Page images
PDF
EPUB

les domages qu'il i ost li soient rendu par dist de boene gent. E vuel que li enfant Monseigneur Adam de Cocuce puissent fere pressoer en leur meson à Cocuce, por pressorer les vins por leur bouire tant seulement.

» Apres je esli e voudré avoir ma sepulture en Val Nostre Dame, là où je pourré plus convenablement gésir, près de mon pere et de ma mere et de ma femme qui iluec gisent....

» Et vueil quen rende à Girart de Valengueujart I roucin que joi de lui, seinsi estoit quil le voussist prendre (1). — A monsegneur Pierre de Bouchy ou a ses hoirs vi liv. de parisis, de la prise dun tornoiement. »

Le manuscrit de Gaignières, auquel nous avons déjà fait de nombreux emprunts, et que nous continuons de citer, reproduit le texte d'un certain nombre d'épitaphes, citons notamment celle du sire de Frouville, Adam :

Cy gist mesire Aden de Lille chevalier iadis seigneur de Frouville qui trespassa l'an mil cc LX... et xv o mois de decembre, le quint iour devant la feste S. Thomas apostre. Pries pour lame de ly que Dieu merci ly face. Amen.

Les armes sont chargées de trois merlettes dans la fasce, comme brisure de puîné.

Quelques extraits de son testament, daté de 1295, ont été publiés dans l'Histoire de l'Isle-Adam (2); nous y relevons encore les passages suivants :

....

« Je veil que Mesire Jehan de Lille mon neveu ait mon palefroi au restor du soen que je li tuai.

» Item je les a Adan de Cocuce mon cousin mon meilleur harnas.

» Item je les à Anselet de Brecourt Morel mon sommier et autre harnas.

>> Item je les aus sergens de ma guarine LX s. p.

» Item je les à Climence ma chamberière LX s. p.

» Item ma volonté est que mes delès et ce que mes sepulture coustera soient pris sous la coupe de mon bois de Giroufay e sur les poissons de mes yanes e li remanans sera pris sur tout mon eritage. » Adam de l'Isle constitue pour exécuteurs testamentaires « labe du Val, Mesire Jehan de Lille son neveu, Mesire Pierre d'Aneri son cousin et Adan de Cocuce son cousin. »

(1) Girart V de Valengoujart mourut le 10 novembre 1292; il fut enterré au Val, comme son père Thibaut VI, mort en juillet 1268, et son grand-père Thibaut V, mort en novembre 1243 (Lebeuf, Dioc. de Paris, t. IV, p. 215).

(2) Appendice v, p. 46.

L'acte est fait en présence de « Mesire Gringoire curé de Vaumondois, Mesire Jefroi chapelain de S. Cosme de Luzarches, Jehan Le Seneschal, etc. »

Le sceau d'Adam, qui diffère sensiblement des armes gravées sur son tombeau, portait six merlettes, trois en chef, deux et une en pointe, et la fasce chargée de trois coquilles (sans doute comme pèlerin de Compostelle).

Citons encore, parmi les membres de cette famille, inhumés dans l'église du Val :

Ansel de l'Isle, sieur de Balaincourt, et son fils Gasce, sieur du Plessis-Launoy en Veusquessin, mort en 1345, avec ses deux femmes, Jehanne de Villiers le Viconte, morte en 1331, et Ennor de Villiers, morte en 1385;

Adam de l'Isle, doyen de l'église et cathédrale d'Évreux, professor legum et licenciatus in decreto, qui fut élu et confirmé évêque de cette ville, mais il mourut avant d'être sacré. Sa tombe le représente en habits pontificaux, mais ayant la mitre et la crosse posées à côté de lui;

Anseau de l'Isle, sire de Bourris, qui succomba dans l'expédition que Philippe le Hardi entreprit contre le roi Pèdre d'Aragon, en 1285, pour venger les Français massacrés dans les fameuses Vêpres Siciliennes.

L'épitaphe d'Anseau était ainsi conçue :

Cy git Monseigneur Ansel de Lille chevalier sire de Bourrit qui trespassa en Arragon l'an de grace mil cc. III VINT ET CINQ au mois d'aoust. Pries Dieu que bone merci lui face.

<< On tient, dit Gaignières, qu'il avoit espousé une heritiere de la maison de Bourrys et qu'il estoit chef de la maison de LisleBourrys. Le nécrologe parle de lui ainsi : IIIo kal. septembris obiit in Aragonna Dominus Ansellus de Insula Dominus de Bourrizo. » Mahy de la Tournelle, chevalier, seigneur de Villers l'Adan et de Foukencourt, dont le testament, fait en 1296, porte ces mots :

« Item, je lesse à l'église du Val XVI setiers de blé et X setiers davaine et LX liv. de parisis.... et leur requier devotement en charité que il welent en leur eglise recevoir les entrailes de mon cors apres ma mort. »

Dreux II de Méry (mort après 1244) et sa femme Jehanne, morte l'an 1276, au mois d'avril. Ils portaient les armes des Villiers, avec cette distinction que le doigt indice et le pouce du dextrochère tiennent une croix et que le fanon est plus déployé que dans les armes pleines.

Citons pour mémoire les chevaliers de Valengoujart, du xiie siècle; les Montmorency, Bouchard V et sa femme Laurence de Hainaut;

Thibaut, son frère; Mathieu II, le grand connétable, son fils; Charles, maréchal de France, et ses deux femmes; les familles de Chambly et Saulnier (1), et disons quelques mots, en terminant, des tombes de la famille de Villiers.

Les sires de l'Isle-Adam, appartenant à cette maison, furent pour la plupart enterrés au Val. Le premier de ceux-ci est Jacques de Villiers, châtelain de l'Isle-Adam, conseiller et chambellan du roi, prévôt de Paris, mort le 25 avril 1471; puis viennent sa femme Jehanne de Neelle, morte en 1472 (dont l'écu familial porte deux poissons adossés avec des trèfles à l'entour); — Ambroise de Villiers, leur fils, et enfin l'évêque de Beauvais, dont le tombeau et surtout l'inscription funéraire avaient pris des proportions tout à fait monumentales.

Gaignières nous a conservé l'Epitaphe de feu Charles de Villiers, Evesque et Comte de Beauvais, faite en forme de complainte à l'encontre de la Nature, de la Fortune et de la Mort.

Elle n'a pas moins de six couplets de onze vers alexandrins chaque. L'auteur fait d'abord d'amers reproches à la Nature et à la Fortune << muable et déréglée, qui du palud de malheur vient et sort,» mais c'est naturellement à la Mort qu'il s'adresse avec le plus d'acrimonie:

O cruauté de mort impetueuse

En qui de tout ire et fureur abonde
Comment es-tu si fort audacieuse
Fiere et rebelle, perverse et furibonde,
De nous oster la perle de ce monde ?
Pourquoi as-tu occis tel personnage,
Devant qu'il fust en fin de son vray aage?...

O mort cruelle, cis qui tant bone grace
Au monde avoit, en maintien et en faiz,
Tu as occis et deturpé en face;

Sang, chair et membres tu gastes et desfais.
Quant à l'honneur estoit des plus parfais
Qu'on sut trouver en tout le genre humain
Pacifieur, traiteur de concordance,
Et tué l'as par ton outrecuidance.
Dancer l'as fait de Macabrai la dance,
Et tresbucher en mortelle cadence,

Sans en avoir ni pitié ni remors.

Charles de Villiers fut inhumé au Val, en 1535. « Le 10 février 1672, dit Gaignières, on ouvrit par occasion son cercueil de plomb,

(1) Nous avons parlé plus haut de la tombe de Robert Saulnier retrouvée au château d'Auvers.

et l'on trouva son corps aussi blanc et frais que quand on lui avoit mis les linges et ornements, le cercueil étant plein de baume liquide comme de l'eau rouce. >>

A cette noble série que nous venons d'énumérer, on a remarqué sans doute qu'il manquait un nom, et des plus illustres, celui de Jean de Villiers, le célèbre capitaine bourguignon. Les motifs de cette exception singulière se trouvent dans un document que nous communique fort aimablement notre éminent collègue, M. Louis de Backer, dans la lettre que voici :

MONSIEUR ET Cher Confrère,

Caen, le 20 Octobre 1884.

Puisque la Société historique de Pontoise se rend, mercredi prochain, à l'Isle-Adam, j'ai l'honneur de vous transmettre la traduction d'une chanson flamande, de 1437, sur un des anciens seigneurs de la jolie petite ville que vous allez visiter.

Le 22 mai 1437, le duc de Bourgogne, Philippe le Hardi, se présente devant les murs de Bruges (en Belgique), à la tête de 4000 Picards, ennemis des Flamands. Les Brugeois n'hésitent pas à lui exprimer leur étonnement d'une semblable démonstration. Philippe parlemente d'abord et finit par pénétrer dans la ville, suivi de Jean de Villers, seigneur de l'Isle-Adam. Il range sa troupe en bataille sur le marché du Vendredi ; les bourgeois, furieux veulent la dissiper et la chasser de leurs murs. Un combat acharné s'engage, le sang coule à flots, l'Isle-Adam est tué. Cela arriva le mardi de la Pentecôte 1437.

« Alors parla Monsieur de l'Isle-Adam: « Seigneur, que voulez» vous faire? Voilà que tant de braves chevaliers parcourent les » rues de Bruges. >>

[ocr errors]

« Ah! noble seigneur de l'Isle-Adam, comment êtes-vous si

simple? Quand vous avez vaincu trois fois à Paris, vous n'étiez » pas tant en peine. »

[ocr errors]

« Quand je pris trois fois Paris, je combattais loyalement. Mais » vous, vous voulez prendre cette noble ville de Bruges par >> trahison. >>

« Quand ils entrèrent en ville, la procession vint à leur rencontre, >> mais le crucifix se brisa en quatre endroits devant les pieds du >> prince.

« Ah! noble seigneur de Flandre, pensez donc à Dieu ! Vous » voulez détruire Bruges, mais Dieu ne le permettra pas. »

« Ah! noble seigneur de l'Isle-Adam, quand vous preniez trois >> fois Paris, vous ne le faisiez pas tant contre-cœur. »

« Quand je pris trois fois Paris, je n'étais pas en danger; si » j'avance, les Brugeois me tueront.

» Qu'on me cherche du pain et du vin, ce sera mon dernier » repas; à Bruges, je serai tué. »

« Alors Monsieur de l'Isle-Adam but et se recommanda à Dieu; » mais avant la fin du jour il était en grand danger.

» Il fallut subir son attaque sur le marché du Vendredi; les » Picards tendirent leurs arcs et se mirent à tirer.

>> Les Brugeois portèrent leurs arquebuses et se mirent à tirer; » les Picards tendirent leurs arcs pour leur malheur.

>> On frappa et on hacha si fort et si dru, qu'ils ne purent éviter » les coups, ils durent renoncer à la vie.

» L'Isle-Adam cria: «Rançon ! rançon ! laissez-moi la vie! je >> vous donnerai un bassin rempli d'or fin. »

<< Ni votre argent, ni votre or vermeil ne peuvent nous servir, » l'Isle-Adam! parce que vous avez été si audacieux, vous périrez. » « Ce noble seigneur fut étendu mort dans la rue; jamais il n'avait » couru plus grand danger. Que Dieu ait pitié de son âme !

» Dans l'église de Saint-Donat (1) il fut enterré, ce noble seigneur » de l'Isle-Adam. Dieu ait pitié de son âme ! »

Le texte original flamand de cette complainte a été publié dans les Alte hoch-und niederdeutsche Volkslieder von UHLAND. Recevez, Monsieur et cher Confrère, l'expression de mes sentiments les meilleurs et bien dévoués.

LOUIS DE BACKER.

Nous sommes heureux de signaler ce précieux lied à l'érudit confrère qui a pris pour sujet de sa thèse à l'École des Chartes la vie de Jean de Villiers, et qui se propose de consacrer au fameux capitaine de Pontoise un travail biographique des plus étendus, et à l'histoire de la guerre de Cent-Ans dans le Vexin une étude du plus puissant intérêt.

(1) Aujourd'hui église-cathédrale de Bruges.

« PreviousContinue »