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eux,

soutenaient, aussi bien que les clercs, sur leurs bâtons; et peut-être conservèrent-ils plus long-temps que ceuxci l'habitude dont nous parlons, n'ayant point, comme le secours des stalles pour tenir lieu de bâtons (1). Par là s'expliquerait la prescription de les quitter à l'Evangile que l'on ne cesse pas de rencontrer dans les écrivains d'une époque où les stalles adoptées généralement avaient dû faire abandonner par le clergé tout autre moyen d'adoucissement. Hildebert de Tours ne parle en effet que des simples fidèles: « Le peuple, dit-il, pendant l'évangile dépose ses bâtons, se tient debout et se découvre la tête (2). » Le pieux abbé Hugues s'exprime dans des termes semblables (3), et nous ne pensons pas que Jean Beleth d'Amiens en 1328 (4), Durand de Mende en 1286 (5), et St. Bonaventure en 1274 (6) aient prétendu parler des clercs, lorsqu'ils

(1) Un auteur du dernier siècle observe que les Maronites gardaient encore de son temps le même usage. A l'entrée de leurs églises sont tenus, dit-il, des faisceaux de bâtons dont chaque fidèle prend celui qui lui convient pour se soulager de la fatigue des longs offices. ( Beaugendre in Hildebertum 1708.) Nous avons déjà dit, d'après le témoignage de M. Didron, que des vestiges de cette pratique ancienne se sont conservés jusqu'à nos jours.

(2) Plebs baculos ponit, stat, retegitque caput. (lib. de myst. missæ. ) (3) Plebs hic baculos ponit, reclinatoria relinquit, caput detegit, stans audit. ( spec. Eccles. cap. vii. )

(4) In lege quidem præcipiebatur ut dùm comederent agnum Paschalem baculos in manibus tenerent, nos verò diacono legente Evangelium baculos deponimus. (De Evang. lect.)

(5) Deponuntur etiam baculi et arma........... reclinatoria relinquuntur.... (Rational. divin. offic. lib. 4. p. 1. f. 66. )

(6) Debent etiam verba S. Evangelii stando et denudato capite ab omnibus et sine baculo vel reclinatorio cum reverentiâ et amore audiri.

signalent la même rubrique; à moins qu'on ne dise que l'usage des stalles n'avait pas été reçu sitôt dans les lieux où ils écrivaient, ce qui paraît hors de toute vraisemblance, et même opposé, en ce qui regarde notre pays, à des faits positifs.

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« Au reste l'usage des bâtons existait dans l'église d'Amiens aussi bien qu'ailleurs, dit le chanoine Vil» leman, et pour en conserver la mémoire, MM. les préchantres et chantres en dignité en avaient retenu l'usage et l'ancienne forme dans leurs bâtons canto>> raux couverts de plaques d'argent, hauts de quatre >> pieds deux pouces, de la figure de potentons, ba» culum supernè rostratum, propres à mettre sous les » aisselles pour se soutenir... Plus tard, ils en chan» gèrent la forme et la longueur, et les laissèrent aux » hauts-vicaires qui s'en servent encore aujourd'hui à » régir le chœur en certaines fêtes et processions. (1) »

La règle qui ordonnait de prier debout fut encore adoucie par de plus larges concessions que celles dont nous venons d'entretenir nos lecteurs. Dans beaucoup de monastères on permit aux religieux de s'asseoir, mais non encore tous à la fois. D. Martène cite les maisons de Citeaux, de Cluny, de St. Bénigne de Dijon, et plusieurs

(1) Observations sur les Bréviaires, Missels, etc. etc. p. 58. Un livre d'heures ms. de l'abbaye de Corbie, conservé à la bibliothèque d'Amiens contient, entre autres, une miniature où sont représentés des moines chantant devant un pupitre. L'un d'eux s'appuie sur un bâton de la forme indiquée par notre auteur.- Lebeuf signale un chantre de l'église d'Auxerre représenté sur sa tombe avec un bâton finissant en T. (Hist. eccl. et civ. d'Aux. t. 1. p. 261.) Le même bâton cantoral se retrouve entre les mains d'un des clercs qui assistent à la translation des reliques de St. Firmin au tympan du portail qui porte son nom à notre cathédrale.

autres où ce relâchement s'était dès long-temps introduit (1). Un Ordinaire des frères mineurs imprimé au commencement du XVI. siècle d'après des originaux plus anciens veut que les deux chœurs de religieux qui se tiennent à droite et à gauche demeurent alternativement debout et assis (2). L'archevêque Lanfranc dans ses décrets pour l'ordre de St. Benoît constate l'existence de la même discipline et détermine plusieurs parties de l'office divin pendant lesquelles le religieux peut s'asseoir pourvu que ses deux voisins soient debout (3). Il arrivait même quelquefois, par exemple les jours de procession, après une marche pénible, que les heures étaient chantées dans la posture la plus commode (4).

Après cette lutte prolongée de la faiblesse humaine contre une rigoureuse discipline, ne semble-t-il pas que la stalle accompagnée de sa miséricorde dût être accueillie avec un vif enthousiasme, lorsque du fond d'un cloître et du cerveau d'un moine, elle apparut pleine de gravité et de douceur, assez indulgente pour obtenir les suffrages de la paresse, assez sévère pour ne pas mériter les anathèmes du zèle? Elle venait résoudre un problème de solution peu facile : adoucir la règle, et ne pas la détruire, bien plutôt la conserver en la rendant praticable. Par elle désormais, et ceux qui sont jeunes et ceux qui sont vieux, et les fervents

(1) Commentaires sur la règle de S. Benoît.

(2) Speculum minorum, Tract. m. fol. 222. 1509.

(3) Decret. Lanfranci Archiepisc. Cantuar. sect. iv.
(4) D. Martène de Antiq. monach. ritib. lib. m. cap. 19.

et les tiédes, tous enfin chanoines et religieux prieront debout et ne s'en plaindront pas.

Telle nous paraît être l'origine de la stalle: l'usage dégénéré de prier debout. Deux des noms qu'on lui donne le disent assez d'ailleurs; Stalle semble venir de stare être debout (1); Miséricorde indique une douceur et une concession. Evidemment la stalle est le résultat d'une composition amicale, d'une sorte d'arrangement, d'une transaction la stalle a fait la paix entre prier debout et prier assis, et l'a faite avec gloire; honorable en effet pour le culte divin, commode pour le clerc, elle bannit l'usage bizarre des bâtons, change l'aspect disgracieux d'un chœur où les uns sont assis, les autres levés, et maintient dans la pratique de la prière une posture respectueuse et grave.

Ces faits établis, nous devions maintenant rechercher auquel des siècles passés il faut rapporter l'honneur de la découverte des stalles; mais on pense bien que n'ayant jamais été interrogée sur ce point, l'histoire ne pouvait ouvrir à notre érudition novice que le champ des conjectures. Si ces conjectures ne paraissent pas au lecteur appuyées sur une argumentation trop peu solide, il nous pardonnera de l'avoir encore retenu un instant.

St. Grégoire de Tours est à notre connaissance le

(1) Le savant Du Cange fait dériver stallum de stabulum d'où est venu le mot français étallage. Plusieurs anciens titres prennent stallum en ce sens ; entr'autres, une charte de l'an 1193 pour la commune de St.-Quentin, une charte de Godefroy, évêque de Langres, de l'an 1164. Voyez le Gloss. lat. art. stallum.- Cette observation ne fait que confirmer notre assertion, puisque, selon les étymologistes, stabulum vient lui-même de stare.

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plus ancien auteur qui se soit servi du nom de Forme formula » dans un sens peu éloigné de celui de siége ou stalle (1). Nous retrouvons cette expression vers le même temps ou peu après dans la vie de St. Eugende, abbé du Mont-Jura (2), de St. Etienne aussi abbé (3), dans les actes de St. Austregisille, évêque de Bourges (4), de Ste. Radegonde, reine de France (5). La supplique des moines de Fulde, adressée en 812 à l'empereur Charlemagne, en fait aussi mention (6). Depuis ce temps, c'est-à-dire, dans le cours du x. siècle, et surtout du xr. et des suivants, l'emploi de ce terme, pour désigner les siéges du clergé, est devenu si fréquent que les citations des auteurs où on le rencontre serait un vain luxe d'érudition (7). A peine les coutumiers des monastères et des cathédrales recueillis à cette époque mêlent-ils quelquefois l'ancien nom de bancs ou de siéges à celui de Formes qu'ils semblent, à dater du XIe siècle, avoir exclusivement adopté.

Est-il prudent d'induire de ces faits l'existence des stalles proprement dites en des temps aussi reculés ? Nous ne le croyons pas. Car outre que l'époque comprise entre les VII. et XI.° siècles est précisément celle pendant laquelle nous avons vu le clergé poursuivre constamment les moyens d'adoucir la fatigue de la pos

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(1) De gloria confess. cap. XCH Id. lib. 8. hist. cap. xxxI.

(2) Vit. S. Eug. abb. cap. I. apud Bolland. t. 1.

(3) Vit. S. Steph. abb. Obanisinensis. lib 1. cap. xvI.

(4) Vit. S. Austrigisilli. t. v. Mart. p. 329.

(5) Vit. S. Radeg. n.o 14. sæc. 1. Bened. p. 330.

(6) Citée plus haut, p. 20.

(7) Cs. Du Cange. Gloss. lat. V. Forma et Formula.

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