Page images
PDF
EPUB
[graphic][ocr errors][ocr errors][merged small]

avancé il y a longtemps sans être cru d'abord, c'est qu'elle communiquait par un des côtés de l'octogone qui n'est pas garni d'absidioles, avec un grand corps-de-logis qui sert de réfectoire aux détenus, comme il en servait autrefois aux religieux.

A l'intérieur, l'édifice est divisé en trois étages et passe successivement de la forme octogone au carré et du carré à l'octogone.

Le premier plan est octogone: sur cinq faces sont appliquées des absides semi-circulaires

[graphic]

couvertes d'un toit hé

misphérique.

La vieille cuisine de l'abbaye de Pontlevoy (Loir-et-Cher) offrait plusieurs étages de toits et six cheminées cylindriques sortant du dernier ce qui porte à croire que les fourneaux étaient au centre, et qu'on pouvait circuler tout autour et vaquer dans une galerie circu

laire aux préparations

Cuisine de Pontlevoy.

qui précédaient la cuisson. Elle était, comme la précédente, voisine

de l'ancien réfectoire.

La cuisine de l'abbaye de StPère de Chartres devait, autant qu'on peut en juger par l'élévation ci-jointe, être disposée à peu près de même. Une cheminée centrale, plus élevée que les autres, occupait la sommité du toit; six autres cheminées l'accompagnaient toutes étaient couronnées d'un toit conique, et la fumée sortait par des ouvertures latérales pratiquées verticalement. Le tout formait deux étages qui parais

[graphic][merged small]

saient séparés l'un de l'autre par une claire-voie, c'est-à-dire que la

partie supérieure reposait sur des piliers et non sur un mur plein, à en juger par l'esquisse.

Enfin, la cuisine de l'abbaye de St-Florent de Saumur paraît avoir été complètement ronde, avec un

[graphic]

toit conique dont la sommité était percée d'une cheminée; d'autres cheminées s'élevaient et traversaient la pente du toit à différents niveaux.

Quoique ces vues prises à vol d'oiseau ne soient pas des représentations aussi fidèles qu'on le désirerait, elles offrent un grand intérêt et nous donnent évidemment la forme et la disposition de ces édifices qui, tous, comme on le voit, se rapportent à un système identique. Seulement, dans certaines cuisines, les cheminées devaient être disposées le long du mur et le centre restait libre; dans d'autres c'était le contraire, elles étaient au centre et le pourtour était vide.

Cuisine de St-Florent.

Quant au nombre considérable des tuyaux, qui correspondaient probablement à autant de foyers, on se l'explique par des conjectures seulement, car les recherches que j'ai faites ne m'ont pas fait découvrir de textes s'appliquant à l'état de l'art culinaire dans les abbayes au XIIe siècle.

Je suppose donc que, vu le grand nombre de moines qui les peuplaient à cette époque, il fallait beaucoup de foyers ou de fourneaux les uns servant à cuire les aliments dans des chaudières ou vases métalliques d'une grande capacité, les autres destinés à rôtir ou à griller les substances alimentaires; enfin, il ne serait pas invraisemblable que quelques-unes de ces cheminées eussent servi à faire saurer le poisson, dont les moines devaient consommer de grandes quantités et qu'il fallait dessécher par des procédés analogues aux nôtres. Mais ceci est une conjecture qui ne repose sur aucune autorité. L'administration des cuisines était une charge importante dans les abbayes, à l'abbaye de Bocherville, par exemple : il existe une charte

du XIIe siècle qui concédait le ministère des cuisines de l'abbaye à un certain Samson, fils de Guillaume d'Eu :

<< Sachez tous, tant présents qu'à venir, dit cette charte, que « Victor, abbé de St-Georges-de-Bocherville, et tout le couvent ont « concédé à Samson, fils de Guillaume d'Eu, et à ses héritiers, le << ministère entier de la cuisine de St-Georges, avec tous les fiefs et « appartenances dépendant du ministère de la cuisine; et pour que • cette concession demeure bonne et stable, nous l'avons corroborée « de notre sceau (1). »

En Angleterre, il a existé dans quelques abbayes des cuisines semblables à celles que je viens de figurer.

Dès le IXe siècle, la cuisine occupait dans les abbayes la place que nous venons d'indiquer aux siècles postérieurs; elle était à proximité du réfectoire. C'est ce que prouve le plan de la célèbre abbaye de St-Gall, en Suisse, figuré et commenté dans le Bulletin monumental (V. aussi la page 21).

Mais revenons à la distribution des bâtiments de nos abbayes aux XIe et XIIe siècles, telle que nous avons pu la reconnaître par l'étude des constructions existantes. Nous avons indiqué la destination des grands bâtiments qui entouraient le cloître, passons maintenant à l'examen des autres parties des établissements monastiques.

On trouvait dans les grandes abbayes :

L'area interior, ou cour intérieure réservée aux frères et aux domestiques de la maison;

L'area communis, grande cour où les charrettes apportaient les dîmes, les provisions, autour de laquelle se trouvaient les bâtiments de l'exploitation rurale (magasins, écuries, étables, etc.);

L'atrium ecclesiæ, petite place devant la façade occidentale de l'église, et par laquelle le public venait aux offices et entrait dans la nef sans pénétrer dans les cours de l'abbaye;

A une certaine époque, la maison de l'abbé, domus abbatis;

(1) Sciatis omnes presentes et futuri quod Victor abbas Sancti Georgii de Bolcherivilla, et omnis conventus, concesserunt Sansoni, filio Willelmi de Ango et heredibus suis, totum ministerium suum de coquina Sancti Georgii, cum omnibus feodis et pertinentiis que pertinent administerium predictæ coquinæ ; et quia benè et inconcussè permaneat, sigilli nostri munimine robora

vimus.

Enfin les jardins, les vergers clos de murs, etc., etc.

A Fontevrault, l'infirmerie est établie dans l'église St-Lazare; elle a son cloître et ses dépendances particulières.

Ces divisions s'observaient dans un très-grand nombre d'abbayes figurées dans la collection déjà citée.

L'abbaye de St-Étienne de Caen, qui était fort riche, était une de celles dans lesquelles ces grandes divisions étaient le plus complètes.

Nous les trouvons encore fort bien indiquées dans une petite vue de l'abbaye de St-Calais (Sarthe) (V. la page suivante ).

L'area interior, ou cour intérieure, accédait ordinairement à l'infirmerie, domus infirmorum, aux bâtiments des hôtes, quand ils ne faisaient pas partie du carré central, à la cuisine et à ses annexes, puis aux dépendances du dortoir (latrines), au réfectoire pour les gens de service, à la bibliothèque, etc., etc. C'était, en quelque sorte, le complément du cloître ou première cour.

L'area communis comprenait la grande porte d'entrée, porta major abbatiæ, les logements des gens de service, cellæ officialium, souvent de vastes greniers, horrea, granaria, et quelquefois la grange, grangia, les celliers, enfin le prétoire où l'on rendait la justice, prætorium, le carcer publicus, etc.

Le moulin, le four, le colombier, le pressoir se trouvaient souvent un peu à l'écart. D'ailleurs, la position du moulin, s'il y en avait un, était subordonnée à celle du courant d'eau qui le faisait mouvoir.

La maison de l'abbé s'accédait ordinairement par la grande cour, area major ou communis; mais elle avait son enceinte particulière et son jardin.

On conçoit que, suivant leur importance, les établissements monastiques ont offert un développement plus ou moins considérable. Les riches abbayes représentaient un village tout entier, une bourgade; les petits prieurés ressemblaient à une ferme.

Les prieurés ruraux, qui n'étaient occupés que par trois ou quatre moines, n'avaient souvent qu'une seule cour et pas de cloître.

La maison des religieux se trouvait près de l'église; les autres constructions étaient disposées autour de la cour. La grange aux dîmes était ordinairement la plus importante de ces constructions. Toutes ces maisons formaient une enceinte autour de la cour, et comme dans les

« PreviousContinue »