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La Conception, qui avait commencé à être célébrée à Lyon, à Naples et en Orient, ne fut rendue obligatoire pour les églises du rit latin qu'en 1466, par Sixte IV, qui en fit composer un office par Léonard Nogarolis, supprimé plus tard par saint Pie V, et ce fut Clément XI qui étendit, selon Benoist XIV, cette fête à toute l'Eglise catholique.

Nous aurions bien d'autres progrès à constater, mais nous devons nous borner à quelques faits. N'oublions pas toutefois de rappeler la Fête-Dieu, fondée en 1246 par Robert, évêque de Liège, et étendue à l'Eglise entière par une bulle de notre illustre compatriote Urbain IV.

Les hymnes ont, comme les offices, suivi une voie de développement, ainsi que les proses ou séquences, dont l'usage fut introduit par le pape Adrien II (867-872), selon un texte cité par l'abbé Le Lebeuf (p. 103-104 de son Traité historique sur le chant ecclésiastique).

Le chant du Credo ne fut accepté à Rome qu'au XI. siècle (Bona). Le Sanctus fut d'abord chanté sur une formule simple à peu près comme celle de la Préface; mais au XII. siècle les mélodies encore en usage aujourd'hui furent em.ployées. L'Agnus Dei ne fut introduit qu'à la fin du VII. siècle, sous le pape saint Sergius. Au XI. siècle seulement, on remplaça le miserere nobis du dernier agnus par dona nobis pacem.

Les Lamentations ont toujours fait partie de l'office de la Semaine Sainte, mais on ne les chantait pas; ce ne fut qu'après le XI. siècle qu'on commença à les chanter. Le chant actuel offre des variantes sans nombre; il est du reste assez moderne. La mélodie actuelle de la Passion date seulement, selon Baini, de la moitié du XIII. siècle; l'auteur en est inconnu.

Une foule de mélodies qui constituent maintenant le corps du chant liturgique, ne faisaient point partie de l'Antiphonaire

de saint Grégoire; elles ont été composées postérieurement à l'époque de ce grand pape : il y a donc eu développement incessant de ce chant que nous appelons Grégorien. Quand on étudie dans Gerbert la marche de l'art grégorien; quand on y lit les noms des personnages qui, jusqu'au XII. siècle, se sont voués à l'étude et à la composition du chant ecclésiastique, et les indications des suaves mélodies qu'ils ont produites, on ne peut se lasser d'admirer l'inépuisable fécondité de la période comprise entre le IV. et le XIII. siècle.

Ayant à traiter d'un art dont les bases ont été arrêtées il y a 1250 ans, nous avons dû nous appuyer sur un ordre de faits et d'idées empruntés aux monuments de la tradition. Comme l'art ogival, l'art grégorien est spécial; il n'est et ne peut être qu'au service de Dieu; il est grand, il est beau, il est parfait, appliqué à la prière. Comme l'art ogival, l'art grégorien s'élance vers le ciel; l'art grégorien est varié comme l'art ogiyal. Il y a une immense variété dans nos vieilles églises gothiques; n'y a-t-il pas aussi une immense variété dans les mélodies grégoriennes : la poésie divine est sans limites. Le merveilleux est encore un caractère commun à l'un et à l'autre des deux arts : les anciens vantaient l'ordre et la force de leurs sept merveilles; que sont donc cet ordre et cette force à côté des milliers de chefs-d'œuvre de l'art ogival qui couvrent le sol de notre patrie; qu'est-ce donc à côté de ces mélodies grégoriennes si simples et si sublimes, à côté de cet art qui n'a pas eu d'enfance, qui n'aura pas de vieillesse, qui nous apparaît tout à coup splendide et majestueux; à côté de cet art divin destiné à chanter l'amour (Charitas, Deus charitas est). Voilà pourquoi elle est forte, pourquoi elle est puissante la musique grégorienne; elle est un peu mélancolique, parce Dieu ne nous apparaît encore que voilé, parce que nous sommes exilés dans cette vallée de larmes; et la force du chant grégorien ne se fait-elle pas sentir, alors que la vieille cathédrale

gothique est remplie de fidèles aux jours des belles fêtes de notre religion; alors que tous chantent avec expansion; alors que l'orgue gémit et soupire; alors que les cloches unissent leurs voix graves et solennelles aux frémissements de la foule; alors que l'encens flotte en nuages épais sur l'autel. Puisse le chant grégorien être compris, être aimé et étudié ; puissentils revenir, ces jours heureux où toutes les voix de l'assemblée chrétienne se réunissaient dans les mêmes témoignages de foi, dans les mêmes acclamations d'amour, dans les mêmes expressions de prière, comme ils étaient réunis dans l'unité de croyance, d'espérance et de charité. Là est notre ardent désir, parce que là est la gloire de Dieu et l'honneur de l'art chrétien.

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NOTE

SUR

QUELQUES ÉPIS EN TERRE CUITE

DES XIII. ET XIV. SIÈCLES;

Par M. Alfred RAMÉ,

Membre de la Société française pour la conservation des monuments.

M. de Caumont a le premier appelé l'attention sur les épis en terre cuite destinés à couronner les édifices et à supporter les girouettes, dans un mémoire du XVI. volume du Bulletin monumental, qui, sous le titre modeste de Notes provisoires sur quelques produits céramiques du moyen-âge, agite et résout quelques-unes des questions les plus importantes relatives à cette industrie trop long-temps oubliée. Il est seulement regrettable que ce mémoire n'ait pas encore été suivi d'un second article qui devait le compléter, et dont le premier renfermait la promesse. Les épis décrits par M. de Caumont sont sortis des fabriques de la vallée d'Orbec; Palissy ne les a pas faits; mais il n'eût sans doute pas hésité à les signer, et, d'après les renseignements que nous a fournis M. Raymond Bordeaux, les marchands de curiosités de Paris, ce fléau des

provinces, en ont dans ces derniers temps enlevé un bon nombre des environs de Lisieux, et les vendent aux amateurs comme des œuvres de maîtres. Ce sont, en effet, des morceaux fort remarquables de la céramique de la renaissance. Je ne sais cependant s'il n'en est pas sorti de plus beaux encore des fabriques de Nevers. Quelque jour j'espère faire connaître ces derniers qui me paraissent, jusqu'à présent, sans rivaux; je ne veux aujourd'hui que signaler certaines œuvres du moyen-âge beaucoup plus anciennes, moins parfaites au point de vue de l'art, mais d'un plus grand intérêt historique et d'une extrême rareté.

Les épis de Nevers et ceux du pays de Lisieux sont en terre émaillée ou en faïence, car ces deux expressions sont synonymes. Mais avant l'introduction en France de la faïence, qui ne date que du XVI. siècle, les poteries étaient-elles déjà employées à la confection des épis? M. de Caumont ne le pensait pas. Cependant, dans une tournée archéologique que j'avais faite en Champagne à la recherche des anciens produits céramiques, très-répandus dans ce pays, j'ai été assez heureux pour recontrer dans la ville de Troyes des épis en terre qui remontent certainement au XIIIo. siècle. Troyes a été, pendant tout le moyen-âge, le centre d'une fabrication de produits céramiques, très-importante et très-nettement caractérisée. La ville et ses environs renferment encore une innombrable quantité de pavés appartenant à toutes les époques, depuis le XIII. jusqu'au XVI. siècle. Indépendamment de ces carreaux, dont je reproduirai les principaux types dans mes << Études sur les carrelages historiés », j'ai recueilli le dessin de trois épis que je mets sous les yeux des membres de la Société française. Au lieu d'être en terre émaillée, comme les épis de la renaissance, ils sont exécutés en terre vcrnissée, par les procédés employés pour la fabrication des carreaux historiés pendant toute la durée du moyen-âge.

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