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obligeance de M. le curé de St.-Junien nous a permis de l'étudier commodément dans tous ses détails extérieurs et même intérieurs : les priviléges des ostensions septennales ont été accordés par lui et même grandement étendus en faveur des pélerins archéologues, et cet examen approfondi nous a mis à même de reconnaitre la parfaite et complète exactitude de la description qu'en a publiée M. l'abbé Arbellot. Toutes les remarques critiques qu'il a faites sur la description de M. Mérimée sont de la plus évidente justesse ; et surtout il y a lieu de s'étonner de ce que le célèbre académicien que je viens de nommer, a pris pour une maladresse l'observation rigoureuse de la plus belle, de la plus poétique prescription liturgique. Il n'a pas vu qu'elle s'unit à la ruse innocente et louable qu'employa la piété du prévôt Ramnulfe II pour entourer de toutes les merveilles de l'art le sarcophage du saint, sans les ensevelir sous l'autel, où l'Agneau sans tache devait être immolé sur les reliques mêmes de ce martyr de la pénitence. Oui, Messieurs, le merveilleux tombeau est et a toujours été incomplet, parce qu'il s'arrête à l'endroit où le prolongement du sarcophage, taillé par les ordres de l'évêque Rorice II, s'engageait dans le massif de l'autel, et venait servir de support à la divine victime.

Je l'ai dit M. l'abbé Arbellot a admirablement décrit le tombeau : je ne le décrirai point à mon tour; ce serait une tâche de simple copiste. Il faut bien cependant que j'explique aux lecteurs du Bulletin monumental la position des riches sculptures qu'ils trouveront reproduites dans les pages de ce rapport; elles ont été dessinées sur bois par notre habile et zélé collègue, M. Léo Drouyn, inspecteur de la Gironde, et la brièveté de notre séjour à St.-Junien l'a empêché d'enrichir cette notice d'un dessin de plus. Il eût été à désirer que le médaillon principal, qui représente J.-C. entouré des symboles des quatre évangélistes, fût joint à celui qui con

tient l'image de sa divine Mère. Celui-ci a été choisi de pré

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férence, à cause de la rareté des images de la Vierge ainsi

renfermées dans un vesica piscis, et aussi à cause de l'inscription qui l'entoure. Cette inscription en vers léonins se fait remarquer par une analogie frappante de style avec celle de la statue qui provient de Notre-Dame de Beaucaire, et que M. de Caumont a figurée en 1845, dans le XIo. volume du Bulletin monumental.

Voici l'inscription de Beaucaire :

IN GREMIO MATRIS RESIDET SAPIENTIA PATRIS.

Voici celle de St.-Junien:

AD COLLUM MATRIS PENDET SAPIENTIA PATRIS :

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ME XP (CHRIST MATREM PRODO GERENDO PATREM :
MUNDI SALVATO (1) GENITRIX GERIT ET GENITOREM,

MATERNOSQUE SINUS SARCINAT HIC DOMINUS.

La face orientale du tombeau (côté étroit) porte le médaillon du Christ, dont je viens d'indiquer la disposition; les bordures verticales de ce panneau sont ornées de quatorze petits médaillons dont chacun renferme une figurine en buste et nimbée. Cinq de ces figurines ont les deux mains ouvertes sur la poitrine; deux autres portent une petite pomme ou boule dans chaque main; deux autres ont les mains dressées, mais voilées par les bouts de leur manches; deux autres ont les bras pendants et les mains par conséquent non apparentes : une autre porte, appuyé sur sa poitrine, un objet qui n'est pas déterminé ; une autre porte de mème un livre ouvert; une autre enfin a la main droite levée, et soutient de la gauche un fleuron à huit rais appuyé sur son cœur. M. l'abbé Arbellot a vu dans ces quatorze

(1) Il fallait FACTOREM. Le mot SALVATOREM rend le vers faux (Note de M. l'abbé Arbellot ).

figurines, l'analogue des quatorze Vertus nimbées de la cathédrale de Chartres je me permettrai de demander s'il ne reste pas quelque place au doute sur cette attribution, d'ailleurs si ingénieuse et si rationnelle, lorsqu'on remarque que les quatorze figurines nimbées de St.-Junien sont, aussi, incontestablement ailées. Leurs ailes sont ces petits enroulements qu'on voit au-dessous du nimbe, et dont le galbe est identique à celui des ailes de l'Ange de St.-Mathieu, auprès du vesica piscis : ces menus détails ont été omis dans le dessin, fort petit, qu'a publié M. l'abbé Arbellot. Le doute que j'exprime se fonde uniquement sur ce que ma mémoire ne me rappelle pas d'images ailées des Vertus, et cela pourrait conduire à voir ici tout simplement des Anges (1).

Sur la face méridionale du tombeau trouvent l'ouverture ovale et la curieuse porte en bois que M. Mérimée, par une préoccupation singulière, a prises pour une mutilation digne du vandalisme du XVIII. siècle. On y voit aussi l'Agneau divin et douze des vingt-quatre Vieillards de l'Apocalypse, dont les douze autres accompagnent, sur la face septentrionale, le médaillon de la Vierge, Mère de Dieu. Le second dessin qui accompagne ce rapport, représente les deux arcatures et les deux Vieillards qui sont à la gauche du médaillon; il suffit pour donner une idée exacte de la prodigieuse richesse d'ornementation de ce magnifique tombeau, ornementation dont les trois panneaux, comme l'a si bien dit M. l'abbé Arbellot, se résument en «< une « page de l'Apocalypse, sculptée en l'honneur d'un pauvre

(1) M. l'abbé Arbellot a fait connaître au Congrès que ce même doute a long-temps préoccupé son esprit, et qu'il n'est pas encore dissipé, bien que la publication de sa brochure l'ait forcé à présenter, de préférence, l'une des deux interprétations: il s'est décidé pour les Vertus, parce que les petits attributs qu'on voit dans les mains des figurines, sont fort difficiles à expliquer dans l'hypothèse des Anges.

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<< solitaire ; c'est une image du Ciel, représenté sous des

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