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apprend que cet encensoir est l'œuvre de l'orfèvre Gozbert. C'est encore au XIIe siècle que se rapporte le remarquable encensoir conservé à Lille, et publié comme le précédent dans les Annales archéologiques de Didron. Cet encensoir eut pour auteur un artiste du nom de Renier, ainsi que nous l'apprennent les trois vers hexamètres, formant une inscription cursive sur les deux bandes d'assemblage de la coupe et du couvercle. Sur l'amortissement de ce dernier sont assis autour d'un ange les trois jeunes hébreux sauvés de la fournaise; sous leurs picds se trouvent les animaux que, dans leur chant d'actions de grâces, ils invoquèrent pour bénir le Seigneur.

EUG DENIS da.

A mesure que nous avançons vers le XIIIe siècle l'édicule de la Jérusalem céleste devient une pyramide élancée. La gravure de l'encensoir du XIIe siècle, que nous avons donnée plus haut, offre encore le type de la coupole byzantine de Trèves. Les dessins. que nous donnons ici nous représentent cet accessoire du culte sous les formes que l'on adopta à partir du XIIIe siècle et que l'on conserva jusqu'à l'époque de la Renaissance. Le second est accompagné de la plaque où

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viennent se fixer les chaînes de suspension et de l'anneau servant à relever le couvercle.

Nous sommes complètement fixés sur les formes géné

rales et les détails des encensoirs, non-seulement par les nombreux spécimens en argent et en bronze, qui nous ont été conservés, mais encore par les sculptures des porches, des châsses et des boiseries accessoires, les miniatures et les émaux sur lesquels ils sont figurés d'ordinaire aux mains d'anges, de prêtres ou de clercs thuriféraires.

Comme nous venons de le dire, au XIIIe siècle, les encensoirs changent complètement d'aspect. La cassolette ne présente plus la forme hémisphérique. L'art du repousseur a fait de notables progrès, et des pénétrations, des encorbellements et diverses figures courbes forment les lignes génératrices, parfois très-compliquées, de la coupe inférieure.

Le musée de la porte de Hal, outre un encensoir du XII° siècle, provenant de Maestricht, possède encore plusieurs autres spécimens de ces accessoires du culte, parmi lesquels nous citerons un encensoir du XIIIe siècle, dont la partie supérieure représente un dôme percé d'ouvertures circulaires et couvert d'une toiture imbriquée. Une rangée de petites absides couronne le couvercle décoré de motifs empruntés au règne végétal.

Parmi les encensoirs remarquables du XVe siècle nous mentionnerons ceux des églises de sainte Croix, à Liége, et de saint Amand, à Jupille, exécutés en laiton, en forme de tourelle, avec pied hexagonal. Comme spécimens d'encensoirs en argent du XVIe siècle nous citerons ceux des églises de Notre-Dame, à Tongres, de saint Quentin et de saint Pierre, à Louvain, et de Notre-Dame, à Hal.

Un accessoire obligé de l'encensoir est la navette, ainsi nommée parce qu'elle partageait avec plusieurs autres ustensiles liturgiques la forme symbolique d'un navire ou vaisseau. Les navettes sont presque toujours pourvues de petites anses servant à soulever facilement les valves du couvercle et montées sur un pied très-trapu. Elles étaient parfois exécutées en métaux précieux, émaillées, semées de pierre

ries, niellées, ciselées et ornées de petits dragons ou animaux fantastiques. Telles sont les navettes conservées dans les cathédrales de Chartres et de Reims et au musée départemental de Rodez. La cuiller à encens participait à la richesse de la navette. A l'exposition de Malines on en voyait une du XVe siècle, à large spatule, portant à l'extrémité du manche une figurine de la sainte Vierge avec l'enfant Jésus.

Le grand triomphe de l'orfèvrerie au moyen-âge fut la châsse. Les châsses, qui au fond constituent des tombeaux portatifs, furent dès le principe traités en forme d'églises. Une idée symbolique présidait à cette forme, puisque les corps des saints sont, suivant le langage des saintes Écritures, les temples du Saint-Esprit. Les châsses de la période ogivale présentent le même aspect que celles de l'époque romane, c'est-à-dire qu'elles affectent la forme d'un édifice oblong, surmonté d'un couvercle à deux versants, couronné d'un crétage, souvent interrompu par des pins et parfois découpé par la statue du saint dont elles enferment les

ossements.

Les grandes châsses du XIII° siècle constituent des coffres revêtus de lames de métaux repoussées, ciselées, émaillées, garnies de pierreries et parfois simplement gravées. Ce dernier mode se combine d'ordinaire avec la niellure dont nous nous occuperons plus loin. Ces fiertes monumentales, le plus souvent rectangulaires, présentaient parfois, comme la châsse de Notre-Dame, ou des grandes reliques à Aix-laChapelle, remontant aux années 1220-1230, sur les deux longs côtés des saillies simulant des transepts ressortant du plan général de l'édifice. Leurs faces latérales sont généralement ornées de statuettes assises ou debout en or, en argent ou en cuivre doré, abritées sous des arcatures en forme de dais. Les faces principales sont tantôt occupées par la figure du Sauveur bénissant et de sa sainte Mère, tantôt par la représentation du saint dont elles enferment

les reliques et du patron de l'église qu'elles enrichissent. Quand les châsses possèdent un transept, le portrait du bienheureux dont les ossements sont contenus dans la fierte figure sur l'une de ses faces au centre de l'édicule. Nous en trouvons un exemple dans la châsse de sainte Gertrude, à Nivelles. Cette œuvre exécutée entre les années 1272 et 1292 par Douai et Jaquemon, orfèvres de cette ville, d'après les plans de l'architecte Jakenet, moine d'Anchin, est en argent doré, ciselé et repoussé, enrichie d'un nombre considérable d'émaux et de pierres précieuses. Les versants de sa toiture, comme dans beaucoup d'autres châsses, sont décorés d'une série de bas-reliefs se rapportant à la vie de la sainte patronne de Nivelles. Cette châsse offre encore cette particularité que les deux faces principales présentent un triple porche à profonde voussure, surmonté d'une galerie ajourée et d'un pignon percé d'une rose à douze compartiments et à rampant décoré de crochets et d'un fleuron terminal.

Notre pays possède encore aujourd'hui un nombre relativement considérable de grandes châsses parmi lesquelles nous mentionnerons celles de saint Eleuthère et de NotreDame, à Tournai, celle de saint Remacle, à Stavelot, et celles de saint Domitien, de saint Mengold, de saint Marc et de la Sainte-Vierge, conservées dans le trésor de Notre-Dame à Huy. Le musée de la porte de Hal renferme aussi, outre la fierte de saint Servais, à Maestricht, deux petites châsses du XII et XIIIe siècle, qui offrent un très-grand intérêt pour l'archéologue.

La châsse de saint Sebald, à Nuremberg, est une des plus belles de la fin de la période ogivale et présente cette particularité qu'elle se trouve placée sous un baldaquin. Ce magnifique monument est le chef-d'oeuvre de Pierre Visscher, qui y retraça sur des plaques d'argent en basrelief les miracles de saint Sebald. Cette œuvre date de l'année 1519.

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