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de la Saintonge (églises de Saint-Hilaire, et de Notre-Dame à Poitiers, de Saint-Eutrope à Saintes, etc., etc.) ne m'ont présenté que des arcs parallèles.

Il m'a semblé que pour diminuer la poussée, on avait, dans quelques églises, eu soin d'exhausser les voûtes et de leur donner la forme d'un fer à cheval. Il m'a paru aussi que les voûtes des ailes, dont la portée était beaucoup moins considérable et qui ne présentaient pas la même difficulté, ont été disposées de manière à soutenir la voûte centrale. Ces ailes ont en effet, dans les églises dont je parle, une hauteur presque égale à celle de la grande nef et semblent avoir été élevées jusques-là pour servir de contreforts à la voûte principale. Cette intention est bien manifeste à Saint-Eutrope de Saintes, où la voûte des ailes ne forme qu'un quart de cercle (1) qui vient s'appuyer en arcboutant sur les murs de la nef, un peu au-dessous du niveau des impostes (voyez la fig. 11, pl. LIV.).

Je vous prie, Messieurs, de noter en passant

(1) M. Le Prévost a remarqué des voûtes disposées de cette manière, dans quelques localités du département de la Seine Inférieure, notamment à Pavilly.

le fait que je viens de citer; nous y reviendrons lorsque nous chercherons l'origine de ces arcsboutants qui jouent un si grand rôle dans l'architecture à ogives.

Tours. Vous vous rappelez ce que j'ai dit des tours et de leur forme dans les VIIIe., IX. et Xe. siècles; celles qui furent construites au commencement du XIe. dûrent être écrasées peu élevées au-dessus des toits et assez simples à l'extérieur. Dans le cours du XIe siècle on les exhaussa de plusieurs étages; on orna leurs murs d'arcades bouchées et de fenêtres.

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Un grand nombre de tours étaient terminées par une pyramide à quatre pans, soit en pierre, soit en charpente; le plus souvent cet obélisque était obtus comme dans les siècles précédents ; mais on fit aussi des pyramides trèsélevées et il paraît que l'origine des tours élancées qu'on a nommées flèches date du XIe siècle. Quoi qu'il en soit, ces flèches, pour me servir de l'expression qui a prévalu, étaient presque toujours à quatre pans (voyez les fig. 2—3, pl. LVIII ). On ne savait pas encore marier les toîts octogones aux tours quadrangulaires, et lorsqu'on trouve la forme octogone appliquée au toît des tours romanes, il y a presque toujours lieu de croire

que ces pyramides sont moins anciennes que le corps de la tour qui les de la tour qui les supporte. Remarquez bien, je vous prie, Messieurs, que mon observation est seulement applicable aux tours dont la base est quadrangulaire; car vous trouverez aussi par fois dans l'architecture romane des tours octogones qui ont dû être invariablement couvertes par des toîts de même forme ou par des toîts ronds (voyez la fig. 4, pl. LVIII). Ces tours octogones sont rares en Normandie dans l'architecture romane et j'ai lieu de croire que celles qu'on y voit ne datent que du XII. siècle : ce sont, pour ainsi dire, des tours de transition. J'en ai rencontré un plus grand nombre dans le Poitou, et elles sont communes sur les bords du Rhin, d'après les observations de M. Schweighausor.

Un autre genre de couronnement est celui qu'on désigne sous le nom de Batière ( pl. LVIII, fig. 1), et qui est formé de deux gables à double égout, supportant un toît plus ou moins incliné. Cette forme est la moins agréable de toutes; elle n'a été employée qu'assez rarement dans le XI. siècle.

Enfin quelques tours romanes étaient terminées par une plate-forme, et pouvaient en cas de besoin servir à la défense. D'autres en très

grand nombre n'ont été achevées que dans les XIII., XIV. et XV. siècles, et sans doute elles étaient primitivement couvertes en bois.

Les tours avaient été dans l'origine construites pour recevoir des cloches; mais au XIe. siècle on les multiplia sans nécessité et uniquement pour le coup-d'oeil ; là où une seule tour eût suffi,on en éleva jusques à trois; ce fut alors qu'on adopta, pour les grandes églises, l'usage qui a subsisté depuis, de placer une tour de chaque côté du portail, à l'Ouest (Saint-Etienne de Caen, abbaye de Sainte-Trinité, Jumièges, etc.). La troisième s'élevait comme auparavant sur le transept. Ordinairement moins haute que les deux autres, cette tour centrale était quelquefois ornée à l'intérieur de manière à rester ouverte jusqu'au toît et à présenter un grand vide ou dôme sur l'intersection de la croix; nous verrons plus tard quel parti on tira, dans les XIII., XIV. et XVe siècles, de ces lanternes dont nous trouvons déjà l'élément au XIe. et au XIIe.

Une observation peu importante en ellemême, et que cependant je ne dois pas laisser échapper, parce que je ne sache pas qu'elle ait été faite par d'autres est relative à la place qu'occupe dans les tours l'escalier par lequel

on y monte; on le trouve presque toujours for mant à l'un des angles du carré de la tour une saillie ou tourelle ronde qui vient se terminer à la base du toît ( tours de l'abbaye de Saint-Etienne, de Bayeux, de Colleville, de Saint-Contest ( Calvados), de Montivilliers, etc., etc.)

Je suppose qu'on plaçait ainsi l'escalier en dehors pour ne pas interrompre les voutes qui séparaient ordinairement les tours en plusieurs étages.

Le tableau que voici indique quelques tours romanes dont plusieurs sont situées dans le département du Calvados.

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