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excite un enthousiasme général; chacun s'endort sur cette bonne pensée. Mais le lendemain, nous dûmes changer d'avis; des nuages menaçants couvraient le sommet des montagnes, et nous ne pouvions plus compter sur le temps.

Nous n'avons donc pu réaliser le projet qui, de prime-abord, nous avait tous séduits; mais l'idée, du moins, n'en a pas été stérile, puisqu'elle a été le point de départ du programme que la Société botanique de France accomplira cette année dans les plus heureuses conditions (nous en avons l'espoir) d'agrément et de succès.

Il était plus de sept heures lorsque, après le déjeûner, nous quittàmes l'hôtel Rolland pour prendre la route de Mazières. L'herborisation commence aussitôt. On rencontre dans les fossés humides :

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Sur le bord de la route, avant d'arriver au golet de Mazières, en face de la cascade et de la grotte de Mandrin, plusieurs touffes d'une magnifique rose montagnarde, Rosa rubrifolia Vill.

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Dans les bois et les prairies, au-dessus du golet de Mazières :

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Dans un petit marécage situé au-dessous de la chapelle de

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En quittant le bois de Mazières on monte à la grange du Vély, en suivant un charmant vallon arrosé par le ruisseau des Taillis. Notre petite troupe s'arrête à chaque pas, ici, pour cueillir une touffe énorme de Chorophyllum cicutaria Vill., là, pour admirer les grappes roses du Lilium Martagon L., qui nous surprennent par une taille et un éclat inaccoutumés, plus loin, pour saluer les premiers pieds de l'Heracleum alpinum L. (H. pyrenaicum Lamk. part.), que nous retrouverons dans un

(1) On a indiqué l'Eryngium alpinum L. dans le voisinage de la Chapelle de Mazières. Toutes les recherches récentes entreprises dans le but de le retrouver ont été infructueuses, et il y a lieu de douter que cette belle plante, qu'on a signalée, il est vrai, sur plusieurs points de la chaîne jurassique, mais qu'on ne connaît aujourd'hui avec certitude qu'au Colombier de Gex, ait jamais existé dans le Bugey.

instant au golet de la Rochette en plus grand nombre et dans des conditions meilleures pour la récolte.

Arrivés à la Grange (1,004 mètres), nous nous répandons dans la prairie. La récolte est abondante :

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A l'extrémité de la prairie, nous atteignons le Golet de la Rochette, qui s'ouvre sur le « riant pays de Valromey ». Le spectacle est admirable. De notre observatoire (1,119 mètres), la vue embrasse un immense panorama, qui n'a d'autres limites que la blanche ceinture des Alpes; mais ce n'est pas sans quelques regrets que nous considérons si près de nous la belle forêt d'Arvières et la chaîne du Colombier que, le matin même, nous avions formé le projet d'explorer.

L'Heracleum alpinum L. croît en très-grande abondance dans les bois du Golet de la Rochette en compagnie des Dentaria pinnata L., Cardamine silvatica Link., Polystichum filixmas Roth.

(1) De même qu'en 1872, nous n'avons pas réussi à découvrir l'Herminium clandestinum Gr. Godr. que M. Cariot indique à la grange du Vély. Quant au Thlaspi Gaudinianum, M. Saint-Lager me dit que cette plante, l'une des plus caractéristiques des hautes prairies de la région jurassique, se trouve en grande abondance, ainsi que l'Orchis viridis, O. sambucina, Heracleum alpinum, au sommet de la prairie qui entoure la grange de Mazières. Elle est aussi très-commune dans les prés qui s'étendent de la forêt d'Arvières aux granges du Colombier.

Plus loin, au Marais, nous retrouvons la Flore spéciale des

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C'est en vain que nous cherchons longtemps sur les sphaignes le Drosera rotundifolia L. que la Société a récolté au même endroit pendant l'herborisation dirigée en 1872 par M. Cusin (1).

En redescendant par le Golet de l'Orme, dans les prairies, les bruyères et les bois de sapins (Abies pectinata D. C.), on rencontre successivement :

Abies pectinata D. C.

Orchis bifolia L.

Epipactis ovata All.

Narcissus poeticus L.

Lilium martagon L.
Veratrum album L.

Trifolium ochroleucum L.

Rosa repens Scop.

Monotropa hypopitys L. v. glabra.
Epipactis nidus avis All.
Colchicum autumnale L.

Pulmonaria tuberosa Schrk.

Egopodium podagraria L.

Genista tinctoria L.

sagittalis L.

Gentiana lutea L.

Cependant la pluie, qui nous avait épargnés depuis la veille, commence à tomber et disperse la phalange des botanistes. Heureusement, le village n'était pas loin, et nous pûmes gagner l'hôtel Rolland sans avoir été trop maltraités par l'orage.

Nous nous étions bien promis de consacrer la soirée à visiter les marais de Cormaranche, mais le temps ne le permit pas. La pluie nous poursuivit jusqu'à Lyon, et si le retour ne fut pas triste c'est que nous étions encore sous le charme de notre délicieuse promenade au Vély.

(1) M. Saint-Lager m'apprend que notre zélé collègue M. Grenier a trouvé, le 4 juin 1876, dans les prés marécageux du Vély, le Pinguicula grandiflora Lam. que l'auteur de la Flore lyonnaise indique, dans le département de l'Ain, seulement à Retord, Colliard, Lélex On sait, d'ailleurs, que cette jolie espèce est assez répandue sur toute la crête du Jura, depuis la Faucille jusqu'à l'extrémité du Reculet, au Colombier de Gex et au crêt de Chalam.

NOTICE

SUR LA

VÉGÉTATION DE LA FORÊT D'ARVIÈRES

ET DU

COLOMBIER DU BUGEY

PAR LE

Dr SAINT-LAGER

Le Colombier du Bugey (1) est une chaîne montagneuse longue d'environ 38 kilomètres qui,commençant au village de Culoz, se dirige du sud au nord jusque près des villages de Saint-Germain-de-Joux et de Châtillon-de-Michaille, en-deçà desquels la chaîne est interrompue par une large cassure qui se prolonge, d'un côté vers Bellegarde, et de l'autre vers Nantua.

Si on fait abstraction de cette cassure, on voit que le Colombier est le prolongement de la seconde chaîne du Jura, qui, depuis le Mont-d'Or (1,465), s'étend par le Landoz, les Rousses, Prémanon, Septmoncel, Bellecombe jusqu'au Crêt de Chalam (1,548), point culminant de la chaîne, et enfin jusqu'au Colombier du Bugey (1,534TM).

La première chaîne du Jura, parallèle à la seconde, est séparée de celle-ci par les vallées de Joux, des Rousses, des Dappes et vers le sud par celle de la Valserine; elle s'étend depuis le Mont-Tendre jusqu'au Sorgiaz, situé au-dessus du fort de

(1) Il importe de ne pas confondre le Colombier du Bugey avec le Colombier de Gex, situé dans la première chaîne du Jura, entre le col de la Faucille et le Reculet.

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