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rallèlement à l'axe, ou coupant l'axe sous un angle de 15 à 20o. mais je n'en ai vu aucune qui soit disposée dans le sens des ravins ou transversalement, et que l'on puisse rattacher aux actions locales qui ont formé les dépôts de débris remplissant le fond de ces

ravins.

Ainsi le phénomène des sulcatures et des dépôts de transport est complexe; il y a eu des actions locales, resserrées dans des ravins ou des vallons étroits, et des actions générales, qui se sont développées d'une manière continue le long des vallées, sur les plateaux ondulés et sur les collines mamelonnées de la Scandinavie : c'est à celles-là que se rattachent les grands systèmes d'érosions, qui se sont étendus, comme nous l'avons fait voir, sur d'immenses surfaces, en suivant des directions généralement constantes.

OBJECTIONS A L'HYPOTHÈSE DES GLACIERS QUI AURAIENT COUVERT

TOUTE LA SCANDINAVIE.

En décrivant quelques uns des caractères des érosions et des dépôts de transport du nord de l'Europe, j'ai montré que la théorie glaciaire ne peut pas en rendre raison; je vais indiquer ici quelques autres objections reposant sur ce principe, que la Scandinavie n'a pu offrir l'ensemble des conditions que nécessitent la formation et le développement des glaciers actuels.

Deux caractères essentiels aux phénomènes erratiques du nord de l'Europe.

Deux caractères essentiels spécifient les phénomènes erratiques du nord de l'Europe, et les distinguent de ceux des Alpes et des Pyrénées :

1° Leur développement principal a eu lieu non au sein d'une région montagueuse, mais sur des surfaces plates, ondulées, mamelonnées, et jusqu'à des distances de plus de 200 lieues des hautes montagnes (en Finlande).

2o Dans beaucoup de régions, ainsi dans la partie de la Suède qui est située au midi du 64° degré de latitude, et dans certaines parties de la Finlande, le mouvement général des agents erratiques ne s'est pas fait dans le sens des pentes suivant lesquelles coulent les fleuves actuels, mais dans un sens oblique ou presque transversal, et souvent il a eu lieu en remontant; nous allons citer plusieurs exemples de mouvements ascensionnels sur des distances considérables.

Difficultés relatives au développement des glaciers en Suède et en Finlande.

:

Jusqu'à présent on n'a observé de glaciers que dans des régions montagneuses; cependant des géologues fort distingués, et entre autres M. de Charpentier, prétendent que les montagnes ne sont pas nécessaires à la formation des glaciers : ce n'est, suivant lui, que leur climat froid, neigeux et pluvieux qui détermine la formation, le développement et le mouvement des glaciers. >> Mais cette inanière de voir me paraît incompatible avec les faits que j'ai observés dans les contrées boréales ainsi sur le plateau de l'île Cherry (ile de l'Ours), à l'ile d'Amsterdam, à l'île des Danois, etc., qui se trouvent à peu près à la limite des neiges perpétuelles, on ne voit pas de glaciers, bien que leur climat puisse être pris pour type des climats insulaires ou maritimes, bien qu'il soit aussi neigeux et aussi humide que celui d'aucun lieu du monde ; ces iles ont cependant une assez grande étendue, et il s'y trouve même des cimes qui ont jusqu'à 300 mètres de hauteur (à l'île Cherry). Dans mon dernier voyage en Norvége, j'ai encore eu l'occasion de me convaincre que sur les terrains plats on ne voit pas de glaciers susceptibles de se mouvoir, et de transporter au loin des débris de roches, que la présence de sommités isolées est même insuffisante pour leur formation, et qu'elle n'a lieu que là où se trouve un groupe de rochers ou un massif découpé en plusieurs parties laissant entre elles des gorges ou des dépressions. Les glaciers étant dans l'origine d'épaisses accumulations de neige qui, en descendant vers des zones atmosphériques de plus en plus chaudes, se changent peu à peu en glace par l'imbibition de l'eau et la congélation, il est évident que des gorges environnées de pics, et emmagasinant toute la neige qui tombe autour d'eux, et qui glisse suivant les pentes du terrain, de même que l'eau pluviale et celle provenant de la fonte superficielle, ces gorges doivent offrir les conditions les plus favorables à la formation des glaciers. Si la couche de neige tombée pendant l'hiver à la surface d'un sol plat et incomplétement fondue pendant l'été pouvait donner naissance à un glacier qui serait nécessairement d'une faible épaisseur, et si l'on supposait que ce glacier s'avançat du nord vers le midi, comme cela aurait eu lieu en Suède et en Finlande, il aurait été fondu avant de pouvoir parvenir à une grande distance de son origine; car même au Spitzberg, à la limite des neiges perpétuelles, sous un des climats les plus froids et les plus neigeux que

l'on connaisse, des surfaces inclinées de quelques degrés seulement et tournées vers le midi se dépouillent de neige pendant la courte durée des étés.

Les glacialistes qui ont voulu appliquer leur théorie au nord de l'Europe ont raisonné en général dans la supposition de glaciers locaux et circonscrits aux rochers d'où ils étaient partis; nous avons vu qu'il y a eu en effet des actions locales, mais que la disposition des grands systèmes de sulcatures atteste l'existence d'actions générales, développées dans un même sens sur une grande étendue de pays, ce qui est aussi confirmé par l'orientation des åsars, et par le transport des blocs erratiques que l'on trouve au midi de la Baltique, à des distances de plus de 200 lieues de leur origine.

Inclinaison de la zone erratique dans la Suède orientale.

Nous avons reconnu dans la partie orientale de la Suède un grand système d'érosions, tout-à-fait continu, qui s'est étendu sur 750 kilomètres de longueur, depuis le lac d'Östersund jusqu'aux environs de Calmar; or, supposons que l'on trace une ligne droite suivant la direction moyenne de ce système de stries (N. 22°1/20.) : elle s'étendra de la rive occidentale du lac d'Östersund jusqu'aux environs de Nyköping, sur une longueur de 480 kilomètres. : i les agents érosifs sont partis non du bassin d'Östersund, mais de sommités situées plus au N., ils ont dû descendre dans cette dépression pour la traverser; car elle est disposée obliquement à leur direction, et ils ont tracé des stries sur ses bords, à une altitude de 304 mètres au-dessus de la mer : par suite, la pente moyenne du terrain sur lequel s'est effectué le mouvement des masses érosives, depuis ce lac jusqu'au littoral des environs de Nyköping, est de 304 ou 0,000633 ou 2'.

480000

Si, faisant abstraction des dépressions du terrain, on suppose un plan incliné passant par les plus hautes sommités situées au N.-N.-O. du lac d'Östersund, à une distance de 90 kilomètres environ, dans le voisinage du lac d'Hotagen, et dont la hauteur est inférieure à 1,200 mètres, ce plan, s'abaissant avec une pente uniforme vers la côte de Nyköping, et passant au-dessus de toutes les hauteurs situées sur le trajet des agents erratiques, aurait eu, sur 570,000 mètres de longueur, une inclinaison de 1200 ou 0,002105, ou 7. Cette pente est beaucoup plus petite que celle de la limite supérieure du terrain erratique de la vallée du Rhône, depuis le

Grimsel jusqu'au Chasseron (20' 10") (1). On n'a pas observé de glaciers dans les Alpes, et je n'en ai pas vu non plus ni au Spitzberg ni en Norvége qui se meuvent sur une étendue de quelques kilomètres avec une pente notablement inférieure à 3°; l'inclinaison de leur fond est à la vérité moindre que celle de leur surface supé rieure, mais eu égard à la puissance que peuvent avoir les glaciers, il est peu probable que la pente de leur fond s'abaisse au-dessous de 1° ou même 1 1/2°; il est donc difficile d'admettre qu'autrefois des glaciers aient pu franchir les plateaux de la Suède orientale avec une pente de quelques minutes.

Les agents érosifs ont traversé une série de plans inclinés à pentes opposées.

Il n'y a pas lieu, en Suède, de déterminer la limite supérieure du terrain erratique, comme l'a fait M. Élie de Beaumont pour la vallée du Rhône daus les Alpes, car les agents erratiques n'ont pas suivi une vallée ou un bassin; mais ils ont traversé une série de plateaux et de vallées, et ils ont laissé leurs traces sur les hauteurs comme dans le fond des dépressions. Mais pour bien connaître leur allure, il ne suffit pas de déterminer, comme nous venons de le faire, l'inclinaison maximum de leur surface inférieure, en supposant qu'elle ait formé un plan incliné uniforme; il faut aussi examiner les ondulations principales de cette surface; or, ces ondulations présentent une série de plans inclinés en divers sens, de pentes ascendantes et descendantes, en rapport avec les lignes de partage des eaux : ainsi, en quittant le bassin silurien du lac d'Östersund, les agents erratiques ont dû s'élever jusqu'aux plateaux de Loos, situés 11 myriamètres plus loin, qui séparent cette dépression de celle du lac Siljan. Dans cette partie de leur trajet, ils ont donc eu un mouvement ascensionnel, et ils ont atteint une élévation de 400 mètres, supérieure d'une centaine de mètres au niveau du lac d'Östersund; ensuite ils sont redescendus, en se dirigeant toujours vers le S. S.-E., et parcourant des surfaces. diversement ondulées. Mais si on considère la partie occidentale du même système d'érosions, on voit qu'à partir de la contrée d'Örebro, située entre les lacs Hjelmar et Wenern, et dont le niveau moyen est inférieur à 100 mètres, les agents erratiques.

(1) Annales des sciences géologiques. Note sur les pentes de la limite supérieure de la zone erratique, par M. Élie de Beaumont

ont eu de nouveau un mouvement ascensionnel pour atteindre le plateau d'Ecksjö et Wexiö, situé entre le lac Wettern et la côte de Calmar, et dont l'altitude varie de 2 à 300 mètres. Il en est de même des forces érosives qui ont strié les sommets de l'Omberg, du Taberg, du Billingen et du Kinnekulle, élevés aussi de 2 à 300 mètres; mais ces forces agissaient du N.-N.-E. vers le S.-S.-E.; et dérivaient probablement du golfe de Botnie; d'ailleurs, au N.-N.-E. de ces cimes isolées, il n'y a que des collines beaucoup plus basses.

Le système sulcateur de la contrée d'Åreskuttan a eu un mouvement

ascensionnel.

Le système sulcateur le plus développé dans la contrée d'Åreskuttan, entre le lac d'Östersund et le col de Skalstuga, sur la frontière de Norvége, s'est avance, comme nous l'avons vu, de l'O.-N.-O. vers l'E.-S.-E., et s'est élevé jusqu'au haut de la cime d'Åreskuttan, à 1,484 mètres; mais dans la zone dont il dérive, la sommité la plus haute est celle de Kelahögen (1,262 mètres ; ainsi en admettant qu'il en soit parti, il aurait eu un mouvement ascensionnel, et se serait élevé à 222 mètres plus haut que son point de départ; d'ailleurs, avant d'arriver à Åreskuttan, il a dû traverser le lac de Tengsjön, élevé seulement de 448 mètres, qui en entoure la base du côté occidental, et sur le bord duquel on voit des stries dirigées de la même manière (O.-N.-O.).

Un autre système d'agents érosifs a envahi la côte occidentale de la Finlande en s'avançant du golfe de Botuie vers le S. 35° O.; ces agents se sont élevés jusqu'à un niveau presque toujours inférieur à 100 mètres; ils ont marché sur un plateau ondulé, tantôt en montant, tantôt en descendant, et se sont ensuite abaissés vers la partie méridionale du lac Ladoga et le golfe de Finlande, où ils ont tracé des stries exactement parallèles à celles que l'on voit sur la côte orientale du golfe de Botnie. Ils ont donc parcouru une distance de 5 à 600 kilomètres sur des surfaces plates et faiblement ondulées, dont l'inclinaison moyenne est nulle, puisqu'ils sont partis du niveau de la mer pour y revenir.

Lors de la période diluvienne, la surface de la Scandinavie n'a pu former un plan incliné disposé favorablement au mouvement des glaciers.

Il est évident que si les érosions et les dépôts de transport de la Suède et de la Finlande avaient été produits par des glaciers, ils

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