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senter à notre esprit que des descriptions souvent incomplètes, toujours indécises, sans relief et sans couleur.

L'archéologie satisfaisant aux exigences de notre nature, qui tient l'âme dans la dépendance des organes, vient donner un corps aux idées, et les fait passer dans l'esprit par les sens.

Grâce à elle, les grands noms des héros de l'antiquité ne sont plus de vains sons, propres à peine à éveiller dans l'esprit l'idée nuageuse d'êtres fantastiques.

Comme une formule magique, elle évoque de la tombe les personnes mêmes de ces illustres morts.

Elle nomme César, et César apparaît devant moi. Je vois ses traits, je touche ses vêtements, je tiens ses armes; voici sous ma main l'aigle dont le vol glorieux conduisit ses légions à la victoire. - Cette terre que j'aperçois à deux son camp; et demain peut-être sortira, du milieu de ces ruines, le trophée élevé à sa gloire.

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C'est ainsi que l'archéologie opère la résurrection des hommes et des choses des anciens temps.

Car ce n'est pas seulement un froid cadavre qu'elle exhume et étend sous nos yeux; sur les monuments antiques, le génie des arts a répandu son souffle immortel qui les anime et les vivifie.

Quand les œuvres incomparables d'un Homère, d'un Platon, d'un Démosthène et d'un Virgile, ne nous auraient pas transmis les généreux sentiments, les sublimes idées, les vives imaginations, qui sont la vie morale et intellectuelle des anciens; nous retrouverions encore ce feu sacré dans les chefs-d'œuvre de la sculpture antique.

Quelles paroles, en effet, exprimeraient plus fidèlement que ces marbres éloquents les plus sublimes élans du génie, les plus impétueux mouvements de la passion, les plus douces émotions du cœur, et jusqu'aux nuances les plus fines et les plus délicates du sentiment et de la pensée?

Et pour ce moyen-âge, où la civilisation renaissante sut triompher de la barbarie qui étreignait le monde.

Où trouver de la tendre et ardente piété, qui caractérisa cette époque, une plus saisissante image que dans ces cathédrales où la grandeur des proportions, la sublimité de l'ensemble, la hardiesse de l'exécution, tout concourt à pénétrer l'âme d'une religieuse émotion, et l'élève à la méditation des éternelles vérités !

La science, qui embrasse l'étude de tels chefs-d'œuvre, n'est donc pas, comme le supposent des esprits prévenus, une vaine distraction qui détourne l'attention des hauts enseignements de l'histoire, pour l'absorber dans la contemplation stérile de la matière.

Sans doute, elle s'occupe de choses matérielles, mais elle n'y touche que pour les spiritualiser, en en faisant sortir la manifestation de la pensée, que toute œuvre d'art est chargée d'exprimer.

Ainsi comprise et appliquée, et c'est ainsi que la comprennent et l'appliquent les savants distingués autour desquels nous nous pressons, l'archéologie met en jeu les plus nobles facultés de l'intelligence humaine.

Pour l'appréciation des monuments au point de vue du goût, elle exige ce sentiment du beau, qui touche de si près au sentiment du bon.

Pour la recherche de leurs rapports avec les idées, les mœurs, la vie des peuples qui les ont érigés, elle requiert de vastes connaissances, une critique judicieuse et des vues philosophiques élevées.

Voilà ce que les esprits les moins favorablement disposés reconnaîtront, en voyant à l'œuvre dans ce Congrès les archéologues éminents qu'il rassemble.

La lumière qu'ils feront briller dans cette enceinte ira se réfléchir au-dehors; sa chaleur bienfaisante échauffera autour de nous les tièdes et les indifférents; elle fera germer dans

la partie intelligente de la population, un sentiment d'intérêt, qui rend plus facile et plus sûre l'action de notre Société.

Et nous, Messieurs, nous aimerons à en avoir obligation à la Société française, qui, dans la vue d'encourager nos efforts, a conçu la pensée de cette fête scientifique ;

A vous, Monseigneur, que notre Compagnie s'honore de voir à sa tête en cette solennelle circonstance; et qui donnez une preuve si éclatante de votre amour pour la science, en consacrant à ce Congrès des instants que réclament un repos né cessaire, entre deux longues et laborieuses tournées pastorales;

A M. le Sous-Préfet et à M. le Maire qui, en cette circonstance, comme toujours, ont secondé avec la plus parfaite bienveillance les efforts de notre Compagnie ;

A vous tous, Messieurs, qui voulez bien apporter votre contingent de lumières dans l'œuvre commune du Congrès, ou marquer par votre présence l'intérêt que vous daignez prendre à nos travaux.

M. Vignon donne lecture des lettres de M. le Préfet de l'Yonne; de Mgr. l'Evêque de Troyes; de M. le Président de la Société des sciences historiques et naturelles de l'Yonne, à Auxerre ; de M. le Président de la Société d'agriculture, sciences et arts de Provins; de M. le Vte. de Cussy, appelé subitement en Ecosse par la maladie de son beau-père âgé de 86 ans ; et de MM. Thiérion, Quantin, Charles, Victor Petit, Petit de Julleville et Bardot, de Sens; ces derniers membres correspondants de la Société archéologique de Sens ces lettres expriment les regrets de leurs auteurs de ne pouvoir assister au Congrès.

M. le Président de la Société d'agriculture, sciences, arts et belles-lettres de Troyes, envoie une délibération de sa compagnie par laquelle elle délégue MM. Corrard, de Bréban et l'abbé Tridon pour la représenter au Congrès.

Il est aussi donné lecture d'une lettre de M. Pernot, artiste peintre, chevalier de la légion d'honneur, membre de plusieurs Sociétés savantes, et de l'Association des artistes peintres, par laquelle il sollicite au nom de M. le B ". Taylor, président de cette Société, la sympathie de la Société française, pour cette Société à cette lettre est joint l'Annuaire, pour 1847, de l'Association des artistes peintres, sculpteurs, architectes, graveurs et dessinateurs.

M. de Caumont donne connaissance à l'assemblée de plusieurs lettres, savoir de M. le docteur W. Bromett, de Londres, qui exprime son adhésion au Congrès et son regret de ne pouvoir y assister. Ce savant archéologue communique les titres des chapitres d'un manuscrit de 120 pages in-fo. dans la collection harléienne au musée Britannique, intitulé : « De gestis Ecclesiæ Senonensis», une Hymne à saint Thomas, et deux narrations, concernant les vêtements qu'il portait, quand il débarqua à Gravelines, et quand il fut assassiné à Canterbury;

De M. Leglay, archiviste du département du Nord, qui exprime son regret de ne pouvoir assister au Congrès;

De M. le Vte. de Cussy, qui recommande à la Société M. Bailey, membre de plusieurs Sociétés archéologiques anglaises, qu'il comptait amener lui-même, sans le fâcheux empêchement qui nous prive de sa présence;

De M. Lecointre-Dupont, membre de la Société française, demeurant à Poitiers, qui, en exprimant son regret d'être retenu en ce moment loin de la Société, demande son concours pour aider à la restauration des peintures murales de la belle sacristie de Ste.-Radégonde, récemment débarrassées du badigeon dont on venait de les recouvrir. Il réclamerait un secours de 150 francs. Cette demande sera renvoyée à la commission, qui sera nommée pour la répartition des fonds de secours qu'alloue la Société.

Il est fait hommage à la Société française :

1o. Par l'Association Normande, de l'Annuaire des cinq départements de l'ancienne Normandie ;

2o. Par M. Vergnaud-Romagnési, d'Orléans, d'une Notice sur la découverte faite, en janvier 1847, de deux inscriptions dans l'église de Germigny-des-Prés (Loiret);

3o. Par M. César Daly, architecte, d'un extrait du 7o. volume de la Revue générale de l'architecture et des travaux publics; revue dont il est le directeur. Cet extrait traite du symbolisme dans l'architecture.

Ces ouvrages seront déposés à la bibliothèque de la ville de Sens, suivant l'usage admis par la Société française en faveur des villes où se tiennent ses réunions.

M. Prou offre à la Société française un exemplaire du Bulletin de la Société archéologique de Sens, publié en 1846. M. le Président nomme une commission composée de MM. l'abbé Chauveau, Tarbé et de Lavernade pour examiner les pièces envoyées par M. le docteur Bromett et en rendre compte.

ENQUÊTE ARCHÉOLOGIQUE. M. de Caumont fait l'ouverture des travaux du Congrès par une enquête sur les monuments celtiques reconnus aux environs de Sens.

La 1re. question étant relative aux tumulus, M. Prou lit un mémoire sur les éminences connues sous le nom de Tombelles de Saint-Martin, et dont les fouilles ont été récemment faites par les soins de la Société archéologique de Sens. Il dépose en même-temps sur le bureau les objets qui y ont été trouvés.

Après cette lecture, un membre de l'assemblée demande qu'après le comblement des fouilles de ces tombelles, une pierre soit placée sur la principale de ces éminences, portant une inscription, qui constate les explorations qui y auront été faites, et garantisse leur conservation ultérieure.

L'assemblée, sans se, prononcer sur cette question, décide

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