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Libergier travaillait, en 1229, à la nef de l'Eglise Saint-Nicaise de Reims (1); Robert de Coucy bâtit, dans le même temps, la belle cathédrale de Reims, dont la première pierre avait été posée en 1211 (2).

Eudes de Montreuil, qui accompagna SaintLouis en Orient, où il fortifia la ville de Jaffa, bâtit le chœur de Beauvais, l'église Notre-Dame de Mantes et plusieurs autres édifices (3).

Il est inutile de citer un plus grand nombre de noms d'artistes; remarquons seulement, en terminant, que beaucoup d'habiles architectes du XIII. siècle n'appartenaient point au clergé; depuis les croisades la plupart des secrets de l'art avaient été confiés à des séculiers, ou devinés par eux. Tout dans la société de cette époque tendait à la sécularisation et à l'établissement des franchises.

(1) Hugo Libergier pronaon ecclesiæ perfecit, utrasque alas, frontem, propyleum et turres; chron. S. Nicas., p. 636. L'inscription tumulaire suivante prouve que cet architecte mourut en 1265.

CI GIT MAISTRE HVES LIBERGIERS QVI COMMENSA CESTE ÉGLISE AN L'AN M CC XX I X LE MARDI DE PAQVES ET TRESPASSA L'AN D. INCARNATION M C CLXIII LE SAMEDI APRÈS PAQVES POVR DEV PRIEZ POR LVI.

(2) Trente ans après ( en 1241) on célébra l'office divin dans I a cathédrale de Reims.

la

(3) Cet artisté mourut en 1289, et fut enterré dans le couvent des Cordeliers de Paris, dont il avait bâti l'Eglise.

CHAPITRE IX.

Style ogival secondaire,

(de 1,300 à 1,400 environ).

Réflexions préliminaires sur l'analogie qui existe entre les monuments de la fin du XIIIe. et ceux du commencement du XIV siècle.-Enumération des caractères les plus saillants de l'architecture au XIVe.-Innovations introduites dans le plan des édifices par l'addition de chapelles le long des collatéraux de la nef.-Caractères des ornements, modifications introduites dans les fenêtres, le triforium, la décoration des portes, des grandes arcades, etc., dans la forme des tours et des clochetons, etc. Mention d'un certain nombre d'édifices élevés au XIV. siècle.

Je vais indiquer le plus rapidement possible les caractères qui différencient les monuments du XIV. de ceux du Xill. ; je dois faire observer avant tout, que vers la fin du XIII. siècle, l'architecture ogivale offrait déjà la plupart des caractères qui la distinguent au XIV., et l'on comprend combien il serait difficile d'établir des limites absolues pour la

durée de chaque style: nous avons dû indiquer pour commencement du second style ogival l'époque où les changements qui nous permettent d'en établir les caractères sont le plus généralement adoptés.

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Or, comme dans toute classification les coupes les plus simples sont les meilleures j'ai préféré faire concorder celle que j'établis avec le commencement du XIV. siècle; mais je le répète, une fois pour toutes, rien ne doit être absolu dans nos divisions, la marche de l'art a été progressive et constante, il y a plutôt dégradation entre les productions d'un siècle et celles du siècle qui le suit, que des différences tranchées à époques fixes et précises; et qui voudrait toujours appliquer trop rigoureusement nos principes, courrait risque de se tromper souvent dans la véritable appréciation des dates en toutes choses il faut avoir recours aux tempéraments.

:

Forme des églises. Un changement notable s'introduisit au XIV. siècle dans le plan des églises par l'addition d'un rang de chapelles le long de chacun des bas côtés de la la nef ( v. la fig. 13, pl. XLIII). Ces chapelles, qui forment en quelque sorte le complément des temples du moyen âge, furent, à cette époque

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construites en sous-œuvre dans un grand nombre d'églises (1) à partir du XIV. siècle, on donna souvent à la chapelle terminale dédiée à la sainte Vierge de plus grandes dimensions qu'auparavant.

J'ai négligé jusqu'ici de parler d'une disposition qui se remarque le plus souvent dans les églises des XII. et XIII. siècles, et dans beaucoup de monuments du XIV. et du XV.; je veux parler d'une légère déviation de l'axe du choeur par rapport à celui de la nef, déviation qui a lieu vers le Nord-Est.

On croit généralement que les architectes qui donnaient aux églises la forme de la croix voulaient par cette déviation du chœur vers le NordEst représenter l'inflexion de la tête du Christ du côté droit, au moment où il expira; si l'inclinaison dont je parle s'observait seulement dans quelques églises on pourrait douter de cette intention, mais je l'ai remarquée dans plus de cent édifices du XIII. et du XIV. siècle (N.-D. de Paris, Bayeux, Le Mans, St.Denis, cathédrale de Nevers, etc., etc.), et

(1) Dans plusieurs cathédrales que je pourrais citer, on avait dès la fin du XIII. commencé à construire quelques chapelles le long des collatéraux de la nef, mais ceci n'infirme nullement mon assertion qui est exacte, prise en général.

d'autres l'ont observée de leur côté, de sorte qu'il faut bien chercher une cause pour cette disposition celle qu'on admet généralement est, je crois, la plus vraisemblable (1).

:

Contreforts. La disposition des contreforts et des arcs-boutants était, au XIV. siècle, à peu près la même qu'auparavant; seulement on substituait quelquefois aux clochetons qui couronnaient les contreforts, au XIII. siècle, des aiguilles garnies de crochets (pl. LXI, fig. 5), portées sur des bases carrées, octogones, et parfois triangulaires.

La largeur considérable que prirent au XIV. siècle les fenêtres du clerestory et le peu de résistance que les murs à jour offrirent alors à la poussée des voûtes obligea de renforcer les parties solides, entre les fenêtres, au moyen d'un plus grand nombre d'arcs-boutants. Le même contrefort servait souvent de support à deux arcs superposés (Amiens, St.-Ouen de Rouen, Le Mans, etc., etc.).

(1) Dans plus de cent églises de campagne, j'ai constaté que le mur du nord est en surplomb sur sa base, tandis que le mur du sud est droit; ceci est-il l'effet du hasard? a-t-on voulu aussi par là indiquer l'inclinaison de la tête du Christ mourant? C'est ce que j'ignore, mais un fait si souvent observé me paraît assez curieux pour être signalé.

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