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grands feudataires; en effet la phrase dont il s'agit permet l'équivoque; mais cette ordonnance, bien que provoquée par le roi, ne fut cependant pas signée de lui; aussi dans le recueil des Ordonnances des rois de France, mentionne-t-on d'une manière positive que la prétendue ordonnance signée par le roi, à Lagny-sur-Marne, vers Noël 1315, est de pure invention. Une preuve suffira pour ne plus croire à l'existence de l'ordonnance royale de Lagny : en effet, dans un manuscrit de la Bibliothèque nationale, connu sous le nom de registre de Lothier (8), nous trouvons le compte rendu abrégé de ce qui fut arrêté entre le roi et les généraux des monnaies, sur les monnaies baronnales « Le XXVIII jour de novembre l'an mil trois cent XV, « le dict sieur roy (Louis X) soy voullant reformer les monnoyes....... « manda.... les generaulx des monnoies...... et l'avalluation des « monnoies des prélatz, ducz, comtes, barons, s et dames aiant « droict de forger monnoye au royaume de France, fut faicte au mois « de décembre l'an mil III XV. » On voit par ce passage que le roi manda les maîtres des monnaies et qu'on arrêta dans le conseil les mesures à prendre pour fixer, à un taux déterminé, la monnaie des barons. Voilà pour le premier point; maintenant passons à l'ordonnance en elle-même et voyons quels en furent les auteurs; nous trouvons la solution de cette question au commencement même du registre entre deux aiz, c'est-à-dire en tête de l'ordonnance de 1315; il n'y est point fait mention du conseil tenu par le roi, on constate seulement que l'ordonnance émane des maîtres des monnaies : « Ce sont « les monnoies des barons et des prelas....... fait et ordéné par Jehan « le Paumier, Nicolas des Moulins et Jehan de Nuesport, maistres des « monnoies notre sire le roy, etc. » Ici plus de doutes, l'ordonnance de 1315 n'est point un décret royal, mais bien un règlement sur les monnaies dont la rédaction fut confiée par le roi aux maîtres des

monnaies.

Les registres entre deux aiz de la cour des monnaies et de Lothier ne sont pas les seuls qui renferment l'ordonnance de 1315; il en existe

(8) Le registre de Lothier (Biblioth. nat., fonds Dupuy, no 353, fo), m'a été communiqué par mon savant professeur, M. Léon Lacabane; je saisis l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui, pour le remercier des précieuses leçons qu'il m'a données et des renseignements bienveillants qu'il m'a fournis. Le registre de Lothier, disons-le en passant, contient : 1o« L'avaluation des monnoyes d'or et d'argent étrangères selon le poix et essay qui ont été faictz par Jehan l'Huilier, s' de Boulancourt, » etc. et 2° L'évaluation des monnaies des barons et prélats, faite en 1315, etc.

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d'autres encore qu'a cités le père Lelong (9). Le premier des deux manuscrits rapportés dans l'ouvrage du savant abbé, est intitulé: « Les cours, loys, poids et coings des monnoies des barons et prélats de « France qui avoient pouvoir anciennement de faire battre monnoie dans « le royaume (10). » Le second commence ainsi : « Registre conte« nant quels princes, barons et prélats se disent avoir droict de faire « battre monnoie, de quel poid et loy elles doivent estre avec leurs « empreintes..., etc. (11). » Ces deux derniers manuscrits ainsi que le registre de Lothier ne sont que des copies mutilées du registre entre deux aiz; aussi avons-nous cru utile de donner aux lecteurs de la Revue, une édition d'après le registre des archives nationales (12), qui renferme l'ordonnance complète telle que les officiers des monnaies l'arrêtèrent, sur l'ordre du roi.

Voici le texte de cette pièce :

CE SONT LES MONNOIES DES BARONS ET DES PRELAS

Du royaume de France qui se dient avoir droit de faire monnoie telle comme il la doivent faire de pois de loy et de coing qu'il ont faites anciennement. Fait et ordené par Jehan le Paumier, Nicolas des Moulins et Jehan de Nuesport, maistres des monnoies nostre sire le roy, l'an de grace mille cccxv environ Noel, et fu ceste copie bailliee par maistre Regnaut clerc des monnoies, lundi xvII jours de may lan mil CCCXVI.

Premièrement. La monnoie le conte de Neuers. Les deniers doivent estre a iijd. xvj grains de loy argent le roy est de xix s. vj d. de pois au marc de Paris. Item, les maailes de la dicte monnoie doivent estre a iij d. de loy et de xvj s. ix d. oboles doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le disième des maailes, c'est à dire ixo 1. de deniers et c. 1. de maailes doubles et aussi vaudront les deniers et les maailles dessus dictes aualue lun parmi l'autre a petiz tournois et a maailles tournois xx. d. mains la liure que petiz tournois, c'est assauoir que les xiij d. de la monnoie dessus dicte ne vaudront que xij petiz tournois.

Et doit faire le conte de Neuers le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pille telle.

(9) Bibl. Hist. de France, liv. III, 56, n° 14433 et 14434.

(10) Ce manuscrit appartenait autrefois au colonel baron d'Hoendorf.

(11) Manuscrit appart. jadis à d'Aguesseau.

(12) C'est M. Douët d'Arcq, achiviste-paléographe, qui m'a signalé l'existence dans un registre des archives, de l'ordonnance de 1315, aussi je profite de celle occasion pour lui en témoigner toute ma reconnaissance.

Item, la monnoie le duc de Bretaigne. Les deniers doivent estre à iij d. xvj grains de loy argent le roy et de xix s. vj d. de pois au marc de Paris. Item, les maailes de la dicte monnoie doivent estre a iij d. de loy argent le roy et de xvj s. ix d. oboles doubles au marc de Paris et ne porront faire que le disieme de maailes, c'est à dire ix 1. de deniers et c. I. de oboles doubles et aussi vaudront les deniers et les aboles (sic) dessus dictes avalue lun parmi lautre a petiz t. et a obole t. xx d. maiz la livre que petiz t. Cest assavoir que les xiij d. de la monnoie dessus dicte ne vaudront que xij petiz t.

Et doit faire le duc de Bretagne le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pille telle. (Voy. pl. 136, no 1.)

Item, la monnoie de Sauvigny qui est monseigneur Loys de Clermont et au prieur de Savigny, les deniers doivent estre a iij d. xvj grains de loy argent le roy et de xix s. vj d. de pois au marc de Paris. Item, les maailes de la dicte monnoie doivent estre a iij d. loy argent le roy et de xvj s. ix d. maailes doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le disieme de maailes, c'est à dire ix livres de deniers, et c livres de mailes doubles et aussi vaudront les deniers et les mailles dessus dictes avalué lun parmi lautre a petit t. et a obole t. xx d. mains la livre que petiz t. Cest assavoir que les xij d. de la monnoie dessus dicte ne vaudront que xij petiz t.

Et doit faire mons. Loys de Clermont et le prieur de Sauvigny le coing de leur monnoie devers croiz et devers pille telle.

Item, la monnoie au conte de la Marche, les deniers doivent estre a iij d. vj grainz de loy argent le roy, et de xx s. de pois au marc de Paris, et les maailes de la dicte monnoie doivent estre a ij d. xvj grainz de loy argent le roy et de xvij s. ij d. oboles doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le disieme partie de maailes, c'est à dire ix livres de deniers et c livres de maailes doubles, et ainsi vaudront les deniers et les maailes dessus dictes avalué lun parmi lautre a petiz tournoiz et a maailes tournoiz v s. mains la livre. Cest assavoir que les xv d. ne vaudront que xij petiz tournois.

Et doit faire le conte de la Marche le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pille telle.

Item, la monnoie messire André de Sauvegny, viconte de Bursse, les deniers doivent estre a iij d. vj grains de loy argent le roy et de xx s. de pois au marc de Paris et les maailles de la dicte monnoie doivent estre a ij d. xvj grains de loy argent le roy, et de xvij s. ij d. de maailes doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le disieme

partie de maailes, c'est à dire ix 1. de deniers et c. I. de maailles doubles et ainssi vaudront les deniers et les mailles dessus dictes avalué lun parmi lautre a petiz tournoiz et a maailles tournoiz v s. mains la livre que petiz t. Cest assavoir que les xv d. ne vaudront que xij petiz t.

Et doit faire le viconte de Bursse le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pille telle.

Item, la monnoie monsigneur Pierre de Brisse, sire de Hiret et de Sainte-Sevère, les deniers doivent estre à iij d. vj grains de loy argent le roy et de xx s. de pois au marc de Paris, et les mailles de la dicte monnoie doivent estre a ij d. xvj grains de loy argent le roy, et de xvij s. ij d. ob. doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le disieme partie de maailes, c'est à dire ixo 1. de deniers et c. I. de mailles doubles, et ainssi vaudront les deniers et les maailles dessus dictes avalué lun parmi lautre a petiz tournois et à maailles tournois v s. mains la livre. Cest assavoir que les xv d. ne vaudront que xij petiz t.

Et doit faire le seigneur de Hyret et de Se Sevère le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pile tele.

Item, la monoie de l'archevesque de Rains, les deniers doivent estre a iiijd. xij grains de loy argent le roy et de xvij s. viij d. pois au marc de Paris, et les maailes de la dicte monoie doivent estre a ij d. xviij grains de loy argent le roy, et de xv s. v d. ob. doubles de pois au marc de Paris, et ne porra faire que le disieme partie de maailes doubles, et ainssi vaudront les deniers et les mailes dessus dictes, autant plus ne mains comme les parisis petiz et les maailes parisies.

Et doit faire l'archevesque de Rains le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pile telle. (Pl. 136, no 2.)

Item, la monnoie au conte de Soissons que on appelle noires doivent estre a iij d. xij grainz de loy argent le roy et de xxiij s. de pois au marc de Paris, et vaudront le deniers dessus diz avaluez a parisis petiz et a maailes parisies les xx noires xij parisis petiz.

Et doit faire le conte de Soissons le coing de sa mounoie deviers croiz et deviers pille telle. (Pl. 136, no 3.)

(Ici une lacune dans le ms.)

Et doit faire le conte de Saint Pol le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pille tele.

Item, la monnoic ma dame de Chastiau Villain mere au seigneur

de Sully, les deniers doivent estre à iij d. vj grains de loy argent le roy et de xx s. de pois au marc de Paris et les maailes de la dicte monnoie doivent estre à ij. d. xvj. grains de loy argent le roy, et de xvij s. ij d. mailes doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le disieme de maailes, c'est à dire ix 1. de deniers et c. 1. de maailes doubles, et ainssi vaudront les deniers et les maailes dessus dictes avalue l'un parmi l'autre aus petiz tournoiz et aus ob. tournois v s. mains la livre que petiz tournoiz, c'est à dire que les xv d. ne vaudront que xij petiz tournoiz.

Et doit faire la damme de Chastiau Villain mere au seigneur de Sully le coing de sa monnoie, deviers croiz et deviers pile tele.

Item, la monnoie monseigneur Robert d'Artois, sire de Meun sur Yèvre, les deniers doivent estre à iij d. vj grains de loy argent le roy est de xx s. de pois au marc de Paris, et les maailes de la dicte monnoie doivent estre à ij d. xvj grains de loy argent le roy, et de xvij s. ij d. ob. doubles de poids au marc de Paris, et ne porront faire que le disième des maailes, c'est à dire ix 1. de deniers et c. 1. de maailes doubles, et aussi vaudront les deniers et les maailes dessus dictes avalue l'un parmi l'autre aus petiz t. et aus ob. t. v s. mains la livre que petiz tournoiz, c'est à dire que les xv d. ne vaudront que xij petiz t. Et doit faire monseigneur Robert d'Artois sires de Meun sur Yèvre le coing de sa monnoie, deviers croiz et deviers pile tele.

Item, la monoie à l'evesque de Maguelone, les deniers doivent estre à iij d. xvj grains de loy argent le roy, et de xix s. vj d. de pois au marc de Paris. Item, les maailes de la dicte monnoie doivent estre à iij d. de loy argent le roy, et de xvj s. ix d. de maailes doubles de pois au marc de Paris et ne porront faire que le disième de maailes, c'est à dire ix livres de deniers et c. 1. de mailles doubles, et ainssi vaudront les deniers et les mailles dessus dictes avalue l'un parmi l'autre à petiz t. et à maaile tournoiz, xx d. moins la livre que petiz tournoiz. Cest assavoir que les xiij d. de la monnoie desssus dicte ne vaudront que xij petiz t.

Et doit faire l'evesque de Maguelone le coing de sa monnoie deviers croiz et deviers pile telle.

Item, la monnoie à l'evesque et au chapitre de Clermont, les deniers doivent estre à iij d. xvi grainz de loy argent le roy et de xx s. vj d. de pois au marc de Paris. Item, les maailes de la dicte monnoie doivent estre à iij d. de loy argent le roy, et de xvj s. ix d. ob. doubles de pois au marc de Paris, et ne porront faire que le x de maailes,

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