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une lettre de M. le marquis de Chennevières, exprimant le désir de voir fixer la séance solennelle annuelle un des premiers jeudis du mois de juin prochain. La Société, prenant en considération les motifs développés dans la lettre de son Directeur, décide que la séance publique aura lieu, conformément à son désir, le deuxième jeudi du mois de juin.

L'ordre du jour appelle l'ouverture du scrutin pour l'élection de MM. Tessier, professeur à la Faculté des Lettres, et Semichon, ancien bâtonnier des avocats de Pont-Audemer, publiciste, demeurant aujourd'hui à Rouen. MM. Tessier et Semichon, ayant réuni l'unanimité des suffrages, sont proclamés membres de la Société.

M. Demay, archiviste aux Archives nationales, est nommé membre correspondant.

M. Desdevises Dudezert donne lecture d'un intéressant compte-rendu d'un travail de M. le docteur J. Raemdoneck sur Gérard Mercator.

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L'ouvrage, dit M. Dudezert, est considérable, digne de l'homme illustre qui en est l'objet; il met en lumière sa laborieuse existence et permet d'apprécier la grandeur de ses services. Sphères terrestres et célestes, instruments d'astronomie et d'arpentage, cartes générales et particulières, plans de châteaux et d'églises, d'évêchés et d'abbayes, Mercator entreprend tout, pour vivre, et réussit en tout. >>

La note de M. Dudezert sera insérée dans un de nos prochains Bulletins.

Le Secrétaire communique, au nom de M. Gervais, un compte-rendu sur le volume des Mémoires de la Société des sciences, de l'agriculture et des arts de la ville de Lille pour l'année 1871.

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M. Gervais appelle particulièrement l'attention sur deux mémoires de M. Léridon: Le droit de senne et Le droit de jambage dans la châtellenie de Lille. « Le mot senne dérivait de synode et désignait un droit appartenant à la juridiction ecclésiastique, ayant pour objet la connaissance de certains crimes ou délits qui offensaient à la fois la loi civile et la loi religieuse, tels que l'adultère, ou simplement la loi religieuse, tels que l'inobservation des prescriptions ecclésiastiques. Quant au droit de jambage, de cuissage ou de culage, il est depuis longtemps démontré que ces dénominations grossières indiquent une redevance purement fiscale, et le mémoire de M. Léridon n'apporle aucun gument nouveau dans la question. Il est néanmoins piquant de voir jusqu'où la passion peut entraîner parfois les écrivains les plus estimables. C'est ainsi, notamment, qu'Heverland métamorphose sans hésitation le mot senne en celui de cène, souper, en ajoutant que le repas avait été admis probablement pour remplacer la réalité du jambage. Plus loin, le même érudit ayant trouvé le mot gambagium dans un compte de célérier, y découvre de suite une preuve non contestable de la réalité de cet abominable droit de jambage, tandis qu'il est démontré qu'il s'agissait tout simplement, dans ce texte, d'un impôt frappé sur la bière. Ces exemples, que l'on pourrait multiplier, sont de nature à montrer avec quelle circonspection il convient de procéder lorsque l'on veut s'occuper sérieusement de recherches historiques. »

Le mémoire étendu de M. Le Boeuf, dont il est ensuite donné lecture et qui est intitulé: Les fonderies ou cachettes de l'âge de bronze dans l'Avranchin, a trait principalement à une découverte d'objets en bronze

brisés faite, en 1873, à St-Georges-de-Livoye, au lieu dit le carrefour de la Chenotière. Une découverte analogue avait eu lieu, en 1851, dans une commune voisine, Notre-Dame-de-Livoye, au carrefour de la Mare-aux-Pourcets. Il en a été rendu compte, par M. Charma, dans nos Mémoires.

A propos de ces trouvailles, M. Le Boeuf signale certains kelts qu'il désigne sous le nom de kelts à ardillon et qu'il a rencontrés, au nombre de 30, dans un amas de vieux cuivre, à Villedieu. D'après les renseignements qui lui furent fournis, ces kelts provenaient d'une trouvaille faite à St-Cast, arrondissement de Dinan (Ille-et-Vilaine). Depuis, M. Le Boeuf a rencontré deux spécimens analogues dans la lande de Beuvais, arrondissement d'Avranches. Les pointes y sont même plus prononcées.

M. Dubus fait remarquer que le mot ardillon, employé dans la communication faite à la Société et qui est employé pour désigner une pointe fixe, est inexact, et qu'il conviendrait d'y substituer le mot pointe. L'exactitude de cette observation n'est pas contestée.

MM. Lavalley-Duperroux et Ricques, à propos de ces kelts à ardillon ou plus exactement à pointe, combattent le système de M. Bermans, tendant à voir dans le kelt une arme de jet destinée à être lancée contre l'ennemi; M. Ricques s'appuie notamment sur ce fait, que des kelts emmanchés d'une manière fixe ont été fréquemment rencontrés. Ces constatations semblent enlever toute valeur aux idées émises, à ce sujet, par M. Bermans.

Séance du 4 mars 1875.

Présidence de M. JOLY.

Après la lecture du procès-verbal, qui est adopté sans observation, le Secrétaire fait connaître à la Société qu'il a reçu de M. le marquis de Chennevières avis qu'un certain nombre de volumes avaient été mis par M. le Ministre de l'Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts, à la disposition de la Société des Antiquaires de Normandie.

La Compagnie décide que des remerciments seront adressés à M. le Directeur des Beaux-Arts, pour l'intérêt bienveillant qu'il n'a jamais cessé de lui témoigner, et dont cet envoi est une nouvelle preuve.

Le Secrétaire donne lecture d'une lettre de M. de Saulcy, président de la Commission de la topographie des Gaules, réclamant divers renseignements sur la direction des voies romaines dans le Calvados. M. Émile Travers est chargé de faire connaître à la Commission de topographie les résultats obtenus par les recherches qui ont eu lieu dans le Calvados. M. Tirard, qui a fait de la question une étude spéciale, l'aidera de ses propres observations.

L'ordre du jour appelle l'ouverture du scrutin pour le vote sur l'admission de M. Angerard, licencié en droit, demeurant à Lisieux, présenté, comme membre titulaire, par MM. Rabec et Aubert.

M. Angerard, ayant réuni le nombre voulu de suffrages, est proclamé membre titulaire de la Société.

Le Secrétaire présente quelques observations relativement au système de M. Matthieu sur les menhirs.

et les pierres branlantes. Les théories émises par le savant antiquaire dans un travail étendu inséré dans les Mémoires de l'Académie de Clermont, t. XV, p. 143, et intitulé L'Auvergne antéhistorique, lui semblent éminemment paradoxales; elles ont néanmoins un côté spécieux et, à ce titre, elles méritent d'être signalées. Pour M. Matthieu, les menhirs et les pierres branlantes ne sont rien autre chose que de gigantesques phallus. L'idée n'est pas nouvelle et a été émise au congrès de Rennes comme se rattachant à l'opinion de certains antiquaires, qui voyaient dans les alignements de Carnac et d'Erdeven une sorte de temple élevé au serpent ou au dragon. Pour faire apprécier la manière de voir de M. Matthieu sur cette question, il suffit d'emprunter à son travail quelques lignes.

Après avoir indiqué que, suivant lui, les dolmens sont des monuments funéraires, M. Matthieu ajoute : << Il reste encore à parler d'un autre ordre de monuments qui peuvent donner lieu à d'intéressantes comparaisons ce sont les menbirs et les roches branJantes, qui paraissent avoir joué dans le culte antérieur au druidisme le même rôle que les obélisques dans la religion égyptienne. Pierres brutes comme les dolmens et généralement en granit, les unes, et c'est le plus grand nombre, ont été dressées par la main de l'homme comme les Khasiens en dressent encore; les autres sont l'oeuvre de la nature. Ces derniers fétiches ont eu longtemps le privilége de conserver leur ancien prestige; ils ont été un but de pèlerinage et un objet d'invocation. La crédulité féminine, si facile à égarer et si difficile à désabuser, leur prêtait une vertu surnaturelle. De jeunes femmes venaient, à certains jours

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