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pour leurs pairs comme pour les paysans; les châtelains du voisinage, les nobles de la contrée avaient sans cesse à se plaindre de leurs violences; ils les maudissaient et les exécraient au moins autant que leurs vassaux. On leur a sans doute prêté bien des forfaits; mais déjà, dès cette époque, on ne prêtait qu'aux riches. En somme, les seigneurs de Tourlaville furent, pendant plusieurs générations, et à la faveur des troubles qui déchiraient le pays, d'abominables hommes et d'infernaux voisins.

Le dernier acte criminel des Ravalet est le scandaleux inceste commis par le frère et la sœur, neveux de ce bienfaisant abbé de Tourlaville qui fit bâtir le manoir actuel. Ces deux jeunes gens se nommaient Julien et Marguerite. Ils étaient issus de Jean de Ravalet, châtelain de Tourlaville, et de Magdeleine de la Vigne, vertueux époux dignes d'être heureux, et que le ciel semble avoir punis dans leurs enfants des crimes de leurs ancêtres.

Julien et Marguerite s'aimaient dès leur enfance avec une tendresse que tout le monde admirait; ils grandirent, et avec l'âge cet amour fraternel devint une passion coupable. Leurs parents s'en aperçurent et les éloignèrent l'un de l'autre le jeune homme fut envoyé à Paris sous prétexte d'y faire ses études, et l'on s'occupa de chercher un mari à la jeune fille. Un vieux richard, nommé Jean Le Fauconnier, receveur des tailles, se présenta et fut agréé par la famille; Marguerite, la honte sur le front, n'osa le refuser.

Deux enfants étaient nés de cette union, lorsque Julien revint à Tourlaville. Les amants incestueux, se retrouvant après une longue absence, s'aimèrent comme auparavant; mais bientôt on soupçonna leurs relations, on les épia; et, pris sur le fait, ils s'enfuirent ensemble et quittèrent la Normandie.

Poursuivis par l'époux outragé, ils se réfugièrent d'abord en Poitou, puis en Anjou, ensuite en Bretagne, et enfin à Paris, où ils furent decouverts, arrêtés et mis en prison. Marguerite était enceinte; elle accoucha d'une fille peu de temps après.

Le Châtelet, saisi de l'affaire, instruisit leur procès, et leur fit subir les tortures de la question ordinaire et extraordinaire, après avoir rejeté l'appel que le mari lui-même porta du jugement préparatoire. Atteints et convaincus des crimes d'inceste et d'adultère, les deux accusés furent condamnés à la peine de mort.

Le rejet de l'appel de cette sentence ne laissant plus d'autre voie de salut que le recours à la clémence du Roi, la veille du jour fixé pour l'exécution, le pauvre père des condamnés, accouru du fond de sa province, alla se jeter en larmes aux pieds de Henri IV et demander grâce. Peut-être le Roi l'eût-il

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Cette seigneurie passa à la famille de Franquetot en 1654;

A celle de Crosville en 1713;

A celle de Fouquet de Réville en 1748 ;

Enfin à celle de Tocqueville en 1786.

M. le comte de Tocqueville, plus tard préfet et pair de France, devint propriétaire du chateau et du domaine de Tourlaville dans le courant de l'année 1786; il en hérita de Fouquet de Réville, son oncle au maternel.

Le château de Tourlaville est passé de M. le comte de Tocqueville à son fils, M. le vicomte Edouard de Tocqueville, qui le possède depuis 20 ans, et qui le fait aujourd'hui si digne

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Novembre 1860.

VÉRUSMOR.

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de son caractère.

Après avoir fait de premières et bonnes études au collége d'Avranches, qui jouissait depuis si long-temps d'une réputation méritée, il alla se préparer, dans le collége spécial de Vannes, à la rude carrière de la marine. Dès l'age de quinze ans, il en subit les épreuves à Saint-Malo, avec un succès que proclama l'examinateur Monge, en lui adressant d'honorables félicitations.

La fatale précipitation avec laquelle la proclamation des libertés consacrées en 1789 avait été étendue aux colonies, avait mis les armes aux mains des nègres de Saint-Domingue, la plus importante de nos possessions lointaines. Le jeune de Clinchamp prit part, comme aspirant, à bord du vaisseau le Jupiter, commandé par M. de la Ville-Léon, aux fatigues et aux dangers d'une expédition que le Gouvernement envoya, en 1791, pour comprimer cette révolte. Malgré des efforts, auxquels il s'associa avec activité et dévoùment, nos soldats furent contraints d'évacuer cette ile, en 1792, et il rentra bientôt en France, avec l'escadre à laquelle il était attaché; mais il fut loin de retrouver le repos et la paix dans sa patrie. On sait quelles profondes divisions agitaient alors la France.

accordée, si au rapport de L'Estoile, la Reine ne s'y fût opposée. Et celte Reine qui se montra en cette circonstance d'une moralité si sévère, était l'éhontée Marguerite de Valois !

Rien ne s'opposant plus à l'accomplissement de l'arrêt de mort, Julien et Marguerite de Ravalet furent décapités sur la place de Grève le 2 décembre 1603, avec toutes les formalités et l'appareil criminel usités à cet époque. Une foule immense assistait à leur supplice. La jeune et belle Marguerite précéda son frère sur l'échafaud, et y murmura des paroles qui feraient croire que son complice fut plutôt sa victime que son séducteur.

Leurs malheureux parents passèrent le reste de leur vie dans la douleur et en bonnes œuvres. De ce moment, Jean de Ravalet substitua à son nom patronymique celui de sa seigneurie, suivant l'usage du temps.

Les premiers seigneurs de Tourlaville sont ensevelis dans l'oubli; on ne connaît ni leurs actes, ni même leurs noms. Ce qu'on sait sur ce château avant les Ravalet se réduit à peu de chose.

La famille des Ravalet, dont le dernier rejeton s'éteignit obscurément en 1733, vint de Bretagne en Basse-Normandie à la fin du XVe siècle.

Un Ravalet succéda à Jean Vipart dans la seigneurie de Tourlaville vers 1540, et sa descendance la posséda pendant plus d'un siècle.

Cette seigneurie passa à la famille de Franquetot en 1654; A celle de Crosville en 1713;

A celle de Fouquet de Réville en 1748;

Enfin à celle de Tocqueville en 1786.

M. le comte de Tocqueville, plus tard préfet et pair de France, devint propriétaire du château et du domaine de Tourlaville dans le courant de l'année 1786; il en hérita de Fouquet de Réville, son oncle au maternel.

Le château de Tourlaville est passé de M. le comte de Tocqueville à son fils, M. le vicomte Edouard de Tocqueville, qui le possède depuis 20 ans, et qui le fait aujourd'hui si dignement restaurer.

Novembre 1860.

VÉRUSMOR.

BIOGRAPHIES.

GUSTAVE DE CLINCHAMP.

Une Compagnie qui perd le Chef qu'elle compte dans le petit nombre de ses fondateurs, et par lequel elle a été longtemps et habilement dirigée, se doit à elle-même de lui consacrer un témoignage durable de respect et de reconnaissance. Appelé depuis plusieurs années par la Société d'Archéologie d'Avranches à suppléer auprès d'elle notre honorable Président, que ses infirmités retenaient éloigné de nos séances, c'est pour moi un pénible devoir, mais en même temps une consolation, d'avoir à retracer rapidement quelques-uns de ses nombreux titres à nos profonds regrets.

M. de Clinchamp (Gustave-Romain-Martial) est né à Avranches le 15 juillet 1775. Dans une carrière de près de quatrevingt-sept ans, il n'a cessé de faire preuve de qualités de tout genre, qui lui ont conquis l'estime, la confiance et l'amitié de tous ceux qui l'ont connu. Issu d'une des familles les plus anciennes et les plus distinguées du pays, il a toujours justifié la noblesse de son origine par celle de ses actions et de son caractère.

Après avoir fait de premières et bonnes études au collége d'Avranches, qui jouissait depuis si long-temps d'une réputation méritée, il alla se préparer, dans le collége spécial de Vannes, à la rude carrière de la marine. Dès l'age de quinze ans, il en subit les épreuves à Saint-Malo, avec un succès que proclama l'examinateur Monge, en lui adressant d'honorables félicitations.

La fatale précipitation avec laquelle la proclamation des libertés consacrées en 1789 avait été étendue aux colonies, avait mis les armes aux mains des nègres de Saint-Domingue, la plus importante de nos possessions lointaines. Le jeune de Clinchamp prit part, comme aspirant, à bord du vaisseau le Jupiter, commandé par M. de la Ville-Léon, aux fatigues et aux dangers d'une expédition que le Gouvernement envoya, en 1791, pour comprimer cette révolte. Malgré des efforts, auxquels il s'associa avec activité et dévoùment, nos soldats furent contraints d'évacuer cette île, en 1792, et il rentra bientôt en France, avec l'escadre à laquelle il était attaché ; mais il fut loin de retrouver le repos et la paix dans sa patrie. On sait quelles profondes divisions agitaient alors la France.

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