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et celles que nous découvrons chaque jour dans le nord de la France, on retrouvera dans les bordures de ces tableaux les zig-zags, les frettes crénelées, les quatre-feuilles, les étoiles, les entrelacs, les tissus nattés, etc., etc.

Les figures exprimées en mosaïque durant l'ère gallo-romaine, furent traduites en relief sur les monuments du moyen-âge.

Notre France centrale entra franchement et avec bonheur dans cette voie; moins riche que l'Italie en peintres et en mosaïstes, elle se détacha plus vite des traditions anciennes et chercha dans les reliefs ce que l'Italie demandait encore souvent aux XI. et XII. siècles, à la peinture et à l'application des pièces de couleur (1).

Mais si les pavés en mosaïques et les débris de monuments gallo-romains épars sur le sol ont guidé le ciseau des artistes, si, à Autun et à Langres, par exemple, on a copié les pilastres canelés des arcs de triomphe et des portes antiques qui s'y voient encore, si, dans un grand

(1) L'Auvergne, attachée à l'école italienné par des causes qu'il ne m'a pas été donné de bien apprécier et qui tiennent peut-être uniquement aux matériaux diversicolores fournis par ses roches volcaniques, continua plus long-temps d'employer la marqueterie concurremment avec les moulures en relief.

nombre de façades on a si bien imité sur le fût des colonnes les feuilles imbriquées, les rinceaux et d'autres moulures que nous voyons sur des fûts antiques, il ne faut pas en conclure que tout soit indigène dans la décoration de nos églises du XII. siècle. Les étoffes, les galons, les peintures, les manuscrits, les reliquaires ciselés et tant d'autres objets d'arts apportés de Canstantinople, avaient sans doute multiplié des types, des motifs de dessin dont nos architectes surent profiter. Il faut ici, comme en toute chose, se garder d'adopter un système exclusif pour ces origines: tout attribuer aux importations de l'Orient comme l'ont fait quelques archéologues serait, je crois, une grande erreur, de même qu'il ne faut pas attribuer aux monuments antiques indigènes une influence absolue.

CHAPITRE VII.

Origine du style ogivál.

Court exposé des principales opinions émises concernant l'origine du style ogival, et recherches sur l'époque de l'introduction de cette architecture dans l'Europe occidentale. L'ogive paraît en général avoir été substituée au plein cintre pendant le XII. siècle. Quelques-uns font remonter plus haut l'introduction de cette arcade dans nos contrées. Examen des faits allégués pour soutenir cette opinion. Réflexions sur la difficulté de faire accorder les progrès variables de l'art avec la marche uniforme du temps.

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Nous venons de voir que l'emploi de l'ogive devint fréquent dans le cours du XII. siècle ; il est curieux de suivre le développement de cette forme nouvelle et de voir comment après avoir été employée concurremment avec le plein cintre, elle finit par lui être préférée ce progrès de l'architecture ogivale est facile à constater quand on observe quelques monuments de la seconde moitié du XII. siècle et du commencement du XIII.

C'est la voûte qui la première paraît s'être

modelée sur les idées nouvelles; elle semble parfois avoir revêtu la forme en pointe, quand le reste de l'édifice était encore sous l'influence du style circulaire.

Puis la forme ogivale fut adoptée pour les fenêtres qui pourtant restèrent quelquefois semi-circulaire à l'extérieur, tandis qu'elles étaient pointues à l'intérieur.

Ce fut ensuite le tour des portails de se prêter au changement. Des portails il se communiqua aux arcades de la nef et finit par envahir toutes les parties de l'édifice.

Au XIII. siècle, l'arc en tiers point fub généralement préféré au plein cintre.

Mais ce n'était pas seulement l'adoption de l'ogive qui signalait alors une révolution architectonique, c'était, comme nous le verrons bientôt, l'adoption d'un système nouveau de moulures pour la décoration, et l'abandon de la plupart des ornements usités aux XI. et XII. siècles.

Un changement aussi considérable dans la manière de bâtir a particulièrement excité l'attention de tous ceux qui ont étudié l'histoire de l'architecture en en France et en Angleterre. Presque tous ont cherché la solution des deux questions suivantes intimement liées l'une à l'autre : dans quelle contrée

l'ogive a-t-elle pris naissance? à quelle époque a-t-elle été adoptée dans l'Europe occidentale? Considérée dans toute son étendue, la première question a donné lieu à beaucoup de

controverses.

En laissant de côté les opinions plus ou moins bizarres de quelques antiquaires (1), on peut réduire à trois les principales hypothèses émises sur l'origine du style ogival.

Suivant les uns, ce genre d'architecture existait très-anciennement en Orient, et les Croisés, enthousiasmés de ce qu'ils avaient observé dans ce pays, importèrent l'ogive en Europe, où elle fut généralement adoptée peu de temps après.

Les seconds sont d'accord avec les premiers quant à l'origine de l'ogive; mais ils croient que les Maures avaient introduit cette arcade en Espagne avant les Croisades, et qu'elle se répandit de là dans toute l'Europe, en même temps que la philosophie arabe.

(1) Parmi ces opinions singulières est celle de Warburton, qui a cherché l'origine du style ogival dans les voûtes naturelles formées par les arbres séculaires des forêts, frappé de l'analogie que présentent les grandes avenues d'arbres avec les nefs des églises à ogives dont la décoration est empruntée au règne végétal. Ce savant croyait ainsi avoir trouvé l'origine du système ogival, sans prendre garde que des innovations successives avaient de longue main préparé la révolution qui éclata au XIIIe siècle.

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