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artiste italien les diverses parties que M. Vachey fait remonter à l'époque gallo-romaine, pour les édifier avec si peu d'intelligence et de goût.

La question paraissant épuisée, bien que non résolue, M. le Président ferme la discussion.

M. Robineau-Desvoidis prend la parole pour expliquer sa pensée sur les cryptes de l'église de St.-Germain que le Congrès vient de visiter. L'honorable membre dit qu'il a étudié les distributions des cryptes dont le tombeau de saint Germain occupe l'axe ou le centre. Il voit dans la disposition des tombeaux des saints évêques et autres personnages placés autour du cercueil de saint Germain tout un système éminemment symbolique et religieux dont il demande à expliquer le sens. Il rappelle la position des cinq inscriptions qui rayonnent autour de la chapelle de Sainte-Maxime, et qui, suivant lui, peuvent être lues dans l'ordre suivant, en retranchant seulement le premier mot sanctus :

OPTATUS SANCTINUS MEMORIUS GERMANUS MAXIMUS.

Les trois premiers noms seraient ceux des trois saints vénérés par l'église auxerroise et qui sont : saint Optat, saint Sanctin et saint Mémoire. La tradition veut que ce furent trois amis inséparables et qu'on les ait ensevelis dans le même tombeau.

M. Leclerc dit à ce sujet que l'inhumation collective de ces trois saints est douteuse, et que l'abbé Lebœuf a vu avec raison non une inhumation collective, mais une translation de reliques.

M. Robineau reprend sa pensée et dit que les inscriptions qu'il signale peuvent être lues ainsi :

OPTATE, SANCTE-QUE MEMORIE SANCTI MAXIMI GERMANI.

M. l'abbé Brullé s'élève contre cette interprétation qui a produit quelques mouvements divers dans l'auditoire.

M. Robineau-Desvoidis se défend d'avoir voulu porter atteinte à la vénération que l'on a pour les trois saints du pays Auxerrois.

L'incident est terminé.

Revenant aux questions du programme, M. de Caumont continue l'enquête sur le moyen-âge.

Quelles sont les dates auxquelles remonte la statuaire dans le pays ?

M. Victor Petit parle d'une scène sculptée sur le portail de l'église de Mailly-Château, village situé à quelques lieues d'Auxerre (1). Il rappelle que c'est M. Leclerc qui, le premier, dans l'Annuaire de l'Yonne, a signalé l'existence de cette curieuse sculpture.

Invité à donner au Congrès quelques renseignements, M. Leclerc prend la parole pour retracer brièvement l'historique de l'affranchissement des communes dans le pays auxerrois. Il ajoute que, suivant lui, les statues que l'on voit à Mailly-Château reproduisent le fait de l'affranchissement de cette commune par Mathilde, comtesse d'Auxerre au XIII. siècle. Les chroniques locales sont positives à cet égard, mais jusqu'ici on n'a rien trouvé relativement à la date d'exécution des statues.

M. Victor Petit pense comme M. Leclerc et insiste pour avoir l'avis du Congrès. Les archéologues d'aujourd'hui sont unanimes à repousser l'interprétation trop suivie au dernier siècle. On ne veut admettre maintenant sur nos monuments d'autres sujets historiques que ceux tirés des livres saints. Peut-être le portail de Mailly-Château fait-il exception.

(4) Bulletin monumental, t. XIII.

:

M. Quantin présente un dessin du sujet on y voit quatre personnages dans des attitudes pénibles portant le poids des colonnes d'une arcature ogivale. Au milieu d'eux une dame

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en grand costume, couronne en tête, paraissant avoir tenu un rotulus dans la main, s'appuie contre sa colonne.

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FRAGMENT DU PORTAIL DE MAILLY-LE-CHATEAU.

M. de Glanville et M. Soultrait ne voient là que la religion chrétienne affranchissant les hommes du génie du mal.

Le Congrès semble se ranger à ce dernier avis.

M. de Caumont demande si l'on peut déterminer la limite précise de la transition, et s'il y a eu parallélisme entre le roman et le style ogival primitif dans le diocèse d'Auxerre?

M. Vachey répond qu'il a observé, dans les monuments de transition, qu'on faisait encore des plein-cintres dans les églises de villages, tout en y introduisant les ornements de la décoration ogivale. C'est ainsi que, dans plusieurs églises, et notamment à Mailly-Château, les chapiteaux des piliers, sont ornés de crosses, tandis que les arcades du triforium sont à plein-cintre. On sent que c'est avec peine qu'on abandonne ce genre d'arcature auquel on était depuis si longtemps habitué.

M. Victor Petit ajoute que l'influence des grandes églises cathédrales ou abbatiales, se fait parfaitement reconnaître dans les églises de village, bien que celles-ci soient toujours en retard d'un certain nombre d'années pour le style général d'ornementation de la province. Il résulte de ce fait, que trop souvent on donne aux églises de village une ancienneté trop grande; la rudesse du travail contribue aussi à augmenter les causes d'erreur. Il faudrait pouvoir chercher dans les textes locaux les dates éparses qu'on y rencontre, et alors on aurait des données plus précises pour modifier les théories générales si bien indiquées par M. de Caumont.

M. Quantin s'empresse de mettre sous les yeux du Congrès une note, précieuse par le nombre des dates qu'elle fait connaître.

M. Quantin cite plusieurs édifices ogivaux datés :
Cave du pignon de l'ancien évêché d'Auxerre (1183-1206).
Chœur de la cathédrale d'Auxerre, commencé en 1215.

Nefs de la cathédrale de Sens (1122-1155).

Pignon ogival du palais épiscopal d'Auxerre (1247-1269). Eglise St.-Germain d'Auxerre (1277, 1309, 1480).

Ancien archevêché de Sens (1260).

Transepts de la cathédrale de Sens (1490 à 1515).

Choeur de St.-Eusèbe d'Auxerre (1530).

Tour nord de la cathédrale d'Auxerre (1500-1530).
Tour sud du même monument (1540 à 60).
Tour de l'église St.-Pierre d'Auxerre (1530).
Portail de Thurry (1521):

A l'égard de cette liste intéressante, M. Victor Petit reprend la parole et dit: Que rien ne serait plus utile pour l'étude de l'archéologie, dans le département de l'Yonne, que cette même liste fût publiée et complétée de la manière la plus simple possible par quelques documents historiques exclusivement relatifs à l'histoire du pays ou de la province; rendre la science archéologique accessible à tout le monde, et par cela même en faire une science populaire, c'est-à-dire utile et amusante pour les habitants des campagnes aussi bien que pour les ouvriers des villes; en un mot, faire pour chaque département, ce que M. de Caumont fait pour la France entière, et cependant aussi, tout spécialement pour le Calvados, par les instructives publications qu'il ne cesse de répandre dans le public. M. Victor Petit espère que les deux Sociétés archéologiques qui se sont formées dans le département de l'Yonne réuniront leurs efforts pour publier de très-courtes notices sur les cantons et même les communes importantes de nos cinq arrondissements. Ces notices devront être publiées à bon marché et mises entre les mains des écoliers par les soins des curés et des instituteurs qui, les premiers, pourront profiter de leurs connaissances déjà acquises pour expliquer les choses dites trop sommairement. dans la notice. Autant que possible, cette notice serait ac

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