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lui les secours que ses successeurs ont obtenus, et qu'il a contribué à ouvrir cette carrière qu'ont depuis parcourue avec tant de gloire les vénérables enfants de St. Benoit.

Le comité de Noyon 'n'est point resté inactif et son directeur, malgré sa santé chancelante, a su entretenir le zèle et le travail de ses membres.

M. Harlay, dans une lecture, a parcouru dans l'ordre chronologique les faits les plus importants de l'histoire de la ville de la Fère, donnant ainsi une idée des matériaux dont il pouvait disposer pour le travail qu'il prépare sur cette place célèbre à la fois et par son traité et par ses sièges.

M. Mony a essayé de rétablir les anciennes limites du territoire de la ville et de la banlieue de Noyon étude préparatoire à laquelle doit se rattacher la recherche des limites de l'ancien évêché et de son antique pagus.

Deux travaux remarquables méritent surtout d'être mentionnés, je veux parler de ceux que vous devez à M. Moët de la Ferté-Maison et à M. l'abbé Bourgeois.

Le premier s'est proposé pour but principal de réfuter Sanson qui prétend que le Noviodunum de César doit être appliqué à Soissons et non pas à Noyon. L'opinion contraire, on le sait, avait été adoptée jusqu'au moment où le célèbre géographe la révoqua en doute, mais aujourd'hui on peut, avec M. Moët, regarder cette question comme résolue. L'auteur de la dissertation suit pas à pas le texte de Sanson, discute la valeur de ses arguments, établit que la ville nouvelle, c'est ainsi qu'il traduit Noviodunum, ne peut désigner l'antique capitale d'un peuple aussi puissant que les Suessiones,

mais un oppidum élevé postérieurement, sur la frontière du pays de Vermandois dont il a remplacé la capitale détruite.

M. Moët décrit ensuite l'étendue du Pagus Noviomensis qui depuis a formé le Noyonnais, et discute l'opinion de Colliette sur les limites du Vermandois et du Noyonnais.

Rattachant à ce point géographique les diverses places qui l'entourent, il suit César dans sa marche à travers le pays des Suessioneses et des Bellovaques, il place Bibrax à Bièvre, qui paraît la traduction de ce mot, comme l'avait indiqué Danville, et termine par une description détaillée des vestiges romains et surtout des murailles qui existaient encore à Noyon il y a quelques années, sujet qui déjà avait été traité par M. Delmotte, dans une Notice sur le château Corbaut que vous avez publiée.

Telle est, Messieurs, la substance de cette dissertation. Elle prouve de la part de l'auteur une étude aussi profonde des Commentaires que des écrivains qui, à diverses époques, se sont occupés de la géographie de l'ancienne Gaule. Il aurait fallu reproduire tout le rapport que vous a présenté M. Woillez, pour vous donner une juste idée de ce travail qui, à part quelques longueurs qu'on peut lui reprocher, mérite une distinction toute particulière.

M. l'abbé Bourgeois n'est point seulement un savant, mais un esprit aussi fin que délicat.

Un christ à six aîles fut trouvé dans les combles de l'église de Margny près Compiègne, on fit remonter ce phénomène archéologique à une haute antiquité, en l'attri

buant aux gnostiques, on en fit un Mithra. M. Bourgeois voit trop de difficulté à remonter si haut, il ne veut devant Mithra, surtout quand mention de la sculpture des

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point fléchir le genou l'histoire n'a jamais fait gnostiques, et, rapprochant les distances de onze à douze cents ans il fixe au XIII. ou au XIV. siècle la date de ce monument qui paraît avoir été l'objet d'une dévotion particulière. Après quelques considérations sur le gnosticisme et ses erreurs, l'art chrétien et l'art païen, l'iconographie et la statuaire du XII. et du XIII. siècle, l'auteur, sans feuilleter les antiquités de Monfaucon, pour y trouver une ressemblance avec un obscur Abraxas, ouvre la Bible et, dans le chapitre où Isaïe représente l'amour séraphique et saint Jean, les quatre figures symboliques, il retrouve le Christ à six aîles. Quoi d'étonnant dès-lors que J.-C., l'amour incarné, le Séraphin par excellence, ait été représenté par les artistes avec les emblêmes séraphiques! Le christ de Margny d'ailleurs n'est point sans exemple, et le chefd'œuvre de Giotto, saint François d'Assise recevant les stigmates, offre avec lui les rapports les plus frappants. Giotto traduisit littéralement le récit de saint Bonaventure. Le Séraphin crucifié qui apparût à saint François d'Assise, fut un fait assez important pour servir de point de départ à une tradition. On ne saurait donc s'étonner que l'influence religieuse et sociale, littéraire et artistique que cet homme prodigieux exerça sur son siècle ait pu saisir l'imagination des contemporains au point d'ouvrir une voie nouvelle à la peinture et à la sculpture chrétienne dont le christ de Margny aurait été l'un des produits les plus intéressants.

Il est impossible de faire passer dans cette analyse

sèche et décolorée, tout ce qu'il y a de fins aperçus, de critique maligne et de bon goût, de hautes et sérieuses pensées dans cette notice que l'auteur termine en déclarant que le Christ aîlé de Margny n'est point un christ gnostique, jugé au point de vue de l'art ou de l'esthétique, qu'il est essentiellement catholique et du XIII. ou du xiv.e siècle.

Vous avez applaudi à cette intéressante lecture et, adoptant les conclusions de l'auteur, vous n'avez point hésité à regarder le récit de St. Bonaventure comme la base et le point de départ d'une tradition artistique, et vous avez rejeté, en toute hâte, le gnostiqne, car c'était à la fois un acte d'idolâtrie et de lèse majesté scientifique que l'adoption de la doctrine combattue avec autant de talent que d'esprit par notre savant collègue.

Ici, Messieurs, je devrais vous présenter l'analyse des travaux du comité de Beauvais qui, tous les jours, prend une réalité plus positive et de nouveaux développements. J'aurais eu à vous dire comment, garde attentive à la conservation des édifices civils ou religieux, il les étudie, les décrit; comment il recueille avec soin dans son musée les débris des monuments ruinés, ou d'un art perdu, comment il classe et inventorie les curieuses archives de notre histoire éparses dans les bibliothèques publiques ou particulières. Alors j'aurais rappelé à vos souvenirs les recherches de M. Le Mareschal sur la seigneurie de Crévecœur ; de M. de Merlemont sur une voie romaine qui traverse le territoire de Montreuil ; de M. Hamel sur l'évêché et sur l'église de St.-Pantaléon; les découvertes qu'à faites M. Dupont-White de pièces concernant La Jacquerie; je vous aurais parlé

de la notice si pleine de détails sur Foy Vaillant, le célèbre numismate Beauvaisien, et de la monographie si curieuse de St.-Etienne qu'à publiée M. de St.-Germain ; de la question de numismatique qu'à ranimée M. Daniel à propos d'une médaille de Julia Mammaea, enfin des lectures de M. Danjou, soit qu'il appelle votre attention sur des titres anciens, soit qu'il développe une classification des portes d'église en relevant les caractères qui paraissent en distinguer les styles aux différentes époques des temps modernes.

Mais une voix plus éloquente que la mienne, celle de M. le directeur du comité, doit retracer l'historique d'une mission que la ville de Beauvais voit s'accomplir sous sa direction avec un succès toujours croissant. J'arrive aux travaux du comité central, qui doit montrer l'exemple de l'activité et du travail. Presque tous les membres ont payé leur dette, soit par des mémoires, soit par des rapports, soit enfin avec la part qu'ils ont prise aux travaux des commissions.

Notre collègue M. Lavernier a continué à vous faire connaître les faits les plus importants de l'histoire de notre cité qu'il recueille dans les archives confiées à ses soins.

Je ne ferai que rappeler ici son mémoire sur ce qui s'est passé à Amiens à l'occasion des divers états-généraux de France; les recherches dans lesquelles il présente d'abord la notice des actes qu'il a réunis, la tenue des états particuliers du bailliage, les contestations qui s'y sont élevées, et les réglements qui les ont terminées; elles ont été insérées dans le 5. volumé de vos mémoires et le public a pu les apprécier : Dans une autre séance, M. Lavernier à su égayer

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