Page images
PDF
EPUB

Troyes sont la légende de la croix, de la Vierge, de saint Nicolas, de saint Sébastien et de sainte Anne, puis le patron de l'église. Nous n'avons qu'un petit nombre de sujets symboliques. Nous avons déjà parlé des vierges sages. Nous n'oublierons pas le Christ au pressoir, dans la cathédrale : de la poitrine de Notre-Seigneur, étendu sous une masse de bois rougi de son sang, sort un cep de vigne, et de chaque rameau une grappe d'où s'élève le buste d'un apôtre; belle pensée fondée sur l'Écriture; nous devons ce travail à la générosité du chanoine Piscot, et au talent du peintre le plus habile. A St.-Nizier, le Christ aux sept sacrements: un large bassin reçoit le sang qui tombe des plaies de Jésus-Christ crucifié, et, par sept canaux, ce sang divin coule sur sept médaillons, où sont figurés les sacrements qui tirent tous leur grâce vivifiante du sang répandu en la croix. Dans cette même église, les quatre âges de la vie, charmante création du XVI. siècle.

Après avoir assigné l'époque des verrières de Troyes, il nous reste à parler en quelques mots de leurs auteurs. La tâche est difficile, parce que les données nous manquent; il faudrait parcourir de longs manuscrits, rechercher les vieux testaments où se trouvent consignées les volontés dernières des pieux fidèles laissant à leur paroisse une verrière en mémoire de leur piété. Nous croyons, surtout pour ce qui regarde les vitraux du XIII. siècle, que les recherches seraient infructueuses. Sans doute, suivant le pieux usage de leur temps, ces admirables artistes travaillaient pour Dieu sous l'œil de Dieu seul. Ils ignoraient leur mérite, et ils ne songeaient pas qu'un jour la postérité, admirant leur génie, demanderait aux monuments et à l'histoire leur nom modeste pour l'entourer d'amour et d'admiration. Quant au lieu, nous pouvons dire avec certitude que nos vitraux ont été faits à Troyes et que l'on en fabriquait pour les cités voisines.

Cette opinion a été démontrée par un savant étranger à notre ville. Pour les temps postérieurs, le XVI. siècle, il nous est resté quelques noms, en petit nombre, mais que nous nous ferons une gloire de rappeler. Les anciens manuscrits citent Henriet, Jean de Troyes, comme les auteurs de plusieurs vitraux. Macadré et Lutereau ont travaillé les grisailles de St.Pantaleon, sur les dessins de Dominique, et ces deux maîtres en cet art ont formé un élève qui les surpassa, Linard Gonthier; il tenait lui-même avec son frère Jehan Gonthier, une école où il instruisait des jeunes gens dans son art. Aussi on lui attribue un très-grand nombre de travaux. « Il était, dit Grosley, le vitrier du monastère de Montier la Celle, de « l'église de St.-Etienne. » C'est de lui que viennent la plupart des vierges entourées des attributs symboliques, les vitraux si estimés de l'arquebuse. « Il florissait, dit le même << auteur, au commencement du siècle dernier (1600); il <«< avait la perfection en ce genre, on en peut juger par les << vitres qu'il a peintes à St.-Remy, à St.-Étienne (elles « n'existent plus), à St.-Martin-ès-Vignes (1). »

[ocr errors]

Nous les avons admirés, ces vitraux; ils nous ont paru avoir atteint le plus haut degré de l'art. Une tradition recueillie de la bouche des anciens cite encore le nom de Blondel comme peintre-verrier de cette même église; il est facile, du reste, de s'apercevoir qu'ils ne sont pas tous de la même main. Sur la verrière de la prise de Jérusalem, toujours à St.-Martin, on lit écrit au poinçon, en lettres presque imperceptibles : Nicolas Hudot a faict la presate verrière. Ces noms méritent nos respects et notre reconnaissance : depuis le retour aux études du moyen-âge, ils nous ont obtenu une place honorable dans le souvenir des savants étrangers et de nos illustres visiteurs. On dirait même qu'ils ont laissé leur esprit parmi nous. Troyes

(4) Leur époque varie de 1602 à 1630.

fut une des premières cités où l'on reprit l'art de la peinture sur verre; elle fut signalée pour cela déjà dans plusieurs Congrès; elle figura à l'exposition de Londres. Déjà, il faut le dire, nous avons obtenu de nobles succès. Puissionsnous un jour voir revivre parmi nous les Macadré et les Linard Gonthier!

NOTE

SUR DIVERSES STATUES DU DÉPARTEMENT DE L'AUBE.

Il existe dans un grand nombre d'églises des statues de Vierge du moyen âge, la plupart du XV. et du XVI. siècle. Plusieurs, aux formes grosses et contournées, n'ont d'autre mérite que leur antiquité. Cependant, dans le nombre, il y en a quelques-unes de valeur. A Bayel, on voit une statue de Vierge du XV. siècle; elle a encore des vestiges de peinture qui sont du temps, et elle peut servir d'exemple pour ce genre de sujets. Au village d'Allibaudières, il s'en trouve une autre du XVI. siècle, remarquable par son costume royal qui rappelle cette époque; elle était dorée, excepté la figure peinte en couleur de carnation. A Vaudes, il reste une Vierge aussi du XVI. siècle, mais avec le rétable de l'époque; la fenêtre du transept a été rejetée de côté, et le rétable se trouve adossé au mur dans le sens du maître-autel. Ce rétable est creusé en forme d'une niche cintrée dans l'épaisseur du mur. Une guirlande admirablement fouillée en fait le tour. Au bas est un socle d'un demi-mètre de haut; ce sont des arabesques à jour, travaillées dans un goût remarquable.

Quant à la statue, elle est d'un beau profil et d'une expression vraiment religieuse. De chaque côté d'elle, des anges viennent la saluer et offrir au divin enfant des corbeilles de fleurs. Ce travail mérite d'être connu et imité. Il faut citer encore l'autel de la Vierge de St.-André, où sont sculptés tous les attributs et les titres d'honneur de l'auguste Marie. A la chapelle St.-Luc, au bas d'une statue ancienne d'une médiocre valeur, il y a quelques bas-reliefs représentant la vie de la Sainte Vierge qui sont d'une belle exécution.

Nous attirons l'attention sur ces statues de Vierge et sur ces rétables; il serait à désirer que les artistes modernes vinssent prendre là leurs inspirations pour donner à leurs statues cette expression de piété et de dignité qui convient à la sainte image de la mère de Dieu. Souvent ils manquent en ce point.

[graphic][subsumed]

NOTES

POUR SERVIR A L'HISTOIRE DE LA CONSTRUCTION

DE SAINTE-MADELEINE DE TROYES,

Par M. Alexandre ASSIER,

Membre de la Société.

L'église de la Madeleine, dit M. Arnaud, est aujourd'hui le plus ancien monument religieux que possède la ville de Troyes. Il a subi, à différentes époques, des restaurations considérables et des mutilations qui lui ont fait perdre cette harmonie, cette unité d'ensemble qui, seules, peuvent constituer la perfection d'un édifice. Ce qui reste de l'ancienne construction, c'est-à-dire la nef, les transepts et la première travée du chœur, appartient au XII. siècle. La coupe heureuse des ogives, la richesse des chapiteaux, la disposition noble et simple des grandes lignes, forment une opposition remarquable avec le rond-point et les chapelles environnantes rebâties au commencement du XVIe. siècle. »

En quelle année furent jetés les fondements de Ste.-Madeleine? Les documents nous manquent. Des pièces nous apprennent que dès l'an 1295 cette église était déjà célèbre et que les paroissiens s'empressaient de lui faire de généreux legs.

« PreviousContinue »