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III

Monnaies des premiers rois Capétiens

Pontoise n'a commencé, sinon à exister, au moins à avoir quelqu'importance que sous les rois de la troisième race. On ne peut guère supposer dès lors que cette ville ait eu un atelier monétaire avant cette époque.

Nous n'avons donc à rechercher que depuis l'avénement de ces rois, et on va voir que la période pendant laquelle on a pu y battre monnaie est très courte.

Les premiers rois Capétiens eurent des ateliers monétaires dans plusieurs villes de leurs domaines; ils y frappaient monnaie plutôt comme seigneurs que comme rois, et chaque ville eut un type particulier; toutefois toutes ces monnaies, d'une fabrication barbare et grossière, ont entre elles une certaine ressemblance.

Hugues Capet (987 à 996) eut des ateliers de monnaie dans plusieurs villes de l'Ile-de-France, mais rien n'indique qu'il y en ait eu à Pontoise.

Robert II, son successeur (996 à 1031) paraît en avoir eu dans plusieurs villes de son domaine propre à Paris, Étampes, Pontoise, etc.; mais parmi ses monnaies, au reste fort rares, on n'a encore reconnu que celles fabriquées à Paris, Laon et Châlon-sur-Saône.

On ignore si Henri Ier (1031 à 1060) a frappé monnaie à Pontoise. Mais son successeur, Philippe Ier, qui a habité souvent cette ville, y a eu des ateliers ainsi que dans plusieurs autres villes, et on connaît deux types de ses deniers frappés à Pontoise. Nous allons les décrire.

IV

Monnaies de Philippe Ier (1060 à 1108)

Il est vraisemblable que les monnaies de Philippe Ier, frappées à Pontoise, n'ont été déterminées que dans ces derniers temps, car les ouvrages de numismatique les plus récents en parlent seuls; ceux antérieurs se contentent de dire qu'il y a été frappé des monnaies par ce roi.

Ainsi, le « Traité historique des Monnoies de France » par Le Blanc (1) (Paris, Robustel, 1690, in-4o), n'en parle que pour dire, d'après Ordéric Vital: « L'an 1064, le roy Philippe Ier s'acquittant » d'un vœu qu'il avait fait à saint Josse, offrit à l'hostel (sic) cin» quante sols de la monnaie de Pontoise. »

De même dans l'ouvrage de M. Conbrouse et dans le manuel Roret, dont nous allons parler plus loin à l'occasion des pièces de Louis-le-Gros, il n'est pas question de monnaies de Philippe Ier frappées à Pontoise.

jer Type: Le nouveau glossaire du Cange en parle comme nous l'avons déjà dit. Il explique qu'il s'agissait de deniers en argent frappés à Pontoise sous Philippe Ier, et il en donne, no 18 de la planche V, une figure identique à celle reproduite plus loin (no 1). Dans les « Études et Recherches historiques sur les anciennes Monnaies de France, » par M. Berry (Paris, Dumoulin, 1852, 2 vol. in-80 et un vol. de planches), nous trouvons, p. 545 et 546, tome Ier, les explications suivantes au sujet du denier de Philippe Ier:

« Le poids des deniers de Philippe Ier varie de 21 à 26 grains..... » Le denier pesant 24 grains en moyenne n'aura plus qu'une valeur >> intrinsèque de 0.25 ces; la valeur du sol de compte, qui représente » 12 deniers, sera donc de 3 fr.; la livre, ou 20 sols, représentera » donc 60 fr. de notre monnaie......

>> Il existe de Philippe Ier des deniers de Paris, de Pontoise, » d'Orléans, d'Étampes, de Château-Landon, de Châlon-sur-Saône » et de Bourges. »

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M. Berry, no 17 de la planche XXIV, donne une figure du denier d'argent frappé à Pontoise; et il le décrit ainsi : « Dans le champ » du droit (face) : les lettres alpha et oméga (2) Légende écrite » à rebours: PIPPVS (3) REX. Au revers Croix carlovin>> gienne dans un cercle de grènetis; légende écrite à rebours: » PONTISI CSIVI (pour civis. » Civis est l'abrégé de civitas, cité, ville).

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Voici la figure très exacte, comme dimension et dessin, de ce denier de Philippe Ier.

(1) M. l'abbé Trou cite l'ouvrage de Le Blanc et même la page 165 de cet ouvrage, mais il appelle, nous ne savons pourquoi, l'auteur Le Beaux (p. 51).

(2) L'alpha et l'ôméga sont, on le sait, la première et la dernière lettre de l'alphabet grec. On les trouve déjà sur quelques monnaies Mérovingiennes et sur les deniers du roi Robert II. Dès l'origine du Christianisme, elles furent employées pour signifier le commencement et la fin de toutes choses, ainsi que le montre le huitième verset du chapitre Ier de l'Apocalypse. Elles figurent donc, sans doute, sur ces monnaies comme un emblème de souveraineté.

(3) Nous rappelons à nos lecteurs que l'antiquité et le moyen âge n'ont eu qu'un seul caractère, le V pour indiquer le V et l'U.

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20 Type: Dans un excellent ouvrage tout récent : « Les Monnaies » royales de France depuis Hugues Capet jusqu'à Louis XVI,» par H. Hoffmann (Paris, 1878, in-4°), nous trouvons la représentation d'un autre type de denier de Philippe Ier, d'après une monnaie de la collection de M. Gariel, figurée no 23 de la planche V. En voici la copie :

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Et page 6 nous avons à ce sujet les explications suivantes : « Phi» lippe Ier...... quant aux ateliers nouveaux, nous citerons...... >> puis deux villes du Vexin Mantes (Medantum) et Pontoise. >> Presque toutes les monnaies de cette époque sont en bas argent.... >> (Description d'un denier de Philippe Ier, frappé à Pontoise :)

« MHIL: PVS REX. (écrit) à rebours. Dans le champ: mono» gramme. Au revers: PONT: ESIVE. Croix cantonnée de » deux globules et des lettres alpha et ôméga. Denier d'argent. »

On voit que ces pièces sont très grossièrement frappées; la gravure du coin est très défectueuse, l'ouvrier n'a même pas su toujours, en gravant ses coins, renverser les lettres composant les légendes, en sorte que celles-ci sont en partie imprimées à rebours: circonstance dont il faut tenir compte en les lisant.

Ces pièces, larges comme une pièce de un franc actuel, mais fort minces, n'ont qu'une très minime valeur intrinsèque; toutefois, comme elles sont extrêmement rares, elles se vendent fort cher et il est très difficile d'en rencontrer dans le commerce des marchands de monnaies et médailles.

V

Monnaies de Louis VI, dit le Gros (1108 à 1137)

Louis le Gros n'a aussi frappé à Pontoise que des deniers ou oboles en argent ou en billon. Ils sont tous au même type; mais ils présentent quelques légères différences dans les légendes.

Le Blanc, page 164 de l'ouvrage dont le titre est rapporté plus haut, donne la figure suivante de cette monnaie :

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Et page 165, expliquant les figures contenues en la page 164, il dit qu'il s'agit d'un denier en argent frappé à Pontoise, sous Louis VI ou Louis VII.

On voit très bien, dans la figure qui précède, les légendes et dessins existant sur cette monnaie; dans le champ du droit : LVDOVICVS RE (Re pour Rex Louis Roi). Au centre, deux barres (appelées pals en blason) supportent l'une un alpha, l'autre un ôméga; entre les deux pals, une sorte de V ou d'Y.

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Au revers: PONTISAR CASTI (pour Pontisaræ castri ou castelli - abrégé du château ou forteresse de Pontoise). Au centre, une croix dite Carlovingienne; à l'un des angles (ce qu'on appelle en termes de blason cantonné au 3e) un annelet ou bezan.

Mais hâtons-nous d'ajouter que le graveur qui a fait les planches de Le Blanc a singulièrement embelli notre monnaie. Les pièces de Louis le Gros sont beaucoup moins régulières et nettes que sur la figure ci-dessus. Quoique la légende en soit bien lisible, elles sont à peu près aussi grossières que celles de Philippe Ier. Cela n'a rien d'étonnant: on ne connaissait pas, à l'époque de leur confection, la presse monétaire, ni même le balancier. Le monétaire plaçait une petite rondelle de métal ou flan entre deux coins ou blocs d'acier, l'un appelé pile où était gravé le monogramme ou le nom de la ville, et qui était fixé dans un bloc de bois, et l'autre nommé

trousseau où était la croix, puis il frappait sur ce dernier à coups de

marteau.

Au surplus, voici la reproduction exacte d'un des deniers de Louis le Gros, qui sont dans notre collection particulière :

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Le nouveau glossaire de du Cange reproduit, no 23 de la planche V, à peu près la figure no IV, en expliquant que c'est un denier d'argent de Louis VI ou VII, fabriqué au palais du roi à Pontoise et portant ces légendes: LVDOVICVS REX au revers: PONTISI CIVIS. Cet ouvrage, rédigé en latin, appelle cette monnaie : « Moneta pontisiensis, » et c'est là sans doute ce qui a donné lieu à la singulière méprise de M. l'abbé Trou.

-

La « Revue de la Numismatique française, » dirigée par MM. Cartier et de la Saussaye, in-8°, dans son premier volume, 1836, rendant compte de la découverte faite auprès de Beaugency d'un dépôt de monnaies de Philippe Ier, Louis VI, Louis VII et Philippe-Auguste, explique qu'il s'y est trouvé une pièce de Louis VI différant un peu de celle décrite par Le Blanc, parce que la légende porte PONTISI CASRSI et parce que l'alpha et l'ôméga, au lieu d'être le premier à droite et le second à gauche, dans le champ, sont, au contraire, l'un à gauche et l'autre à droite.

On va voir que ce renversement est signalé aussi par plusieurs des auteurs que nous allons citer.

Le volume en contient une figure semblable, sauf ces détails, à celle n° IV.

Un ouvrage de Numismatique, dont l'autorité est universellement reconnue, le « Catalogue raisonné des Monnaies nationales de » France, Essai de Guillaume Conbrouse » (Paris, Fournier, 1839, 2 vol. in-4° avec atlas), à la page 53 du premier volume, s'exprime ainsi au sujet des monnaies de Louis-le-Gros et des variantes que présentent leurs légendes:

« Louis VI dit le Gros.

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Denier frappé à Pontoise. Titre élevé. » Sept coins variés. Cabinet du Roi. (1)

(1) C'est-à-dire que la collection de ce nom, qui existe à la Bibliothèque Nationale, contient sept spécimens, différents l'un de l'autre, de deniers de Louis le Gros.

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