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fait adopter, afin de provoquer la communication de renseignements plus précieux, qui sont peut-être en la possession de quelqu'un d'entre nous. Les occasions ne manquent pas, si l'on veut recueillir mieux que moi les traditions relatives au camp de Voeuil et les éléments d'une bonne étude sur ce local, qu'il est permis de visiter dans une promenade de quelques instants.

NOTICE HISTORIQUE

SUR LA SEIGNEURIE DE LA TRANCHADE.

La terre de La Tranchade avait un château fortifié, ses dépendances féodales étaient nombreuses et considérables (1), et ses seigneurs avaient, depuis 1697, droit de justice, haute, moyenne et basse, sur la paroisse de Garat et sur celle de Sainte-Catherine son annexe (2). Il m'a

(1) Elles s'étendaient non seulement sur une grande partie des paroisses de Garat et Sainte-Catherine réunies, mais aussi sur celles de Dirac, de Magnac-sur-Touvre, de l'Ile d'Espagnac et de Soyaux. Les logis de Dirac et d'Hurtebise relevaient de la seigneurie de La Tranchade.

(2) La cession de ce droit de justice fut faite par les commissaires généraux députés par le roi, le 18 avril 1697 et le 18 janvier 1703, à titre d'aliénation et de propriété incommutable, à messire Jean Normand, II du nom, écuyer, seigneur de La Tranchade.

donc paru d'un certain intérêt pour l'histoire du pays de connaître quelles ont été les familles qui ont possédé cette seigneurie, l'une des plus anciennes et des plus importantes de la sénéchaussée d'Angoulême. Voici le résultat de mes recherches; je le donne ici sans autre prétention que celle de l'exactitude.

Des titres, qui remontent à la première moitié du 12a siècle et que je trouve dans le Cartulaire de l'abbaye de Saint-Cybard (1), nous apprennent que la contrée où est situé le château de La Tranchade se nommait alors la Terre de Prus (Terra de Prus). Cette contrée vaste et spacieuse (lata et spatiosa), mais dont il serait difficile aujourd'hui de déterminer au juste les limites (2), renfermait un grand nombre de borderies relevant de deux fiefs principaux, l'un le mas de Chai (massus de Chai) (3), et l'autre le mas de La Tranchade (massus de la Truncheda vel Trunchada), qui fait le sujet de la présente Notice.

Il y avait dans ces mas et dans ces borderies des terres cultivées et des terres incultes, des bois et des prés, des

(1) Transcript de l'antien (sic) Chartulaire manuscript... de l'abbaye et monastère de Sainct-Éparche, copie authentique, écrite de 1640 à 1681, 1 vol. in-fol., faisant partie de mon cabinet particulier.

(2) Il est probable qu'elle s'étendait au nord jusqu'à la rivière de Touvre, au midi jusqu'au ruisseau des Eaux-Claires, à l'est jusqu'à celui de l'Échelle, et qu'elle était bornée à l'ouest par une ligne plus ou moins courbe partant de Magnac-sur-Touvre ét se dirigeant vers Puymoyen par les hauteurs de Soyaux et la vallée de l'Anguienne.

(3) Le mas de Chai ou Chaix est situé à l'est et à environ deux kilomètres du château de La Tranchade.

fontaines et des rivières, et toutes choses nécessaires aux besoins de la vie (in quibus massibus et borderiis habetur terra et inculta, et habetur boscua et prata, et fontes et riberiæ, et multa hominum usui apta). La terre de Prus, aride en plusieurs endroits, était en plusieurs autres fécondée par les ruisseaux qui la bordaient ou la traversaient; si ce n'était pas un Paradis terrestre, c'était du moins une contrée assez favorisée de la nature pour que le laboureur pût espérer d'y voir en paix fructifier le grain que ses mains avaient déposé dans le sillon.

Il n'en fut pas ainsi. Une multitude de seigneurs se partageaient depuis long-temps cette étendue de pays, et leurs continuelles vexations envers ses pauvres habitants en avaient fait un véritable désert; telles sont à-peu-près les expressions, effrayantes dans leur simplicité, de l'une des vieilles chartes que j'ai sous les yeux (hæc terra diù permanserat deserta et inculta, propter multitudinem Dominorum qui oppressiones exercuerant in illâ). Mais le sentiment chrétien, seul défenseur de l'humanité et de la raison dans ces temps de barbarie, réveilla le remords dans le cœur de ces petits tyrans de troisième ordre, dont le nombre ne s'élevait pas à moins de trente-huit, et les força d'abdiquer leur souveraineté pillarde et tracassière qui avait frappé les campagnes de stérilité.

Ils firent donc une donation collective de toute la terre de Prus (totam terram quæ vocatur de Prus) sans aucune retenue (ex integro, sine ullo retinaculo) à Dieu et à saint Éparche (Deo et beato Eparchio), pour la guérison de leurs âmes et de celles de leurs parents (pro remedio animarum nostrarum et parentum nostrorum). Ils n'oublièrent pas surtout de terminer leur charte par invoquer la miséricorde de Dieu dont ils avaient un si

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