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dont les murs étaient d'une grande épaisseur. Ce caveau se divisait en trois cryptes de différentes dimensions: la première crypte renfermait dans un angle, à droite, le tombeau de saint Martial; elle avait seize pieds de longueur sur dix-huit de large; la hauteur jusqu'à la voûte, du côté du sépulcre, était, d'après le P. Bonaventure, de dix pieds (1); cette chapelle était voùtée (arcuata); et, aux siècle, pavée en marbre (2). Cette première crypte communiquait avec une seconde par une ouverture, large de douze pieds, qui se présentait en face lorsqu'on avait descendu l'escalier, et était fermée par une balustrade. La seconde crypte, qui servait de chapelle, avait vingt-quatre pieds de largeur sur douze de longueur, on y trouvait un autel dont on pouvait faire le tour et qui ne gênait point l'entrée de la troisième crypte; « et derrière l'autel de ce souterrain » se trouvait, « dans un réduit enfoncé », le tombeau « d'un ancien gouverneur de cette province ». C'est ainsi que l'abbé d'Expilly, dans son Dictionnaire des Gaules (3), parle du sarcophage de Tève-le-Duc ou du duc Etienne (Stephani ducis), souvent nommé dans la légende de saint Martial par le pseudo-Aurélien. Cette troisième crypte (4) avait dix-huit pieds de longueur sur douze de large (5), et la longueur totale de l'église de SaintPierre-du-Sépulere, en y comprenant la crypte de Tève-le-Due, était de cent quatre-vingt-six pieds (6).

Des trois cryptes dont nous avons parlé, la seconde, celle du milieu, était la seule éclairée, et elle prenait jour au moyen d'un soupirail qui donnait dans le cloitre, démoli en 1752. C'est dans cette crypte que l'ancienne tradition plaçait la sépulture de sainte Valérie.

Les deux compagnons de saint Martial, saint Alpinien et saint Austriclinien, avaient été inhumés près de leur maitre, dans la première crypte qui renfermait le tombeau de l'apôtre d'Aquitaine (7).

Le sarcophage du duc Etienne, qui se trouvait dans la troisième crypte, se voit encore aujourd'hui dans une cour de la rue Neuve-des-Carmes, où il sert d'abreuvoir; il a huit pieds de long, quatre de large, deux de hauteur et six pouces d'épaisseur; le granit en est très grossier.

Quel était ce duc Etienne? Nos chroniqueurs limousins du xvre siècle ont conjecturé que ce personnage était le proconsul romain Junius Silanus, dont Tacite parle dans ses Annales, et que Caligula appelait la brebis d'or (pecudem auream); cette conjecture ne repose sur aucun fondement. De nos jours, M. le baron de Gaujal, dans son Mémoire sur le tombeau de Tève-le-Duc, a prétendu que ce personnage n'était autre que Waïfre, duc d'Aquitaine; mais cette thèse est insoutenable, puisque le tombeau du duc Etienne est mentionné non-seulement dans le Livre des Miracles de saint Martial (IXe siècle), mais encore dans la légende de saint Martial par le pseudo-Aurélien, c'est-à-dire au vie siècle, deux siècles avant la mort de Waïfre.

Le duc Etienne est un gouverneur du Limousin dont le vrai nom nous est inconnu, et qui après avoir fait décapiter sainte Valérie parce qu'elle refusait de l'épouser, fut converti par saint Martial et prit le nom d'Etienne en recevant le baptême.

(1) T. II, p. 578.

(2) Domuncula arcuata (Miracles de saint Martial, p. 353;- super pavimentum marmoreum (Ibid. p. 358).

(3) T. IV. p. 232, article Limoges Ephémérides de 1765, p. 147.

(4) Tertia cryptella (Miracles de saint Martial, p. 3561.

(5) BARON DE GAUJAL, Mémoire sur le tombeau de Tève-le-Duc, p. 12.

(6) TEXIER, Traité de la dévotion à saint Martial, 2e édition, p. 230.

(7) Voir l'ancienne Vie de saint Martial et Grégoire de Tours (De Gloria confessorum,

cap. XXVII.) Voir aussi dans le P. Bonaventure (t. II, p. 580, les cinq inscriptions latines qui se trouvaient à l'entrée de la crypte de saint Martial.

NOTE 2. AUTRES LIVRES DES MIRACLES DE SAINT MARTIAL.

1o A la suite du Livre des miracles de Saint-Martial que nous avons reproduit, les Bollandistes ont publié un Recueil de treize autres miracles, opérés à liverses époques, et tirés d'un manuscrit de Tournay par le P. Joseph-Ignace de Saint-Antoine, carme déchaussé. (T. V junii, p. 559562.)

Ce Recueil a pour auteur un prêtre du diocèse d'Agen, qui dit avoir préché sur saint Martial dans une église dédiée à ce saint, c'est-à-dire à Basens (Bassanes), près le port Sainte-Marie; il rapporte également la guérison d'un évêque d'Agen nommé Gérald (x1° siècle), comme ayant été racontée par l'évêque lui-même.

Signalons quelques erreurs géographiques, chronologiques, etc., qui ont échappé aux Bollandistes dans leurs notes sur ce Recueil.

(a) Dans le premier miracle, il est question d'une ville nommée Cainone, située à trois journées de marche de la ville de Toulouse; dans le ms. 5365 de la Bibliothèque nationale, le nom est écrit « Caminone »; le P. Papebroch, qui traduit Cainone par Chinon (en Touraine), trouve avec raison que ce mot est une faute, et met à la place Tarascon; or, il ne s'agit ni de Chinon ni de Tarascon, mais bien de Caunes (Cainone) (1), ville située, en effet, à trois journées de marche de Toulouse.

(b) Dans le septième article, on raconte le miracle de la guérison des Ardents et la translation des reliques de saint Martial à Montjauvy. — Le P. Papebroch place cette translation à l'an 835; or, ce n'est pas en cette année, mais en l'an 994 qu'eut lieu cette translation, suivie du miracle des Ardents.

(c) Dans le huitième article, on parle du voyage de saint Martial à Mortagne (in Mauritaniam); le P. Papebroch a cru qu'il s'agissait de bourg de Marennes et du Marancin.

Dans le même article, il est question d'une ville nommée dans le manuscrit « Hurdeg » (de urbe Hurdeg); le P. Papebroch a traduit ce mot par Urdache, à cinq lieues de Bayonne; or, il faut lire « de urbe Burdegala », de la ville de Bordeaux, comme il est écrit dans le ms. 5365 et dans le P. Bonaventure (t. II, p. 620).

(d) Dans le douzième article, on parle du bienheureux Géraud d'Aurillac (fin du xe siècle) et d'un évêque de Clermont nommé Etienne; le P. Papebroch a cru qu'il s'agissait de l'abbé saint Gérald, fondateur du monastère de la Grande-Sauve, près Bordeaux (fin du x1a siècle).

2o Dans le manuscrit 5365 de la Bibliothèque nationale, on trouve, à la suite du Livre que nous avons publié, le récit de douze autres miracles, dout six seulement sont rapportés dans le Recueil des Bollandistes que nous venons de citer.

3o Nous avons publié dans les Analecta Bollandiana, en 1882, un Recueil de miracles de saint Martial opérés en 1388, sous ce titre : Miracula S. Martialis, anno 1388 patrata, ab auctore coævo conscripta, nunc primum edita (d'après un manuscrit de la Bibliothèque de Nimes).

(1) Aujourd'hui département de l'Aude.

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COLLEGIALE D'EY MOUTIERS (SAINT-ETIENNE)

Planche extraite de l'Art monumental en Limousin, ouvrage en préparation par M. Jules Tixier

DOCUMENTS HISTORIQUES

SUR

EYMOUTIERS

INTRODUCTION

Nous offrons ce recueil de pièces historiques à ceux de nos compatriotes qui s'intéressent à Eymoutiers et veulent avoir sur cette ancienne ville quelques données sérieuses.

A défaut d'autre mérite, il aura du moins celui de la nouveauté; car, jusqu'à présent, on ne s'est guère occupé du passé de notre commune. Sur les bords de la Vienne, entourée de montagnes, elle s'est formée et développée sans bruit, à l'ombre de son vieux moûtier. Les uns placent à son berceau un pieux ermite du nom de saint Psalmet (vers 630); les autres ne datent sa naissance que du jour où, dans ces parages, un roi de France vainquit un chef des Sarrazins (vine siècle).

Quoiqu'il en soit, au cours des siècles suivants, des bandes de pillards étrangers vinrent troubler dans la solitude des cloitres les moines du moûtier.

Comme les prières des religieux étaient des armes insuffisantes contre de pareils brigands, les habitants s'entourèrent d'une ceinture de murailles; ils formèrent au xve siècle un corps de ville, avec l'agrément de l'évêque de Limoges et des chanoines du chapitre, puis ils introduisirent dans leurs murs diverses institutions.

On trouvera, dans le présent recueil, le développement de ces faits historiques; nous ne faisons que les rappeler ici.

Préalablement, nous indiquerons les sources générales, les publications, études historiques et les travaux archéologiques relatifs à Eymoutiers.

Les sources les plus abondantes en renseignements sont les Archives départementales de Limoges (le fonds des chapitres et celui de l'intendance), les Archives communales et hospitalières d'Eymoutiers, celles de la Société archéologique; les extraits de Bandel dans la collection Gaignières, et les

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