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prêteraient pas à former des lances comme les silex tabulaires de la grande oolithe : c'est ce qui fait que, quoiqu'il y ait plus de silex dans les arrondissements de Pont-l'Évêque et de Lisieux que dans tout le reste du département, la matière clivable y était plus rare.

On parle ensuite des instruments de bronze, rapportés généralement à la période celtique.

M. de Glanville indique à ce propos la découverte de plusieurs hachettes en bronze à Villers-sur-Mer (Voir la Statistique monumentale ).

M. Delaporte mentionne une autre découverte de hachettes de bronze qui a eu lieu en la commune de Prêtreville.

3 Question Que sait-on de la population lexovienne avant la conquête de César'?

La solution de cette question nécessitait des études longues et approfondies; personne n'est préparé à la traiter comme elle le mérite.

« A l'époque de la conquête des Gaules par Jules César, dit M. A. Pannier, les Lexovii formaient une tribu puissante, commandée par un chef qui portait le titre de Vergobret. Le conquérant des Gaules, dans ses Commentaires (de Bello) gallico), qui sont le modèle du genre historique, parle avec éloge de cette tribu guerrière, et indique d'une manière précise le territoire qu'elle occupait, mais il ne fait pas connaître l'emplacement de la ville principale ou capitale des

Lexovii. Il se borne à mentionner l'existence d'une ville importante, qu'il place au nombre des cités armoriques, c'està-dire maritimes, et nous apprend que cette ville était ceinte de murs et gouvernée par un sénat. « Les Lexovii, comme « les Eburovices, égorgèrent leurs sénateurs, qui avaient « refusé de seconder le mouvement national, et fermèrent « les portes de leur ville: Senatu suo interfecto, portas

« clauserunt. » La cité des Lezovii n'est pas indiquée dans la fameuse table topographique de l'empire romain, connue sous le nom de Carte de Peutinger.

<< Parmi le petit nombre de monnaies en bronze de cette époque, nous signalerons celles frappées au type de Cisiambos. Cattos vercobreto, dont la plus remarquable, trouvée dans la commune de Govy, près Pont-de-l'Arche, en 1837, fait partie de la collection de M. de Saulcy; elle porte d'un côté: Simissos publicos Lixovio, autour d'une roue formée de grenetis; au revers est représenté un aigle, avec la légende: Cisiambos Cattos vercobreto. Deux autres pièces semblables, de même métal et de même module, ont été trouvées en 1842, l'une à Vieux, près Caen, l'autre aux environs de St-Pierre-sur-Dives (probablement à Jort); enfin, plusieurs médailles gauloises, appartenant au pays lexovien, ont été découvertes à Berthouville (Eure) il y a près de 40 ans, et dans les dernières fouilles faites dans cette localité, en septembre 1861, sous la direction de M. Lo Métayer-Masselin. Aucune médaille au type de Cisiambos Cattos, ou de tout autre chef lexovien, n'a été trouvée à Lisieux ni sur les hauteurs qui dominent la ville; ce qui ne nous permet pas de déterminer d'une manière certaine la position qu'occupait l'ancienne capitale des Lexovii, laquelle probablement se trouvait au confluent des deux rivières qui se réunissent à la jonction de trois vallées. La seule médaille gauloise découverte dans la contrée a été recueillie dans un champ entre Hermival et Fauguernon; c'est un quart de statère d'or que M. Lambert, ancien bibliothécaire de Bayeux et savant numismate, désigne sous le nom de gallo-grecque. Cette belle pièce offre sur le droit la tête d'Apollon Bélénus; sur le revers, le bige dirigé par un aurige tenant de la main droite le stimulus ou fouet, et de la gauche un symbole en forme

de bonnet hémisphérique; à l'exergue un méandre. Cette pièce rare remonte, selon M. Lambert, à une époque bien antérieure à la conquête des Gaules et a dû être frappée vers l'an 200 avant Jésus-Christ.

<< Tout le pays entre la Dive et la Risle, habité par les Lexovii, fut soumis, comme on sait, l'an 56 avant JésusChrist, par un des lieutenants de Jules César. Quatre ans après, la Gaule entière se souleva contre les Romains et tenta un effort suprême afin de reconquérir son indépendance. La capitale des Lexovii s'unit aux cités voisines et fournit à Vercingétorix un contingent de trois mille hommes. La prise d'Alise mit fin à cette lutte nationale. Espérons que, plus heureuse que l'ancienne Gaule, la France actuelle sortira bientôt triomphante de la nouvelle et terrible épreuve qu'elle subit en ce moment. >>

M. de Caumont remercie M. A. Pannier des renseignements qu'il a communiqués. A la médaille celtique qu'il vient de mentionner il ajoute celle qui fut trouvée au Mesnil-Mauger, près du carrefour des Forges, dans les mouvements de terrain occasionnés par le tracé du chemin de fer de Paris à Cherbourg. C'est un quart de statère figuré par M. Éd. Lambert dans son ouvrage sur la numismatique gauloise (seconde partie, pl. XIV, fig. 2). Le poids de cette monnaie est de 39 grammes, d'un or assez pur. Je crois, dit M. de Caumont, qu'on a trouvé autre chose dans le même lieu, car c'est le hasard qui m'a fait acquérir cette 'monnaie.

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Ère gallo-romaine.

4° Question: Décrire les vestiges de l'époque romaine à Lisieux et dans les environs.

M. Pannier a la parole:

Le sol de l'arrondissement de Lisieux, dit-il, recèle de nombreux débris de constructions romaines, tels que briques et tuiles à rebords, meules en poudingue, marbres et porphyres, etc.; mais les vestiges apparents sont rares. Nous signalerons seulement des fragments de mur en petit appareil régulier, avec chaînes de briques, aux Tourettes, à 3 kilomètres de la ville actuelle. Ces murs, assez bien conservés, s'élèvent sur les bords d'un ruisseau, que bordent des arbres de haut jet, dont les branches s'entrelacent d'une manière pittoresque et forment berceau au-dessus du hardi touriste. qui ose s'aventurer dans cet espèce de ravin, près duquel se montrent les vestiges ou plutôt l'emplacement d'un ancien théâtre romain signalé en 1828 par M. de Formeville, et dont la forme est fortement accusée.

Voici ce que dit M. de Caumont dans sa Statistique monumentale du Calvados :

"La cité romaine, dont M. Hubert, ingénieur des pontset-chaussées, a découvert, en 1770, d'importants vestiges à 2 kilomètres au nord-ouest de Lisieux, s'étendait jusque dans la vallée et sur le versant oriental. La ville du moyen-âge est assise sur des ruines romaines. La découverte d'un vaste cimetière gallo-romain (1), au nord de la ville, sur le bord d'une ancienne chaussée ou voie romaine qui a transmis son nom à une rue voisine, donne un grand poids à notre assertion. Ce cimetière, placé dans la vallée, s'étendait jusque sur le versant du coteau qui domine à l'orient le Grand-Jardin (2).

(1) Les urnes funéraires provenant des fouilles faites, en 1846, dans le Grand-Jardin, sous la direction de M. Fauque, préposé en chef de l'Octroi, sont déposées au musée de la Société des Antiquaires de Normandie.

(2) On peut consulter, sur cette découverte, une notice publiée

Une large tranchée pratiquée en 1861, pour l'ouverture d'une rue, a mis à découvert un cippe gallo-romain bien conservé, ainsi que de nombreux vases, dont trois, ornés de rinceaux, ont conservé en partie leur couverte.métallique ; des agrafes ou fibules, etc., etc. (1).

« Le cadre restreint de la Statistique ne nous permet pas d'entrer dans de longs détails sur les importantes découvertes qui eurent lieu en 1770. On pourra consulter le Mémoire de M. Mongez, membre de l'Institut, publié dans l'Histoire de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, t. V, p. 73, et l'Histoire de Lisieux par M. Louis Dubois (Ier volume, pages 58 et suivantes). Un plan accompagne le texte. Nous dirons seulement que les fouilles ont mis à découvert les vestiges d'un vaste édifice qui, d'après les marbres précieux dont il était orné, devait être consacré au culte, ou à la résidence des magistrats. Cet édifice était situé au centre d'une grande place à laquelle aboutissaient plusieurs rues, de 10 à 15 mètres de largeur.

« La ferme des Tourettes, près de laquelle les fouilles dont nous venons de parler ont été faites, a pris son nom, d'après Danville, d'un pilier qui était encore debout en 1770 (2). Ce pilier avait 4 mètres de hauteur et 3 mètres de largeur sur chaque face; il était construit en caillou et revêtu en

dans le Bulletin monumental, t. VIII, p. 201 et suivantes. Cette notice est accompagnée de nombreux dessins.

(1) Les principaux objets provenant de cette découverte sont déposés au musée de la Société française d'Archéologie.

(2) Selon M. Louis Dubois, ce nom de Tourettes viendrait d'anciens débris de tours ou de fortifications qui auraient survécu à la destruction du Neomagus. Nous ne pouvons admettre cette dernière étymologie. Il n'est pas probable qu'une enceinte aussi considérable que celle de Noviomagus fût protégée par des murs. Ces débris apparents avaient dû appartenir à quelque monument, mais non à des murs d'enceinte.

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