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M. LE PRÉSIDENT annonce à la Société l'heureuse issue de ses démarches auprès du Conseil général, qui a bien voulu nous voter une allocation de 500 fr. La Société botanique de Lyon remercie vivement le Conseil de ce témoignage de sympathie.

Le Président annonce ensuite les pertes douloureuses que notre Société vient de faire dans les personnes de deux de ses membres, MM. Antonin Joannon et Berchoux fils (1).

M. Saint-Lager paye aussi un juste tribut de regrets à la mémoire de deux botanistes enlevés récemment à la science; le premier est M. de Schoenefeld, secrétaire-général de la Société botanique de France. La bienveillance extrême qu'il témoigna toujours envers notre association a contribué pour une grande part à l'établissement des bonnes relations qui existent entre les deux Sociétés; le second est M. Boreau, directeur du Jardin botanique d'Angers, bien connu de tous par ses travaux sur plusieurs espèces critiques et par sa Flore du centre de la France.

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Communications :

1° M. VIVIAN-MOREL donne lecture du compte-rendu suivant:

HERBORISATION A DÉCINES, par M. Vivian-Morel.

En dehors des excursions lointaines, les botanistes lyonnais n'ont plus de localités nouvelles à explorer; presque tous les environs de Lyon sont devenus classiques à la suite des nombreuses visites que leur ont rendu plusieurs générations de botanistes. Il ne faut donc pas songer à y faire de nombreuses découvertes, à moins de se livrer à l'étude des formes ou des espèces critiques.

Donc, plusieurs membres de notre Société se rendaient, au mois d'août dernier, pour la quatrième ou cinquième fois depuis deux ans, à Décines. Le chemin suivi est toujours le même; ce sont les balmes qui s'étendent depuis le cimetière de Villeurbanne jusqu'au tumulus, si connu par la présence remarquable d'une graminée méridionale, l'Andropogon Gryllus. Cet ancien rivage du Rhône sert de support, non à une florule particulière, mais à une végétation qui rappelle, par l'exiguité de ses

(1) Voyez l'article nécrologique consacré à ces regrettés confrères et publié, par anticipation, à la fin du fascicule no 2 de la 3me année de nos Annales.

dimensions, les plantes rabougries des hauts sommets des Alpes. C'est ainsi que j'ai récolté des Centaurea Jacea et paniculata bien fleuris, ayant 10 centimêtres de hauteur, des Campanula glomerata, de 5 centimètres, et plusieurs autres, évidemment naines, comparées aux mêmes espèces linnéennes qui croissent ailleurs. Avions-nous affaire à des formes particulières de ces espèces, ou bien simplement à un effet de la pauvreté du sol? La culture comparative nous l'apprendra plus tard.

:

Parmi les plantes récoltées en allant du cimetière au tumulus, je citerai Scilla autumnalis, Coronilla minima, Campanula rotundifolia (flore albo), Centaurea Jacea déjà cité, mais ici à fleur également blanche, Teucrium montanum, Trifolium montanum, Asperula Cynanchica et beaucoup d'autres, dont je ne veux pas grossir ce compte-rendu.

Dans une des séances précédentes, un de nos collègues nous avait montré plusieurs espèces démembrées du Thymus Serpyllum, dont j'avais suspecté l'authenticité, en remarquant que les espèces critiques créées au dépens du Thymus Serpyllum ont été trop insuffisamment décrites pour qu'on puisse les reconnaître au milieu des nombreuses formes qui restent à étudier. Je crois donc que ce qu'il y a de mieux pour le moment est de réunir ces différentes formes sous le nom de Serpyllum vulgare, et de récolter de nombreux matériaux qui serviront plus. tard à éclaircir cette question. On ne sait, en effet, si ces diverses formes de Serpolet sont fixes; peut-être sont-elles des hybrides ne se reproduisant pas, ou simplement des lusus naturæ que la culture réduit à néant. Nous avons donc cherché des Thymus Serpyllum sur les balmes que nous explorions, et, sans sortir d'un rayon très-restreint, quatre formes vivant ensemble ont été facilement distinguées même par les personnes peu habituées à ce genre d'observation.

Mais revenons à l'excursion. Au village de Décines, nous faisons une halte et nous nous dirigeons ensuite vers les marais. Sur les coteaux voisins, nous trouvons de nombreux échantillons d'une plante peu commune, le Scabiosa suaveolens, qui se distingue assez facilement du Scabiosa columbaria, avec lequel il a certains rapports. On le retrouve aux environs de Crémieu, dans la Drôme, à Romans, dans l'Ain, à Meximieux. La Flore de M. l'abbé Cariot ne cite pas cette dernière localité, d'où je l'ai reçu en beaux exemplaires d'un de nos collègues, M. Fiard.

Grenier, dans sa Flore jurassique, dit que c'est probablement par erreur que certains auteurs signalent cette espèce dans le Jura. Il croit que cette plante est silicicole; cependant la localité de Crémieu n'est-elle pas calcaire? Nous récoltons aussi de superbes touffes de Carlina acaulis, probablement nommée ainsi parce que ses tiges ont de la peine à entrer dans les feuilles d'un herbier mesurant 40 centimètres. Les écailles de son involucre ont la propriété curieuse d'être hygrométriques.

Une colonie abondante d'Hirschfeldia adpressa vit au pied du talus. Nous pénétrions dans les marais quand la pluie nous surprend et nous force de terminer l'excursion avant d'avoir pu récolter le Gentiana pneumonanthe.

A la suite de cette communication, M. Sargnon dit à propos des Gentianes, qu'il a observé, le 21 octobre dernier, dans la forêt de Saint-Hugon, près d'Allevard, et à une altitude de 800 à 900, des pieds de Gentiana asclepiadea présentant encore des fleurs. Cette floraison tardive pourrait expliquer pourquoi MM. Saint-Lager et Perroud n'ont pas rencontré cette espèce dans leur dernière excursion au Mont-Cenis.

M. CUSIN dit avoir récolté le Gentiana asclepiadea à la Pra de Belledonne le 16 juillet de cette année. M. Saint-Lager l'a trouvé dans la vallée de Saas le 15 août dernier.

M. VIVIAN-MOREL qui a rencontré il y a quinze jours à peine, à Couzon, des Gentiana ciliata en pleine floraison, demande comment ces plantes annuelles peuvent mûrir leurs graines.

M. SAINT-LAGER ajoute quelques mots sur les particularités que présentent les Gentianes dans leur distribution géographique. En parcourant le Valais et la Savoie, ainsi que vient de le faire notre honorable président, on peut observer que les terrains calcaires présentent une abondance considérable de Gentiana lutea. Passe-t-on sur les terrains siliceux, alors apparaissent les Gentiana purpurea et punctata, à l'exclusion de la Gentiane jaune.

2o LE PRÉSIDENT annonce que la famille de M. Joannon offre à la Société les collections botaniques laissées par notre regretté collègue.

Ce don est accepté par la Société, qui, sur la proposition de M. Debat, vote des remercîments aux donateurs et à notre confrère M. Piaton, qui a bien voulu s'occuper de cette affaire.

3o M. DEBAT donne de nouvelles explications sur une Mousse nouvelle, le Leptobryum dioicum, trouvée près de Zermatt, en Valais, par M. Saint-Lager. (Voy. Ann. de la Soc. bot. de Lyon, t. III, p. 114.)

4° M. SAINT-LAGER présente, de la part de M. SCHMITT deux produits que notre collègue a rapportés du Sénégal. Ce sont les tiges et les feuilles d'une Strychnée probablement Icaja?, employée sous le nom de M'boundou comme poison d'épreuve par les Pakouins du Gabon. C'est un tétanique puissant que ces indigènes emploient sous forme de décoction faite avec la racine préalablement râpée.

En second lieu, un gros fruit, anguleux, appartenant aussi probablement à une Strychnée (Thevetia ou Cerbera-Ahouai?), nommée Pemba-Rauké par les Pakouins. C'est un poison qui agit très-énergiquement sur le larynx. L'exemplaire communiqué par M. Schmitt étant porteur d'un bourgeon en voie de développement, le fruit est remis à M. Cusin, qui veut bien se charger d'en essayer la culture.

5° M. DEBAT donne lecture des analyses suivantes :

FLORE BRYOLOGIQUE DE BELGIQUE, par M. Gravet (Bull. de la Soc. roy. de Botanique de Belgique;. XIII no 3).

La première partie de ce travail, celle relative aux Mousses pleurocarpes, est seule publiée. Elle comprend la description de 118 espèces, nombre à peine différent de celui que nous avons indiqué pour notre région et qui s'élève à 130. il sera facile d'ailleurs de s'expliquer cette légère variation en remarquant l'absence complète en Belgique des Fabroniacées et de quelques autres espèces appartenant, comme ces dernières, aux contrées méridionales. L'auteur débute par une distribution, suivant les genres, des espèces pleurocarpes. Comme division fondamentale, il sépare les Mousses à feuilles papilleuses de celles à feuilles lisses. Cette distinction pèche, comme M. Gravet le reconnaît lui-même, en ce que certaines espèces placées dans la catégorie des Lamprophyllacei (à feuilles lisses), offrent cependant des papilles souvent assez nombreuses. Un autre inconvénient de la subdivision adoptée par l'auteur nous semble résulter de cette considération que les Thuidiacées et les Hypnacées se trouvent placées aux deux extrémités de la section des pleurocarpes et séparées par toutes les autres subdivisions, alors cependant qu'un examen attentif de leurs divers caractères les place immédiatement à la suite les unes des autres.

La sous-section des espèces à feuilles lisses est subdivisée par M. Gravet d'après les caractères suivants: capsule droite et symétrique ou incurvée; feuilles tristiques, distiques ou étalées en tous sens; capsule immergée ou longuement pédicellée; opercule à bec rostellé ou à bec court et conique. L'auteur arrive ainsi, non pas à distinguer les genres les uns des autres,

mais à grouper un certain nombre de genres sous une rubrique commune. Il eût été sans doute à désirer que M. Gravet eût poussé plus loin la distinetion des caractères génériques et fût arrivé à la détermination précise du genre. A l'imitation de plusieurs bryologues modernes, M. Gravet confond dans le genre unique Eurynchium les espèces que Schimper y a placées et celles du genre Rhynchostegium (même auteur): il y ajoute en outre celles du genre Scleropodium. Pour des raisons analogues, l'auteur réunit les Limnobium et les Hypnum. Nous ne reviendrons pas sur ce que nous avons dit, en d'autres circonstances, sur ces réductions de genres qui nous paraissent peu justifiées, surtout en ce qui concerne les trois premiers.

Ce qui précède fait suffisamment eonnaître la marche adoptée par M. Gravet dans sa distribution des Mousses pleurocarpes. Si nous avons eru devoir exprimer sur ce point quelques critiques, il est juste de dire que les descriptions qui accompagnent le nom de chaque espèce sont bien faites et donnent une notion suffisamment complète de la plante. Nous signalerons toutefois une lacune importante: l'auteur a omis tout détail sur la plante mâle ou sur le mode d'inflorescence des fleurs mâles.

La distribution géographique des Mousses pleurocarpes est la même pour la Belgique que pour nos environs. Aussi nous bornerons-nous à signaler parmi les espèces communes dans notre circonscription celles que M. Gravet indique comme rares, ou du moins comme offrant rarement des fruits. Ce sont :

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Les Mousses indiquées par l'auteur sont nouvelles pour la Flore belge et un assez grand nombre n'ont été signalées jusqu'à ce jour que dans de rares localités. Exceptons toutefois le Trichostomum tophaceum et le Bryum murale assez communs dans nos environs, les Trichostomum crispulum, Bryum Donnianum que l'on rencontre assez souvent dans la région méditerranéenne.

A la suite de cette lecture, diverses observations sont faites par MM. Cusin, Debat, Saint-Lager qui insistent sur l'uniformité de la Flore belge aussi bien en cryptogames qu'en phanérogames.

La séance est levée.

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