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LES SIRES DE L'ISLE ET DE VILLIERS

BIENFAITEURS DE L'ABBAYE DU VAL

Par M. J. DEPOIN

Secrétaire général

Les deux principales étapes du second pèlerinage archéologique fait par la Société du Vexin, ne sont pas seulement rapprochées au point de vue des distances; elles sont reliées historiquement entre elles par de nombreux souvenirs. Quelle que soit l'opinion qu'on adopte sur l'origine primitive de l'Abbaye du Val; quand on admettrait, avec Mabillon et les auteurs du Gallia (1), que ce monastère fut peuplé, dès le viie siècle, par un essaim sorti de Saint-Denis, on ne peut méconnaître l'influence considérable qu'ont exercée les Sires de l'Isle-Adam en faveur de son développement et de sa prospérité. Le Cartulaire du Val, conservé aux Archives nationales, et analysé par Gaignières (2), est rempli des témoignages de leurs. libéralités. Les Sires de l'Isle et ceux de Villiers-Adam, leurs proches parents et plus tard leurs héritiers, ont presque tous fait des dons ou des legs importants à ce moûtier dans lequel ils élisaient leur sépulture.

(1) Voir plus hait l'Histoire de l'Isle-Adam, par M. l'abbé Grimot, p. 11.
(2) Mss. lat. 5462. B. N.

La plus ancienne tombe était celle d'Anceau Ier, regardé comme le fondateur du couvent, vers 1136. Cette tombe, en marbre noir, placée au milieu du Chapitre, portait les armes primitives de la maison de l'Isle. Le manuscrit de Gaignières dit en effet :

« La Maison de l'Isle portait anciennement l'escu de gueules chargé d'une fasce d'argent avec une merlette d'argent au premier quartier, avec deux lions d'or comme supports et un pélican d'or pour cimier. Mais depuis l'an 1280 on trouve toutes leurs armes de gueules avec une fasce d'argent chargée de sept merlettes de même, quatre en chef, deux et une en pointe; les supports et les cimiers de même. Mais présentement les aînés de cette maison, parce qu'ils descendent de Heleine d'Aspremont, de la très illustre Maison d'Aspremont en Lorraine, portent pour support de leur escu d'armes deux sauvages au lieu de lions d'or. »>

Au XIe siècle, Jehan de l'Isle fut enterré dans l'église du Val avec sa femme Heloys.

« Il est dit dans les mémoires de M. le comte d'Auneuil qu'elle s'appelait Heloys de Noival et qu'elle étoit dame de Crapaumaisnil. » Les fondations inscrites dans son testament démontrent en effet que cette paroisse du Beauvoisis lui était particulièrement chère. Les armes placées sur la tombe de Jehan de l'Isle sont les armes pleines de l'Isle-Adam; celles gravées sur la tombe de sa femme sont chargées de six merlettes, et 2 en chef, 2 et 1 en pointe.

Il nous semble intéressant de reproduire ici le testament d'Heloys, daté de 1274. C'est une pièce en langue française assez curieuse :

Au nom du père et du Fil et du Saint Esperit, sachant tout chil qui sont et qui a venir s(er)ont que je HELOIS fame Mgr IEHAN Sgr de Lile, ai fait mon testament en tel maniere que quant il plaira à Nre Seigneur que ie trespase de chest mortel vie, que ie vel gesir ou Val Nre Dame.

Premièrement ie lais a leglise du Val N. D. xl s. de parisis de rente chascun en a paier a prendre suer mon heritage ou travers de Coudun tousiours mais, a paier a la première chandeleur qui sera apres mon dechet et à chascune chandeleur après en siavant, den en en, perteneument por mon enversaire faire, ou suer mes aquestes lau mi eseuqiteur vauront que il sera mis à asoir les et plus au pourfit de mame, et de deux jornieus et demi de terre qui fu Robert de Garmegni. Ie en lais jornel et demi a leglise et au prestre de Crapaumaisnil a tousiours perpetuement por mon servige faire le iour de mon eniversaire et l'autre jornel je lais a lostelerie de Crapaumaisnil et jornel et demi qui fu achates a Gillon du Pontle

vesque. He lais a le a leglise de Crapaumaisnil por faire ardoir une lampe devant Nre Dame à la messe et à toutes les autres heures du jour et de la nuit.

Après ie lais a Leurence ma pucele x11 de Parisis. A Gillon de Buveringnes c s. à Witace le keu LX s. a Helet et a Marget sa fille a chascune xx s. a Mgr Thoumas de Crapaumaisni x s. a Mgr Godefroi v s. à Mgr Thoumas de Waumondois xx s. au prestre d Auni x s. au prestre de Devicourt x s. au prestre de Werpilbieres v s. au prestre de Martegni v s. au prestre de Buveringnes v s. au prestre de Couchi v s. à luevre du Moustier de St Aigaise de Couchi v s. à la Maladerie de Crapaumaisnil x s. à la Confrairie des prestres de Devicort x s. à lospital Saint Iehan de Noion x s. au clerc de Crapaumaisnil 1 s. a Pierre le fix Helui 1 s. a sr Flourent de Roie xx s. a Oscans xx s. a leglise de Noion x s. a Ste Marguerite Deslincourt xx s. à labeese de Monci xx s. à St Iehan du Bos xx s. a luevre du Moustier s. Godegren de Lile xx s. à luevre du Moustier de Vaumondois xx s. au prestre de Vaum. v s. au Chapelain du Pré x s. a la Maladerie de Lile x s. a Anselet de Qisine v s. a Iehannot de la Qisine v s. a Hennoke v s. a xx fames veves de Crapaumaisnil a chascune 11 s. as enfans Wauteron Lengles x s. a la fille Richart le barbier qui est ma fillole x s. a St Pierre de Biauvais xx s. a Lostelerie de Biauvais x s. au prestre de Noveras x s. a Loete x s. a Roger le porteur x s. a Iehannot le olier xx s. a leglise de N. D. de Roen xx s. a leglise de Noveras x s. au chapelain de Vaumondois xx s. por amender les aournements de la Chapele. a xxx maladeries en larceveschié de Roen et en leveschié de Noion a chascune i s. as freres mieneurs de Pontoise por pitance faire xx s. En apres ie lais xx 1. de parisis de rente a prendre tous les ans den en en seur mon heritage a Coudun au travers por une chapelerie que ie establis a Noveras a un chapelain qui chantera por larme de moi et de Mgr de Lile et por nos devanchiseurs et vel que les devandites x 1. soient prises et paiiés au devant dit chapelain as witanes de ceste chandeleur prochaine a venir et as autres chandeleurs apres ensievans den en en perpetuement et vel que la devant dite chapele soit a Noveras lau mi eseuqueur verront que ele sera miex, et le doins a Iehennot nostre clerc por Dix et en aumosne. Et lais xx 1. de parisis a porter en la terre d'Outremer et vel que Pierre le Chanbellenc sil i va. Et vel que mi jouel et mes robes soient departis par mes eseuquiteurs tout en chel maniere qui verront quil sera plus profitable a lame de moi, hors mes robes qui sont devisées, et vel que tout chil lais chi devant nommés soient pris suer cc 1. de parisis que ie preng a ma part a departir por lame de moi. Et le suerplus de ces cc 1. devant noumées que irai pus a me part tel suerplus come il i aroit, ie les lais a mes fille que iai de

Mgr lehan de Lile et aumosne. Et sainsi estoitque mi hoir a lassent a lencontre de la chapelerie devant noumée et des autres rentes que ie lais perpetuement por lame de moi, si laige mon quint en la main. de mes eseuqiteurs por ramplir toutes ces choses chi desus noumées. Et sainsi estoit que nus venist avant de qui ieusse rien eu par mauvaise raison et le peust prouver ou on le peust chertainement savoir, ie vel qu'il soit rendu par mes eseuqiteurs les quieus je establis et doins plain pooir de mes detes paier et de mes forfais amander de mes lais rendre.

Et sont a savoir li testamenteur li abes du Val. Mesires Iehans de Chantelli, mesires Raaus du Bos, mesires Robers de Coudun. Mes freres Mesires de Lile, et se chil sont ensamble por faire le porfit de mame, bien le vel et sil ni pueent estre a li mi sont, ie vel quil aient plain pooir de faire autant come si les v i estoient. Et ie Helois deuant noumée en bon sen et en bon entendement en tesmoignage de cheste chose, et ie Mesires Per, prestre de Noveras, et ie mesire Iehans sires de Lile avons pendus nos siaus et ie mesires Iehans de Chantelli li abes du Val Nostre Dame et ie mesires Raaus d'Estrées sires du Bos, ie mesires Robers de Coudun en tesmoignage de cheste chose avons pendus nos siaus. Che fu fait lan de grace Nre Sgr. MCCLX et xi, le jour de feste Nostre Dame es avens eu mois de décembre (1).

Le testament de Jehan de Lisle, fait l'année suivante, offre aussi quelques détails importants à signaler pour les mœurs du temps et pour l'histoire de la Maison de l'Isle-Adam.

Voici par exemple un écho des dernières tentatives faites pour renouveler le magnifique effort de la chrétienté, luttant pendant deux siècles pour la recouvrance des Lieux Saints :

« Je lais et doings por Dieu et por lame de moi a porter en la terre d'Outremer xx 1. de par. rendues et baillies par la mein de mes executeurs por avoir le general pardon que Saint Esglise donne et que li Apostoles conferme a tos boens crestiens. »

Une longue série de legs fait passer sous nos yeux la nomenclature complète des personnes composant la famille et la maison du Seigneur :

<«< Item, je lais à leuvre Madame Sainte Marie de Rouen, XL S. de parisis.

(1) Gaignières indique deux sceaux seulement, représentant l'un un cavalier armé en guerre portant un écu où sont figurés 5 coupes en croix; l'autre un cavalier aussi armé, la visière quadrillée, rabattue, le cheval caparaçonné, portant les armes de l'écu (un quintefeuille avec 8 merlettes en orle). Contre-scel à l'écu, avec exergue : † le secret de Raoul d'Estrée.

Item, je lais à Lesglise Saint-Quentin de Valmondois x s. de

parisis.

Au prestre diluecques x s. de parisis.

à ш paroisses plus prochiennes de Valmondois

a chascun des prestres v s. de tournois.

à la maison Dieu de Pontoise xx s. de torn.

à la maison Dieu de Biaumont xx s. de torn.

à Damoiselle Helois la fille ma fame LX 1. de par. à Mon segneur Guille le Tyois xx 1. de torn.

à Monseigneur Thomas mon chapelain c s. de par. à Ansel de Cocuce c s. de par.

à Jehannot de Cocuce c s. de par.

à Perot de Vilers c s. de par.
à Thomas de Braye c s. de par.

à Huitace mon queu c s. de par.

à Mahiu mon seriant c s. de par.

à Colart mon seriant c s. de par.

à Guiot mon fauconnier LX s. de torn.

à Johan mon clerc c s. de par.

à Johan Heraut, à Rogier de Sommeville, à Vin-
cent, à Johan seriant de ma garenne, à Guichart
mon seriant, à chacun XL s. de par.

à Loeste le garçon Ansel mon fil xL 1. de torn.
à Hennoque mon garçon LX s. de par.

à Anselet de la cuisine XL s. de torn.

à Leurin le fius Huytace XL. s. de torn.

à Jehannet le garçon Ansel mon fil XL s. de torn.

à Colin le charetier x s. de par.

à Perruchon le charetier x s. de tor.

à Renot le garçon Ansel mon fil x s. de p.

à Thomasset le charetier x s. de t.

à Jehan mon pennetier x s. de t.

à Symon le portier x s. de t.

à Ordry de Chiele x s. de t.

à Thibaudin le fiuz Aubert v s. de t.

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Les dispositions qui suivent mentionnent notamment certaines restitutions d'un caractère tout spécial aux mœurs féodales.

« A Mon segneur Hellin de Waurin vii s. de torn. de la prise d'un tornoiement. Et si vuel quen rende aux hoirs Godefroy de Roujaus le pressoer que je li fis oster, et vuel que toz les couz et

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