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avec elle, forme, en amont du pont du chemin de fer, un véritable lac dans lequel manoeuvrent de puissantes dragues à vapeur. A l'angle sud-ouest de cette excavation, à environ 300 mètres du fleuve, se dresse un bloc de grès mesurant 2 m. 10 de hauteur, 1 m. 40 de largeur et 0 m. 60 d'épaisseur (fig. 52). Au sommet est une cavité en forme de fer à cheval qui paraît naturelle. L'endroit est appelé depuis longtemps plaine du Gros-Caillou, de la Grosse-Pierre, de la Pierrede-Mouceau ou de Monceaux, ainsi qu'on le voit sur d'anciens documents. Dans un mémoire rédigé en 1723, dont Piérart cite un passage, il est question du lieu dit «<le Gros-Caillou ou la Pierre de Monceaux >>. L'orthographe actuelle est : Pierre-à-Mousseaux.

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La Pierre-à-Mousseaux, à Vigneux (Seine-et-Oise). Vue prise du S.-S.-O.
Echelle 1/50. (Dessin de Paul Allorge.)

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Ce menhir est situé sur la commune de Vigneux, non loin de la limite de celle de Draveil; c'est à tort qu'on l'a parfois indiqué comme se trouvant sur cette dernière. Il appartenait à Mme veuve Trottemant, qui habite le château de Mousseaux, mais il a été récemment acquis par les propriétaires de la sablière et M. Charles Piketty a bien voulu nous rassurer sur son sort. Il n'est nullement question de le détruire. Lorsque les dragages entameront le champ dans lequel il est planté, on réservera autour de lui un îlot assez grand pour qu'il ne coure aucun danger.

La Pierre-à-Mousseaux a été signalée en 1861 par M. Francis Mar

tin' et décrite depuis par divers auteurs, entre autres Piérart et Philippe Salmon.

Il devait aussi y avoir un menhir sur la commune de Draveil. Ph. Salmon a indiqué à la Commission des Monuments mégalithiques un bloc de grès couché dans un trou au bord et au-dessous du chemin de la Roche, près de La Malplacée, dernières maisons du village de Mainville. Quelques habitants de Mainville prétendent avoir vu debout cette pierre, qui aurait été renversée il y a plus de vingt ans. Elle se termine en pointe à une de ses extrémités et mesure 2 m. 70 de longueur, 1 m. 50 de largeur et 0 m. 60 d'épaisseur.

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La Roche-qui-tourne, à Lardy (Seine-et-Oise). Vue prise du N.-E. Échelle: 1/70. (Dessin de A. de Mortillet.)

Mais le temps devenant menaçant, il était prudent de fuir. Tandis que M. Allorge, resté seul auprès du menhir de Vigneux, en prenait un croquis sous une pluie fine qu'un violent vent rendait encore plus déplaisante, nous avons rapidement atteint Juvisy, où notre déjeuner était préparé. Pendant le repas les nuages se dissipèrent, et le soleil ne nous quitta plus de la journée.

A 2 h. 21 nous sommes remontés en chemin de fer à destination de Lardy, où nous étions rendus à 3 h. 16. Nous avons eu le plaisir de trouver à la gare M. Ernest Delessard, qui nous a obligeamment guidés pendant toute la seconde partie de l'excursion.

1. FRANCIS MARTIN, Notices archéologiques sur Villeneuve-Saint-Georges. (Mémoires de la Société des sciences morales, des lettres et des arts de Seine-et-Oise. T. VI.)

La Roche-qui-tourne. Longeant la ligne du chemin de fer jusqu'à un tiers environ de la distance qui sépare la station de Lardy de celle de Chamarande, nous sommes d'abord allés voir un énorme bloc, nommé dans le pays la Roche-qui-tourne, la Pierre-qui-tourne ou la Roche-branlante. Cette pierre, située un peu au delà du poteau kilométrique 44, à quelques mètres seulement de la clôture du chemin de fer, entre la voie et la Juine, figure au cadastre de 1818. Une partie de la Section E des plans de la commune de Lardy porte, en effet, le nom de Champtier de la Roche-qui-tourne.

Il s'agit d'une pierre de forme irrégulière dont le grand axe a 4 m. 40 de longueur et le petit 2 m. 20. Sa plus grande épaisseur est de 2 m. 20. Le volume de cette pierre serait, d'après M. Delessard, d'environ 14 mètres cubes, ce qui représente un poids de 36 000 kilogrammes. Elle repose par deux points seulement sur un rocher (fig. 53). Le tout est en grès de Fontainebleau, de même nature que les blocs volumineux dont toute la contrée est parsemée.

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Au dire de M. Paul Tomasi on pourrait, à l'aide d'un levier, faire subir à la pierre de dessus un mouvement de bascule du nord au sud. Peut-être a-t-elle été autrefois plus facile à mettre en mouvement, mais rien ne nous permet aujourd'hui de la ranger avec certitude dans la catégorie des pierres branlantes. Ce n'est plus qu'une pierre à légende.

Les anciens du pays se souviennent avoir entendu raconter par leurs ancêtres que : « tous les jours, à midi précis, arrive un pigeon blanc qui fait tourner la Roche ». Suivant une autre version, ce serait non pas à midi, mais à minuit que la pierre effectuerait un tour sur elle-même. On dit aussi qu'elle ne tourne que « quand on ne la regarde pas ». Elle passe, enfin, pour guérir les maladies d'entrailles ; il suffit pour cela d'aller se frotter le ventre contre.

Ce qu'il y a de certain, c'est que dans toute la région on tenait beaucoup à cette pierre. Nous savons par M. Peccadeau de Lisle que, lors de la construction du chemin de fer de Paris à Orléans, les habitants du pays s'opposèrent énergiquement à sa destruction. Afin de l'épargner, la compagnie modifia légèrement son tracé.

En quittant la Roche-qui-tourne, nous sommes descendus à travers la campagne dans le fond de la vallée, nous avons passé la Juine, traversé le parc du château de Gillevoisin et nous sommes entrés dans le bois de la Bouillie. Dans un coin fort pittoresque du bois, au milieu d'un amas de blocs de grès, M. Delessard nous a montré un très

1. PAUL TOMASI, Notice sur les temps préhistoriques et l'homme primitif à Étampes, 1886.

curieux pseudo-polissoir. Sur le côté d'un des blocs s'ouvre une cavité en forme de four, assez grande pour qu'un homme puisse s'y tenir couché les jambes pliées. A l'intérieur, sur la face inférieure ainsi que sur les parois et même sous la voûte, se voient de nombreuses stries, se croisant de diverses manières, dont les plus longues n'ont qu'une vingtaine de centimètres. On y voit aussi quelques cupules.

Un examen attentif de ces sillons nous a convaincus qu'ils n'étaient pas dus à des causes naturelles. Ils sont bien l'œuvre de l'homme, mais ils n'ont que des rapports assez éloignés avec les rainures des véritables polissoirs de la période néolithique. Leurs dimensions sont, du reste, trop exiguës pour qu'ils aient pu servir au polissage de haches en pierre et il faut avouer que la place aurait été singulièrement mal choisie, car on ne jouit guère, dans ce trou, de la liberté de ses mouvements. L'idée que ce pourrait être des traces d'aiguisage des outils en acier dont se servent les carriers qui taillent du grès dans ces parages doit également être écartée.

A vrai dire, ces marques ont tout l'air de n'avoir jamais servi à aucun usage pratique. Dans quel but ont-elles donc été faites? Peutêtre tout simplement pour s'amuser, pour tuer le temps. Bien que les combinaisons variées de lignes qu'elles présentent paraissent, au premier aspect, n'avoir aucune signification, on y distingue cependant, en regardant plus attentivement, plusieurs croix latines assez nettement figurées. Le reste rappelle un peu les dessins incohérents des vieux grimoires cabalistiques.

Ayant cherché de toutes parts si nous pouvions découvrir quelques indices capables de nous fournir des éclaircissements, nos recherches n'ont pas été tout à fait vaines. Nous avons retrouvé, sur le bloc même, une date: 1691, tracée en creux, en chiffres de l'époque. D'un autre côté, M. Allorge, explorant le fond de la cavité, en retira un fragment de grès de forme à peu près rectangulaire, ayant 5 centimètres de long sur 4 de large et de 15 à 20 millimètres d'épaisseur. C'est un éclat probablement naturel de roche très dure, dont un des grands côtés se termine en biseau légèrement arqué et usé par un frottement prolongé. Nous avons certainement là, recueilli en place, un des instruments avec lesquels ont été creusés les traits longitudinaux.

De tout ce que nous avons pu observer, il résulte que ces gravures ne paraissent pas remonter à une bien haute antiquité. Elles ont sans doute été faites, il y a quelques siècles, soit par des bergers ou par des désœuvrés fréquentant le bois, soit par quelque malheureux, quelque sorcier ou quelque ermite retiré en ce lieu solitaire.

M. Delessard nous a ensuite conduits au dolmen qui se trouve sur le petit plateau dominant le village de Janville.

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Dolmen de la Pierre-Levée. Ce monument est situé à environ 300 mètres au nord de la ferme de Pocancy et à peu près à égale distance à l'ouest de la tour de Janville. L'endroit porte le nom de Champtier de la Pierre-Levée. Il fait partie de la commune d'Auvers-SaintGeorges et non de celles de Lardy ou de Bouray, comme on l'a parfois indiqué.

Onze pierres 9 supports et 2 tables, composent le dolmen. Elles forment une chambre assez régulière, exactement orientée de l'est à l'ouest, et précédée à l'est d'un vestibule (fig. 54). La longueur intérieure du monument est de 4 m. 70. La chambre proprement dite a les dimensions suivantes : 3 m. 70 de longueur, 2 m. 65 de largeur à sa base et au fond, et 2 m. 40 de largeur dans le bas vers l'entrée; dans le haut elle n'a que 2 m. 18 de largeur, les parois latérales étant légèrement

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inclinées à l'intérieur; sa hauteur est de 1 m. 87 au fond et 1 m. 72 à l'entrée. Une forte dalle de 4 m. 10 de longueur, 3 m. 20 de largeur et 0 m. 50 en moyenne d'épaisseur la recouvre presque complètement. Sa paroi sud comprend 4 supports, la paroi du fond 2 et la paroi nord un seul.

Le vestibule, large de 1 m. 40, était formé par deux supports, dont l'un, celui du côté nord, est venu en tombant buter contre l'autre. Il était recouvert d'une seconde table, renversée depuis longtemps, qui gît actuellement à terre en avant du monument.

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La Pierre Levée, entièrement composée de dalles de grès, est encore en partie engagée dans un murger de pierrailles calcaires, qui formait jadis un vaste tumulus couvrant complètement le monument. On l'a mise à découvert vers 1860, en enlevant des pierres pour la construction d'un chemin voisin. Depuis lors, elle a été fouillée à

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