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de Bourgogne et quatre blasons ès quatre coins. (On lit en marge :) Delivré par ordonnance de madite dame à son aulmosnier.

112. Ung aultre tableau de ecce homo, ung escripteau pendu au col et petitz anges en chiefs, tenant en une main ung fouet et verges et en l'aultre une canne, le fond rouge. (En marge :) Délivré aux prieurs et religieux du couvent de Broux, comme il appert cy-après folio vi** vii et les quatre ensuivants. (Voir noo 113, 114, 115 et 116. Ces cinq tableaux se retrouvent sur l'inventaire du mobilier de l'église de Brou, dressé en 1659.)

113. Ung aultre tableau de Nostre Seigneur, fait après le vif, et plusieurs lettres d'or à l'entour dudit tableau. Ledit tableau couvert de verre.

114. Ung aultre tableau de Nostre Dame de Pitié, à vj personnages, comprins Nostre-Seigneur.

115. Ung aultre tableau de Nostre Dame habillée de rouge, assise sur ung tabernacle de massonnerie, qu'il se clot à deux fulletz et ausquelx il y a escript une oraison en latin commencent: Virgo decus.

116. Ung aultre tableau figuré comme Nostre Seigneur aloit à la mort portant sa croix, les bors dorez.

117. Ung aultre petit tableau d'ung homme habillé de noir à nue teste. Le fond dudit tableau verd.

118. Ung aultre tableau d'ung personnaige de moien eaige, ayant une robbe noire à un collet fourée de martre et ung chapperon noir sur son espaule, à hault bonnet. Le fond dudit tableau de brunc verd.

119. Ung aultre tableau d'ung personnaige, comme marchant, à rond bonnet, ayant les mains l'une sur l'aultre. La robbe de pourpre, le fond dudit tableau verd.

120. Ung aultre petit double tableau, où il y a une jeusne fille, habillée à la mode d'Espaigne, ayant ung bonnet rouge sur sa teste, l'aultre cousté plain d'escripture.

121. Ung aultre tableau d'ung marchant ytalien, à rond bonnet, son habit de couleur de pourpre, le fondz verd, à grosse chevelure.

122. Ung aultre petit tableau de la portraiture de madame de Horne, ayant un carcant au col.

123. Ung aultre riche tableau de la portraiture de madame, fete en tappisserie après le vif.

124. Ung aultre tableau de Nostre Dame tenant Nostre Sei

gneur nuz devant elle, clouant à deux feuilletz, où il anges tenant l'ung une espée en sa main (1).

y a deux

125. Ung aultre tableau de Nostre Dame, ayant une couronne sur sa teste et ung petit enfant tenant une longuette patenostre de coral.

126. Ung aultre petit tableau de sainct Francoys au bout duquel il y a escript sancte Francise ora pro nobis.

127. Ung sainct Anthoine, à manteau bleu, ayant ung crucifis emprès de luy, tenant ses mains joinctes; sur toille.

128. Ung aultre tableau de Nostre Seigneur, en habit rouge, tenant un baston ou canne en sa main destre, à une couronne d'espine sur son chief.

129. La portraiture de Madame, fort exquise, fête de la main de feu maistre Jacques (de Barbaris).

130. Ung aultre tableau de une jeusne dame, accoustrée à la mode de Portugal, son habit rouge fouré de martre, tenant en sa main dextre ung rolet avec ung petit sainct Nicolas en hault, nommée la belle portugaloise (2).

:

131. Ung aultre tableau de deux petitz enffans, embrassant et baisant l'ung l'aultre sur l'arbette, fort bien fait.

132. Ung aultre tableau exquis de la portraiture d'ung ancien homme, a rond bonnet, son habit fouré de martre, le fond du tableau verd, ledit personnaige venant des mobz de Bruxelles.

133. Ung aultre tableau fort exquis qui se clot à deux feulletz, où il y a painctz un homme et une femme estantz desboutz, touchantz la main l'ung de l'aultre, fait de la main de Johannes, les armes et devise de feu don Dieghe esdits deux feulletz, nommé le personnaige Arnoult fin (3).

(1) On lit dans l'inventaire de 1516: « Ung petit tableaul d'ung Dieu de pityé estant es bras de Nostre Dame; ayant deux feulletz dans chascun desquelz y a ung ange et dessus lesdits feulletz y a une annunciade de blanc et de noir. Fait le tableaul de la main de Rogier (Van der Weyden) et lesditz feulletz de celle de maistre Hans (Hemling, son élève). »

(2) Cet article me paraît correspondre avec l'article suivant de l'inventaire de 1516: Ung moien tableau de la face d'une Portugaloise que Madame a eu de Don Diego. Fait de la main de Johannes (Van Eyck) et est fait sans huelle et sur toille sans couverte ne feullet. »

(3) Voici l'article de l'inventaire de 1516: « Ung grant tableau qu'on appelle Hernoul-le-Fin, avec sa femme dedens une chambre, qui fut donné à Madame par Don Diego, les armes duquel sont en la couverte dudit tableaul. Fait du painctre Johannes (Jean Van Eyck). »

(La suite au prochain numéro.)

LE JUBÉ DE NOTRE-DAME DE CHARTRES.

L'auteur de la Parthénie, Sébastian Roulliard (1), décrivant avec complaisance toutes les merveilles de Notre-Dame de Chartres, écrit : « Après le circuit faict, et venant à la porte du chœur, pour sortir de la nef, se trouvent deux escaliers, de pierre de taille, par lesquels on monte de costé et d'autre au poulpitre, lequel contient 11 toises de long et de large 2 toises 9 pouces, est artistement faict et basti en pierres de taille, de diverses histoires, fleurs et compartiments, soustenues de coulomnes de pierre d'une seule pièce, et si minces et si délicates que les meilleurs architectes de ce temps, à peine oseroient-ils promettre de pouvoir faire mieux. Aux deux bouts duquel poulpitre il y ha des armoires fermantes esquelles couchent deux marguilliers laïques pour servir à l'église et la garder comme leurs autres collègues. >>

Ce poulpitre dont parle Roulliard n'était autre que le Jubé. Des nombreuses églises de Chartres, Notre-Dame et Saint-André étaient les seules qui en eussent un (2).

A qui revenait l'honneur de cette décoration?

A s'en rapporter à Sablon (3), « ce fut Yves de Chartres qui fit construire ce bel ouvrage, il y a six cents ans, dit-il, sous le règne de Philippe Auguste. » Sablon écrivait en 1671.

Parlons d'abord de saint Yves. Il occupait le siége de Chartres en 1091; il contribua à la renommée des Écoles chartraines; l'église de Chartres n'était pas encore terminée (4), » qu'il songea à la décorer, à l'embellir. Mathilde, reine d'Angleterre, lui fit don de cloches qui furent les premières qui sonnèrent depuis l'incendie de 1020, arrivé sous l'épiscopat de Fulbert.

Saint Yves fit les frais d'un Jubé. « Barrière admirable placée par l'art chrétien entre le saint des saints et le peuple fidèle. »>

(1) Ou histoire de la très-auguste el très-dévote église de Chartres, éd. de 1609, p. 134, 1re partie.

(2) Thiers, Dissertation sur les Jubės, p. 67.

(3) Histoire de l'auguste et vénérable église de Chartres, éd. 1780, p. 20. (4) Biog. univ. de Michaud, v. St. Yves, p. 545.

Ce fait est attesté :

1° Par l'un des nécrologes de l'église de Chartres: <«< Pulpitum « miræ decoris construxit (1). »

2o Par l'épitaphe placée sur la tombe (2) de saint Yves dans l'abbaye de Saint-Jean à Chartres :

a Ære suo atque opera renovavit præsulis ædes

« Hoc duce fit Mariæ pulpitus ecclesiæ. »

3o Par les auteurs du Gallia Christiana (3) : « Decoratumque << (templum) ab Yvone qui ambonem (4) construxit. »

Qu'est devenu le Jubé de saint Yves?

Souchet (5) (d'après l'extrait qu'en donne Le Tunais) (6) ne fait pas de doute que ce Jubé existait encore de son temps, tel qu'on le voit à présent. Souchet écrivait de 1632 à 1654.

Contre cette opinion se produit le fait rapporté par Rigord (7), l'incendie de 1194! S'il est vrai que le feu ait tout abîmé, le Jubé de saint Yves aurait partagé le sort de l'église, conflagravit ! Robert d'Auxerre ajoute, ce qui est plus énergique, corruit!

Poursuivons en 1763 et non en 1761 (8), dans la nuit du 25 avril, le chapitre de Chartres a fait détruire le Jubé. Une lettre de M. de Fleury (9), lors évêque de Chartres, sanctionnait au besoin cette œuvre de dévastation et de vandalisme.

Évidemment, ce Jubé n'était pas celui de saint Yves. D'abord

(1) Manuscrits de la Bibl. de Chartres.

(2) Il mourut le 23 décembre 1115. L'église de Saint-Jean a été détruite en 1568 par les protestants.

(3) T. VIII, col. 1191.

(4) Le mot ambo vient de ce qu'il y avait deux escaliers pour y monter. (BouvetJourdan, p. 183.)

(5) Histoire de Chartres, manuscrit.

(6) P. 169.

(7) De gestis Philippi Augusti Francorum regis.

(8) Comme l'a écrit M. Schmit (Bull. archéol., t. III, p. 39).

(9) Voici la lettre :

Versailles, 21 avril 1763.

« Je suis persuadé, Monsieur, que le chapitre ne s'est déterminé à la délibération qu'il a prise au sujet de l'église qu'après un examen bien réfléchi et sur des raisons décisives; celles que vous me marquez de la part de la compagnie me paraissent telles. Aussi je crois pouvoir consentir aux démolition et suppression de cet ancien monument et le chapitre peut y mettre des ouvriers quand il le jugera à propos. « J'ai l'honneur, etc.

« P. A. B., évêque de Chartres. »

par la raison qué nous venons de donner, ensuite, d'après les fragments découverts tout naguère du Jubé détruit en 1763.

Le pavage, en avant de la grille principale du chœur de NotreDame, avait gravement souffert par la chute du plomb que l'on jeta par les trous de la voûte, après l'incendie de 1836. Lorsqu'on releva ce pavage, on découvrit au mois de novembre 1837 des basreliefs mutilés provenant bien certainement de l'ancien Jubé. Je m'empressai d'en instruire (1) M. le ministre de cultes, mais aucune suite ne fut donnée à ma réclamation; la mutilation de ces débris se fit ou se continua de plus belle, on les enfouit pour la seconde fois, un peu plus endommagés que la première! En 1848, M. Lassus, architecte du diocèse de Chartres, fut plus heureux que moi. Il obtint du gouvernement des fonds pour fouiller les approches du chœur. Ces fouilles commencées au mois d'octobre de 1849 amenèrent la découverte d'une masse de débris du Jubé de 1763 (2); on les a recueillis avec soin dans la crypte de l'église.

Ces débris offrent la preuve incontestable que le Jubé en 1763 n'était pas antérieur au XIII siècle (3). Au reste il devait être d'une grande richesse si l'on en juge par le fini des morceaux ou débris que l'on a retirés.

Ainsi tombe cette opinion fausse que le Jubé de 1763 était resté celui de saint Yves; erreur qu'ont répétée à l'envi les auteurs de notices sur Notre-Dame de Chartres, sans l'avoir vérifié (4). Mais le Jubé du XIIIe siècle en avait-il remplacé un autre? c'est ce que nous ignorons.

Aujourd'hui le doute n'est plus permis sur l'époque à laquelle appartiendrait le Jubé détruit en 1763. C'est ce que nous tenions à signaler.

Les annales chartraines citent deux faits mémorables qui nous rappellent l'existence de notre Jubé.

On connaît le meurtre du duc d'Orléans par les ordres du duc de Bourgogne. La réconciliation qui se fit entre celui-ci et les enfants du duc d'Orléans, de 1407 à 1408, eut lieu dans l'église de Chartres. Un échafaud ou théâtre d'ais (planches) fut dressé dans le Jubé. Le roi était assis auprès du crucifix.

(1) En notre double qualité de correspondant des Comités historiques et de Conservateur des monuments historiques d'Eure-et-Loir, titres gratuits bien entendu. (2) A Laon, le Jubé a été enfoui comme à Chartres.

(3) M. Schmit, semble attribuer ces fragments à une époque postérieure (Bull. archéol., t. III, p. 39). Les dernières découvertes le convaincraient de son erreur. (4) Entre autres Gilbert, Descript. de l'église de Chartres, p. 103.

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