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uns sont rares, plusieurs sont ornés de fines moulures; le marbre blanc de Carrare, qui se prête si bien à la sculpture, est le plus abondant. On a également trouvé des portions de fûts de colonnes, des fragments de corniche en pierre dure et en grès rose d'un grain très-fin. C'est sur l'emplacement du Champ-Loquet que s'élevaient les principaux monuments de la cité découverte, en 1770, par l'ingénieur Hubert, en faisant extraire du caillou pour former l'encaissement de la route royale de Lisieux à Caen. Un plan de ce champ, qui était traversé par plusieurs rues, accompagne l'Histoire de Lisieux de M. Louis Dubois, qui rend compte de cette importante découverte d'après un mémoire publié par Mongez, membre de l'Institut.

La route du Prédauge, qui part du carrefour St-Désir, traverse l'ancienne cité romaine. Parmi les débris antiques, on a recueilli une médaille grand bronze de Posthume que nous devons signaler à cause de sa rareté et de sa belle conservation. Le plus grand nombre de pièces découvertes dans le Champ-Loquet remonte au Haut-Empire.

Le sol de notre ville offre de nombreuses substructions romaines, ainsi que l'attestent les découvertes qui ont eu lieu à diverses époques sur plusieurs points. L'ancienne chapelle St-Paul, qui s'élevait au nord de la cathédrale et datait de la fin du XIIIe siècle, l'époque la plus brillante de l'architecture gothique, était assise sur des ruines romaines. En creusant les fondations de l'hôtel de la gendarmerie, on a mis à découvert une grande quantité d'objets antiques, briques romaines, tuiles à rebords, médailles en or et en argent, etc. L'ancienne basilique du XIe siècle, construite par Herbert et détruite, en 1136, par un incendie, sur l'emplacement de laquelle s'élève la cathédrale actuelle, était bâtie sur des débris de constructions romaines.

Des tronçons de mur en grossier blocage, avec briques

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romaines, faisant partie de l'ancienne enceinte de la ville, ont été également découverts dans la cour de la gendarmerie, entre le transept et le chœur, lors de l'établissement d'une fumière qui nécessita de grands travaux de terrassement.

Çà et là, dans la cité du moyen-âge, nous rencontrons de nombreuses traces de l'occupation romaine. Deux beaux chapiteaux corinthiens en pierre, simplement épanelés et percés, à leur partie inférieure, d'un trou carré et profond indiquant l'emploi du tour, ainsi que l'attestent, du reste, la finesse et la correction des moulures, ont été exhumés d'un terrain situé à l'angle de la rue des Boucheries et de la rue aux Fèvres. Ces chapiteaux, qui proviennent d'une importante villa, gisaient près d'une voie ou chaussée romaine, dont l'encaissement était parfaitement caractérisé, laquelle partait du Noviomagus Lexoviorum et traversait la ville actuelle de l'ouest à l'est. D'autres substructions existent et ont été constatées rue des Boucheries. Dans la maison Allain on a découvert, il y a quelques années, de nombreux et beaux fragments de marbre. Des briques romaines ont été aussi trouvées dans les fondations de plusieurs maisons, rue Pont-Mortain, et nous croyons pouvoir affirmer avec certitude que tout le pâté de maisons situé entre cette rue et celle des Boucheries repose sur des ruines romaines et offrirait à l'explorateur une mine trèsriche en antiquités et donnerait lieu à d'intéressantes dé

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Dans l'ancienne cour de l'Abbaye on a trouvé au milieu de débris romains, lors des fondations qui furent faites pour l'établissement de l'usine à gaz, une grande quantité de médailles du Haut-Empire, la plupart en grand bronze et parfaitement conservées, parmi lesquelles on distinguait des monnaies à l'effigie de Nerva, Trajan, Antonin-le-Pieux, Faustine, femme d'Antonin, Marc-Aurèle. Enfin, des tra

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vaux de terrassement récents, exécutés dans le même terrain, ont mis à découvert de nombreux fragments de poterie rouge avec dessins, de l'époque romaine.

Toutes ces découvertes, auxquelles se joignent d'autres moins importantes que nous pourrions indiquer, semblent attester l'importance de l'ancien Noviomagus Lexoviorum, qui devait s'étendre des hauteurs qui dominent la ville, au nord-ouest, jusque dans la vallée; ce qui confirmerait en partie l'opinion de Danville, qui plaçait à Lisieux même le Noviomagus Lexoviorum.

Ce serait peut-être le moment favorable de parler du vaste camp romain du Castellier, dont il reste encore quelques retranchements bien accusés et qui occupait un large plateau au sud-ouest de la ville actuelle. Ce camp, qui domine plusieurs vallons, a été décrit avec une grande exactitude par le directeur de la Société française d'Archéologie ; il en a publié un plan dans son Cours d'antiquités.

Poteries.

5 Question: Histoire des découvertes de poteries romaines à Lisieux.

M. Pannier répond en ces termes à cette question:

La céramique gallo-romaine occupe une place importante dans l'histoire de l'industrie lexovienne, ainsi que l'attestent les découvertes de vases cinéraires qui ont eu lieu à diverses époques dans le Grand-Jardin, au nord de notre ville, et les nombreux fragments de poterie sigillée extraits de la rivière de Touques, près du pont de la Barre et devant l'hôtel de la sous-préfecture. Nous allons rappeler aussi brièvement que possible toutes ces découvertes, qui ont été l'objet de plusieurs notices publiées dans le Bulletin monumental de M. de Caumont, et signaler les produits céramiques qui nous paraissent les plus remarquables.

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C'est à l'époque de la conquête de la Gaule par les Romains, conquête pleine de grandeur et qui ne saurait être assimilée à ces invasions des Barbares qui ont souillé le sol de la France au IVe siècle, que nous faisons remonter, dans notre contrée, l'origine de ce genre d'industrie, appropriée à nos usages et à nos besoins journaliers. Les Romains, en soumettant notre riche pays, apportèrent avec eux leur civilisation et firent connaître aux vaincus leurs divers procédés de fabrication; en même temps qu'ils changèrent les mœurs et modifièrent les habitudes sévères des Gaulois, ils leur apprirent les arts industriels, entre autres celui de façonner la terre et d'imprimer aux différents vases destinés à l'économie domestique une forme élégante et gracieuse; ils leur enseignèrent également l'art de mélanger et de colorer la terre et d'imiter ces beaux vases en terre rouge vernissée que Rome faisait venir à grands frais de l'île de Samos, et qui étaient la vaisselle de luxe d'alors, d'où le nom de poterie samienne donné à ce genre de produits. Ces derniers vases sont couverts, comme on sait, d'ornements en relief ou rinceaux formés de feuillages, parmi lesquels on distingue surtout des feuilles de vigne parfaitement imitées, ou bien des sujets extraits de la mythologie. Un assez grand nombre de ces vases porte l'estampille (ou sigillum) du potier qui les a façonnés, ou la marque de fabrique, officina Severi, par exemple, d'où le nom de sigillée donné à la terre dont ils sont formés (Voir l'Abécédaire d'archéologie de M. de Caumont, ère gallo-romaine).

Les vases en terre commune ou du pays, continue M. Pannier, se font remarquer par la variété de leurs formes et par la grâce de leurs proportions qui révèlent le goût de l'artiste qui les a confectionnés. Les uns sont en terre rouge et d'un grain plus ou moins fin, les autres en

terre blanche, très-fine, ou en gris foncé, quelques-uns en terre noire. Plusieurs sont revêtus d'une couche de terre délayée dans l'eau et très-légère, ou engobe, appliquée après coup sur la surface du vase simplement desséché au soleil et soumis ensuite à l'action du feu. Cette espèce de couverte ou engobe qui a pour but de changer la couleur de la pâte ou terre, produit l'effet d'une légère couche de peinture agréable à l'œil. Des fragments de vases en terre trèsfine et d'un blanc jaunâtre offrent, dans leur composition, de nombreuses parcelles de mica, qui les rendent trèsbrillants à la lumière. Enfin, quelques urnes sont revêtues d'un enduit métallique ou oxyde de plomb, qui atteste que ce genre de vernis employé par les potiers modernes était connu des Gallo-Romains. Trois de ces vases font partie du musée de la Société française d'Archéologie; ils ont été trouvés dans l'ancienne cour des Buissonnets, sur la pente du coteau qui domine à l'orient la vallée de Touques, et ont été décrits dans le Bulletin monumental (1862). Deux autres vases semblables, dont l'un fait partie de la collection de M. Augustin Delaporte, membre de la Société française d'Archéologie, ont été découverts dans des fouilles postérieures et dans la partie de la vallée de Touques appelée le Grand-Jardin, si riche en produits céramiques. Le plus remarquable de ces vases a été acquis par M. Riocreux, pour le musée historique de Sèvres. Il offre un dessin gracieux et élégant, et se rapproche, sous le rapport de la forme et de la décoration, de l'une des urnes trouvées dans la cour des Buissonnets, sur l'emplacement de laquelle s'élèvent aujourd'hui de jolies villas. L'autre, beaucoup plus petit et d'un dessin plus grossier, présente également de l'intérêt à cause de sa couverte qui est parfaitement conservée.

Nous ne suivrons pas les progrès accomplis par les cé

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