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Des remercîments sont votés à M. de Tournal.

La Société française d'Archéologie compte à Nice plusieurs membres zélés, qui chaque année lui adressent de nouvelles notes sur Cimiez, où ils font toujours quelques fouilles; la note suivante est adressée par M. Chevallier, architecte.

NOTE DE M. CHEVALLIER.

Au mois d'avril 1870, le défoncement d'un champ faisant partie de la propriété de feu M. Musso, à Cimiez (près de Nice), mit à découvert deux grands murs parallèles, bordant sans doute une rue romaine. L'un de ces murs était coupé de nombreux refends. Notre honorable collègue, M. Brun, vous donnait au moment même de cette découverte une description de la position de ces constructions, ainsi que celle de quelques objets trouvés à cet endroit par le paysan qui avait opéré le défoncement. Malheureusement, ces murs ont été démolis avant même que l'on ait pu constater exactement leur position.

Averti de ces premières fouilles, je me rendis immédiatement sur les lieux, et cherchant à retrouver la direction de ces murs, je fis opérer une tranchée de 8m, 50 de longueur sur 1, 50 de largeur, à 500m environ de l'endroit où devaient avoir été faites les premières fouilles, à 3TM, 70 du mur de clôture est de la propriété et à 10m, 50 du mur de clôture sud. J'orientais la tranchée du sud au nord.

La pelle, puis la pioche, après avoir traversé une couche de terre végétale et plusieurs couches compactes d'argile rougeâtre fort mélangée de débris de vases en terre cuite et en verre, ainsi que des fragments de tuiles, découvrit la tête d'un mur large de 0, 80 (sans doute l'un des refends découverts précédemment et se dirigeant comme eux de l'est à l'ouest) qui, se retournant d'équerre vers le nord sur

une longueur de 1, en conservant toujours sa même largeur, formait l'une des parois d'un conduit de chaleur pavé en briques de 0,025 d'épaisseur, irrégulièrement taillées, mais fort bien jointoyées, recouvert de dalles en pierre calcaire de 0m, 06 d'épaisseur, clos de chaque côté soit par le mur que nous venons de dire, soit par une paroi composée de moellons de 0, 025 à 0, 030 d'épaisseur, se joignant bout à bout, liés au mortier et plus régulièrement taillés que ceux qui composaient l'appareil de la maçonnerie du mur. Ce conduit avait 0m, 25 et 0m, 30 de largeur; une pente, insensible sur un parcours de 1", 60, s'abaissait brusquement, pour rejoindre sans doute l'hypocauste dont nous avons trouvé une brique posée normalement. La moitié d'une autre brique de même espèce a été trouvée posée de champ et brisée suivant son diamètre. Perpendiculairement au mur et en prolongement de son retour d'équerre se trouve une assise ou plutôt une banquette de pierre de taille calcaire d'un gris clair, large de 0, 45, longue de 4m, épaisse de 0, 35, composée de plusieurs morceaux jointoyés admirablement bout à bout, se dirigeant du nord au sud et portant un rebord de 0, 08 de largeur formant la paroi d'une rainure taillée carrément, large de 0, 03, profonde de 0, 04, partant d'un évidement rectangulaire et s'arrêtant à 0m, 12 environ de l'extrémité sud de l'assise.

Cette assise, que je prends pour un seuil de porte, vu son poli gagné par le long frottement causé par la marche des entrants et des sortants et vu sa forme régulière (des éclats de pierre rajustés au mortier corrigent certaines épauffrures), est continuée par un tronçon de maçonnerie de 0, 90 de long et 0, 50 de large de même appareil que le mur, qui s'amortit doucement sur le rocher.

A l'extrémité sud est une banquette de pierre de taille, vers l'ouest se trouve une belle dalle en pierre,

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longue de 1,30, large de 0,65, épaisse de 0,20, flanquée au sud par un mur en maçonnerie large de 0,25; nous n'avons pu suivre ce mur que sur une longueur peu considérable.

Si, retournant sur nos pas, vers le nord, nous laissons derrière nous ce conduit, nous trouvons un espace libre de 0,35 de largeur, comblé de terres, séparant ce conduit de l'extrémité d'une banquette semblable à la première, placée dans le même alignement mais à un niveau plus élevé. Cette nouvelle banquette, que nous n'avons pu découvrir que sur une longueur de 1,50 environ, s'encastre d'équerre dans la tête d'un mur.

Une terre charbonneuse recouvrait le seuil sur une épaisseur de 0,06 et le sol compris entre le mur et la banquette, la dalle et le mur avoisinant, sur une épaisseur dont nous n'avons pu nous rendre compte, n'en ayant pas trouvé la fin. Cette terre renfermait plusieurs objets tels que : Quatre monnaies d'argent à l'effigie d'Alexandre Sévère, Julia Mésa, Gallien; la quatrième est illisible.

Sept monnaies de bronze dont trois très-frustres: Julia Mammée, fort bien conservée; Fausta diva, Gordien III, M. Julius Philippus Arabs; une charmante clef en bronze fort bien conservée, ainsi qu'un clou de même matière ; deux Olla; une clochette du genre Spathalia, une autre de forme pyramidale; plusieurs clous, crochets, etc., en fer; un morceau de serrure en fer, etc., etc.

Les fouilles devront être dirigées, pensons-nous, vers le nord, le sud, l'est et l'ouest en suivant la banquette, le rocher, le conduit et les refends; car en suivant les refends on arrivera infailliblement à leur jonction avec l'un des grands murs que je pense d'ailleurs devoir être parallèle aux banquettes de pierre de taille, dont j'ai parlé. Nous voici en possession d'une trace précieuse pour la reconsti

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tution de l'antique cité, travail que la Société française d'Archéologie a recommandé de poursuivre en 1866, et auquel notre honorable collègue, M. Brun, s'est livré avec autant de zèle que de perspicacité.

M. de Caumont adresse au nom du Congrès des remercîments à M. L. Chevalier et à M. Brun, pour les soins qu'ils donnent à l'exploration de l'antique ville de Cimiez. Cette ville romaine, qui domine Nice à 3 kilomètres, est encore très-intéressante à étudier quoique bien des destructions aient été faites. On y voit des murs et des mosaïques au milieu des rochers qui percent çà et là l'emplacement de l'ancienne ville; certaines mosaïques ont été établies à nu sur les couches rocheuses aplanies.

Époque mérovingienne.

On passe à l'époque mérovingienne.

M. d'Hacqueville, membre du conseil général, rend compte de la découverte d'antiquités mérovingiennes faite dans sa terre de Launay, près Orbec, à l'occasion des travaux exécutés pour la construction du chemin de fer. Ces travaux ont d'abord mis au jour quatre tombeaux renfermant des objets d'une importance médiocre, tels qu'un poignard en fer, un anneau de même métal et des débris de poterie grossière; mais un peu plus loin les déblais ont amené la découverte de trois tombes plus riches en objets d'une belle conservation. Il s'y est trouvé notamment un certain nombre de haches, sept à huit pointes de javelot, un vase de poterie mérovingienne, un anneau formé d'une faible lame de cuivre courbée en cercle et deux belles plaques de ceinturon. M. d'Hacqueville présente ces objets à l'examen de la Société.

M. Bouet dessine, séance tenante, l'esquisse des objets inté

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ressants exhibés par M. d'Hacqueville, qui reçoit les remercîments de la Compagnie et ses félicitations pour le soin qu'il a mis à surveiller les fouilles.

L'époque mérovingienne, dit M. Pannier, nous reporte à l'invasion des Francs, au Ve siècle, en 420.

Les Francs, qui ont donné leur nom au pays que nous habitons, lequel auparavant s'appelait la Gaule, chassèrent, comme on sait, les Romains qui l'occupaient depuis 400 ans. Ce peuple puissant, qui s'allia aux Gaulois, n'a laissé dans notre contrée qu'un petit nombre de vestiges ou de débris provenant des luttes qu'il eut à soutenir avant d'asseoir sa domination. Les armes grossières dont ils se servaient, tels que les scramaxaxes, se retrouvent, çà et là, dans les tombeaux ou sépultures mérovingiennes à côté des guerriers qui combattaient et ont succombé dans la lutte contre le pouvoir déchu.

On a découvert, il y a quelques années, au village de la Princeric, commune d'Hermival-les-Vaux, dont l'origine (le val d'Hermès ou de Mercure) est toute païenne, des sépultures mérovingiennes. Les guerriers, dont on a retrouvé les squelettes au nombre de 12 environ, avaient été inbumés à la hâte et à une faible profondeur, sur la pente d'un coteau marneux ou plutôt d'un monticule qui fait face au couchant. Comme cela avait lieu dans ces sépultures, la tête regardait l'orient et les pieds étaient tournés vers le couchant. A côté d'un de ces guerriers était placé un scramaxaxe, espèce de sabre, dont la poignée manque presque toujours et qui s'attachait au ceinturon. On a également retiré de l'une de ces sépultures deux agrafes en bronze, autrefois argenté, dont une fort belle. L'une de ces agrafes est de forme circulaire. L'autre de forme carrée et allongée, ornée de dessins ressemblant à des méandres, était garnie

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