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en jour moins sentir.

Quelques-unes de ces confraternités furent instituées par des bulles pontificales. Ces documents, ainsi que les majestés qui renferment les statuts, les priviléges, les délibérations, la liste des membres et des bienfaiteurs, pourraient fournir de précieux renseignements sur l'histoire de nos antiques confréries de charité. Albert TROCHON.

Lettre de M. Louis Duval.

MONSIEUR ET CHER CONFRÈRE,

En classant les papiers de la sénéchaussée criminelle de Guéret, déposés aux archives de la Creuse depuis quelques années, j'ai rencontré une pièce qui, sans avoir une grande importance, m'a paru assez curieuse. Il s'agit, d'ailleurs, d'un compatriote auquel ses malheurs et le reflet d'un nom illustre donnent peut-être quelque titre à l'attention des biographes normands. C'est ce qui m'engage à vous adresser une copie de ce document, que vous pourrez communiquer, si vous le jugez utile, à la Société des Antiquaires, dans sa pro

chaine réunion :

Procès-verbal de capture du sieur de Saint-Pierre Dutailli, ingénieur en chef des Etats-Unis de l'Amérique, exilé à l'Ile-Bouchard, en Touraine, 3 février 1788.

<< L'an mil sept cent quatre-vingt-huit, et le troisième

jour du mois de feuverier, nous soussigné Jean-Baptiste Lécuyer, brigadier de maréchaussée, et Challes Pasquet, cavalier à la résidence de Montluçon, lieutenant de Geuret, nous avons arrêté un voyageur à nous inconnue daprais l'avoir intérogé il nous ôrret dit se nommer De Saint-Pierre Dutailly, natif de la paroisse de NotreDame de la ville du Avre-de-Grâce, province de Normandie, et qu'il venet de lile Bouchard, provaince de la Touraine, ou il était exilée, dans la maison des Cordeliers, par ôrdre du roy, il nous a déclaré qu'il allet trouver Madame Daihmour (1) à Clermon an Auvergne, nayent poin de pasport, porteur dune ôrdre du roy, daté du 2 décembre 1785, signié du roy, et ossi porteur d'une lettre daté du 28 janvier 1785, signé le maréchal De Casdrill (2); porteur de plusieurs autres coppie de lettres, nayan que anvirons vingt-cainq sols argent nous le ôrrions constitué prisonnier esdit prisons de Montluçon, pour aitre traidui ansuite anselle de Geuret, raisons pour quoi nous avons fait notre prosei verbal que nous sertifions véritable le dit jour mois et an que desus. Signé: LÉCUYER et PASQUET.

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Déposé au Greffe de la Maréchaussée de Guéret, le cinq février 1788, à six heures du soir.

Signé: DAREAU.

Signalmans du dénommé sidesous :

« Agé denvirons 45 ans, taille denvirons 5 p. 4 pouces, les cheveux noir grisonné, sousil noir, les yeux brun, visage long, un peu ridée, manton pointu mainse de

(1) Hémecourt.

(2) Castries.

• Etat des efait trouvé dudit sidesous:

Deux rasoirs an nargent chacun,

Un per de sisaux,

Un coutaux à manche divoir blanc,

Deux chemises une garnie dune dantelle,

Trois mouchoirs de poche,

Deux colles,

Deux pairs de connesons,

Une pair de bas de sois,

Une ôrdre du roy,

Une lettre de monseigner le maréchal de Castrille,
Et plusieurs copie de autres lettres,

Une bonbonnière garnie.

Du 19 mars 1788, est parti pour être reconduit à l'île Bouchard. >>

Il résulte de ce document qu'un voyageur inconnu, se disant ingénieur en chef des Etats-Unis de l'Amérique, et nommé de Saint-Pierre Dutailly, fut arrêté, le 3 février 1788, par la brigade de la maréchaussée de Montluçon, et traduit successivement dans les prisons de cette ville et dans celles de Guéret. Je n'eus pas de peine à deviner qu'il s'agissait probablement de quelque membre de la famille de Bernardin de Saint-Pierre, et, en consultant la notice biographique donnée par Aimé Martin, en tête des œuvres de ce grand écrivain, je trouvai la justification de l'identité de personnage

avec un frère de Bernardin, portant en effet le nom de Dutailly.

Comme l'auteur des Études de la Nature, Dutailly eut une existence des plus aventureuses. Il prit part à la guerre d'Amérique et accepta une mission en Géorgie, où il se signala contre les Anglais, dit Aimé Martin, et reçut le titre d'ingénieur en chef. Accusé injustement de trahison, le malheureux Dutailly fut jeté dans un cachot, d'où il ne sortit que pour être conduit en France et enfermé à la Bastille. Bernardin de Saint-Pierre écrivit un mémoire en sa faveur, et, grâce à la protection de Franklin, réussit à obtenir sa mise en liberté. « Représenté comme un traître, il s'était vu enlever son état, sa fortune, son honneur, et l'espérance d'obtenir la main de celle qu'il aimait. Sa raison ne put résister à tant de pertes, et il ne sortit du cachot que pour tomber dans les accès d'une noire mélancolie; sa fureur n'enfantait que des projets sinistres ; il voulait retourner à Saint-Domingue, se venger et mourir. » Un accident épouvantable, dont le malheureux Dutailly fut la cause involontaire, acheva d'égarer sa raison... Bernardin de Saint-Pierre, quoique lui-même alors presque sans ressources, continue jusqu'à la fin à pourvoir à ses besoins, d'après Aimé Martin.

On voit, par le document ci-joint, que Dutailly avait été interné au couvent des Cordeliers, à l'Ile-Bouchard, et qu'ayant réussi à s'échapper, il fut ramené de Montluçon, d'où il espérait se rendre à Clermont, chez Mme d'Hémecourt, à Guéret, et de là reconduit à l'IleBouchard, après quelques semaines de détention.

Comme vous le voyez, ma découverte ne fournit qu'un détail de minime importance, relativement à un personnage qui lui-même n'a pas joué un rôle bien

rance de mes sentiments respectueux et dévoués.

Louis DUVAL.

Lettre de M. l'abbé Cochet.

Rouen, le 9 avril 1871.

MONSIEUR ET CHER SECRÉTAIRE,

Je dois vous avoir déjà écrit, il y a quelque temps, pour vous demander des nouvelles de notre chère Société; peut-être ma lettre ne vous est-elle pas parvenue, car je n'ai reçu aucune réponse et je vous sais scrupuleux et exact.

Je vous serai reconnaissant de vouloir bien plaider la cause du théâtre de St-André-sur-Cailly. La Société des Antiquaires de Normandie ne saurait abandonner un des monuments antiques de cette province, un monument auquel se sont intéressés MM. Auguste Le Prévost, Deville et Gaillard, les fondateurs de cette Compagnie.

En ce moment, les allocations gouvernementales et départementales nous font défaut. Nous voici comme en Angleterre, où le gouvernement ne se mêle de rien. Tout est laissé à l'initiative particulière. Dans ce grand pays, les associations opèrent des prodiges, et l'archéologie britannique est entièrement leur œuvre.

Avec des révolutions comme celles qui nous travaillent sans cesse, il semble que nous devions bientôt

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