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Les Gaulois se servaient avec grand succès de chars de guerre, dont l'usage se perdit plus tard et qu'au temps de César on ne retrouve plus que chez les Bretons (1).

Nous lisons dans les Comptes-rendus de la Société de numismatique et d'archéologie, tome IV, année 1873, que la Société historique et archéologique de Château-Thierry, avait acquis la maison de Jean de Lafontaine, notre grand fabuliste, pour en faire un musée où étaient réunis les souvenirs du poëte; malheureusement, pendant la guerre de 1870-71, l'établissement d'une caserne allemande fut cause que tout fut pillé et dispersé. Or, ce que l'on doit le plus regretter, au point de vue archéologique, ce sont les débris d'un char gaulois en bronze, plus complet que ce que possède en ce genre le musée de Saint-Germain.

Dans le compte-rendu de la sépulture antique, découverte à Berru, laquelle a beaucoup d'analogie avec celle dont nous donnons la description, M. E. de Barthélemy affirme avoir trouvé, dans l'angle à droite, à la tête du squelette, un fragment de cercle de roue en fer qui n'a pu être conservé. (Société des antiquaires de France 1874, tome XXXV.)

Si nous portons nos regards en dehors du département, nous voyons que le tertre de Sainte-Colombe, près MagnyLambert (Côte-d'Or), a livré en 1862, avec des débris de chars, des boucles d'oreilles et des bracelets en or qui sont au nombre des plus précieux joyaux du musée de SaintGermain.

Les Mémoires de l'Académie des Inscriptions, XXV. pages 109 et 116, parlent d'une découverte d'épée en

(1) Voir Alex. Bertrand. —Les Gaulois, extrait de la Revue archéologique.

bronze trouvée avec une roue et d'autres pièces de harnais. Les tombelles d'Anet (canton de Berne) ont montré un homme enterré sur son char, dont les nombreux débris purent être conservés par M. le baron de Bonstetten.

Le tumulus de Graucholtz, fouillé par le même, et qui a fourni un seau à côtes en bronze, renfermait en outre des cercles et des débris de roues de chars. (Tumulus gaulois, par Alex. Bertrand.)

Le compte-rendu du Congrès international d'anthropologie et d'archéologie antéhistorique de Paris (1867, page 291), parle d'une découverte faite en Angleterre consistant en boucles, casque émaillé, des épées en fer avec fourreaux de bronze, des mors et pièces de harnachement, avec des roues de chars. Le musée de Berlin possède la garniture d'un char provenant du tumulus de Gallscheid (Prusse Rhénane).

Dans les tombes celtiques de l'Alsace, publiées par M. Max. de Ring, nous voyons que l'un des tumuli de la forêt de Hatten, fouillé par M. Zaepffel, a fait voir les restes de deux chars de guerre dans la sépulture d'un riche guerrier. L'auteur constate que cette apparition de chars dans les tumuli celtiques de l'Alsace se présente ici pour la première fois, mais il ajoute que M. de Bonstetten en a trouvé dans les fouilles d'Anet et de Tiefenau, en Suisse; que dans le Doubs, M. Castan en a trouvé dans les fouilles du massif d'Alaise, et M. Jahn dans les tumuli ouverts à Græchwyl, entre Berne et Aarberg, tumuli qu'il regarde comme appartenant à l'époque étrusque.

Le char dont nous allons essayer de décrire les débris qui nous restent, ne devait pas être gaulois, attendu que l'écartement entre les roues était de 1m35, ainsi que nous l'avons constaté par la présence de l'oxyde de fer des roues marqué sur la craie, tandis que le char gaulois

n'avait que 105 et n'était traîné que par un seul cheval, ainsi que l'a si judicieusement remarqué notre collègue M. Peigné-Delacour.

Les débris du char que nous avons trouvé ne nous permettent pas d'en indiquer la forme, attendu que le bois et le cuir ont disparu et que nous n'avons pu recueillir que les parties métalliques. Nous ne savons si c'était le char de guerre (currus) ou le carpentum, voiture à deux roues recouverte d'une capote.

Le char de guerre était une voiture à deux roues, où l'on entrait par derrière, mais qui était fermée sur le devant et découverte, ne débordant pas en hauteur la croupe des chevaux. On ne pouvait guère que s'y tenir debout, mais il y avait place pour deux personnes; l'usage constant était que l'un conduisait les chevaux pendant que l'autre combattait. Aucun monument ne nous montre nettenient les parties détaillées de ces sortes de chars.

Notre guerrier ayant été trouvé inhumé, non assis, mais étendu naturellement, nous en concluons qu'une fois descendu dans la fosse, la banquette de devant du char aura été enlevée pour plus de facilité.

Les roues étaient en bois, recouvertes chacune d'un cercle de fer d'une seule pièce de 003 de largeur sur 001 d'épaisseur et 092 de diamètre.

Les cercles qui étaient encore debout, brisés chacun en quatre morceaux inégaux, étaient rattachés au bois par six clous également espacés, dont les têtes oblongues faisaient saillie au dehors; un seul est encore adhérent et mesure 005 de long, bien qu'il paraisse avoir été brisé vers son milieu. Ces cercles de roues ont longtemps servi, car ils ne sont plus plats mais bombés par l'usure, ce que les carrossiers appellent tuilés. L'un d'eux a conservé sa

forme ronde, mais l'autre s'est affaissé et se trouve déprimé aux deux tiers de sa hauteur.

Au milieu de chaque cercle, et à la place des moyeux, on a constaté la présence de deux frettes parallèles en fer, de un centimètre et demi de largeur sur 015 de diamètre ; à l'extrémité de ces frettes se trouvait la plaquette de fer recourbé qui maintenait le bout de l'essieu et dans laquelle se trouvait la fiche de fer destinée à maintenir la

roue.

Les deux tiges parallèles de la plaquette de fer recourbée dont nous venons de parler mesuraient sept centimètres et leur écartement n'est que de quatre centimètres. La clavette n'est qu'une tige ronde et droite, longue de 0TM12. Les autres débris du char consistent:

1o En deux fiches rondes, de 17 centimètres de longueur sur 2 d'épaisseur; ces fiches étaient sans doute destinées à maintenir le char sur l'essieu, car on voit que la moitié inférieure a été engagée dans le bois et qu'elle y était maintenue par un bourrelet qui l'empêchait de descendre. La partie supérieure de ces fiches est ornée, en son milieu, d'une boule de bronze ciselée, avec filets, comme motif de décoration.

2o En deux pitons d'attelage dans lesquels sont passés deux anneaux accolés, reliés entre eux par une boule de bronze; c'est après ces anneaux mobiles que devaient être attachés les traits.

3o En deux autres pitons qui ont dû être fixés et rivés

au timon.

4° En cinq petites tiges de fer, rondes, ornées aussi de boules de bronze et dont nous ne pouvons déterminer P'usage.

L'extrémité du timon placée à 3-80 du fond de la fosse était ornée de six demi-rondelles de bronze, très-rappro

chées, consolidées elles-mêmes par un mince bourrelet de fer.

L'ÉPÉE.

La magnifique épée qui reposait à droite du guerrier est longue de 90 centimètres, y compris la soie, qui en a douze.

Elle est essentiellement gauloise et représente le type des épées de la Marne. Nous en avons trouvé une tout à fait semblable pour la forme dans notre cimetière gaulois de Marson. Mais ce qui distingue celle de Somme-Bionne, c'est que la partie extérieure de son fourreau est en bronze et que l'autre côté est simplement en fer, aujourd'hui presque complétement rongé par l'oxyde. On peut voir que la lame est tranchante des deux côtés, mince et flexible comme celles des palafittes.

La soie est légèrement aplatie, sans ressemblance en rien avec le nouveau type dit soie plate, si bien décrit par M. Alex. Bertrand; elle va en diminuant légèrement de grosseur de la base à l'extrémité; elle ne présente pas de trous de rivets, et cependant il en a été trouvé deux en bronze qui ont dû servir à consolider le manche ou la poignée qui devait être en bois. De plus cette poignée était ornée, dans le sens longitudinal, de deux filets en bronze perlés.

La partie du fourreau qui est en bronze est parfaitement conservée; son ornementation consiste en trois cordons de bronze reliant les deux parties; deux de ces cordons de bronze représentent trois cuvettes rondes réunies, celle du milieu étant plus forte que les autres. Le premier, qui est placé à quatre centimètres du haut du fourreau, a aussi quatre centimètres et demi de largeur ;

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