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6o. Un ensemble d'étrangeté qui frappe. Indication de tâtonnement qui démontre que l'art est à son enfance.

Evidemment beaucoup de ces caractères appartiennent au roman de la seconde époque, mais pris dans leur ensemble ils indiquent cependant un faire spécial, qu'il est impossible de confondre avec celui d'une époque où l'art marcha rapidement à la réalisation de véritables beautés architecturales.

Certes, je suis loin de ne pas confondre mon admiration avec celle des hommes de mon temps, qui rendent, au style ogival, un hommage si mérité; toutefois, je pense que cette admiration est trop exclusive, et puisque, en définitive, l'art aujourd'hui, incapable de créer, s'arrête à l'imitation, je trouverais bon qu'on proposât aux architectes, chargés de construire de nouveaux édifices, l'imitation de nos belles basiliques romanes, autant pour le moins qu'on leur donne à copier des édifices de style ogival.

En parlant du style primaire, on ne peut avoir d'autre pensée qu'une question d'intérêt d'études; c'est de l'histoire. de l'art et voilà tout. Mais ces recherches de l'art à sa naissance n'en ont pas moins de charme. Je suis convaincu que des études plus attentives, dans chaque province, amèneront une classification plus rigoureuse des édifices romans.

Pour l'Angoumois, voici quelques indications sommaires sur les monuments qui, pour des parties notables, m'ont paru remonter à la première époque de l'art, depuis l'invasion des Barbares dans les Gaules jusqu'aux premières années du XIe siècle :

Courcôme.

La nef et la coupole centrale.

Un document historique constate que cette église existait avant 970. Nef très-étroite. Sculptures des chapiteaux d'une complète grossièreté. Toutes les arcades rigoureusement en plein-cintre. Voûtes légèrement surbaissées, soit par système, soit par affaissement des voussoirs.

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Parties notables de la nef. Arcade à pilastres d'ornementation, s'élevant jusqu'au sommet. (St.-Jean-de-la-Palud, aujourd'hui La Couronne). La nef. Par une singularité qui ne se rencontre que dans ce monument, les fenêtres s'ouvrent dans la voûte même et nullement dans l'intervalle des colonnes, au centre des arcardes des murs latéraux. Sculptures grossières de chapiteaux; bases à plusieurs boudins superposés; appareil très-soigné.

Une des églises primitives d'Angoulême. Son abside est tournée à l'occident. Ce caractère prouverait-il l'antériorité de l'édifice à la prédominance dans le monde chrétien de l'idée d'orientation? Colonnes libres, supportant des arceaux destinés à séparer la nef des bas-côtés, dont les fûts sont formés d'assises composées de deux blocs. Cette nef et ces bas-côtés ne pouvaient pas avoir reçu de voûte; l'abside seule est voûtée.

L'abside de la chapelle du château.
La chapelle du château.

La nef et le clocher-arcade, très-belle construction des dernières années du Xe. siècle.

Chapelle du château (partie de l'ouest); voûtes transversales, petit édifice très-curieux.

La nef, morceau très-remarquable et digne d'étude, comme type.

Le sanctuaire.

La nef.

Petite abbatiale construite dans un désert, par des moines. Une bulle d'Alexandre III, de

1170, dit que c'est un des plus anciens monastères élevés dans les vastes déserts de la Gaule; très-remarquable par les chapiteaux de style barbare qui décorent les colonnes. Je prépare une monographie de ce monument, que la Société française aida à racheter, en 1836, des mains du vandalisme, qui allait le détruire. Confolens. (S'.-Barthélemy) l'église entière moins un bas-côté. St.-Cybar

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de-Chabanais. La base du clocher; le portail.

Je pourrais mentionner plusieurs autres églises, où j'ai trouvé des fragments des églises primitives qu'elles avaient remplacées. En donnant ce travail, à mes yeux fort incomplet, j'aurai pourtant rempli un but important en réveillant l'attention des archéologues sur cette époque de l'art monumental, et il faut le reconnaître, trop dédaignée, parce qu'elle ne présente d'ordinaire que des portions d'édifices ou des fragments de murs et rarement des édifices entiers.

M. de Caumont présente quelques réflexions après la lecture de ce mémoire. Sans nier des faits qu'il n'a pu observer lui-même et auxquels l'opinion de M. Michon vient donner plus d'importance qu'on n'y en avait d'abord attaché, il dit qu'il faut être d'une extrême réserve dans l'attribution qui peut être faite pour certaines parties d'anciens monuments, de dates antérieures au XI. siècle. Il rappelle à combien d'erreurs a donné lieu l'opinion qui, naguère encore, tendait à attribuer à l'ère romane primitive un certain nombre de monuments

qui depuis ont été reconnus comme étant de beaucoup postérieurs. Du reste, M. Michon a fait de l'éclectisme monumental, et son mémoire doit être pris en sérieuse considération.

Première séance du 16 septembre 1847.

Présidence de M. LA CURIE, membre du Conseil.

La séance est ouverte à 8 heures sous la présidence de M. LA CURIE. MM. DU CHANCEL, DE CAUMONT, DES MOULINS, GAUGAIN, BROMETT, DROUYN, COGNASSE, siègent au bureau.

M. Avril DE LA VERGNÉE, de Niort, et M. Ernest DE LA VERGNÉE, son frère, de La Rochelle, sont introduits et prennent place parmi les membres.

M. Michon esquisse à grands traits la géographie ancienne de l'Angoumois, et traite aussi une des questions mises à l'ordre du jour par M. de Caumont, pour les séances d'Angoulême.

M. Michon indique avec une scrupuleuse exactitude la direction et les caractères de toutes les voies romaines qu'il a suivies et explorées dans l'Angoumois; il reçoit les félicitations les plus empressées du bureau pour le dévoûment qu'il a apporté dans cette exploration si fatigante et si difficile.

M. Michon ayant pris l'engagement de reproduire in extenso ses précieux renseignements, dans la Statistique monumentale de la Charente. Nous allons simplement indiquer les voies qu'il a si bien décrites; sa communication a occupé toute la séance.

RENSEIGNEMENTS DONNÉS PAR M. MICHON.

M. Michon s'exprime ainsi :

1o. Voie de Saintes à Limoyes et à Lyon.

Cette voie suit une ligne droite de Saintes à Limoges, excepté qu'elle oblique légèrement vers le nord, au-delà du Châtelard, pour aller joindre la route de la Péruse avec laquelle elle se confond. J'ai marqué avec exactitude, moyen d'un pointillé, sur la carte monumentale, toutes les parties où j'ai trouvé le pavé encore entier ;

2o. Voie de Limoges à Aunay, par Charmé.

au

C'est la voie de la carte de Peutinger. Les ingénieurs chargés par le département de la Guerre de la grande carte du dépôt, la cherchaient vainement sur les données qui leur avaient été fournies par M. Hase, de la Bibliothèque royale; j'ai eu le bonheur de la découvrir. Elle se détache de la grande voie de Limoges à Saintes, au-dessous de Mézière, elle suit la vallée de la Bonnieure, passe dans les prairies chez le Meunier où l'on voit des fragments de son pavé: de là à Bords, à la Rivaille, chez Dieu, au Mas Chinet où elle fut découverte par les ouvriers qui coupèrent sa chaussée pour établir la route de Manles à Saint-Claud, à Ventouse, à Aulnac, à Essart près des Deffends, à Bellicol (alias Bellicour), villa romaine où sa chaussée se voit encore à travers une plaine cultivée, à Charmé, Gragonne, Saint-Fraigne, les Goures, d'où elle se dirige sur Aunay;

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3o. Voie de Saintes à Périgueux, appelée le chemin Boine ou Boisne. Cette voie est tracée sur la Table Théodosienne avec les indications suivantes pour les distances calculées en lieues gauloises:

MEDIOLANO SANTONUM (Saintes).

CONDATE, X.

SARRUM, XX.

VESONNA (Périgueux).

4°. Voie d'Angoulême à Poitiers. Cette voie n'est indiquée dans aucun itinéraire, ni dans aucun géographe. Cependant, à défaut de ces indications, les chartes de l'abbaye de Nanteuil

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