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compatriotes qui prennent intérêt à cette partie de l'archéologie à interroger le sol, de manière à confirmer ou contredire, par des arguments matériels, les données que les livres nous ont fournies.

Le temps presse; ces voies autrefois si larges seront bientôt réduites à l'état de sentier. Le laboureur avide, avidus colonus, les sape chaque jour avec le soc de sa charrue. Les travaux publics et privés, qui se poursuivent de toutes parts avec une ardeur qui n'a point de précédents, bouleversent le sol et effacent les vestiges des civilisations qui ont précédé la nôtre. Que les ouvriers de l'intelligence se hâtent à leur tour, s'ils ne veulent pas encourir le reproche que nous adressons nousmêmes souvent à nos devanciers, d'avoir, par négligence, laissé périr la mémoire de faits intéressants dont ils devaient nous transmettre la tradition.

Le secrétaire donne ensuite lecture d'un travail sur le même sujet envoyé par M. Guérard, président de la Société d'agriculture de Provins cette note, qui n'est qu'un extrait d'un ouvrage plus complet actuellement sous presse, traite des voies romaines de l'arrondissement de Provins, lesquelles se continuent dans le département de l'Aube.

La première de ces voies, au Nord, partant de l'extrémité de la Gaule, passait à Senlis, Meaux, Chailly, Courtavaut et Pont-sur-Seine, d'où elle se dirige sur Fay-Lapèze (ancien chemin), pour se joindre à la voie ci-après.

La seconde, désignée dans les itinéraires d'Antonin à Caracotino Angustolorum usque (d'Honfleur à Troyes) passait à Caudebec, Rouen, Paris, Melun, Montereau, Jaulnes, FayLapèze, Marigny-le-Châtel, Echemines, le Pavillon et Troyes.

La troisième est la voie intermédiaire allant de Chailly

(Calagum ) à Orléans ( Genabum), en passant aux Orby, à Jaulnes, à Sens et à Dordives.

M. Guérard cite encore quelques fragments d'une ancienne voie qui paraît se diriger sur le village de Thorigny, venant de Jaulnes (Agendicum ).

Ces deux derniers mots, Jaulnes (Agendicum), contiennent la pensée principale de l'auteur du mémoire; car tout le sujet de son travail est consacré à prouver, par les distances qu'il relève sur les voies romaines citées par lui, que l'ancien Agendicum est bien le Jaulnes actuel et non pas Sens ni Provins.

M. Guérard donne également comme preuve certaine de ce fait une inscription tumulaire trouvée à Sens, le 1er. janvier 1839, et par laquelle un certain Amatius est désigné comme ayant été à la fois édile du bourg Agendicum, et édile curule à Sens, ce qui prouve que ces deux localités étaient distinctes.

Le Congrès surseoit, jusqu'après la publication de l'ouvrage complet de M. Guérard, prêt à paraître, à discuter cette question très-importante.

M. Dosseur demande qu'une carte des voies romaines du département soit dressée et annexée au mémoire de M. Corrard, tant pour faciliter l'étude de l'emplacement et du tracé de ces voies, que pour constater l'état actuel des lieux qui tend chaque jour à se dénaturer par les travaux de la culture et la construction de nouveaux chemins.

M. de Caumont déclare que cette proposition est excellente et qu'il y sera donné suite, si M. Corrard veut préparer cette carte; mais il conseille, en outre, une mesure qui a eu ailleurs d'excellents résultats, c'est de déposer dans la salle des séances de l'Académie de l'Aube, un exemplaire de la carte dressée par le Ministère de la guerre, sur laquelle on tracerait en rouge, non-seulement le parcours des anciennes

voies romaines, mais encore toutes les découvertes de ce genre qui se feraient dans le département.

Ces propositions sont adoptées, et le Congrès décide que M. le Préfet de l'Aube sera prié, en son nom, de faire don, pour cet usage, à la Société académique de l'Aube, d'une des cartes dressées par les officiers d'état-major.

M. Chanoine, à propos des chemins romains dont a parlé M. Corrard, signale des fragments d'une ancienne voie ferrée qu'il a remarquée, sur une étendue de 200 mètres, au milieu de la forêt de l'Arrivour, dans une localité où la pierre manque absolument. Il croit y voir les vestiges d'une voie romaine, conduisant peut-être de Tonnerre à Bar-sur-Seine, en passant par Bailly, Chauffour, etc.

M. Boutiot signale des fragments de voie romaine qu'il croit avoir reconnus sur les hauteurs de la vallée d'Arce, allant de Bar-sur-Seine à Bar-sur-Aube, et passant par Bertignolles et Vitry-le-Croisé.

M. Coutant dit qu'il y a une voie romaine encore très-apparente près d'Avicey, Bagneux et Beauvoir, arrondissement de Bar-sur-Seine. Cette voie, qu'il a suivie et étudiée avec soin, se dirige de Troyes à Alise; elle traverse la grande voie romaine de Sens à Auxerre près de Beauvoir, et celle de Tonnerre à Langres près du bois de Maulne. On n'y a jamais trouvé de colonnes milliaires.

Elle était composée du rudus et du stratumen, puis d'un herisson qui variait selon la contrée.

Elle passait près de Rumilly-les-Vandes.

M. de Caumont, revenant sur la question des cartes, dit qu'une carte très-utile, surtout pour la constatation des fouilles, c'est une copie des cartes cadastrales. On peut, à l'aide de ces cartes, en notant toutes les parcelles successivement fouillées, les rapporter toutes, à un moment donné, pour dresser un plan d'ensemble.

M. Corrard fait observer que, sans avoir mis en usage les cartes cadastrales, pour toutes les fouilles et découvertes faites depuis 10 ans, les membres de la Société de l'Aube ont eu soin de noter le numéro des parcelles du cadastre où les découvertes avaient eu lieu.

La discussion étant épuisée, le Congrès règle, ainsi qu'il suit, l'itinéraire de ses visites à divers monuments de Troyes. Aujourd'hui 9 juin, à sept heures du soir, il visitera l'église de St.-Martin-ès-Vignes, et la chapelle du l'etit Séminaire.

Demain, 10 juin, à midi, il visitera l'église cathédrale et son trésor.

Le 11 juin, à midi, il visitera l'église Ste.-Madeleine.

A la levée de la séance, les membres du Congrès sont admis à examiner les magnifiques armes et bijoux en or trouvés autour d'un squelette à Pouan, près Méry, sur le lieu indiqué comme le champ de bataille d'Attila et d'Aétius.

Ces objets appartiennent aux héritiers de M. Gauthier, orfèvre à Troyes, qui ont bien voulu les déposer sur le bureau du Congrès ce sont des objets en or d'un immense intérêt (poignées de sabre avec la garniture du fourreau, agrafes, colliers, etc.). M. le Président les remercie au nom de l'assemblée.

L'un des Secrétaires-généraux,

A. GAYOT.

1re. Séance du 10 juin.

Présidence de M. CAMUSAT DE VAUGOURDON, vice-président de la Société académique de l'Aube.

Le bureau est composé de MM. de Caumont; Parigot;

Fleury, procureur Impérial; Ferrand-Lamotte; de Glanville; de Mellet; Gaugain; l'abbé Tridon et Gayot, secrétaires.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. A propos du procès-verbal, M. Peigné-Delacour signale des découvertes très-curieuses faites à Champlieu (Oise), précisément dans le parcours de la voie de Milan à Boulogne, dont M. Corrard a parlé dans la séance précédente. M. Thiollet a fait un travail complet et une série de magnifiques dessins au sujet de ces fouilles : un extrait de ce travail a été publié dans le Bulletin monumental de M. de Caumont et dans les Comptes-rendus de la Société française qui avait contribué pour 200 fr. aux fouilles exécutées sous la direction de MM. le comte de Bréda et Thiollet. M. Peigné-Delacour fait hommage personnellement au Congrès de trois beaux dessins qui lui appartiennent, représentant des statues, chapiteaux et bas-reliefs trouvés dans les ruines de Champlieu.

M. Sollier parle d'une autre voie romaine non encore détruite qui, venant de Sézanne, passe auprès de Grange-surAube, entre dans le département de l'Aube à Etrelles, et là se bifurque en deux directions, l'une sur Méry et l'autre sur Arcis. Des monnaies romaines ont été trouvées par des laboureurs sur les champs qui confinent à cette route.

M. Peigné-Delacour, dans le but de voir constater les observations particulières faites sur les voies romaines dans les différentes localités, demande qu'il soit dressé une carte générale de ces voies pour toute la France.

M. de Caumont lit une lettre de M. l'abbé de Wilmowsky, membre de l'Institut des provinces, qui rend compte de la découverte d'une riche villa romaine à Neuvich, près de la Moselle, à 9 lieues de Trèves. Les fouilles ordonnées sur ce point par la Société des recherches utiles de Trèves, ont

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