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l'abbaye de la Trappe, le regardé comme beaucoup plus ancien (1).

«Un assez grand nombre de ces ciboires suspendus avaient la forme d'une colombe, comme l'indiquent fort clairement plusieurs passages des historiens du moyen âge. Voy. COLOMBE.

Il paraît que parfois la réserve eucharistique était enveloppée dans un linge : il en était ainsi à Saint-Théoffrey, dans le Velay, comme le prouve un passage de ses archives rapporté par Ducange (2). L'hostie sacrée pouvait bien n'être pas toujours renfermée dans la colombe, mais y être ellemême suspendue: c'est ce que l'abbé Thiers infère du texte d'Uldaric que nous avons cité plus haut, et ce qui est encore plus clairement démontré par le passage suivant, extrait des Coutumes de Cluny, recueillies par le moine Bernard... prædictam autem pyxidem... diaconus de eotumba jugiter pendente super altare... abstrahit. (Ducange, Gloss., v Ccl) (3).

:

« Les custodes en forme de tour furent peut-être plus nombreuses que les columbarium (4); mais les tours étaient quelquefois elles-mêmes surmontées de colombes. On lit dans Anastase le Bibliothécaire (In Vitis rom. Pont.) qu'Innocent Ier (402-417) fit faire une tour d'argent accompagnée d'une colombe dorée pour l'église des martyrs Saint Gervais et Saint-Protais (In Innoc. I) (5); que le pape Hilaire (mort en 468) donna aussi une tour d'argent et une colombe d'or de deux livres pesant, à la basilique de Latran (6). M. l'abbé Texier, dans le n° 9 du bulletin du Comité des arts et monuments, parle d'un pyxis qui était tout à la fois tour et colombe, et que l'on conserve dans l'église de la Guêne (arr. de Tulle): « Les pattes de l'oiseau reposent sur un disque attaché par trois chaînettes à un cercle décoré de tourelles et suspendu lui-même à la voûte. » L'empereur Constantin fit présent à l'église Saint-Pierre d'une tour et d'une colombe d'or, enrichie de perles et de pierreries, qui pesaient 30 livres (7); comme on le voit par ce dernier fait, les ciboires en forme de tour étaient parfois d'un prix inestimable. Nous en voyons une nouvelle preuve dans les vers

(1) J.-B. Taiers, Dissert. sur les autels.

(2) Columba desuper altare aurea, ubi dominicum reponitur corpus in linteo mundo servandum (Ducange, Gloss., v Col).

(3) Consultez sur les columbarium: saint Paulin, ep. 32; Actes du v conc. de Const.; Casalius, dom Mabillon, dom Martenne, D. Durand, Ducange, D. Carpentier, D Chardon, Molanus, le cardinal Bona, Bocquillot, Claude de Vert, J.-B. Thiers, Lebrun Desmarets, Grandcolas, Ciampini, etc. (passim).

(4) Voyez le dessin d'une tour eucharistiqué dans le tome XI des Annales de philosoph. chrét., n° 61, fig. 17.

(5) Tarrem argenteam cum patena et columbam deauratam pensantem libras triginta (In inn., 1).

-

(6) In Vitis rom. poni., in Inn. I. In Hilar. (7) Patenam anam cum turre et columba ex auro purissimo ornatam gemmis prasitis et hyacintinis margaritisque numero 215 pensantem libras 3 (Anast. in Sylvestro).

qu'adresse Vénance Fortunat à Félix, évêque de Bourges, qui avait fait ciseler une tour d'or, destinée à contenir la réserve eucharistique (1).

Quam bene juncta decent, sacrati ut corporis agni
Margaritum ingens, aurea doria ferant?
Cedant chrysolithis salomonia vasa metallis

Ista placent magis ars facit atque fides (2) (3).

« Les tours ne servaient souvent qu'à contenir le vase eucharistique; telle était, selon D. Martenne et Durand (4), la tour d'ivoire, conservée à l'abbaye de Saint-Vaast près d'Arras, qu'une tradition erronée regardait comme le vase où Marie-Madeleine conservait autrefois ses parfums. Telle devait être encore la tour de bois placée sur l'autel de l'abbaye d'Olivet, et à laquelle on montait par un degré (5). Ces tours eucharistiques étaient quelquefois fort grandes et contenaient plusieurs vases sacrés. L'auteur de la Gloire des confesseurs (6) parle d'un diacre qui alla chercher dans l'episcopium, pour la porter sur l'autel, une tour « in qua mysterium dominici corporis habebatur. » Les liturgistes, il est vrai, interprètent ce passage de diverses façons. Le P. Mabil

(7) et l'abbé Thiers (8) pensent qu'il ne s'agit ici que de vases sacrés; mais le P. Ruinard, J. Gropper (9), dom Chardon (10) et Pierre Lebrun (11), à l'avis desquels je me range, croient que cette expression collective, « mysterium dominici corporis, » com

(1) Lib. II, carm. 25; Frodoart, Hist. Rhem., 1., c. 6.

(2) Il ne paraît point que cette tour fût accompagnée d'une colombe: telles étaient encore celles que firent faire saint Remi et Landon. archevêque de Reims, pour l'église de cette métropole. (Gallia. christ. in arch. Rhem., p. 21. Frodoart, lib. 1, Hist. Rhem., cap. 18.) La tour que donna saint Remi pesait 5 livres d'or elle devait avoir un pied de largeur et un pied et demi de haut, selon les calculs de Larcher. Cette tour eucharistique fut probablement confectionnée avec les débris du fameux vase de Soissons que Clovis donna à saint Remi; c'est ce que semble démontrer le passage suivant, extrait du testament de l'illustre archevêque : Argenteum vas quod mihi dominus illustris memoria Hludovicus rex, quem de sacro baptismatis fonte suscepi, donare dignatus est, ut de eo facerem quod ipse voluissem, tibi heredæ meæ ecclesiæ jubeo turriculum et imaginatum calicem fabricari... (Bibl. Labbe, t. I, p. 806).

(3) Il y avait des ciboires en forme de tour dans la basilique de Latran, dans les cathédrales de Reims, de Bourges, de Digne et de Laon; dans les églises de Saint-Gervais et Saint-Protais à Rome, de Riom en Auvergne, de Saint-Laurent à Rouen, de SaintBenoit à Paris, des Célestins à Avignon et à Colombiers, et de Saint-Michel de Dijon, dans les abbayes. d'Olivet et de Marmoutier en Touraine, etc., etc. Voyez dom Martenne et Durand, Voyages littérai res de deux bénédict., et Moléon, Voyage liturgique. Gall. christ. (passim).

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(4) Op. cit., t. 11, p. 67.

(5) Id., t. Ier, 1r part., p. 21.

(6) Greg. Turon., cap. 86.

7 Dissert. de azym., c. 8.

(8) Diss. sur les antiquités, ch. 24.
(9) De asservatione Eucharist., p. 454.
(10) Hist. des Sacrem., t. II.

(11) Expl. des cérém. de la Messe., t. II.

prend les vases et les pains consacrés. La forme de tour fut aussi adoptée pour certains ostensoirs (1) et certaines châsses. Ainsi, par exemple, les religieux de l'abbaye de Saint-Jean d'Amiens, de l'ordre de Prémontré, conservaient une partie de la mâchoire de saint Jean-Baptiste dans une tour de vermeil, soutenue par deux chérubins d'or (2). D. Martenne, dans son Nouveau trésor d'anecdotes, dit qu'on a choisi cette forme pour les vases eucharistiques, parce que le tombeau de Notre-Seigneur avait dans l'intérie r l'aspect d'une tour (3). Ne serait-ce pas aussi parce que la tour est le symbole de la force, et que le chrétien puise toute sa force morale dans la communion?

« Les columbarium peuvent-ils revendiquer sur les tours une priorité d'ancienneté? C'est l'opinion de D. Martenne: Antiquiora tamen nobis suppetunt argumenta pro columbis (4); mais cette assertion ne me paraît nullement prouvée dès le commencement du Ive siècle, sous le règne de Constantin, nous voyons usitées en même temps et les tours et les colombes; le siècle ne nous fournit aucun fait relatif ni aux unes ni aux autres il n'y a donc pas lieu d'établir entre elles une différence de date.

« La forme de colombe et de tour ne fut point exclusivement adoptée pour les c.boires du moyen âge: ce n'était quelquefois que des boites de matière plus ou moins précieuse. Hugues de Flavigny rapporte, dans sa Chronique de Verdun, que saint Henri fit présent au monastère de Vannes d'une boîte d'onyx pour y mettre le corps de Notre-Seigneur (5). Rupert, dans 1 Histoire de l'incendie du monastère de Duits, parle d'une boîte en bois, où l'on gardait la réserve cucharist'que (6); dans l'église de Bologne, près de Chambord, le viatique se conservait dans un coffret d'argent doré en dedans (7); d'autres fois les ciboires étaient en verre ou en cristal à Saint-Rambert, dans le Bugey,on conservait le saint sacrement dans une tour vitrée (8) (9); à Notre-Dame de la Ronde, à

(1) Tel était l'ostensoir des Célestines de Marcoucy, dont J.-B. Thiers a donné le dessin d'après une peinture sur vélin d'un missel de 1374. Etait-ce un ornement du même genre qui décorait le haut du tombeau de saint Denis? Voy. De Glor. mart., 1, c. 89. Bocquillon, Traité hist. de la lit., 199. —Thiers, De l'expos. du Saint-Sacrement, p. 223.

(2) Ducange, Traité hist. du chef de saint J.-Bapt.,

P. 151.

(3) Corpus vero Domini ideo defertur in turribus, quia monumentum Domini in similitudinem turris fuit scissum in petra. (D. Martenne, tom. V, Anecd., col. 95).

(4) De ant. eccl. rit.

Pyxidem unam de onycido, in qua servaretur corpus dominicum dependens super altare. (Hug. Flav., In Chron. Vird.).

(6) Rupertus, De incendio Tuitiens., c. 5.-D. Chardon, Hist. des Sucr., t. II.

J.-B. Thiers, loc. cit.

(8) Voy. litt., t. Ier, ire part., p. 239.

(9) Dans l'église de Sainte-Croix, à Rome, on le conserve derrière l'autel, dans un vase transparent (Mabillon, Voy. d'Italie).

Rouen, on le mettait tout au haut du contreretable, dans une lanterne vitrée, dont le bois était doré (1). Ces vases en cristal, qui n'étaient nullement convenables à cause de leur fragilité, étaient encore usités au XIV' siècle. Dom Carpentier cite un extrait d'une lettre ms. (1383) du chartrier royal, où on lit: lesquels pillards s'en alèrent en l'église de Béon, en laquelle ils prindrent un joyau de crystal qui estoit en manière d'une custode pour porter le corps de N.-S. J.-C. » (2). Ces vases étaient plus communément en ivoire (3), mais très-rarement en albâtre; cependant, à Saint-Bénigne de Dijon, on conservait les espèces consacrées dans un vase d'albâtre haut d'un demi-piel, et dont le couvercle avait un pied de diamètre (4). Du temps du roi Charibert, nous avions des calices ornés d'anses qui servaient de ciboires; c'est ce que prétend prouver Bonteroüe, en décrivant plusieurs médailles de ce temps où l'on voit des calices surmontés de petites hosties; mais le P. Mabillon croit pouvoir récuser cette preuve numismatique: il ne nie point pourtant que des calices n'aient pu servir autrefois de ciboire; bien loin de là, il rapporte que le pape Grégoire III fit suspendre un calice à l'abside d'une chapelle de SaintPierre de Rome, et il ajoute qu'on ne peut lui assigner un autre usage que la conservation des espèces consacrées (5).

« Des liturgistes érudits ont rencontré dans certaines églises des ciboires d'une forme toute particulière. Le P. Mabillon (6) a vu, dans le baptistère de la cathédrale de Pise, un globe dans lequel on conservait autrefois l'eucharistie pour les nouveaux baptisés. D. Martenne et Durand ont remarqué à Marchienne (Pays-Bas) une colonne de cuivre qui soutenait le saint sacrement; d'Agincourt a dessiné, dans son pl. XII, n° 2) un ciboire en forme de tasse, Histoire de l'art par les monuments (Sculpture, qui provient de l'église de Saint-Ambroise de Milan. Les bas-reliefs dont il est orné représentent l'histoire de Jonas et les miracles de l'hémorroïsse, du paralytique et de Lazare. « On reconnaît dans cet ouvrage, dit l'auteur, le choix des sujets et le faire de ceux qui, au sortir des catacombes et dans les premiers siècles de la liberté du culte chrétien, in

(1) Moléon, p. 407.

(2) Nov. Gloss., V° Hostia.

(Valais), (D. Mart., De ant. Eccl. rit., 1. 1, c. 5), dans (3) Il en était ainsi dans la cathédrale de Sion l'église des chanoines réguliers de Vérone (Mabillon, Voy. d'Ital., p. 194), du monastère de Ferrière (diocèse de Sens) et de la Grasse en Languedoc (Voy. litt., t. Ier, 1 part., p. 55).

(4) Ce vase était renfermé près de l'autel dans une armoire où était inscrit ce vers :

Hostia salveto, nostræ spes sancta salutis.
(Voy. litt., t. I, p. 144.)

(5) Clarior est locus in gestis Gregorii papæ 111, qui calicem unum argenteum qui pendet in abside oratorii, dedisse perhibetur non alium videtur ad usum, quam ad sacratissimam eucharistiam conservandam (Mabillon, De azym. et ferm., c. 8).

(6) Mabillon, Voy, d'Italie, p. 106.

diquent si clairement la décadence de l'art (1) (2). »

« Assez ordinairement les pyxis étaient suspendus sur l'autel principal (3); cependant dans un assez grand nombre d'églises on les plaçait sur un autel particulier (4), parce qu'on regardait comme plus conforme à l'esprit de l'Eglise de ne pas mettre la réserve eucharistique en présence du saint sacrement. C'est la remarque que font le P. Gavantus (5), Baudry (6) et Delacroix (7). Les tours, comme nous l'avons déjà vu par un passage de l'auteur de La gloire des confesseurs, restaient quelquefois à la sacristie; Jean Gropper explique ce passage du chroniqueur, en disant que la tour eucharistique était conservée dans l'episcopium, et qu'aux jours des fêtes solennelles et à celles des martyrs, le diacre allait la chercher avant la consécration (8).

A partir du XVIe siècle les columbarium, en France, tombèrent en discrédit. Cependant, au XVIIIe siècle, il y avait encore quelques colombes et quelques tours suspendues, comme le témoignent Pierre Lebrun et Claude de Vert (9). Elles sont maintenant reléguées dans les musées de province et dans les cabinets particuliers. On peut voir des colombes liturgiques dans les collections de M. le comte de Bastard, de M. le colonel Dubois, de M. Garrand, etc. Aucune d'elles n'est antérieure au xir siècle. Les tours affectées au même usage, dont se sont enrichis quelques musées, remontent parfois à une époque plus reculée : tel est le pyxis d'ivoire sculpté (vi siècle) que possède le musée de Cluny, formé par M. du Sommerard. »

CIERGE.-I. L'usage des cierges, dans les cérémonies du culte chrétien, remonte au premier âge de l'Eglise et jusqu'aux temps apostoliques. Cet usage, qu'il ait été introduit par la nécessité ou qu'il ait été emprunté aux coutumes des païens, a été sanctifié par l'Eglise, maintenu pendant toute la durée du moyen âge, et persévère jusqu'à nos jours. Ce qui est certain, c'est que les païens

p. 44.

(1) D'Agincourt, Hist. de l'art (Sculpture. — Texte), (2) Voyez Gori (Thesaurus dypt., t. III, p. 74). On a donné à cette espèce de ciboire le nom d'Artophorium. (V. Annales de phil. chrét., t. XI, art. de M. Guenebault.)

(3) Il en était ainsi à Saint-Germain-des-Prés, à l'abbaye de Cluny (De consuet. mon. Clun., c. 52), et à Saint-Bénigne de Dijon (D. Mart., De ant. monachor. ritib.), etc., etc.

(4) Dans les cathédrales de Saint-Pierre de Rome, de Digne, de Lyon, de Besançon, de Vienne; à Maurienne, dans les monastères de Moutiers, de Casal, de Bursfeld, et dans la plupart des églises des PaysBas. J.-B. Thiers, Dissert. eccles. (passim). (5) Comm. in rubr. miss.

(6) Mon. sacr. cœrem.

(7) Parf. Eccles.

(8) Joh. Gropper, De asserv. Ench., p. 451. Gregor. Tur., I., De Glor. confess., c. 86.-Fleury, Mœurs des Chrét., 327.

p.

(9) V. aussi d'Espense, De adoratione Euch., et Lebrun-Desmarets.

se servaient de flambeaux dans les jours de cérémonies, comme dans les sacrifices et les mystères de Cérès. On en mettait aussi devant les statues des dieux. H y avait encore des illuminations à la porte des maisons où l'on célébrait quelque fête. Ce qui n'est pas moins certain, c'est que les Juifs pratiquaient l'usage d'allumer des cierges ou flambeaux dans le temple, et en plusieurs circonstances religieuses. On alluma des cierges dans nos églises dès le principe, non-seulement pour donner de la lumière, pendant les offices de la nuit, ou dans l'obscurité des catacombes, mais encore par dévotion, pour donner plus de solennité à la fète, et dans une intention mystique. Ce qui le prouve, c'est un passage de saint Paulin, qui vivait au commencement du ve sièele, où il est dit que les chrétiens faisaient peindre les cierges. Le quatrième concile de Carthage, tenu vers la fin du Iv siècle, ordonne que, quand on donnera l'ordre d'acolyte à quelqu'un, l'archidiacre lui mette entre les mains un chandelier avec un cierge. Saint Jérôme, contre Vigilance, c. 3, marque que l'usage était dès lors d'allumer des cierges dans l'église, mais qu'on ne le faisait cependant point le jour. Que si quelques séculiers, ajoute-t-il, ou quelques femmes, le font par ignorance, ou par simplicité, quel mal y at-il? On lit dans Khistoire de l'Eglise que les fidèles, enterrant le corps de saint Cyprien, martyr, au milieu du me siècle, allumèrent des cierges, quoiqu'ils lui rendissent les derniers devoirs en public.

II.

Nous compléterons ici, par quelques détails, ce que nous avons dit du cierge pascal. Voy. CHANDELIer.

Le Pontifical dit que c'est le pape Zozime qui est l'auteur de la bénédiction du cierge pascal; mais Baronius remarque que l'usage en est plus ancien, comme il paraît par une hymne de Prudence. Ainsi, il croit que ce pape en établit seulement l'usage dans les paroisses; jusque-là on n'en avait usé que dans les grandes églises. Le P. Papebroch nous en a expliqué plus distinctement l'origine dans le Conatus chronico-historicus, qui est dans les Propylæum ad Acta sanct. Maii, pag. 9, et dans les Paralipomena ad conatum, qui sont à la fin du VII tome des saints du mois de mai, pag. 19. Voici, en abrégé, ce qu'il en dit :

« Quand le concile de Nicée eut réglé le jour que l'on célébrerait la pâque, il chargea le patriarche d'Alexandrie d'en faire faire tous les ans le canon, et de l'envoyer au pape. Toutes les autres fêtes mobiles se réglaient sur celle de Pâques, et l'on en faisait, chaque année, un catalogue que l'on écrivait sur un cierge, que l'on bénissait solennellement dans l'église. Ce cierge, selon l'abbé Chastelain, n'était point une chandelle de cire faite pour brûler; il n'avait. point de mèche c'était seulement une colonne de cire faite pour écrire cette liste des fêtes mobiles, et qui suffisait pour cela

durant un an. Car, dans l'antiquité, quand on voulait que quelque chose durât toujours, on la gravait sur le marbre ou sur l'airain; quand on voulait qu'elle durât longtemps, on l'écrivait sur le papier d'Egypte, ou sur de l'écorce d'arbre; mais quand on voulait qu'elle durât seulement quelque temps, on se contentait de l'écrire sur de la cire. Dans la suite, on écrivit les fêtes mobiles sur du papier ou sur un tableau; mais on ne laissa pas d'attacher toujours l'un ou l'autre au cierge pascal. Telle est l'origine de la bénédiction du cierge pascal; cérémonie qui ne commença pas néanmoins sitôt à Rome, comme il paraît par l'Ordo Romanus, dans l'office du samedi saint, où il est dit que cette bénédiction se fait seulement in forensibus civitatibus, mais non pas dans Rome. »

Deux choses prouvent l'antiquité de cette cérémonie premièrement, c'est que la formule d'invitation qui la précède est la même qui se voit dans le bréviaire ambrosien, et qu'il semble, par deux missels très-anciens, que saint Augustin la porta de Milan en Afrique; secondement, c'est que l'auteur du Traité du cierge pascal, qui se trouve parmi les ouvrages de saint Jérôme, était contemporain de ce Père et de saint Augustin; ou même plus ancien, puisqu'il écrivait l'année que Gratien fut trahi par son armée, m's dans les fers, et enfin tué, c'est-à-dire l'an 383 de Jésus-Christ.

Au reste, le P. Papebroch croit que ce que l'abbé Chastelain pensait de cette colonne de cire peut s'être observé à Rome; mais il Juge avec raison qu'ayant été instituée pour être une figure de Jésus-Christ ressuscité, et apparaissant à ses disciples, et afin que, pour représenter ce mystère, elle brulât pendant les saints offices, jusqu'au jour de l'Ascension qu'on l'éteint; cela suppose qu'elle avait une mèche, et que c'était véritablement un cierge. Saint Ennode, évêque de Pavie, au commencement du vi° siècle, nous a laissé, parmi ses œuvres, deux bénédictions du cierge pascal. La forme de cette bénédiction n'était pas la même partout; la plus généralement reçue était celle que nous avons retenue et qui commence par Exultet jam angelica turbà.

CIMENT. - Le ciment, en général, est une composition d'une nature tenace, propre à lier et à faire tenir ensemble plusieurs parties distinctes d'un membre d'architecture ou d'une muraille. Les Romains ont fait des ouvrages indestructibles avec le ciment employé seulement pour lier les pierres. Que!quefois, par exemple pour des voûtes légères, il a remplacé la pierre même et a acquis une dureté et une solidité qu'elle n'eût peutêtre pas offertes. Il a servi aussi à faire des enduits que l'eau non plus que les siècles n'ont pu détruire.

Au moyen âge, on a composé des ciments ou mortiers qui n'offrent guère moins de résistance que les ciments romains.

L'examen du ciment ou mortier, tel qu'on l'employait dans les édifices religieux, peut

offrir un caractère propre à en faire connaître l'âge dans certaines provinces. Ainsi, dans le centre de la France, en Touraine, en particulier, il est facile, à l'aspect des joints de pierre faits en mortier, de reconnaître les constructions du xi siècle et celles du x. Le ciment fait saillie entre les appareils, dans les murailles bâties aux siècle, et cette particularité est tellement remarquable dans certaines localités, comme à Saint-Mars-la-Pile, au diocèse de Tours, que l'on aperçoit encore le jeu de la truelle. En général les joints de mortier sont fort épais dans les grands édifices du moyen âge, et le mortier est composé d'un sable gros et serré. Les joints ont donné aux appareils un tel degré de solidité, qu'il serait plus facile de briser les pierres que de les séparer les unes des autres.

CIMETIÈRE. I. Les cimetières ont toujours été en grande vénération parmi les chrétiens. Le concile d'Elvire, can. 34 et 35, défend d'allumer des cierges pendant le jour dans les cimetières.

Dans les premiers siècles, les chrétiens faisaient leurs assemblées dans les cimetières, comme nous l'apprenons d'Eusèbe, au livre vi de son Histoire ecclésiastique, chap. 11, et de Tertullien, qui appelle areas les cimetières où l'on s'assemblait pour faire des prières. (Tertull. ad Scap., cap. 3). Valérien avait apparemment confisqué les cimetières des chrétiens, puisque Gallien les leur rendit par un rescrit public, qui est rapporté par Eusèbe (Lib. vii, cap. 3). Il semble que les cimetières et les lieux destinés aux éérémonies de la religion y soient pris pour une seule et même chose. Comme les martyrs étaient enterrés dans les cimetières, ce fut là particulièrement que les chrétiens bâtirent. des églises, lorsque Constantin eut donné une entière liberté. Voy. CATACOMBES.

Pendant de longs siècles, on enter, ait les morts uniquement dans les cimetières, situés autour des églises; ce fut bien plus tard qu'on les ensevelit dans l'intérieur de l'église. Voy. Pierres tombalES.

On trouve encore dans quelques cimetières des croix en pierre fort anciennes.

[I.

Le Campo-Santo, ou le cimetière de Pise, est, sous tous les rapports, un édifice digne d'admiration. Relativement à l'histoire des arts, il s'offre comme un de ceux où l'architecture y est aussi remarquable que curieuse, et par l'étendue de son plan, la grandeur de sa conception, et la noblesse de ses usages, il est un des monuments les plus importants et les plus intéressants de l'Europe. Ubaldo, archevêque de Pise, conçut, en 1200, l'ide de ce vaste cimetière; la construction n'en fut commencée qu'en 1218, et terminée en 1283. Jean de Pise, le plus célèbre architecte de son temps, fut chargé de ce grand ouvrage, et y déploya une très-grande habileté. La longueur de cet édifice est de 460 pieds ou 222 brasses, sa largeur de 76 brasses, sa hauteur de 24, son circuit en a 596, et le nombre total des brasses carrées qu'occue

la superficie est de 16,872. Sa forme est un grand rectangle. La façade extérieure, du côté du midi, est ornée de 44 pilastres d'une proportion assez bonne, qui soutiennent un égal nombre d'arcades en plein cintre; ce qui prouve que les architectes pisans avaient déjà abandonné les voûtes d'arête et les formes gothiques. Au-dessus de chaque chapiteau, et à l'endroit où les arcs se réunissent, est une tête de marbre, en forme de mascaron, dont le travail, ainsi que celui des chapiteaux, se sent du goût capricieux d'ornement qui régnait alors. Tout l'édifice est construit en beaux marbres blancs, la plupart tirés des montagnes de Pise, régulièrement taillés, unis et appareillés avec soin. Deux portes latérales donnent entrée dans l'intérieur du monument : c'est une vaste cour de 450 pieds en longueur, environnée de portiques, formés par 62 arcades qui rappellent le style ogival. Les deux grands côtés ont chacun 26 arcades; cinq seulement composent les deux petits côtés. Les arcs y sont, selon le goût de l'extérieur, portés sur des colonnes, auxquelles un soubassement continu sert de piédestal. Les galeries sont pavées de beaux marbres, et ornées de peintures fort curieuses. On y voit plusieurs ouvrages de Giotto, Cimabué et autres anciens maîtres. La reine Christine donnait à ces belles galeries le nom de museum. De beaux sarcophages antiques en ornent le pourtour; tantôt ils sont élevés sur des consoles, et tantôt placés sur un soubassement à hauteur d'appui. Sous ces portiques funèbres on voit encore les monuments des hommes célèbres, dont la république de Pise a conservé les images et honoré la mémoire.

CINQ-FEUILLES. - Expression empruntée au blason: c'est une espèce d'ornement en forme de rosace, qui présente cinq divisions, comme on a dit un quatre-feuilles pour un ornement analogue qui n'offre que quatre

divisions.

CINTRE. Le cintre est un trait d'arc, ou figure courbe qu'on donne à une voûte, à une arcade. Dans le langage de la coupe des pierres, le cintre est le contour arrondi de la partie intérieure d'une voûte, pris en un endroit déterminé, ou perpendiculairement à la direction alors il s'appelle l'arc droit; ou obliquement à l'arête d'une face biaise, alors il s appelle cintre de face ou arc de face. Celui de ces deux cintres, qu'on a le premier en vue pour tracer la voûte, s'appelle le cintre primitif. Celui qui résulte de cette première détermination s'appelle cintre secondaire.

Ces cintres, considérés dans la figure de leur contour, ont différents noms; celui qui est en demi-cercle complet s'appelle plein cintre; celui qui, étant supposé de largeur égale, ne s'élève pas à la mêine hauteur que le demicercle, s'appelle cintre en anse de panier, ou cintre surbaissé; celui qui, dans la même supposition, s'élève au-dessus du demi-cercle, s'appelle cintre surhaussé, ou cintre surmonté; celui qui est d'un arc de cercle beaucoup

moindre que sa moitié, comme du quart ou du sixième, s'appelle cintre bombe.

On appelle encore cintre cet assemblage de charpente qu'on fait pour bâtir de grandes voûtes, et soutenir les pierres, en attendant que les clefs y soient mises pour les fermer. CIRCITORIUM. Ce mot, dans les écrivains ecclésiastiques, signifie une COUVERTURE D'AUTEL. Voy. ce mot et ENDYTIS, Chasuble. Il signifie aussi courtine ou rideau suspendu autour du baldaquin ou ciboire. Voy. BALDAQUIN. CISELURE. La ciselure est l'art d'enrichir et d'embellir les ouvrages d'or et d'argent, ou d'autres métaux, par des dessins ou sculptures en relief, travaillés ou réparés avec une espèce de petit ciseau appelé ciselet. En architecture on appelle proprement ciselure le petit bord que l'on fait avec le ciseau autour du parement d'une pierre dure pour la dresser: ce qui s'appelle relever les ciselures.

Les sculpteurs de la période ogivale, surtout au xv siècle et au xvIe siècle, ont exécuté les ornements d'architecture avec le même fini, la même délicatesse que les ouvrages ciselés sur métaux. C'est donc de la ciselure sur pierre qu'ils ont pris à tâche de faire rien n'est admirable comme les dais ou baldaquins qui ornent le frontispice des grands monuments, comme la cathédrale de Tours, celle de Troyes en Champagne, celle de Rouen, etc. Il y a d'autres œuvres non moins remarquables de ciselure en pierre, comm le jubé de l'église de la Madeleine, à Troyes, la clôture du chœur et le jubé de la cathédrale d'Albi, etc.

Des critiques regrettent, peut-être avec raison, que les artistes aient autrefois dépensé tant de goût, de science et de patience, à ciseler la pierre, parce que cette matière n'a pas assez de dureté pour résister aux mille causes de destruction qui tôt ou tard ruinent les œuvres d'art de cette nature. Hélas! en effet, la plupart des chefs-d'œuvre de la ciselure en pierre ont disparu ! Ceux qui n'ont pas entièrement péri sont aujour d'hui dans le plus déplorable état de mutilation. Il est vrai qu'il ne faut pas seulement en accuser la mauvaise qualité des matériaux, l'effet du temps qui ronge toute chose ici-bas et les accidents ínséparables de la condition terrestre; des vandales, au xvI° siècle, sous le XVIII siècle, sous le nom de philosophes, ont nom de protestants; d'autres vandales, au prêché la destruction et ont ariné la main sacrilége des soldats de l'émeute, hommes sans instruction, sans morale, sans frein, à. ` la disposition de tous ceux qui savent les passionner, lesquels se sont fait un barbare plaisir de déchirer, de rompre, d'abattre et de démolir! Les protestants et les philosophes ont-ils jamais su faire autre chose? Non; les faits sont là, qui parlent haut !

CITÉ. Autrefois cité, civitas, se disait des villes où il y avait évêché : la bulle d'érection, de division et d'assignation des évêchés de Poitiers, de Maillezais et de Luçon, est remarquable pour cela : le pape dit, dans cet acte, qu'il érige en cités les villes de

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