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DE

SAINT-SIMON

NOUVELLE ÉDITION

COLLATIONNÉE SUR LE MANUSCRIT AUTOGRAPHE

AUGMENTÉE

DES ADDITIONS DE SAINT-SIMON AU JOURNAL DE DANGEAU

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MÉMOIRES

DE

SAINT-SIMON

Cette année commença' par un acte de bonté du Roi dont il est vrai qu'il auroit pu s'épargner la matière. Puysieulx, ambassadeur en Suisse, avoit son frère, le chevalier de Sillery, attaché de toute sa vie au prince de Conti, plus de cœur encore que d'emploi. Il étoit son premier écuyer, et intimement avec son frère'. La conduite de Mme de Nemours, de ses gens d'affaires, et de ses partisans à Neuchâtel, avoit fort embarrassé les vues et les démarches de ce prince, et souvent déconcerté tous ses projets. Il étoit ardent sur cette affaire, dont ses envieux lui reprochoient que la richesse lui tenoit bien plus au cœur que n'avoit fait la couronne de Pologne3. Puysieulx le servit autant, et plus même que ne lui

p. 430.

per

1. Journal de Dangeau, 9 janvier, tome IX, 2. Tome I, p. 256. Il avait changé son titre de chevalier contre celui de comte en épousant Mlle Bigot, en 1697: tome IV, p. 195.

3. Voyez, en dernier lieu, notre tome VII, p. 2 et 3.

4. La première lettre de dont surcharge une s.

5. Allusion au voyage de 1697, où Sillery avait accompagné son maître, après s'être préalablement marié. La principauté de Neuchâtel rapportait environ cent cinquante mille livres par an.

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1704. Duchesse

de Nemours

rappelée.

[Add. SS. 516]

239605

mettoit son caractère, et l'impartialité du Roi entre les prétendants'. Il n'y en avoit aucun de plus opposé au prince de Conti, ni de plus aimé et autorisé à Neuchâtel, que Mme de Nemours, qui possédoit ce petit État depuis si longtemps, et qui en vouloit disposer en faveur de ce båtard de Soissons qu'elle avoit déclaré son héritier', et de ses filles'. Elle fut desservie auprès du Roi, et Puysieulx l'eut beau à la donner comme peu mesurée avec un prince du sang, et trop altière sur l'exécution des ordres du Roi dans sa conduite si bien qu'enfin elle fut exilée en sa maison de Coulommiers'. Elle en reçut l'ordre et l'exécuta sans se plaindre, avec une fermeté qui tint encore plus de la hauteur, et, de ce lieu, agit dans ses affaires

1. Voyez, parmi les très nombreux documents diplomatiques émanés de Puysieulx, et que les gazettes de Hollande reproduisaient régulièrement, ceux de l'année 1699, dans la Gazette d'Amsterdam, no xvIIXLIV, et le discours de l'envoyé extraordinaire d'Angleterre au prince de Conti et à la duchesse, dans la copie des Dépêches vénitiennes de la même année, ms. Ital. 1916, p. 26-29. Le prince avait fait alors saisir l'hôtel de Soissons et divers autres biens de la duchesse, prétendant qu'elle lui redevait douze cent mille livres, tandis qu'elle-même se disait sa créancière de six cent mille livres sur la succession de Mme de Guise. 2. Tomes II, p. 227 et 504-305, et X, p. 571.

-

3. Les deux filles qu'il avait eues de son mariage avec la fille de Luxembourg étaient : 1° Louise-Léontine-Jacqueline de Bourbon, née en octobre 1696, qui épousera en 1710 l'héritier du duc de Montfort et mourra le 11 janvier 1721; 2° Marie-Anne-Charlotte, née le 26 septembre 1701, et qui mourra le 23 août 1711. Saint-Simon a oublié de mentionner, en 1703, la mort du père (8 février), quoique Dangeau en eût parlé à la date, et que lui-même n'y eût pas manqué non plus dans la notice du duché de NEMOURS (Écrits inédits, tome VII, p. 110-111). La veuve était brouillée avec Mme de Nemours, à ce que dit Dangeau (année 1703, tome IX, p. 115-116).

4. C'est ce qui a été raconté dans le tome VII, p. 2. On a vu qu'avant de faire la donation au bâtard des souverainetés de Neuchâtel et de Vallengin, Mme de Nemours lui avait également transféré la propriété de Coulommiers; mais elle n'avait pas obtenu que le Roi consentît à se laisser présenter le nouveau prince, ni même à reconnaître son titre : Histoire journalière, ou Gazette de la Haye, correspondance de Paris, 2 mars 1699; ms. Clairambault 719, p. 103.

avec la même vivacité et aussi peu de mesure contre' le prince de Conti, sans qu'il lui échappât ni plainte, ni reproche, ni excuse, ni le moindre desir de se voir en liberté1. A la fin on eut honte de cette violence, qui duroit depuis trois ans3, sur une princesse de plus de quatrevingts ans, et pour des affaires de son patrimoine. Elle fut exilée sans l'avoir mérité, elle fut rappelée sans l'avoir demandé'. Elle vit le Roi deux mois après, qui lui fit des honnêtetés, et presque des excuses.

Nangis', le favori des dames, épousa, dans les premiers jours de cette année, une riche héritière fille du frère de l'archevêque de Sens la Hoguette'.

1. Contre a été écrit en interligne, au-dessus de sur, biffé.

2. On a vu cependant qu'elle avait obtenu, en octobre 1700, la permission de venir auprès de Louvres, dans le château du marquis de Rothelin (Gazette d'Amsterdam, 1700, n° LXXXV et LXXXVII; Arch. nat., M 825, n° 117, lettre de la duchesse au Roi).

3. Ces cinq derniers mots ont été ajoutés en interligne.

4. On sut ce rappel le 28 décembre 1703 (Sourches, tome VIII, p. 253), et, le 6 janvier, la duchesse arriva en grand cortège dans sa chaise, suivie d'un chariot plein de porteurs. Il y avoit dix carrosses, quatre chaises roulantes et deux cents chevaux des habitants de Coulommiers venus jusqu'au faubourg Saint-Antoine; le badaud devant l'hôtel de Soissons. On croit qu'il est question de quelque complaisance pour les Suisses, bien aises de son retour, et d'un projet de mariage du petit prince de Rohan, petit-fils de M. et Mme de Soubise, âgé de huit ou neuf ans, avec Mlle de Neuchâtel, qui en a six. » (Dangeau, tome IX, p. 402, avec l'Addition et avec la lettre de la marquise d'Huxelles au marquis de la Garde datée du 7 janvier 1704.)

5. Toute cette phrase a été ajoutée après coup, à la suite du paragraphe. 6. Le 10 février (un mois après), « Mme de Nemours vit le Roi dans sa chambre au sortir de son souper. S. M. lui parla avec beaucoup de bonté, et lui dit qu'il avoit été fâché de lui faire de la peine, et qu'à l'avenir il lui feroit les plaisirs qu'il pourroit. (Dangeau, p. 430.)

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7. Tome III, p. 173. — Voyez ci-après, p. 271.

8. Dans les premiers jours de l'année suivante, le 8 janvier 1705, après bien des difficultés: Dangeau, tome X, p. 175 et 228; Sourches. tome IX, p. 120, 130 et 156; Mercure, novembre 1704, p. 302-306; la Marquise d'Huxelles, p. 202 et 205. Le Roi avait signé le contrat le 4. 9. Marie-Marguerite Fortin de la Hoguette: tome VIII, p. 282.

Mariage de Nangis

et de Mlle de

la Hoguette.

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