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où il se trouvait. Nous le voyons, au XIV. siècle, en Allemagne et ailleurs, avec des caractères à peu près semblables à ceux qui dominent chez nous.

En Allemagne, on trouve une preuve de ce que j'avance dans la cathédrale de Francfort, dont le chœur a été bâti en 1315, et qui présente effectivement les caractères de cette époque, dans la cathédrale de Strasbourg, et dans quelques autres. Si le système d'ornementation qui domine dans ces édifices se rapproche beaucoup du nôtre, il faut dire toutefois qu'on y remarque l'emploi de grandes fenêtres allongées, d'une légèreté fort remarquable, que nous n'avons pas aussi habituellement chez nous. Ces fenêtres sont employées surtout dans les églises qui n'ont pas de bas-côtés, et qui offrent, par conséquent, pour l'établissement des jours, des murs verticaux d'une grande hauteur. Telles sont les fenêtres si élevées et dont les meneaux ont tant de portée et de légèreté, de la cathédrale de Francfort, et celles du chœur de la cathédrale d'Aix-la-Chapelle. On voit aussi se développer, ainsi que l'a remarqué judicieusement M. Whewell, un système d'ornementation d'après lequel les moulures des façades étaient disposées sur deux plans

différents, de manière que les unes se détachaient complètement des autres et formaient claire-voie. Ce système, que nous trouvons à Strasbourg, dans la cathédrale, produit un effet tel que la façade semble être placée derrière un riche écran découpé à jour. On comprend combien les édifices ainsi décorés offrent de richesse, et, quoiqu'il y ait à distance un peu de confusion dans les lignes, on est toujours frappé de l'éclat qu'ils présentent. Au reste, il ne faut pas, en général, je crois, attribuer spécialement au XIV. siècle ce brillant système de décoration; on l'observe dans quelques monuments de cette époque, mais il appartient tout autant au XV., et si nous le trouvons dans la cathédrale de Strasbourg, il ne faut pas oublier que de nombreuses retouches, faites à différentes époques dans cet édifice, rendent fort problématique la date des ornements qu'on y remarque. J'ai même, dans un article inséré au Bulletin monumental, exposé les motifs qui me portent à regarder plusieurs soudures que j'ai reconnues dans la façade de Strasbourg, comme étant au moins du XV. siécle et peut-être du commencement du XVI. L'architecte voulut alors mettre le vaste soubas

sement de la pyramide en rapport avec l'admirable aiguille qui couronne l'édifice et qui, comme l'on sait, ne fut terminée qu'au XVI. siècle.

Dans le centre et dans le Midi de la France, je n'ai rien remarqué qui différencie le style du XIV. siècle de celui qui prédomine chez nous et en Angleterre ; seulement, comme je le disais en commençant, les édifices de ce genre n'ont pas acquis le même développement que dans le Nord, leurs moulures sont plus maigres et moins bien fouillées.

En revanche, le style ogival primitif s'est modifié beaucoup plus lentement qu'ailleurs dans la Bretagne. M. Mérimée y a remarqué l'emploi du chapiteau du XIII. siècle jusqu'à la fin du XIVo. siècle, et l'a même retrouvé dans des monuments du XV.

L'Italie, toujours attachée aux anciennes formes, répudia long-temps l'ogive; on y a employé le plein-cintre durant tout le cours du XIII. siècle jusqu'au XIV. qu'on s'y décida à faire usage des formes et des décorations ogivales. Ainsi le Campo-Santo, commencé en 1278, offre des arcs à plein-cintre, remplis plus tard au XIV. par des meneaux et des bro

deries dans le style ogival secondaire j'ai re

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marqué la même combinaison dans la galerie qui remplace le triforium à l'église cathédrale de St.-Etienne de Lucques, et qui doit être postérieure à l'an 1308 (1). On en voit aussi de pareilles à l'église St.-Michel de Florence, bâtie en 1284 pour servir de grenier et convertie en église en 1337 (2).

(1) A cette époque on exhaussa l'église et l'on y fit des travaux considérables.

(2) La broderie des fenêtres à plein-cintre doit être de cette dernière époque.

L'architecture ogivale n'a jamais été comprise en Italie, les églises manquent d'élévation; il est très-rare quelles aient un triforium, et les fenêtres du clerestory, sont souvent remplacées par une ouverture ronde, comme à St.-Pétronille de Bologne. On peut attribuer à cette suppression d'un étage dans les églises ogivales d'Italie, le peu d'élégance, je pourrais dire la pesanteur qui les distingue presque toutes.

Les constructions religieuses du XIV. siècle ne sont pas rares : nos principales églises commencées au XIII., ont été continuées au XIV. et n'ont souvent été terminées qu'au XV., mais il n'est pas toujours facile de distinguer ce qui dans ces édifices appartient à l'époque qui nous occupe, par la raison que les architectes du XIV. se sont quelquefois conformés au style employé par leurs devanciers pour ne pas détruire l'unité qui doit régner dans une œuvre pareille. Un examen attentif conduit néanmoins à reconnaître les parties construites au XIV. siècle dans les édifices qui appartiennent au premier et au second style ogival, lors même qu'elles sont peu caractérisées.

J'indique dans le tableau suivant quelques spécimens du style ogival secondaire.

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