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verte, l'ont vivement intéressée; elle a prié M. Thiollet, qui avait dessiné à l'avance et mesuré tous les blocs, de choisir les morceaux qui lui paraissaient dignes d'être conservés, et de les faire transporter à l'Hôtel-de-Ville. M. Pernot a dessiné plusieurs vues des parties les mieux conservées de l'enceinte antique.

M. de Caumont a rappelé combien, en 1838, il fut profondément peiné de voir scier et débiter une multitude de pierres sculptées provenant des murs et déposées sur la promenade, et les réclamations énergiques qu'il fit à ce sujet près de M. Darcy, alors sous-préfet de Sens. Si l'on eût donné asile à tout ce qui avait été exhumé de curieux, le musée de Sens serait déjà considérable; on peut encore former à Sens une des plus importantes collections du monde, a dit M. de Caumont, si l'on veut recueillir soigneusement ce qui sortira des démolitions bien regrettables des murailles; seulement que la Société archéologique surveille ces travaux, qu'elle ne s'en rapporte qu'à elle-même, et qu'elle ne craigne pas de recueillir trop de morceaux sculptés : tous auront leur importance; et tel morceau, dédaigné d'abord, sera peut-être celui qui complètera plus tard un autre débris ou qui expliquera une difficulté.

Tous ces morceaux sont, en effet, tirés des grands monuments qui ornaient la ville à l'époque de sa splendeur; ils ont été apportés et employés pêle-mêle dans les soubassements; il faut donc chercher long-temps pour réunir et rassortir ce qui appartenait au même édifice ou à une partie d'un édifice.

MM. Vignon, Prou, Lallier, Tarbé, de Canchy et plusieurs autres membres, ont donné des détails intéressants sur l'état ancien des murs et sur les découvertes faites dans les démolitions depuis 10 ans.

Deuxième séance du mardi 1er. juin. ·

Présidence de M. DE MAGNITOT, Sous-préfet.

La séance s'ouvre à heures sous la présidence de M. le Sous-Préfet de Sens. Mgr. l'Archevêque, M. le Maire, M. DE GLANVILLE, M. l'abbé CROSNIER, curé de Donzy, M. DE CAUMONT, M. GAUGAIN, M. PROU, M. DE FONTENAY, M. TRIDON et M. LALLIER, secrétaire, prennent place au bureau.

Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.

M. Pernot annonce que plusieurs dessins représentant différentes parties des murs de la ville, ont été exposés par lui dans la pièce voisine.

M. de Canchy donne lecture d'un passage du mémoire de M. de Lavernade, relatif à la portion de la voie romaine de Sens à Orléans, près Jouy, qui se trouve formée de débris de mâchefer.

M. de Fontenay lit un rapport sur la découverte de différents objets faite par suite de fouilles pratiquées auprès d'Autun aux frais de la Société française.

RAPPORT DE M. DE FONTENAY.

«Dans le courant de l'année 1846, un cultivateur dé«<couvrit, en labourant, un grand tombeau creusé dans un « énorme bloc de calcaire blanc, et recouvert d'une pierre semblable, affectant à peu près la forme semi-cylindrique.

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« Il s'empressa de soulever le couvercle et trouva entre « autres, quatre objets en or, dont le dessin est ci-joint :

« 1°. Une rouelle à bélière et découpée à jour ;

2o. Une boucle avec son ardillon mobile;

« 3o. Un phallus à bélière ;

«4°. Une amulette chargée de figures repoussées en relief.

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<< Caylus, tome V, p. 160, décrit ainsi une variété du no. 4.

<< Cette amulette est ronde et formée comme ce que nous appelons un bouton; elle a une queue percée et arrondie, << mais placée dans le milieu de la partie qui n'est point tra«< vaillée. Ce petit monument d'or a été trouvé à Hercu<«< lanum. Les reliefs dont cette amulette est chargée ont «< été estampés, c'est-à-dire frappés ou repoussés, pour parler plus juste. Les monuments ne nous ont point << encore prouvé que cette pratique fut en usage en Egypte, « et son peu de solidité empêche de l'attribuer à ce pays. « Les reliefs sont disposés de façon qu'on en voit toujours quelques-uns d'aplomb, de quelque sens que l'amulette « soit tournée. Cette disposition, ainsi que la forme de la bélière, pourraient encore empêcher de croire ce monument égyptien ; mais on ne peut douter qu'il ne soit dépendant << du culte de ce pays; et l'on sait que la Grèce l'avait adopté << dans ses commencements. C'est donc à ces premiers temps « que je rapporterais ce monument, car l'arrangement de ses reliefs et leur exécution ne peuvent convenir à la Grèce « éclairée. Presque tous les objets de ce petit bas-relief sont << reconnaissables; on y voit clairement un œil, un serpent, <«< une abeille, un faucon pêcheur, un crocodille, un hippo«potame, un cancre ou écrevisse de mer, enfin une étoile. << Il est vrai que je laisse deux objets sans dénomination; je << n'ai pu les reconnaître, quoiqu'ils soient aussi distincts que <«<les autres. Cet arrangement circulaire empêche, ce me

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« semble, de regarder ces figures comme des hiéroglyphes. « Je croirais plutôt que ce monument présenterait la réunion << de plusieurs objets du culte, auquel on donne le nom de << Panthée; usage qui ne me paraît point ordinaire à l'Egypte. << Ces différentes raisons jointes à celles du lieu où le monu<< ment a été trouvé, m'ont engagé à le donner à la Grèce. << La parfaite conservation, ainsi que la matière, autorise en«< core cette prévention.

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<< Ne voulant pas me permettre de discuter l'opinion du savant Caylus, je me bornerai à faire remarquer que les objets trouvés au polyandre du bois St.-Jean, situé à 3 kilomètres à l'ouest d'Autun, ont dû être portés comme ornements, et que la représentation du phallus est une chose extrêmement rare dans nos contrées. Si l'on compare l'amulette décrite avec celle représentée ici, on reconnaîtra quelques différences; mais dans les deux, la pièce principale, l'œil est placé au milieu et le foudre qui le surmonte, est un des signes que Caylus n'a point nommé, quoi qu'il soit aussi apparent sur le dessin qu'il nous a transmis que sur celui-ci.

<< Une semblable découverte due au hazard était bien faite pour stimuler la curiosité des archéologues, aussi ai-je pensé ne pouvoir mieux appliquer la subvention accordée par la Société française, pour l'exploration de quelques tombeaux, qu'en plaçant des ouvriers au polyandre du bois St.-Jean. Malheureusement la partie qui présentait le plus de chances de succès, se trouvait ensemencée, et j'ai dû me porter à la partie inférieure, évidemment moins favorable. Par suite, je n'ai pu recueillir qu'une colonne monolithe en granite rose, le fût d'une colonne semblable, des baguettes cubiques en schiste et en porphyre vert ayant évidemment servi à des incrustations, et enfin une sorte de caisse rectangulaire de 1. de longueur, 0". 50 de largeur et 0m. 35 de profondeur taillée dans le granit. Je suppose à cause des filets

gravés sur la tranche du côté ouvert, qu'elle était peutêtre placée debout sur les colonnes, comme semblent l'indiquer des trous pratiqués dans l'une des petites faces. Il me reste à avouer qu'il serait difficile de formuler une opinion sur ce monument, qui confirme en moi la conviction de l'intérêt, qu'offriraient des fouilles largement entreprises dans les nombreux polyandres de nos environs. On y exhumerait quantité de ces monuments gallo-romains trop négligés et surtout trop peu expliqués. Ils dévoileraient des particularités du plus grand prix pour l'étude de ces associations si fortes dans leur organisation, qu'elles ont subsisté jusqu'à nos jours. Il nous mèneraient peut-être à une explication positive de l'instrument mystérieux nommé ascia; ils nous initieraient à la connaissance des dieux topiques, non moins nombreux, et nous arriverions enfin aux divinités spéciales, les Déesses-Mères, etc., etc. >>

A la suite de cette lecture, dans laquelle il est question des Déesses-Mères, M. de Caumont fait observer que dans son dernier Bulletin, la Société archéologique de Londres exprime l'opinion qu'on ne les trouve que sur les bords du Rhin ou en Allemagne, et point en Italie; mais il s'en rencontre à Autun et dans beaucoup d'autres villes de l'ancienne Gaule, dont les mœurs étaient tout-à-fait romaines.

M. de Caumont rend compte de la promenade faite entre les deux séances autour de la ville. Un assez grand nombre de pierres sculptées très-importantes ont été remarquées par les membres du Congrès. M. Thiollet en a compté quatorze, formant ensemble 1m. 25 cubes de pierre. On pourrait s'entendre avec les propriétaires pour les sauver de la destruction, en les leur achetant.

M. Le Maire dit que, si le Congrès veut bien désigner exactement les pierres dont il est question, l'administration

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