Page images
PDF
EPUB

cours aux monuments du pays qui en auraient un plus pressant besoin; 3°. de voter la pose d'inscriptions monumentales aux lieux rendus célèbres par quelque fait historique peu connu ou exposé à l'oubli par l'absence d'aucun signe qui le rappelle.

M. de Caumont témoigne, en finissant, du désir qu'a la Société française d'entretenir avec les Sociétés locales et avec cel'e de Picardie en particulier un lien de fraternité et de mutuel appui qui ne peut que profiter à la science, comme l'expérience l'a déjà prouvé.

M. Lemerchier répond, au nom de l'assemblée, à l'allocution qu'elle vient d'entendre, et assure que les membres de la Société française résidant à Amiens, ne retireront jamais leur sympathie ni leur concours à la compagnie dont ils ont l'honneur de faire partie.

Il donné ensuite la parole à M. le docteur Rigollot qui entretient l'assemblée des sculptures remarquables qui se voient en Saxe, à Freiberg et à Weschselbourg, dans lesquelles les archéologues allemands ont cru trouver les œuvres d'une école toute germanique qui, établie dans l'Erzgebirge saxonne au XII. siècle, aurait servi de modèle à Nicolas de Pise; tandis que d'autres n'y ont vu que l'ouvrage d'un artiste florentin du XV. siècle. L'auteur du mémoire demande en terminant ce qu'il faut penser de ces deux assertions si différentes.

La réunion pense que la question mérite d'être sérieusement étudiée et que M. Rigollot est plus à même que qui que ce soit de la résoudre à l'aide de sa grande et judicieuse érudition.

M. l'abbé Bourgeois lit ensuite un mémoire sur l'église de St.-Germer-en-Bray, département de l'Oise. Après avoir fait l'histoire et la description de ce monument, un des plus remarquables de l'époque du XI. siècle que nous pos

sédions en France, M. le curé de Grandvilliers expose l'état d'abandon où il se trouve et qui pourrait devenir pour lui une cause de ruine ou du moins de grave détérioration, et conclut à demander que la Société française émette auprès de l'administration supérieure le vœu de la conservation de ce monument, et qu'elle prenne pour en assurer la réalisation toutes autres mesures qu'elle jugera convenables.

DESCRIPTIOn de l'égliSE ABBATIALE DE ST.-GERMER;

PAR M L'ABBÉ BOURGEOIS.

MESSIEURS,

A la limite occidentale du département de l'Oise, il existe un bourg célèbre par son site, ses souvenirs et les monuments qu'il possède encore, je veux parler de St.-Germeren-Bray, situé dans la vallée de Bray, si remarquable par la richesse et la variété de son paysage, dominée par des hauteurs d'où se déploie un magnifique panorama. St.-Germer, réduit maintenant à de bien modestes proportions, a eu, dans le moyen-âge, une importance historique, grâce à l'abbaye dont il fut doté; les murs d'enceinte avec leurs tourelles, dont plusieurs existent encore, l'ancienne porte ogivale, l'ancienne maison abbatiale avec sa corniche du XI. siècle, les débris des bâtiments claustraux transformés aujourd'hui en habitations particulières, l'étang et les jardins qui ont conservé leur beauté sous les auspices d'un riche proprié– taire, tels sont les restes d'une antique splendeur, tel est l'entourage d'une église et d'une chapelle qu'on peut signaler comme des chefs-d'œuvre. L'église dont la longueur totale, dans œuvre, est de 67"., la largeur de 18, et la hauteur sous voûte de 19, est construite en craie dure de moyen appareil. Bâtie en 1036, sous la direction de Druen, qui

occupait le siége épiscopal de Beauvais, et qui était autorisé en vertu d'une bulle accordée à l'un de ses prédécesseurs, à toucher les revenus de l'abbaye, l'église de St.-Germer a la forme d'une croix latine dont les bras sont peu étendus, et la tête se termine en hémicycle; le chœur est extrêmement court comparativement à la nef, qui encore n'est pas complète aujourd'hui ; car les tours et le portail ont été détruits par la garnison de Gournay, du temps de la guerre des Bourguignons ; le chœur n'a qu'une travée avec l'abside, tandis que la nef a neuf travées, en comptant celles des transepts: son plan se rapproche, à cet égard, de celui de plusieurs basiliques anciennes, telles que l'église de St.-Pierre-ès-Liens, dont le plan est dans le savant ouvrage de M. de Caumont.

On ne remarque pas de décroissement dans l'élévation des parties; le chœur, la nef et l'abside sont de même niveau ; les collatéraux ne s'arrêtent pas aux transepts suivant la règle ordinaire des églises de cette époque, mais ils font complètement le tour du chœur ; contre l'usage encore, cinq chapelles rayonnaient originairement autour de l'hémicycle, aujourd'hui il n'en reste plus que trois, parce que l'une d'elles, celle de retro, fut supprimée dans le XIII. siècle pour ouvrir un magnifique atrium qui conduit à la Ste.-Chapelle; l'autre a pu être détruite pour faire place aux bâtiments claustraux, dont une partie était adossée au côté septentrional de l'église. Ces chapelles resserrées entre deux contreforts ont, comme le chœur, une forme semi-circulaire ; les tours et les portails détruits n'ont pas été remplacés seulement la façade de la grande nef a été bouchée par une maçomerie de briques, dans laquelle on a pratiqué une grande fenêtre à meneaux, ornée à sa base de l'écusson de Guy-de-Villiers de l'Isle Adam, frère de l'évêque de Beauvais et du grand maître de Rhodes, qui fut le dernier abbé régulier, car après lui l'abbaye passa en commande: cette

T

maçonnerie est soutenue par un portique moderne qui sert aujourd'hui d'entrée unique, car la baie d'un portail latéral pratiquée au transept sud est bouchée, et il n'y a plus d'ouverture au côté nord depuis la destruction du monastère. L'aspect de l'église, à l'entrée de la nef, a quelque chose de saisissant ; la longueur, l'élévation, la majesté et l'harmonie de l'ensemble, la beauté de l'abside, la Ste-Chapelle dont l'axe un peu incliné ne permet pas de découvrir toute l'étendue, et qui ne se révèle aux yeux de l'observateur que d'une manière mystérieuse; enfin, certaines particularités qu'on ne trouve nulle part ailleurs, telles sont les causes de l'impression dont personne ne peut se défendre à la vue de ce magnifique monument. La nef a huit travées jusqu'aux transepts, chacune d'elles est déterminée par quatre piliers de front, dont deux sont engagés dans les murs des collatéraux, et deux s'élèvent à la hauteur des voûtes, complètement dégagés dans le bas jusqu'à la retombée des arceaux des voûtes collatérales, puis, à demi perdus dans la maçonnerie jusqu'à la retombée des arceaux de la voûte principale. Les deux piliers engagés dans le mur de la façade et les deux suivants, qui probablement devaient servir de support aux anciennes tours, sont plus volumineux que les autres; cependant leur volume est dissimulé par leur constitution; ils sont flanqués de dix-sept colonnes plus ou moins grosses suivant leur destination, avec quatorze angles qui les séparent; la base élevée d'un mètre environ au-dessus du sol, a un dé octogone surmonté de vingt-quatre angles saillants; les piliers du reste de la nef, jusqu'aux transepts, ne présentent que de légères modifications entr'eux, et ne diffèrent des précédents que parce qu'ils sont d'une moindre dimension, d'ailleurs c'est le même système; en voici la constitution : quatre grosses colonnes destinées à soutenir les arceaux parallèles des voûtes et les arcades de l'entre-colonnement: huit petites,

dont deux entre chaque grosse colonne; l'une, plus volumineuse, supporte les nervures transversales des voûtes; l'autre plus petite supporte, du côté de la grande nef, une tablette saillante dont je parlerai, et aux collatéraux de petites arcades; douze formes anguleuses séparent les colonnes, le soubassement est prismatiquement découpé et la base des fûts est ornée de pattes aux angles du socle et des moulures rondes, soit en saillie, soit en creux, tels que quarts de rond, tores, etc., etc. Les quatre piliers du transept se composent de quatre grosses colonnes à demi cantonnées et de quatorze colonnes inférieures de grosseur différente; les six piliers de l'hémicycle du chœur forment un groupe de huit colonnes; trois d'entr'elles sont réunies et s'élèvent avec grâce jusqu'à la tablette saillante qui règne autour de l'église. Les grandes arcades qui mettent la nef en communication avec les collatéraux, sont à tiers-point avec les moulures qui caractérisent l'ogive romane; à l'abside, elles sont ornées de zig-zags. Dans le plein du mur, au-dessus des arcades ressort une saillie composée de plusieurs moulures rondes qui se profilent sans interruption, si ce n'est aux plus gros piliers de la nef et à ceux du transept; ce cordon sert de bordure à la tablette du mur d'appui d'un triforium maintenant bouché dans la nef, mais ouvert encore dans le transept et le chœur. Partout les arcades de ce triforium sont à pleincintre surbaissé dans la nef, mais exhaussé à l'abside à cause de l'espacement plus étroit de l'entre-colonnement; les deux extrêmes latérales qui sont tripartites présentent une arcade intermédiaire en fer à cheval double en hauteur des autres ; au chevet seulement un second cordon se profile sur les colonnes groupées au niveau des tailloirs des petites colonnettes du triforium, de sorte que les piliers du chœur sont annelés à deux endroits, tandis que ceux de la nef ne le sont qu'à la hauteur de la tablette de la galerie. Quelques-uns des tym

« PreviousContinue »