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M. Pelfresne met sous les yeux de l'assemblée ce projet de clocher pour l'église d'Ecrammeville. L'élévation de cette tour placée en avant de l'église est de 36m. 60°. Le style pur et correct est celui du XIV. siècle, époque de laquelle datent les autres parties du monument, et l'aspect général est on ne peut plus satisfaisant; l'exécution de ce projet aurait entraîné une dépense de 35,000 fr.

Le même architecte soumet encore à la Société le plan d'un clocher en style du XIII. siècle, qui est actuellement en voie d'exécution à Esquay-sur-Seulles. Cette jolie flèche, dont la hauteur doit être de 25 mètres, ne coûtera que 6,400 fr., preuve évidente et incontestable que le style ogival, doué d'un caractère éminemment plus religieux que les autres genres d'architecture, n'entraîne pas de frais d'exécution plus considérables.

La Société engage M. Pelfresne à persister dans la voie où il est entré et où il promet de marcher brillamment.

M. Bouet, à son tour, donne communication de plusieurs dessins dans lesquels il reproduit, avec un talent et une fidélité remarquables, plusieurs monuments du pays.

M. Lambert présente aussi le dessin qu'il a relevé d'une pierre tumulaire dans le chœur de l'église d'Engranville.

Ce dessin offre d'autant plus d'intérêt que l'église d'Engranville va être très-prochainement démolie, cette paroisse ayant été pour le culte réunie à celle de Formigny.

L'église d'Engranville offre des parties curieuses. MM. Lambert et Villers signalent entr'autres son chœur, qui est du XIIIe siècle, et dont la voûte est élégante et hardie; à un des côtés de la nef, on voit aussi une porte romane d'une grande beauté et dont l'architecture présente une particularité unique dans le pays et probablement fort rare en Normandie, les claveaux en sont évidés. La destruction de ce monument est donc fort regrettable, et il serait fort à désirer que la

Société pût arrêter la ruine imminente qui plane en ce moment sur lui.

M. de Caumont confirme ce témoignage sur l'importance monumentale de l'église d'Engranville qu'il connaît, et il engage la Société à voter une somme de 400 fr. qui, dit-on, sera suffisante pour en faire l'acquisition.

La Société accueille avec empressement cette proposition et nomme MM. Lambert, Gaugain, Villers et de Bonnechose, propriétaires dans le canton, pour négocier l'achat.

M. Gaugain rappelle à la Société que précédemment elle avait alloué une somme de 150 fr. pour la restauration du prieuré de St.-Arnould. De leur côté, les habitants se sont cotisés. M. le colonel Langlois a donné 400 fr., et une somme de 1,000 fr. a été réunie; les travaux ont donc été entrepris et conduits à fin. Au dire de l'architecte, cette restauration aurait rempli le but que l'on se proposait, mais la fabrique de Tourgeville serait loin de partager cette satisfaction; de là, divergence d'opinions et rapports d'architectes experts contradictoires; aussi paraîtrait-il prudent que la Société ne versât son allocation que quand elle sera éclairée par le rapport d'un troisième architecte.

affirme que

la

M. Bouet, qui a été témoin des travaux, direction n'en a pas été convenable, en ce sens qu'elle n'aurait pas mis l'édifice en état de le rendre au culte, condition expresse imposée par la Société, dans le but d'en assurer désormais la conservation par la consécration religieuse.

La Société décide qu'avant de verser l'allocation promise, elle s'assurera préalablement de leur parfaite exécution et qu'il en sera écrit à M. Le Métayer-Desplanches, commissaire de la Société à Pont-l'Evêque.

Sur la demande de M. Gaugain, 50 fr. sont mis à la disposition de M. le curé de Vaucelles, près Bayeux, pour contribuer à la restauration du chœur de son église; il s'agit

de restituer des parties de colonnettes mutilées dans le XVII. ou le XVIII. siècle.

La parole a été ensuite donnée à M. Le Flaguais.

Le vote récent, par le conseil municipal de Paris, de la construction de l'église Ste-Clothilde, et l'adoption de ce projet par le conseil des bâtiments civils, a, comme on sait, soulevé les colères de l'académie des beaux-arts. Indignée que l'on osat tenter de faire revivre ces types merveilleux créés par le génie de nos pères au milieu de la plus grande ferveur du catholicisme, la docte assemblée, par la bouche éloquente de M. Raoul-Rochette, a fulminé un terrible anathème contre la témérité de ces hommes qui ne craignent point de mettre en doute la convenance d'un temple payen tel que la Madelaine, pour le culte catholique. L'architecture ogivale n'est plus qu'un cadavre, dont on peut admirer la puissance passée, mais qu'il faut bien se garder de chercher à ranimer.

Devant cet acte d'intolérance, l'auteur des Neustriennes s'est indigné à son tour; et prenant la défense de l'art chrétien, dont l'esprit anima Piel, de même que tous les jours il suscite tant d'efforts généreux, dont l'Académie aurait dû au moins respecter le désintéressement, sa muse a noblement répondu à l'étrange manifeste, et glorieusement vengé la renaissance de l'architecture ogivale des attaques de ses détracteurs.

La pièce de vers de M. Le Flaguais, aussi remarquable par le charme de la poésie que par l'élévation et la recherche des idées, est intitulée : Aux Antiquaires. La Société française a accueilli avec enthousiasme cette apologie de ses labeurs, et en a voté l'impression par acclamation.

Lors de son apparition, la lecture du rapport de M. Raoul-Rochette avait aussi inspiré, à M. Georges Villers, l'idée d'en entreprendre la réfutation. Son travail a paru

réunir les suffrages de l'assemblée, elle en a voté l'impres

sion (1).

Le Secrétaire,

Georges VILLERS.

SÉANCES TENUES A AMIENS.

Séance du 6 novembre 1846.

Etaient présents MM. de CAUMONT, directeur de la Société française; LEMERCHIER, docteur en médecine; RIGOLLOT, docteur en médecine, inspecteur des monuments de la Somme; l'abbé BOURGEOIS, curé de Grandvilliers (Oise); de CAYEUX, membre de l'Académie d'Amiens; Amable DUBOIS, id.; MAthieu, id.; BarBIER, docteur en médecine; GUÉRARD, président de la Société des antiquaires de Picardie; LE BOULLENGER, chanoine de la cathédrale d'Amiens; marquis de CLERMONT-TONNERRE; de GESTAS, Ch. DUFOUR, DUVAL, JOURDAIN, membres de la Société française.

La séance est ouverte à 6 h. 112 du soir.

Sur l'invitation de M. de Caumont, M. le docteur Lemerchier occupe le fauteuil de la présidence, et M. l'abbé Jourdain remplit les fonctions de secrétaire.

La parole est à M. de Caumont, qui rend un compte sommaire de l'état actuel des travaux de la Société et expose le but de la présente réunion. Il dépose sur le bureau diverses

(1) V. dans le XII. volume du Bulletin le mémoire de M. Villers et les vers de M. Le Flaguais.

brochures qui témoignent du zèle, de la persévérance et du succès avec lesquels sont poursuivies les études archéologiques.

On y remarque 1°. le Coup-d'œil sur le Congrès archéologique tenu à Metz et à Trèves dont M. de Caumont fait hommage à la Société des antiquaires de Picardie et aux membres présents de la Société française.

2o. Un ouvrage ayant pour titre : Définition Elémentaire de quelques termes d'architecture. 180 dessins sur bois d'une très-belle exécution accompagnent la plupart des définitions, et rendent ce livre infiniment utile aux hommes qui veulent s'initier à l'étude de l'archéologie monumentale. L'auteur en confie un certain nombre d'exemplaires à la Société pour être distribués gratuitement aux écoles ou aux instituteurs primaires.

3o. La Table générale analytique et raisonnée des matières contenues dans les dix volumes formant la première série du Bulletin monumental, par M. l'abbé Auber. Cette espèce de dictionnaire encyclopédique de la science archéologique, telle qu'elle a été formulée et rendue classique depuis quinze ans, a dû coûter beaucoup de travail et de patience à M. l'abbé Auber. M. le directeur de la Société française en offre un exemplaire à la Société de Picardie en rendant hommage au zèle et au savoir qui la distinguent et qui donnent une impulsion efficace au goût et à l'étude des antiquités dans cette province. Il se plaît à encourager en particulier les travaux de MM. Duval et Jourdain qui ont communiqué quelques articles au Bulletin monumental, et il remet à ces messieurs un second exemplaire de l'ouvrage de M. Auber.

M. de Caumont développe ensuite le but de la présente réunion qui est 1°. de recevoir les communications des membres de la Société française résidant à Amiens; 2°. de mettre à leur disposition une somme de 500 francs pour porter se

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