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grand théologien, le grand cardinal Gousset, fondateur de l'église Saint-Thomas de Reims, qui a bien voulu présider ces assemblées savantes toutes les fois qu'elles se sont tenues dans sa ville métropolitaine. En lui la bonté, la bienveillance la plus expansive égalaient les éminentes vertus. Sa mémoire est toujours chère aux populations rémoises, qu'il bénissait, accueillait et encourageait de son vivant.

La liste serait bien longue, Messieurs, de tous les archéologues d'une grande valeur qui ont disparu de ce monde, si nous la voulions parcourir en détail. Il faut nous borner, et deux noms seulement seront encore rappelés par moi l'un est celui de M. Félix de Verneilh, de l'auteur érudit du livre plein de faits et d'observations sur la cathédrale byzantine de Saint-Front, de Périgueux; archéologue éminent, enlevé par la mort dans toute la force de l'âge et du savoir. L'autre nom est celui de M. le vicomte de Cussy, cet homme à l'âme chevaleresque, au cœur d'une parfaite loyauté, qui fut le compagnon fidèle de M. de Caumont, et qui eut l'honneur de présider le Congrès scientifique de Tours.

Ce sont là, Messieurs, quelques-uns des chefs qui ont dirigé et encouragé, dès le début, la croisade de retour aux édifices du moyen âge, qui lui ont donné une vive et féconde impulsion, et qui ont été suivi, dans cette carrière, par bien des soldats jaloux de s'associer à ces puissants efforts, de contribuer à remettre en honneur les glorieux legs de nos pères, trop longtemps dédaignés par la postérité.

Je viens, Messieurs, de jeter quelques lauriers sur le souvenir des vaillants hommes qui furent nos maîtres et nos amis. Mais, si je donne de vifs regrets à leur retrait de ce monde, je le fais non-seulement sans décou

ragement, mais avec confiance dans l'avenir. Nous marchons toujours, grâce à Dieu, nous continuons même à courir dans la carrière, et si je suis le témoin des années qui ne sont plus, je le suis aussi de celles qui s'écoulent dans le présent, et je constate les efforts qui se font dans le sens du progrès. Nous ne sommes pas indignes de nos illustres devanciers. Ne voyons-nous pas, de tous les côtés et sur tous les points, les études se poursuivre, les investigations se multiplier? Partout on fouille le sol, on interroge le passé, on scrute les archives, on demande, on cherche la vérité, et de nombreux succès viennent récompenser le labeur.

Pour ceux d'entre vous, Messieurs, qui appartiennent au diocèse de Châlons-sur-Marne, combien doivent-ils se féliciter d'avoir pour père spirituel et premier pasteur, un prince de l'Église qui unit une science profonde aux plus saintes vertus, qui fut une des illustrations de la faculté de théologie de la Sorbonne, et qui fait donner aux élèves de son grand séminaire une forte et scientifique éducation.

Il est, Messieurs, une science nouvelle, qui s'est fait jour depuis un certain nombre d'années, qui va tous les jours augmentant son domaine, et dont il n'était point autrefois question dans les Congrès. Vous avez tous nommé ces études qui embrassent les époques préhistoriques, études pleines d'attrait, mais aussi pleines de périls, si on ne s'y livre pas avec prudence et si on s'abandonne à l'esprit de système, ou aux spéculations que peuvent enfanter des esprits sans contrôle et sans frein. Nous aborderons cette science, Messieurs, nous lui donnerons nos premières séances, nous recueillerons les faits constatés dans le département de la Marne, nous admirerons l'étendue et la richesse des découvertes et les efforts généreux faits pour les mettre en valeur. Et puis, nous

nous livrerons à l'examen des autres branches de l'archéologie nous continuerons paisiblement à nous initier aux beautés de nos vénérables basiliques, de nos églises de Notre-Dame de Reims, de Notre-Dame de l'Épine, de Saint-Remy de Reims, de Notre-Dame en Vaux de Châlons et de tant d'autres. Nous entourerons de nos admirations tant et de si illustres témoignages de la foi et du génie de nos pères.

Courage donc, Messieurs; abordons le programme de nos travaux, et cimentons par des études faites en commun, les sentiments de vive sympathie dont sont animés les uns pour les autres les membres de ce Congrès.

M. de Laurière donne ensuite communication d'une étude biographique sur M. de Caumont, due à la plume du chevalier Da Silva, architecte de Sa Majesté le roi de Portugal, membre étranger de la Société française d'Archéologie, dans laquelle l'auteur rend un éclatant hommage à la mémoire et aux importants travaux du fondateur des Congrès. En terminant, M. de Laurière rappelle que la ville de Bayeux, avec le concours de tous les archéologues français, se prépare à élever une statue au plus illustre de ses enfants.

Parmi les ouvrages déposés sur le bureau, il faut signaler: Sépultures gauloises de Marson, texte et album par M. Morel; divers ouvrages de M. l'abbé Boitel; Notice sur la Haute-Mère-Dieu, par M. C. Remy.

L'ordre du jour appelle la discussion sur la 9° question: A-t-on découvert des objets appartenant à l'époque étrusque ou s'en rapprochant? La parole est à M. J. de Baye.

MONSIEUR LE PRÉSIDENT,

MESSIEURS,

La contrée que vous avez choisie pour tenir votre Congrès cette année, à été dans les temps reculés le théâtre des plus anciennes civilisations. Les époques archéologiques s'y succèdent avec suite et dans un ordre frappant.

Les annales de l'humanité se lisent dans son sol, toujours prêt à répondre à l'infatigable curiosité des archéologues qui lui demandent ses secrets. Les explorations multipliées qui ont été faites, n'ont pas eu seulement pour résultat de reconstituer la chaîne de l'histoire depuis l'âge de la pierre polie jusqu'à nos jours: elles ont démontré les éléments étrangers qui se sont trouvés en contact avec les produits de l'art indigène, attestant ainsi des relations, des transactions, des luttes avec les peuples helléniques, dont l'influence artistique s'affirme puissamment.

L'art étrusque est représenté chez nous par des objets en bronze découverts dans plusieurs sépultures répandues sur différents points de notre antique Champagne. La céramique a donné également des spécimens qui portent l'empreinte de l'inspiration hellénique. Il est donc impossible d'en douter, l'industrie grecque avait de nombreux contacts avec l'industrie gauloise telle que nous la retrouvons dans la Champagne. De semblables observations ont été faites dans d'autres parties du territoire gaulois. L'art archaïque ainsi constaté est-il simplement le résultat d'une importation purement matérielle, ou bien a-t-il, par une influence artistique, laissé des empreintes sur l'industrie gauloise? Les faits provoquent impérieusement

ces questions qui s'imposent d'elles-mêmes. L'industrie gauloise a laissé des traces nombreuses qui dénotent d'une manière évidente sa présence dans le pays tyrrhénien. Des emprunts nombreux ont été faits à l'art étrusque, qui fut un inspirateur et un modèle fréquemment retrouvé dans l'art gaulois. Ce dernier peut-il revendiquer le même honneur à l'égard de l'industrie étrusque? Présentement on ne peut recourir qu'à des conjectures pour résoudre la question. La civilisation, la force matérielle des Gaulois, leurs relations commerciales étendues, paraissent seules inspirer la pensée de le soupçonner. Cependant, M. A. Bertrand a pu dire: «Deux tombes isolées du cimetière de Marzabotto, contenant une épée et une lance en fer qui semblent bien gauloises, sont jusqu'ici les seuls spécimens à nous connus de sépultures appartenant aux conquérants de la Cisalpine. »

Il n'est pas sans opportunité, du reste, d'en faire la mention; la civilisation hellénique constituait un foyer bien plus capable de rayonner sur les peuples voisins que la civilisation gauloise, quel que soit le développement qu'on lui suppose.

L'élément gaulois, il faut le répéter, ne s'est pas encore rencontré dans sa pureté et isolément dans les régions où sa présence a été reconnue. Il ne constitue nulle part dans les pays où il apparaît, une agglomération parfaitement tranchée. C'est, du reste, sous ce même aspect que l'art étrusque se préconise parmi nous.

Il existe dans nos musées et dans les collections particulières, des objets d'art et notamment des vases d'une grande perfection, communément désignés sous le nom de vases étrusques, attestant un art exquis. Telle n'est point l'industrie dont les traces sont si nombreuses dans l'ancienne Gaule, et particulièrement constatée dans les

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