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seulement d'un siècle à un autre, d'une année à une autre, d'un mois à un autre, mais d'un jour à un autre jour, que la situation change. Ici les dates ont chacune une signification propre. Sans doute, la tendance reste la même toujours: certains faits sont communs à toutes les dates, et le lecteur croira peut-être que nous nous sommes répété; mais, à côté, il y a aussi des faits nouveaux qui constamment s'ajoutent aux anciens. Eugène III, Alexandre III, Innocent III ont pris des mesures disciplinaires dans l'Église, ont dans les Conciles porté des canons contre l'hérésie, ont ordonné des Missions; les différents légats du Saint-Siége, simples moines ou élevés à l'honneur de la pourpre romaine, ont agi dans un même but, mais par des moyens divers. Pour expliquer la conduite des papes et des légats à mesure que la question des Albigeois se développe, ne convenait-il pas de faire connaître chaque situation particulière? Ce n'est pas là se répéter, nous semble-t-il. A ce compte l'histoire ne serait qu'une restriction mensongère. L'impartialité, qui est le premier devoir de l'historien, justifie la longueur des détails; pour donner au lecteur le droit d'apprécier les hommes qui ont joué

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un rôle important dans l'affaire des Albigeois, ne fallait-il pas mettre sous ses yeux tous les

éléments d'une saine discussion?

Dans le courant du récit, nous avons dù blâmer la conduite de quelques hommes, qui, dans l'Église du Midi, occupèrent des situations élevées et auxquels notre cœur n'eût voulu donner que l'admiration et la louange. Nous ne les avons blàmés qu'après les papes euxmêmes, et encore ne l'avons-nous fait que dans la pensée d'apprécier plutôt leur époque qu'euxmêmes. Le lecteur se convaincra que les Albigeois parvinrent à former une vaste conspiration, une société aux agissements secrets, une seconde cité tramant des complots contre la cité de Dieu. La lettre d'Yves de Narbonne à l'archevêque de Bordeaux, au commencement du xir siècle, est restée comme pour éclairer les ombres dont ils s'enveloppaient. Mais tous les évêques ne percèrent point l'épaisseur de ces ténèbres; quelques-uns cédèrent peut-être à la faveur, et d'autres furent trop timides en présence de circonstances difficiles. C'est là ce que nous avons dû déplorer, non en accusant toutefois, mais en plaignant des hommes qui, mieux informés ou mieux secondés, se seraient

unis plus entièrement à l'action vigoureuse, juste et prudente du gouvernement pontifical.

Notre étude comprendra deux parties: la première traitera la question de l'origine des Albigeois; la seconde montrera l'action de l'Église par ses légats et ses missionnaires pendant le XII° siècle et les premières années du XIII. Elle sera suivie d'une série d'autres études que nous publierons sous ces titres :

Les Albigeois et la Croisade ;

Les Albigeois et l'Inquisition ;
Les Albigeois et les Templiers;

Les Albigeois et les Réformateurs du
XVIe siècle.

Montpellier, 29 septembre, fète de Saint-Michel
Archange, 1878.

PREMIÈRE PARTIE

LES ALBIGEOIS.

LEURS ORIGINES.

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