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ceinture couronnée par une première corniche. A ce niveau, des piédroits continuent le rôle des colonnes, et dans leur intervalle se logent des arcatures à colonnettes. Une corniche semblable à la première marque au-dessus l'étage du beffroi, largement ouvert sur chaque face par deux très hautes et larges baies, dont les triples voussures retombent sur des colonnettes. Sur une dernière corniche, s'élève enfin une flèche octogone de pierre, dont les pans sont limités par des boudins; des pinacles octogones ainsi qu'une lucarne à gâble plein entre chacun d'eux ménagent la transition entre le fût et la flèche; sur les angles des deux derniers étages est appliquée une colonnette (1).

On voit la franchise du parti : une pièce aussi ouverte que possible pour donner libre passage au son, et portée aussi haut que possible, sur un soubassement dont la solidité défie les ébranlements provoqués par les cloches, c'est la définition même du clocher. Le soubassement est plein; les petites fenêtres ouvertes dans l'escalier, la petite baie de la chapelle ne permettent pas de rester indécis sur la place du beffroi, seul si largement ouvert. L'étage intermédiaire, le plus petit des trois, assure aux baies ouvertes tout l'effet de hauteur que le voisinage immédiat des grands arcs du premier aurait pu amoindrir, et cette variété de proportions prévient la monotonie. Enfin, la continuité des lignes de renfort, colonnes, piédroits, s'arrêtant aux angles supérieurs où sont assis les pinacles, donne à l'œil l'impression de stabilité absolue. Quant à la décoration, elle n'est obtenue que par les seuls organes de construction. Tout affirme la sincérité et la maîtrise de l'artiste, et pourtant cette œuvre, très forte dans sa simplicité, ne semble pas pouvoir descendre très avant dans le XIIe siècle.

On ne cherche pas encore l'octogone comme transition entre la tour et la flèche, comme à la Trinité de Vendôme,

(1) Hauteur totale, 60m 50; hauteur de la flèche, 23m 50.

comme à Saint-Aubin d'Angers, problème qui sera si admirablement résolu à Chartres. On ne trouve pas trace non plus de ces essais si curieux, tentés à la Trinité et à SaintAubin pour épargner aux murs les oscillations du beffroi.

Les chapiteaux, trapus comme ceux du XIIe siècle, ont leur corbeille garnie de feuilles d'eau qui se retournent en volutes aux angles; quelques-uns portent des palmettes.

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mais très simples, les bases sont classiques. Les tailloirs sont tracés suivant une formule nettement définie, toujours très simple: bandeau et vigoureux cavet. Leur moulure se prolonge sur le parement extérieur, y formant une ligne droite qui alterne avec les petites arcatures des

corniches.

La décoration est tout entière reportée sur les archivoltes des baies du beffroi; deux d'entre elles ont, simplement profilé sur l'angle, un boudin dégagé; la dernière y ajoute une

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Clocher de Beaulieu-les-Loches.
Coupe sur l'axe orienté.

série de longues feuilles triangulaires dont les pointes s'appuient sur le boudin, enfin, contre le filet qui entoure l'extrados, s'applique à l'intérieur un feston de faible relief.

Aux angles des pinacles, des colonnettes reçoivent les arcatures; sous le gâble plein des lucarnes, dans une double et profonde voussure aux angles amortis en boudins continus, s'ouvre une baie haute et très étroite, comme une archère.

La décoration du soubassement présente des caractères un peu différents. Une série de fleurs, de plan rectangulaire, à huit pétales, forme frise à la base des glacis, puis au-dessous, entre les contreforts, les petites arcades de la corniche paraissent avoir une petite tête sculptée au sommet de leur circonférence.

A l'intérieur, une voûte en berceau à doubleaux très rapprochés, correspondant aux deux contreforts extérieurs, couvre la salle du rez-de-chaussée. L'étage des hautes colonnes est partagé, au niveau des voûtes de la nef, par un berceau simple, en deux salles; dans celle du bas se trouve, à l'angle nord-est, une petite chapelle orientée qui reçoit du jour par une petite baie nue pratiquée au fond d'une absidiole ménagée dans le mur est, et par une autre petite baie au nord, au-dessus d'une piscine. Au sud, deux arcatures inégales en tiers-point prouvent le collage évident du clocher, puisque, dans le mur de fond, l'une d'elles laisse apercevoir le sommet de la fenêtre basse et l'autre l'appui de la fenêtre haute. De plus, l'inégalité prouve que c'est le contrefort lui-même qui a été utilisé comme pilastre. Une petite vis en pierre, dans l'intérieur de l'angle nord-ouest, part de ce niveau jusqu'au beffroi; on ne pouvait donc avoir accès aux étages du clocher que par l'église et en descendant.

A en juger par l'ensemble, on placerait volontiers la construction de ce clocher au milieu du XIIe siècle. Quels progrès accomplis depuis les travaux de transformation!

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