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teau; réduite aujourd'hui à deux étages, elle avait jadis plus de 100 pieds de haut, et ses murs n'ont pas moins de 10 pieds d'épaisseur ;

2o. Deux portes composées chacune de deux vastes corps de bâtiments à 2 étages, flanqués de quatre tours en partie massives et couvertes en ardoises;

3o. Débris du mur de ville qui avait originairement 10 à 12 pieds d'épaisseur sur 40 de haut et était flanqué de seize tours rondes ou carrées;

4o. L'église que le Congrès a le projet de visiter.

M. Déligand (Auguste) a la parole comme rapporteur de la commission chargée d'examiner les vitraux de M. Vincent Larcher, de Troyes.

Après avoir décrit la principale des verrières exposées dans les salons de la mairie, M. Déligand fait remarquer que l'artiste s'est sourtout appliqué à reproduire le caractère des vitraux antiques. Dès lors, il a pris exemple sur ses devanciers du moyen-âge, qui ne séparaient point leur œuvre de l'édifice auquel elle était destinée, et recherchaient moins la correction du dessin qu'un effet en harmonie avec la conception de l'architecte. Il faut donc féliciter plutôt que critiquer M. Larcher de s'être plus préoccupé de cet effet d'ensemble que de la perfection absolue du dessin et des figures.

Un autre mérite de la verrière décrite, c'est qu'elle n'a pas la transparence éblouissante de la plupart des verrières nouvelles; elle a, au contraire, le degré de translucidité qui, tout en laissant pénétrer la lumière, conserve au monument qu'elle doit orner son caractère grave, propre à inspirer le recueillement.

Après ce rapport, M. de Caumont, au nom de la Société française, propose l'approbation des travaux de M. Larcher. M. Larcher, présent à la séance, reçoit des mains de Mon

seigneur une médaille d'argent qui lui est décernée en témoignage de cette approbation.

M. l'abbé Crosnier a la parole et donne lecture de son procès-verbal de la visite de la cathédrale, et entre ensuite dans quelques explications de vive voix.

NOTE DE M CROSNIER.

MESSIEURS,

Vous m'avez chargé de vous faire un rapport sur votre église métropolitaine, si digne d'attirer l'attention du Congrès et malheureusement trop mutilée comme tant d'autres; je n'aurai point à vous entretenir de sa partie historique, M. l'abbé Chauveau a rempli cette tâche avec talent, je n'aurai même que quelques mots à ajouter à ce qu'il vous a dit sur les détails architectoniques; il ne me restera donc à traiter que la partie iconographique, travail que je laisserai cependant incomplet, car je me bornerai à l'explication des portails; plus tard, d'autres s'occuperont sans doute de la description et de l'interprétation des vitraux, et alors vous aurez une monographie à peu près complète de cette basilique dont Sens s'enorgueillit à juste raison.

Quoique terminée au XIIIe siècle (car je dois ne considérer que l'ensemble général, et ne point m'occuper ici des chapelles et du transept, œuvres des XIV., XV. et XVI. siècles, comme vous l'a indiqué M. l'abbé Chauveau ); cette église est d'un seul jet et présente tous les caractères de l'époque de transition : c'est-à-dire que, commencée dans la dernière moitié du XII. siècle, elle accuse dans la partie supérieure de la grande nef les commencements du XIII®., et c'est ce qui nous explique pourquoi nous n'y rencontrons pas l'inclinaison symbolique qu'on remarque dans les églises de la

première période ogivale. Ce symbolisme n'existait pas encore quand on jeta ses premiers fondements; quand on éleva ses piliers, il eût fallu, pour lui imprimer cette forme, renverser une partie du travail déjà avancé. Cette particularité n'est point sans importance, elle vient préciser en quelque sorte la date que nous devons lui assigner.

Vous avez remarqué comme moi, en visitant votre église, que les deux premiers piliers du côté du midi présentent un caractère particulier ainsi que le portail latéral et les parties du bas-côté qui les avoisinent; ce caractère qui indique le XIV. siècle, époque qui concorde parfaitement avec la date que M. l'abbé Chauveau a précisée, est une preuve de plus que l'archéologie et l'histoire sont deux sœurs qui vivent d'habitude en bonne intelligence.

Ici, Messieurs, je vous communiquerai une observation que j'ai déjà faite en considérant d'autres monuments du XII. siècle; on a souvent et long-temps disserté sur l'origine de l'ogive, et enfin on est généralement convenu que des raisons de consolidation l'avaient fait adopter en principe; mais comme nous ne devons pas confondre l'ogive avec l'arc ogival, complément du système architectural qui en a conservé le nom, il est important de considérer tout ce qui a pu contribuer à l'adoption de l'arc ogival. Comme votre métropole vient appuyer une observation antérieure, je m'empresse de vous la soumettre.

Rien n'est disgracieux au coup-d'œil, comme des arcs de différentes dimensions rapprochés les uns des autres; dès le XI. siècle, époque cependant encore peu sévère dans la perfection de l'art, on l'avait compris dans le cas que j'indique : on cherchait à dissimuler ce défaut, soit en exhaussant l'arc dont le rayon était moins étendu, soit en surbaissant l'arc dont le diamètre était plus large, soit enfin en n'employant au besoin que le quart du cercle au lieu de l'arc parfait. On

comprenait que l'œil exigeait pour être satisfait que les arcs voisins eussent la même base et le même sommet.

Cependant les procédés du XI. siècle laissaient encore beaucoup à désirer; le XII. siècle résolut le problême, on vit régner simultanément le plein-cintre et l'ogive; le pleincintre, quand l'arc avait un plus grand diamètre ; l'ogive pour les arcs voisins d'un diamètre moins étendu; on conservait le même rayon, on changeait seulement le point de centre et on arrivait ainsi au même sommet en partant de la même base, c'est ce qu'on remarque dans les arcs doubleaux des bas-côtés de l'église de Sens; ils sont en plein-cintre, tandis que les arcs latéraux des travées prennent la forme ogivale.

Je dois ajouter que l'abside de la chapelle Saint-Jean m'a paru évidemment être l'œuvre du XII. siècle et par conséquent se rattache au plan général; comme il paraît certain qu'il y en avait une semblable dans le transept méridional qui a été remplacée par la chapelle que le XIV. siècle a élevée en l'honneur de la très-sainte Vierge, il faut nécessairement abandonner l'opinion qui a été émise, que le transept n'existait pas dans le plan du XIII. siècle.

Telles sont, Messieurs, les observations archéologiques que je devais vous soumettre ; passons maintenant à l'iconographie.

GRAND PORTAIL.

Le grand portail de la métropole de Sens présente, comme nos principales églises, plusieurs pages de ce que nous pouvons appeler le catéchisme mural : dédié à saint Etienne, premier martyr et patron primitif, il devait d'abord nous tracer, par quelques traits saillants, l'histoire abrégée de ce glorieux martyr; aussi le pilier symbolique est-il orné de la

statue du saint, portant le livre de la loi divine qu'il expliquait avec tant de zèle. Au-dessus, dans le tympan, on le voit d'abord au milieu des Juifs qu'il instruit, puis chassé de la synagogue d'où il se retire tenant à la main son livre fermé, puis lapidé par les Juifs. Au-dessus de chacun de ces trois tableaux une main bénissante sort des nuages, indiquant la protection divine assurée à saint Etienne, pendant qu'il remplissait ses glorieuses fonctions, pendant ses épreuves et au moment de sa mort. Le quatrième tableau est tellement fruste que je n'ai pu en découvrir le sujet; avec plus de temps et d'attention on le découvrira sans doute. Deux quatre-feuilles au second plan renferment d'un côté le saint couché et dormant d'un sommeil calme; au-dessus, dans un nuage, on aperçoit un aigle et un lion, symboles des vertus principales qui le distinguaient, le courage et la générosité; de l'autre, deux anges ont reçu l'âme du premier athlète de la foi et la transportent glorieuse devant celui qui doit couronner ses mérites; le Sauveur entre deux anges, du sommet du tympan, attend son généreux serviteur. La cour céleste doit nécessairement être reproduite aux cinq archivoltes qui encadrent cette magnifique scène : ce sont d'abord les anges, puis les martyrs, puis les autres saints de toutes les conditions; la dernière archivolte présente une particularité assez rare tous les personnages qui la composent portent en main un disque orné d'une fleur. Ce disque, ou plutôt ce nimbe qui doit orner leur tête, il a fallu le mériter; il doit être la récompense de la vertu, et le souverain rémunérateur qui ne fait acception de personne, exigera cette vertu pour prix de cette portion de sa gloire qu'il leur a promise; cette vertu est indiquée par la fleur qui en est le symbole et que nous remarquons sur le disque; les deux statues le plus rapprochées du sommet du tympan portent sur leurs disques l'une un phénix au milieu des flammes, l'autre un aigle ou une colombe. Nos actes n'arrivent au degré de vertu qu'autant qu'ils sont

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