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rare de voir trois ou quatre de ces traînées de détritus disposées parallèlement et formant des sillons inégaux, comme c'est indiqué dans la fig. 6, dessinée entre Öfvre Hogdal et Rätan (Jemtland). Quelquefois les åsars, aplatis en forme de terrasses, sont parsemés de monticules et disposés en forme de dômes semblables à ceux que j'ai dessinés (fig. 7) entre la petite ville d'Halmstad et la maison de poste de Kärrby.

Directions des åsars dans la partie S.-E. de la Suède

Quant à la direction de ces collines allongées et de ces chaussées aplaties ou à section triangulaire, elle est en rapport évident avec le phénomène des érosions. Nous avons vu que les stries et les sillons ne sont pas dirigés du N. au S. dans toute l'étendue de la Scandinavie; il en est de même de ces åsars, et les observations que j'ai faites dans les différentes régions où j'ai voyagé m'ont amené à conclure que les traînées de détritus sont généralement allongées dans le sens du système d'érosions qui prédomine dans chaque zone, et, ce qui est encore plus remarquable, c'est que dans les régions où il y a plusieurs systèmes de stries, il y a souvent aussi plusieurs systèmes d'åsars ou de traînées de détritus. Ainsi, j'ai mesuré la direction de plusieurs groupes d'âsars au nord d'Upsal, et j'en ai vu qui sont dirigés au N.-N.-E. et d'autres au N.-N.-O. Ce fait se reconnaît même sur les grandes trainées de terrain meuble qui sont indiquées sur les cartes d'Hermelin et Forselle, et à la surface desquelles sont ordinairement établies les routes; cependant il faut noter que ces traînées, qui se prolongent à de très grandes distances ne forment pas en général des åsars tout-à-fait continus, mais des séries ou de petites chaînes d'åsars successifs. La ligne d'åsars la plus considérable de l'Upland, celle qui va d'Upsal à l'embouchure du Datef dans la mer, près de Gefle, présente certaines parties dirigées du N. au S.; néanmoins elle affecte plus généralement la direction N. 15° 0.; mais à l'est de cette ligne, il y a d'autres séries d'âsars qui courent entre le N.-S. et le N.-N.-E. sur de très grandes étendues; ainsi il en est une qui s'étend à l'est de Sigtuna de Asby à Åshusby du N. 13° E. au S. 13° O. sur 8 kilomètres, une autre, dirigée N. 15° E., s'étend sur 20 kilomètres de Läby à Tobo; une autre, dirigée N. 30 E., se prolonge de Carlholm, au bord de la mer, jusqu'auprès d'Ulfors, sur 28 kilomètres.

Plus à l'Ouest, dans la Westmanie, aux environs de Westerås,

Köping, Nora, etc., les lignes d'åsars sont habituellement dirigées, non plus entre le N.-S. et le N.-N.-E., mais entre le N.-S. et le N.-N.-O; il y en a un grand nombre que l'on peut suivre sur des distances fort considérables; je citerai pour exemple celle qui s'étend sur 28 kilomètres de longueur du N, 18° O. au S. 18° E., depuis Fellingsbro (entre Linde et Arboga) jusqu'à l'île Winö dans le Hjelmar; elle se dessine même au milieu de ce lac sous forme de bancs de sable.

Direction des åsars en Finlande.

En Finlande, où les sulcatures sont dirigées en moyenue du N. 35° O. au S. 35 E., les terrasses de dépôt de transport que j'ai eu l'occasion d'observer sont allongées dans le même sens; mais il faut, en général, avoir soin d'examiner si les åsars sont composés entièrement de terrain meuble ou si ce terrain forme simplement une couverture au-dessus des rochers granitiques, car alors leur direction peut être fort différente de celle des stries.

Directions des åsars dans l'Est du Jemtland.

Entre le lac d'Östersund et la frontière de Norvége, dans la partie orientale du Jemtland, où la plupart des sulcatures sont dirigées de l'O.-N.-O. à l'E.-S.-E., les collines diluviennes sont allongées dans le même sens. Mais sur la côte S.-O. de la Suède, on voit des terrasses telles que celle représentée par la fig. 7 (entre Halmstad et Kärrby), qui sont allongées du N.-E. au S.-O., c'està-dire suivant la direction principale des stries dans cette contrée. Nous avons vu que dans les vallées norvégiennes dont les flancs sont continus et un peu élevés, les stries suivent la direction du Thalweg, il en est de même des traînées de graviers et de cailloux que l'on rencontre fréquemment dans les parties où ces vallées ont une largeur un peu grande.

Dans les vallées de la Suède le dépôt de transport ne présente pas de terrasses en gradins comme dans les vallées des Alpes et des Pyrénées.

On ne remarque pas en Suède le phénomène des terrasses diluviennes disposées en gradins, qui se montre si bien développé dans les grandes vallées des Alpes, des Pyrénées, voir fig. 8, des Vosges, et quelquefois aussi dans le nord de l'Allemagne, où les grands

fleuves, tels que l'Elbe, l'Oder, etc., coulent à un niveau de 30 mètres environ au-dessous de la surface du dépôt diluvien : ces terrasses en gradins sont dues à ce que les eaux ont creusé leur lit au milieu d'un terrain de transport d'une assez grande épaisseur, et l'ont approfondi à plusieurs époques successives, entraînant avec elles les matériaux dont il est composé. Or les grands fleuves de la Suède, le Dal-Elf, le Ljusne-Elf, le Göta-Elf, etc., ne coulent point entre des parois rocheuses continues; ils sont simplement bordés de collines détachées et laissant entre elles des intervalles vides: on comprend alors que les courants diluviens de la Suède n'ont point été resserrés entre des barrières continues, mais se sont répandus uniformément sur toute la contrée. Par suite il y a eu diffusion des matériaux transportés sur de très vastes surfaces, et non agglomération au sein des vallées, d'autant plus que le mouvement des agents de transport a eu lieu, dans beaucoup de cas, obliquement par rapport à ces vallées. En outre, leur fond n'offre pas une pente graduelle et continue, mais une succession de parties plates, souvent occupées par des lacs, et de cascades formant comme des barrages naturels; des fleuves placés dans de semblables conditions ont peu de tendance à approfondir leur lit, et se rapprochent des rivières canalisées. Ces digues de granite et de gneiss maintiennent le niveau des eaux dans des conditions de fixité qui contrastent avec le changement perpétuel de niveau qu'éprouvent beaucoup de grandes, rivières de l'Europe, lorsque leur régime n'a pas été réglé par des travaux d'art.

Les stries que l'on remarque en beaucoup d'endroits disposées obliquement sur les rochers des cascades, et que n'a pu encore détruire l'eau qui coule sans cesse à leur surface, montrent combien est faible l'action érosive de l'eau lorsqu'elle est pure; elles attestent aussi que ces barrages ou ces repères naturels sont encore aujourd'hui tels qu'ils étaient à la fin de la période diluvienne, et par suite les eaux de ces fleuves ont été maintenues entre les mêmes limites depuis cette époque jusqu'à présent.

Dans les vallées norvégiennes il y a des terrasses de dépôt de transport semblables à celles des Alpes et des Pyrénées.

Dans les régions montagneuses de la Norvége, il y a des vallées bordées de flancs continus, comme dans les Alpes, les Pyrénées et les Vosges, et dans les parties où le dépôt de transport est un peu épais, on y remarque souvent de belles terrasses disposées en radins, ayant jusqu'à 20 et 30 mètres de hauteur; ainsi leur ab

sence en Suède et en Finlande tient uniquement à une différence dans la structure du terrain. La formation des magnifiques terrasses que l'on voit près de l'embouchure des larges vallées norvégiennes dans la mer, ainsi dans les anciens fiords de Drontheim, de Værdalsören, dans le Finmarck, etc., paraît dépendre de l'action des eaux marines, lorsqu'elles s'élevaient plus haut qu'aujourd'hui; mais il y a aussi des terrasses à une altitude de 5 à 600 mètres au-dessus de la mer, ainsi dans les vallées de Foldal, de la Glommen, du Guldbrandsdal, etc.

Nature des matériaux constituant le terrain de transport.

Les matériaux constituant le terrain de transport du nord de l'Europe sont des détritus sableux, argilosableux, des graviers, des cailloux et fragments divers plus ou moins usés et arrondis pour la plupart : quant aux blocs erratiques, les plus gros et ceux qui ont les arêtes tout-à-fait vives et les angles aigus se voient à la surface du dépôt; ceux que l'on trouve à l'intérirur sont en général plus petits, ont les angles moins aigus, et beaucoup sont grossièrement arrondis. Quand le dépôt erratique forme des entassements irréguliers sur le flanc des collines, le mélange des matériaux est plus confus, les cailloux et les gros fragments y sont en général plus abondants; sur les plaines ou les plateaux qui ont été nivelés, et dont la surface se rapproche d'être horizontale, de même que dans les åsars en forme de larges chaussées plates, ou dans les terrasses en gradins des vallées norvégiennes, le dépôt de transport est plus sableux et graveleux, les cailloux y sont moins volumineux et mieux roulés; les blocs d'un volume de plusieurs pieds cubes se rencontrent plus habituellement à l'intérieur des dépôts qui renferment beaucoup de cailloux roulés, mais j'en ai aussi remarqué dans les parties formées de graviers ou de sable presque pur. D'ailleurs nous avons déjà dit que ces dépôts présentent quelquefois des indices de stratification, et offrent un commencement de triage des éléments d'après leur grosseur et leur

nature.

Les dépôts sont principalement sableux et graveleux avec mélange de fragments roulés.

Cependant l'un des caractères principaux des terrains de transport dans le nord de l'Europe consiste en ce que, excepté à la surface, les gros fragments y sont en faible proportion, compara

tivement aux menus détritus; ce sont principalement des dépôts sableux et graveleux, mélangés d'une quantité plus ou moins grande de cailloux roulés, et c'est ce qui leur a fait donner le nom de collines de sable, sandåsar. Entre ces collines et les moraines abandonnées par les glaciers, il y a des différences notables sous le rapport de la configuration extérieure, de la grosseur des matériaux, de leur état de conservation et de leur distribution : les moraines n'ont pas la forme de terrasses ou de larges chaussées aplaties en haut, et à section trapézoïdale; il s'y trouve en géné– ral plus de gros fragments, les matériaux y sont plus anguleux, mélangés confusément, et ne présentent pas cette répartition par zones de sable et de cailloux que l'on remarque fréquemment dans le nord de l'Europe. D'ailleurs les blocs erratiques gigantesques, s'ils avaient été transportés par des glaciers, devraient se trouver exclusivement dans les accumulations de débris offrant les caractères des moraines, et l'on ne conçoit pas comment ils pourraient se trouver à la surface de dépôts qui présentent les caractères évidents de formations aqueuses. En outre, beaucoup de ces blocs proviennent de contrées basses qui ont été entièrement couvertes par les agents érosifs, et, par suite, ils ne peuvent résulter d'éboulements ayant eu lieu au-dessus des glaciers que l'on suppose avoir strié la surface de ces collines : ils auraient alors l'origine qui leur a été attribuée par M. de Charpentier, savoir qu'ils auraient été arrachés par les glaciers à leur fond, et se seraient élevés progressivement à leur surface; mais cette opinion me paraît difficile à admettre, d'autant plus que les très grands blocs qui gisent à la surface des dépôts de transport ne présentent pas de traces de frottement.

Abondance des fragments erratiques d'une même espèce autour de leur gisement originaire, et ailleurs prédominance des fragments granitiques.

Comme l'ont remarqué MM. de Verneuil et Murchison, il y a des régions où les blocs erratiques sont beaucoup plus abondants qu'ailleurs, et dans les lieux où ces blocs sont très gros, très rapprochés et tous de la même espèce, ils ont été amenés de petites dis. tances ou n'ont même été que déplacés; mais il n'en est pas ainsi dans d'autres régions où il y a des blocs de natures très diverses et aussi très abondants et formant comme une mosaïque, ainsi que je l'ai remarqué près de Falun et en beaucoup d'endroits, principalement sur les côtes de la Baltique. D'ailleurs, l'abondance des fragments

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