Page images
PDF
EPUB

une construction importante dont nous devons le plan à M. de Brébisson, et dont M. Victor Petit a dessiné les corniches et un fragment d'autel découvert sur place: depuis plus de vingt ans des fonds ont été votés par la Société française d'Archéologie pour continuer ces fouilles ; mais personne encore n'a pu s'en occuper. Espérons que M. Renault, revenu à Falaise, pourra prendre ces fouilles sous son patronage. M. Galeron a signalé, près de St-Sylvain, un point que l'on pourrait peut-être fouiller, et l'on m'a signalé à Soignolles des puits bouchés dans la campagne, qui peut-être méritent d'être vidés. Quant à Jort, où l'on a trouvé tant de poteries romaines à une certaine époque, il paraît que les localités qui en avaient le plus fourni sont épuisées, ce qui ne veut pas dire que tout soit trouvé et qu'il n'y ait pas encore quelque chose.

Dans l'Orne, si l'on excepte les belles poteries samiennes trouvées à Chamboy par M. le marquis de Manoury, on n'a pas signalé de découvertes gallo-romaines bien importantes depuis quelques années; les vestiges de la forêt de Bellême, les 6,000 médailles d'argent trouvées à Silly, les découvertes faites à Séez et à Planches sont déjà anciennes.

Dans la Manche, il y aurait des fouilles à faire à Alleaume, mais personne n'aurait à Valognes le loisir de les diriger; en attendant, j'ai signalé un point où l'on devrait fouiller, et M. Bouet, qui a bien voulu m'accompagner, a dessiné les ruines imposantes des bains décrits par Caylus, tels qu'ils existent encore.

Évidemment c'est dans la Seine-Inférieure que les fouilles ont continué d'être pratiquées avec le plus de suite depuis MM. Rever et Gaillard de Folleville. C'est M. l'abbé Cochet qui les a surveillées avec beaucoup de zèle et de talent; il continue à l'heure qu'il est des fouilles à Cailly, où il a mis

[ocr errors]

à nu une espèce de théâtre. La Société française d'Archéologie a contribué aux frais de cette intéressante explo→ ration.

On peut conclure de là, continue M. de Caumont, que les explorateurs manquent. Quoiqu'il y ait plus d'antiquaires aujourd'hui qu'autrefois, il y en a moins qui aient le courage d'explorer nos campagnes, et surtout de s'établir près des ouvriers terrassiers pour les diriger; on est accoutumé à voyager commodément en voiture ou en chemin de fer, et l'on ne peut plus se décider à aller à pied ou à loger, ne fut-ce que pour quelques jours, dans un modeste cabaret à proximité des fouilles à entreprendre. Voilà pourquoi on ne fait plus de découvertes d'antiquités romaines et pourquoi aussi on trouve difficilement l'emploi des sommes destinées aux explorations de ce genre.

Relativement aux voies romaines, la connaissance précise de leur tracé n'a guère fait de progrès depuis 35 ans que je publiais mon Cours d'antiquités; de Lisieux on connaît celle qui tend vers Vieux ou Bayeux, et dont une colonne milliaire trouvée à Frénouville, en 1804, nous donne rigoureusement le passage sur ce point; la voie passait trèscertainement à Bellengreville et Moult. Des médailles ont été trouvées en grand nombre sur deux points du parcours sur ces communes; mais depuis le camp de Moult jusqu'à Lisieux, le tracé est toujours un peu moins certain: on croit d'ailleurs qu'un embranchement se détachant sur la droite se dirigeait vers Canon, Percy, Grisy et Jort, vers le sud.

La voie de Lisieux à Brionne est encore reconnaissable sur quelques points, où M. Le Prévost l'avait indiquée ; je l'ai vue moi-même depuis lui, et son arrivée à Brionne est bien connue.

[ocr errors]

La voie de Lisieux à Dreux, par Condé-sur-Iton, indiquée dans l'Itinéraire d'Antonin, est visible à St-Germainla-Campagne, au Besnerey, à la Chapelle-Mayoc, et j'en ai donné le tracé détaillé dans mon Cours d'antiquités, t. II. Mais les voies qui mettaient Lisieux en communication avec Avranches, Le Mans, Jublains et Rennes ne sont connues que par conjecture.

Le camp de Quévrue paraîtrait indiquer la direction d'une de ces voies. Le chemin des Aniers, le chemin de Lorée, dont M. le vicomte de Neuville indique le parcours, sont toujours cités sans avoir été suffisamment suivis ; il est évident que le chemin qui descend la côte et qui passe à Chamboy (Orne), est un très-ancien chemin.

Y avait-il des voies romaines allant de Lisieux à la mer? · On ne peut guère en douter; mais on ne sait si ces chemins étaient de grandes voies ou de simples routes.

Enfin, indépendamment de la route de Lisieux à Brionne, il devrait y avoir eu une route allant à Lillebonne par le Vieux-Port et passant par Cormeilles; ces voies n'ont pas été suffisamment étudiées; la Société historique de Lisieux pourrait trouver des renseignements utiles dans quelques chartes: nous l'engageons à recueillir soigneusement ces indications.

En l'absence de M. Ch. Vasseur, M. Piel communique l'article que cet honorable confrère avait rédigé sur la disposition de la ville de Lisieux à la fin du IVe siècle.

«La partie orientale de la ville, bâtie sur la pente du coteau, formait à peu près un quadrilatère régulier. On y trouve, en tenant compte des usurpations qui ont pu pendant quatorze cents ans déformer la régularité primitive, des rues alignées se coupant régulièrement à angle droit. C'est le quartier le plus populeux de la ville. Le sol en est ex

haussé d'une manière notable au-dessus 'des deux premiers quartiers et indépendamment des inégalités du terrain environnant. Deux rues à peu près parallèles le coupent du nord au sud, aboutissant sur deux autres voies allant de l'est à l'ouest. En outre on voit encore des tronçons d'un chemin de ronde qui s'arrêtent maintenant, d'un côté à la rivière de l'autre au doyenné. Ce petit espace quadrilatère embrasse une superficie de 18,400 toises carrées. Évreux en a 21,000; Meaux, Bourges, Tours, Auxerre, Le Mans, sont incomparablement plus étendus. Dans cet espace restreint se groupent la cathédrale et l'évêché, assis sur le rempart du nord ; le doyenné, à l'est de la cathédrale, comme à Évreux; les halles anciennes, une église paroissiale fort ancienne, StJacques; enfin une douzaine de maisons canoniales, distribuées depuis le transept de la cathédrale jusqu'à l'église St-Jacques. Là aussi se trouvent les plus importantes des substructions gallo-romaines découvertes dans le sol de notre ville actuelle.

[ocr errors]

Remarquons encore que, dans cette partie de la ville seulement, on trouve des caves profondes qui offrent maintenant les caractères de la riche architecture du XIII° siècle, mais qui pourraient bien avoir remplacé les excavations creusées par les Gallo-Romains pour resserrer leurs provisions; car, dans une enceinte si peu étendue, il fallait économiser l'espace superficiel.

« Au siècle dernier, la ville avait quatre portes; on les nommait portes de Paris, de Caen, de la Chaussée, d'Orbec. Celles d'Orbec et de Paris se trouvent dans notre enceinte présumée romaine. A la première aboutissait une voie romaine, signalée par M. de Caumont comme conduisant à Dreux, par le Besnerey, St-Germain-la-Campagne, Chambrais, la Barre et Condé-sur-Iton. De la seconde partait la voie, signalée par les Itinéraires de Lisieux (Noviomagus) à

Brionne et Lillebonne (Juliobona), et toutes celles qui rayonnaient dans la plaine du Lieuvin, que l'on retrouve encore avec de nombreuses traces d'habitations, dès que l'on creuse la terre, dans ces champs fertilisés par tant de générations.

La porte de la Chaussée est, comme nous l'avons déjà dit, assise sur une voie romaine, qui, d'après nos présomptions, passait sous le mur occidental de la cité. Rien ne s'oppose à ce que sa place primitive ait été dans l'axe du portail actuel de la cathédrale ou de la rue qui aboutit à la porte de Paris, tandis que la porte de Caen, placée maintenant sur le bord de la Touque, se serait rapprochée jusqu'à la dérivation de l'Orbec. Nous sommes d'autant plus hardi à faire cette dernière transposition qu'elle s'accorde parfaitement avec les observations de M. de Caumont sur les tronçons des voies romaines venant de l'ouest, qu'il réunit toutes pour passer la Touque au pont de la Barre. On retrouve facilement la direction probable de la voie, en traçant une ligne droite au travers des quartiers réunis à la ville au XVIe siècle, et qui auparavant étaient des cultures.

Il faut cependant le répéter, rien ne peut servir de preuve matérielle à ces allégations. Pendant les temps de désordres incessants et de carnage dont il s'agit, l'histoire reste forcément muette: aucun document écrit ne peut donc suppléer à l'impuissance de l'archéologie.

M. Pannier prend la parole :

Le Champ-Loquet, que borde la nouvelle route de Lisieux au Prédauge, contient, dit-il, un grand nombre de fragments de marbres, porphyres, ophites, provenant de monuments d'une certaine grandeur qui révèlent une cité importante. Parmi les marbres qui ont été recueillis et dont quelques

« PreviousContinue »