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les vastes douves qui l'entouraient. Il subsiste encore une faible partie des terrassements, formant esplanades, qui les endiguaient; c'est ce que l'on appelle les turgeaux. La Boutonne prêtait probablement le concours de ses eaux à ces travaux de défense pratiqués au pied du coteau sur lequel s'élevait le vieux castel. Sa situation lui permettait ainsi de dominer toute la région de l'ouest, dont l'immense horizon se déroulait à ses pieds. Au midi, une butte élevée, connue sous le nom de butte ou terrier aux gardes, servait, en quelque sorte, d'observatoire de ce côté et formait une fortification toute naturelle. Du château, comme point central, partaient plusieurs souterrains prenant des directions diverses à travers la contrée. Les habitants du bourg en ont constaté plus d'une fois l'existence. Il en est un dont l'issue est encore accessible; il débouche sur les anciennes douves, à quelques pas de l'église, vers le nord-ouest.

Il serait difficile de dire quel rôle a joué l'antique castel pendant le cours du moyen âge et les péripéties par lesquelles il a passé. ** La Chronique locale *** raconte à ce sujet des faits tellement invraisemblables, qu'elle ne saurait, dans toutes ses parties, soutenir l'examen, ni être intégralement prise en sérieuse considération. Outre que jamais il n'a été permis à personne d'en contrôler la valeur, ni même d'en constater l'existence authentique, il est à remarquer, que le nom d'aucun seigneur n'y est consigné et qu'une seule date y figure, celle de la destruction du château Gaillard (1475). Au sujet de ce dernier événement, il y est dit, que Louis XI, allant assiéger Perpignan,

Chaque année en voit disparaître une partie ; il n'en restera bientôt plus rien.

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Un quartier du bourg porte encore le nom de Château-Gaillard. Découverte, commentée et publiée par M. André Arsonneau ; Niort, Lafond-Debenay, 1875.

aurait été imploré par le baron du château Gaillard injustement attaqué par ses voisins et à bout de ressources. Le roi aurait alors envoyé un prévôt d'armes qui aurait rasé le château et réduit le pays sous l'empire du monarque. Mais un semblable récit n'est pas admissible. A quelque époque de la féodalité que nous remontions, nous trouvons Dampierre possédé, soit par la maison de Surgères, soit par celle des Clermont, deux des familles les plus considérables de la noblesse française. Quel seigneur à la fin du XVe siècle (et sous Louis XI!...) aurait osé prendre les armes contre d'aussi puissants seigneurs? D'ailleurs, les guerres privées n'étaient plus en usage depuis longtemps et le roi avait alors assez d'autorité pour raser, nonseulement le château du seigneur, qui, en semblable circonstance, l'aurait appelé à son secours, mais encore celui des instigateurs de pareils troubles.

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La destruction du château Gaillard a donc dû s'effectuer dans de tout autres conditions. C'est bien à la fin du XVe siècle et sous François de Clermont que le nouveau château a été commencé; mais il parait bien plus probable que l'idée de remplacer la forteresse féodale par une élégante construction en harmonie avec les goûts de l'époque est le fruit du progrès. Les matériaux de l'ancien castel servirent naturellement à élever le nouvel édifice à quelques cents mètres de là, et bientôt la Renaissance le compléta et l'embellit. **

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Nous avons retrouvé les armes de François de Clermont.

On voyait naguère au-dessus de la porte d'entrée de la maison Richard, rebâtie il y a une quinzaine d'années environ, une pierre d'assez respectable dimension sur laquelle on lisait ce mot grec, gravé en gros caractères: ANALOTOS, c'est-à-dire « imprenable. » Elle venait, paraît-il, de l'ancien Château. (Note de M. Serton père, communiquée par M. Fragnaud, ancien maire de Dampierre). Cette pierre a servi dans la suite à la construction d'un pilier de hangar.

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Le château de Dampierre

DESCRIPTION DU CHATEAU. offre actuellement l'aspect d'un bâtiment rectangulaire. Aux deux extrémités nord et sud, s'élèvent aux angles qui confinent au couchant, deux grosses tours à machicoulis, couvertes d'une flèche conique ardoisée. * La façade occidentale regarde la Boutonne dont elle n'est séparée que par un terrassement étroit, à niveau du sol et soutenu par une maçonnerie. Sur la façade orientale décorée d'une galerie bien digne de fixer l'attention de l'artiste, règne une superbe frise. En face et autour de cette galerie, se déroule une charmante promenade plantée d'arbres et entourée d'eau. Jadis ce château avait un étage de plus; il suffit de visiter les combles où subsistent encore d'immenses cheminées pour se convaincre de la réalité de cette assertion; mais cet étage fut modifié dans ses dispositions, lorsque furent construites les galeries. ** Au nord et dans la direction de l'est, il y avait une aile dont il ne reste plus aucune trace. Au sud et dans la même direction, il existait une autre aile où l'on voyait un monumental escalier de

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La façade de l'ouest et la tour du midi portent encore le cachet du XVe siècle.

** L'EPIGRAPHIE SANTONE avance que cet étage fut rasé en 1793; c'est une erreur. Quand le château fut vendu comme bien national, l'étage et sa couverture étaient, à peu de différence près, comme aujourd'hui. Les parents de l'acquéreur d'alors existent encore. Le rez-de-chaussée et le premier étage seulement eurent une galerie, l'élévation voulue manquant au deuxième étage et la pente de la toiture empêchant qu'on y remédiât. C'est pourquoi l'on prolongea la toiture du château conformément à l'inclinaison qu'elle avait déjà, audessus de la galerie du premier étage, et ainsi fut dissimulée ou plutôt supprimée la façade du deuxième étage qui devint dès lors inutile et même incommode pour l'aération de la pièce. A cet endroit même, la pente de la toiture indique une reprise dont il est facile de se rendre compte.

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