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pour sa Carte armorique à l'époque romaine, et ses deux brochures intitulées: 1. des Voies romaines sortant de Carhaix, in-8°; 2. des Voies romaines sortant de Rennes, in-8°.

Lorsque l'on considère le nombre relativement si faible d'ouvrages archéologiques envoyés au concours, quand on voit avec quel peu d'empressement les écrivains traitent les questions relatives aux monuments anciens, malgré l'importance des prix proposés par l'Académie, on se demande si l'étude de l'antiquité doit être dans рец de temps abandonnée, idée affligeante que pourrait faire naître encore la disparition successive des collections particulières qui abondajent à Paris il y a quelques années. Alors que l'Académie dispose déjà des prix Gobert, il eût sans doute été à désirer qu'elle réservât, le plus possible, les médailles destinées aux écrits sur les antiquités de la France, pour les travaux archéologiques, en s'abstenant de mentionner dans les concours ces publications relatives à des sujets modernes ou exclusivement historiques qui doivent trouver ailleurs leur récompense. L'archéologie a d'autant plus besoin d'être protégée, actuellement, qu'elle devient une science plus difficile, Lorsque cette science en était encore à ses débuts, lorsqu'elle existait à l'état rudimentaire, elle était accessible à un plus grand nombre d'intelligences, et aussi, disons-le, à un plus grand nombre de courages. On assiste à la naissance d'une étude, on en suit les diverses phases, on prend part aux premières luttes qu'elle soulève, on est érudit presque insensiblement. Mais pour ceux qui viennent plus tard, quand déjà les travaux de leurs devanciers s'accumulent, la tâche est bien autrement laborieuse. Il faut d'abord découvrir tout ce qui a été écrit; puis le live, souvent sans guide, toujours sans le secours que fournit la critique du moment; puis retenir dans sa mémoire, sous peine de tomber dans le plagiat ou les redites inutiles, une masse accablante de travaux refroidis que recèlent, comme des caveaux funéraires, les collections académiques, les recueils spéciaux, des traités plus ou moins dogmatiques. Tout cela, on le conçoit, demande du travail et (nous n'osons pas dire que c'est aujourd'hui demander l'impossible) exige un genre d'efforts dont beaucoup de gens aiment à se dispenser. A l'époque où l'égyptologie se réduisait à peu près au déchiffrement des cartouches royaux, cette étude comptait de nombreux sectateurs; mais maintenant qu'il s'agit de l'analyse grammaticale des textes, de la reconstruction philologique d'une langue, quelques courageux érudits ont seuls osé poursuivre une entreprise si hérissée de difficultés. Les grandes découvertes de monuments an

tiques faites en Grèce, en Asie Mineure, en Étrurie, les beaux et savants travaux qu'elles firent éclore ayant rendu l'étude de l'antiquité presque inabordable pour les esprits d'une activité vulgaire, on inventa l'archéologie du moyen âge qui semblait pouvoir se soutenir sans le secours de l'instruction classique. Mais il fut bientôt évident que ceux-là qui prétendaient interpréter le moyen âge, sans avoir la connaissance de l'antiquité, n'y entendaient absolument rien; l'archéologie du moyen âge demande elle aussi de longues et fortes études. Quand la difficulté d'une science est constatée par quelque ouvrage d'une érudition profonde, on peut remarquer que le cercle des adhérents se rétrécit bientôt après. L'érudition est comme un aérostat qui monte en jetant son lest. C'est alors que les grandes autorités comme l'Académie doivent intervenir par une intelligente protection.

PRIX EXTRAORDINAIRES, fondés par M. le baron GOBERT, pour le travail le plus savant et le plus profond sur l'histoire de France et les études qui s'y rattachent.

L'Académie maintient le premier de ces prix à M. OZANAM, auteur des Études germaniques pour servir à l'histoire des Francs, ouvrage couronné en 1849; et accorde le deuxième à M. JAL, pour son Glossaire nautique.

RAPPEL DU PRIX PROPOSÉ POUR 1851. L'Académie rappelle qu'elle a proposé pour sujet du prix ordinaire à décerner en 1851, la question suivante: Quelles notions nouvelles ont apportées dans l'histoire de la sculpture chez les Grecs, depuis les temps les plus anciens jusqu'aux successeurs d'Alexandre, les monuments de tous genres, d'une date certaine ou appréciable, principalement ceux qui, depuis le commencement de ce siècle, ont été placés dans les musées de l' Europe? Le prix sera une médaille d'or de la valeur de deux mille francs.

NOUVEAU SUJET DE PRIX PROPOSÉ POUR 1852. L'Académie propose pour sujet du prix ordinaire à décerner en 1852, la question suivante: Comment et par qui se sont exécutés en France, sous le régime féodal, depuis le commencement de la troisième race jusqu'à la mort de Charles V, les grands travaux, tels que routes, ponts, digues, canaux, remparts, édifices civils et religieux? Le prix sera une médaille d'or de la valeur de deux mille francs.

PRIX EXTRAORDINAIRE D'ANTIQUITÉS. M. de Caumont, correspondant de l'Académie, a déposé au secrétariat une somme de cinq cents francs, pour être offerte à l'auteur du meilleur mémoire sur un point relatif aux antiquités nationales, et laissé au choix de l'Académie. En

conséquence, l'Académie avait mis la question suivante au concours, pour l'année 1850: Existe-t-il encore en France des monuments religieux construits au Xe siècle? Si ces monuments existent, à quel signe peut-on les distinguer de ceux du siècle suivant? Un seul mémoire étant parvenu au secrétariat de l'Institut, et n'ayant pas été jugé digne du prix, l'Académie a prorogé ce concours à l'année 1851, et en a rédigé le programme dans les termes suivants : Signaler et décrire les monuments ou parties de monuments bátis au Xe siècle et existant encore en France; Indiquer les caractères qui peuvent les distinguer des édifices du siècle suivant, en tenant compte des styles d'architecture propres à nos diverses provinces. L'Académie n'exige pas des concurrents une liste complète des monuments du Xe siècle. Une description exacte de quelques monuments, ou même d'un seul, sera considérée comme suffisante, si elle peut conduire à des indications générales.

Après le rapport sur les antiquités nationales, le public a entendu une Notice historique sur la vie et les ouvrages de M. Letronne, par le secrétaire perpétuel. C'est une lourde tâche que d'avoir à faire connaître, et bien connaître un homme si considérable par le nombre et surtout par la force de ses travaux. Pour bien apprécier M. Letronne il faut avoir senti par soi-même de quel secours est son infatigable critique pour la solution des mille petites difficultés qui embarrassent les sentiers de l'érudition; il faut avoir vu tout à coup les questions les plus obscures s'éclairer sous les rayons de sa lumineuse intelligence. M. Walckenaer qui a vécu dans l'intimité de M. Letronne a très-souvent rencontré juste lorsqu'il a dépeint l'homme et l'académicien; mais étranger, par le genre de ses études, aux préoccupations de son illustre confrère, il ne pouvait, on le comprend facilement, approfondir la nature des services qu'il a rendus à la philologie. Aussi a-t-il passé sous silence ou mentionné sommairement des travaux qui resteront comme des modèles. Parmi les différentes luttes scientifiques que soutint M. Letronne et dont il sortit toujours vainqueur, M. Walckenaer n'a raconté que celle qui avait pour objet l'histoire de la monnaie chez les anciens; mais il était évident pour les auditeurs que M. le marquis Garnier, mort depuis bien des années, n'était là qu'un mythe, le symbole d'une armée tout entière, comme le prétorien qui sur les médailles d'allocution, écoute la harangue impériale, ou comme cette colonne dorique qui sur les vases peints indique à elle seule l'intérieur d'un édifice. Au reste cette courtoise synecdoque a permis à M. Walckenaer de retracer avec chaleur et infiniment d'esprit un de ces combats scientifiques auxquels M. Le

tronne ne prenait part qu'après avoir donné verbalement des avertissements dont la valeur n'était pas comprise. On a dit si souvent de M. Letronne qu'il recherchait la discussión, que nous tenons à bien établir que c'est toujours l'opiniâtreté de ses adversaires qui le forçait à rendre publics des arguments plusieurs fois présentés de vive voix avec une franchise dont on ne lui tenait aucun compte. La vérité lui apparaissait dans tout son éclat; devait-il la taire? C'est la postérité qui se chargera de la réponse.

M. le secrétaire perpétuel a fait entendre de justes regrets au sujet de cette publication des papyrus grecs que M. Letronne n'a pu achever. Sans aucun doute nous sommes privés à tout jamais des commentaires dont notre illustre helléniste eût enrichi un pareil recueil; mais du moins il laisse la transcription et la restitution de ces textes précieux classés dans un ordre méthodique, et ce travail peut être, dès à présent, livré au public. Depuis que l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres a perdu son grand critique, des événements étrangers à l'érudition ont arrêté le mouvement habituel de la science; les questions ardues ont été un peu laissées de côté et les théories erronées ont rarement eu l'occasion de se faire jour. Cependant il n'en sera pas toujours ainsi et c'est alors que les amis de la vérité, de la logique sentiront l'énormité de la perte que nous avons éprouvée. Faisons des vœux pour que dans quelque Lemnos inconnue, il se trouve un Philoctète qui conserve pieusement les flèches d'Hercule, et se sente le courage de les manier dans l'occasion.

Après M. le secrétaire perpétuel, M. F. Ravaisson a occupé la tribune. Le Mémoire sur la morale des stoïciens qu'il a lu est un exposé très-détaillé de l'opinion de ces sectaires touchant Dieu et l'humanité. L'auteur a même fait entrer dans son travail, comme sujet de comparaison, l'analyse de la doctrine épicurienne. La partie de ce mémoire qui se rattache le plus directement aux études historiques est le parallèle de la philosophie stoïcienne et du dogme chrétien. M. Ravaisson a démontré combien les idées que les disciples de l'Évangile ont conçu de l'homme et de son créateur sont éloignées de l'orgueilleux système des anciens philosophes.

ÉCOLE FRANÇAISE D'ATHÈNES. L'Académie annonce que les sujets d'explorations et de recherches proposées par elle pour la seconde et la troisième année d'études des membres de l'École française d'Athènes, en exécution du décret du 17 août 1850, sont les sui

vants :

1° Visiter l'île de Patmos, principalement pour faire des recher

ches dans la bibliothèque du monastère, et pour y dresser le catalogue, avec la description exacte et complète, accompagnée d'extraits des manuscrits qui s'y trouvent.

2o Faire une étude et une description complètes et approfondies de l'acropole d'Athènes, d'après l'état actuel et les travaux récents, comparés aux données des auteurs anciens.

3o Explorer l'île d'Eubée et la décrire exactement, en comparant l'état actuel avec l'état ancien aux diverses époques; en étudier et en exposer les traditions et l'histoire.

4° Étudier et éclaircir, par l'étude des lieux et par l'examen des traditions et documents divers de l'antiquité, le mythe de Trophonius, les cultes et les rites auxquels il pouvait se rattacher.

- Par suite de la translation des prisonniers dans les bâtiments de la nouvelle prison cellulaire au faubourg Saint-Antoine, on s'occupe en ce moment de la démolition de l'ancienne prison de la Force dont les dépendances ont servi jadis de résidence à d'illustres personnages.. Le premier possesseur de cette maison dont l'histoire fait mention, est Charles, roi de Naples et de Sicile, frère de saint Louis, qui l'habitait en 1265; en 1292, Charles de Valois, fils de Philippe le Hardi, en fit l'acquisition; elle fut cédée en 1329 au roi Charles VI; les rois de Navarre, le comte de Tancarville en furent depuis propriétaires ; le cardinal de Meudon la fit rebâtir en 1559, mais les travaux furent achevés par le cardinal de Birague, qui en devint propriétaire. En 1583 le maréchal de Roquelaure en fit l'acquisition; ayant été vendue au comte de Saint-Paul, elle porta le nom d'Hôtel Saint-Paul; M. de la Force s'en étant rendu propriétaire, lui donna son nom. Au commencement du XVIIIe siècle, elle fut divisée en deux parties: l'une sous le nom d'Hôtel de Brienne, qui fut depuis la Petite Force, ruc Pavée, et l'autre la Grande Force, rue du Roi de Sicile; celle-ci fut acquise en 1715, par MM. Pâris de Montmartel et Du Vernai, qui y firent des embellissements et la revendirent en 1731 à mademoiselle Toupel, de qui le comte d'Argenson l'acheta en 1754, pour y établir l'École Militaire. Vers la fin du règne de Louis XVI, tous ces bâtiments furent transformés en maison de détention pour délits civils (1). Ces deux prisons ont été le théâtre d'horribles massacres dans les journées des 2 et 3 septembre 1792, et notamment de celui de la princesse de Lamballe.

(1) Cette note est extraite du Dictionnaire historique des rues et des monuments de Paris, 1 vol. in-8°. Leleux, édit.

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