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M. Rozet proposerait de faire un appel officiel au bon vouloir de chaque membre.

M. Élie de Beaumont rappelle, à ce propos, que tout membre est libre d'envoyer, de lire, de déposer sur le bureau des analyses de travaux qu'il aura crus importants; les Secrétaires ou la Commission du Bulletin décident ensuite sur le choix de ces analyses.

:

Enfin, M. le Président répond à toutes ces observations qu'à côté de la question d'utilité doit être placée la question d'argent évidemment une revue des travaux géologiques, publiée en dehors des travaux habituels de la Société, aurait une utilité très grande, surtout pour les membres éloignés des bibliothèques publiques et des grands centres scientifiques; mais jusqu'à quel point la Société serait-elle prête à subvenir aux frais d'une semblable publication? La question d'argent est donc ici trop grave, et elle ne peut être résolue en séance de la Société; en conséquence elle sera renvoyée à la décision du Conseil.

Note sur le calcaire pisolitique, par M. Hébert.

J'ai l'honneur de mettre sous les yeux de la Société quelques échantillons de fossiles appartenant au terrain désigné sous le nom de calcaire pisolitique, et en dernier lieu de terrain danien par M. Desor. Ces échantillons sont dans un état de parfaite conservation; les formes, les ornements mêmes des espèces dont ils présentent les empreintes ou les moules, y sont reproduits sans la plus légère altération. Jusqu'ici les localités où l'on a pu observer ce terrain, Laversine, Bougival, Port-Marly, Meudon et Vigny, n'avaient donné que des débris mal conservés. Il y a quelques jours, en parcourant les limites du dépôt du calcaire grossier, entre Houdan et Meulan, j'ai rencontré dans la vallée de la Mauldre, près d'un petit hameau, situé à 1 kilomètre de Mareil, et nommé Falaise, une roche d'une vingtaine de pieds d'élévation et d'une étendue à peu près égale en longueur, qui me parut appartenir au calcaire pisolitique. Cette roche, dont voici un échantillon, contenait, en effet, en abondance une petite Lime semblable à celle de Laversine, et ses caractères minéralogiques favorisaient ce rapprochement; mais il n'y avait guère d'autres fos

siles reconnaissables que cette Lime. Je me suis assuré depuis qu'un échantillon de cette même localité avait été déposé en 1841 dans la galerie de géologie du Muséum par M. Raulin. Je ne tardai point à apercevoir de l'autre côté de la vallée, et au même niveau, un amas de rochers, les uns en place, les autres éboulés, que de près je reconnus immédiatement pour un calcaire identique à celui de Vigny. L'épaisseur de ces couches y est à peu près la même qu'à Vigny, 25 mètres au moins. La roche est plus compacte qu'à Vigny; les fossiles y sont moins encroûtés et les empreintes qu'ils ont laissées ont en général une netteté admirable. Dans les échantillons que j'ai rapportés on remarque :

1o Un fragment de ce fossile Turriculé, désigné fort improprement sous le nom de Cerithium giganteum. D'autres échantillons que j'ai placés ici sous vos yeux, et qui viennent de Laversine et de Vigny, rendront évident pour tout le monde que c'est une espèce tout à fait distincte et nouvelle; c'est d'ailleurs l'opinion de M. Deshayes.

2o Des empreintes de Cérites et de Nérinées, qui ont des ressemblances soit avec le jeune de la grande espèce de Cérites de Maestricht, soit avec la Nerinea Marrotiana (d'Orb.) de la craie supérieure de Royan. Dans tous le cas on peut affirmer que ces empreintes n'appartiennent à aucune espèce connue du calcaire grossier.

3o Un Oursin du genre Hemiaster, que M. Desor regarde comme étant très voisin de l'H. inflatus. Cette espèce établie sur un échantillon unique du Muséum, et dont l'origine est inconnue, ne nous fournit aucun renseignement nouveau.

4 Une Pleurotomaire, voisine du P. royana (d'Orb.), de la craie supérieure de Royan, et paraissant identique avec un échantillon de la collection de M. Deshayes, et qui vient de la craie supérieure de Valognes. J'ajouterai que les caractères minéralogiques de cette craie de Valognes, à en juger par cet échantillon, l'identifient avec le calcaire de Vigny et de Falaise.

5° Plusieurs empreintes très nettes et très complètes de Mollusques acéphalés, dont pas une n'appartient à une espèce tertiaire. 6o Des Polypiers parmi lesquels il y en a un identique avec celui figuré par Goldfuss sous le nom d'Astrea arachnoides (craie de Maëstricht). M. Michelin a bien voulu me donner la conviction de cette identité, et par son avis, et par l'examen comparatif que j'ai pu faire dans son cabinet d'un échantillon venant de Maestricht avec le mien.

Je présente ces échantillons comme une preuve nouvelle de l'exactitude de l'opinion émise en 1834 par M. Élie de Beaumont sur l'identité du calcaire de Laversine et de Vigny avec la craie de Maestricht. Cette opinion, fortifiée par les observations de M. Graves sur les fossiles de Laversine, et par celles de M. Desor sur un Cidaris de Vigny (Cidarites Forchhammeri, Desor), qu'il a retrouvé dans le calcaire de Faxoë, rapporté par lui et par M. Deshayes au même horizon géologique, me paraît aujourd'hui généralement admise.

Le seul point qui serait peut-être encore contesté par quelques personnes serait la réunion du calcaire de Vigny et des couches observées à Port-Marly, Bougival et Meudon. Qu'il me soit permis d'ajouter un mot sur ce sujet. J'ai visité ces localités pour la première fois avec M. Élie de Beaumont, j'y suis retourné seul, et enfin j'ai eu le plaisir de conduire récemment MM. Graves et Desor à Vigny, à Port-Marly et à Bougival. A Port-Marly nous avons constaté l'identité des couches inférieures avec le dépôt de Vigny et de Laversine; ces couches inférieures reposent immédiatement sur la craie blanche, mais la surface de contact est nette et tranchée. La couche supérieure est brisée, démantelée, et ses débris sont de toutes parts enveloppés d'argile plastique. Une grande partie de ces débris sont des blocs alignés, formant presque une couche continue. Ces blocs ont un autre aspect que le reste du dépôt. Ils n'ont plus l'apparence crayeuse; ils ressemblent davantage à du calcaire compacte. A Bougival, la partie inférieure manque, comme manquent aussi les couches supérieures de la craie. Celles-ci, aussi bien que le calcaire de Port-Marly, ont été bouleversées; mais l'identité des débris a pu être facilement constatée, sans qu'un seul doute ait pu subsister dans l'esprit d'aucun de nous. J'avais personnellement la conviction que ces blocs de calcaire compacte, à texture cristalline, qui entrent à Bougival dans la composition du ciment hydraulique, n'étaient que la représentation des couches supérieures de Vigny, dont je dépose un échantillon, lesquels sont là bien en place, et qui ont exactement la même texture; mais ces messieurs n'ont pas tardé à y remarquer les inêmes fossiles que dans les couches inférieures, et entre autres les mêmes polypiers caractéristiques, et dès lors il ne fut plus question de distinction entre ces diverses couches. Il en est de même de Meudon, dont le calcaire dit pisolitique n'a jamais été séparé par personne de celui de Bougival.

D'après la disposition de ce calcaire dans la vallée de la Mauldre,

à Vigny, et en divers points de la vallée de la Seine, il me semble prouvé aujourd'hui qu'il s'est déposé en couches horizontales, qui s'étendent à l'O. de Paris, sous les bois de Meudon, de Saint-Cloud, la forêt de Marly, celle des Alluets, et sous les plaines de calcaire grossier qui séparent Vigny de Meulan.

Il se pourrait aussi que Vigny fût une des limites N. de ce dépôt, et Falaise une des limites S.-O. Nous avons, en effet, MM. Graves, Desor et moi, constaté qu'à Vigny le calcaire pisolitique est adossé au N. contre la craie, et, bien que le sol ne soit point entamé de manière à faire voir nettement la superposition, je pense que je ne m'écarterai pas beaucoup de la vérité en donnant pour cette localité la coupe suivante, dans laquelle les hauteurs sont beaucoup exagérées proportionnellement aux longueurs.

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Au S., au contraire, nous pensons que ce dépôt, que nous avons retrouvé de l'autre côté de la vallée, pourrait bien rejoindre de ce côté la portion que la vallée de la Mauldre a mise à découvert.

Dans cette vallée, quelque chose de tout à fait analogue se présente. Du côté de Beyne, la craie paraît être plus élevée que le dépôt de calcaire pisolitique, tandis que ce dernier passe évidemment de l'autre côté de la vallée, sur la rive droite de la Mauldre, sous le calcaire grossier, pour aller, sans aucun doute pour moi, sous la forêt des Alluets, sous la forêt de Marly et les bois de Meudon, rejoindre les dépôts observés dans cette partie de la vallée de la Seine. Toutefois, à cause des ondulations de la craie qui ne paraît pas avoir, même aux portes de Paris, été entièrement sous les eaux lors de ce dépôt, et des ravages causés par l'éruption violente qui a accompagné la période tertiaire, la continuité peut ne pas exister dans cette étendue.

On a signalé le calcaire pisolitique en plusieurs autres points du bassin de Paris, à Montereau, aux environs d'Épernay et de Sezanne. N'ayant pu étudier ces localités par moi-même, je m'abstiendrai d'en parler (1).

M. Desor a proposé de substituer le nom de terrain Danien à celui de calcaire pisolitique. Je trouve comme lui que rien n'est moins pisolitique que les 80 pieds d'épaisseur du calcaire de Vigny et de Falaise. Je pense aussi qu'il vaut mieux emprunter les noms des terrains à la géographie qu'aux caractères minéralogiques. Toutefois, comme ce n'est point en Danemark que ce terrain paraît présenter le plus de développement, que ce n'est point là que les relations avec les couches entre lesquelles il est compris paraissent les plus claires, je ne puis m'empêcher d'espérer une dénomination plus satisfaisante et de regarder comme provisoires celles qui ont été proposées jusqu'à ce jour.

M. Constant Prévost, à la suite de cette lecture, rappelle que des dépôts analogues à ceux de Bordeaux, de Vigny et de Meudon, paraissent exister sur une plus grande échelle à la ceinture E. des terrains tertiaires parisiens, de Reims à Montereau (Mont-Aimé, plateau de la Madelaine, etc.). Il demande si M. Hébert a constaté l'identité de ces dépôts avec ceux qu'il a décrits; il fait observer, en thèse générale, qu'il y aurait des inconvénients à se hâter de donner un nom spécial à un terrain encore peu connu, et qui pourrait n'être qu'un membre des terrains supérieurs ou inférieurs.

Au sujet du travail de M. Hébert et par suite de la discussion, qui n'a fait que soulever de nouvelles incertitudes relativement au terrain pisolitique des environs de Paris, M. Rozet s'élève fortement contre l'abus que l'on a fait dans ces derniers temps des caractères empruntés aux fossiles pour la détermination de l'âge des terrains. Les fossiles n'ont qu'une valeur tout-à-fait secondaire; en général, il faut se méfier beaucoup des détermi

(1) Depuis que cette communication a été faite, j'ai vu chez M. Duval, pharmacien, barrière d'Italie; des échantillons recueillis par lui au Mont-Aimé près Sézanne. Ces échantillons appartiennent évidemment au calcaire pisolitique; ils renferment les mèmes fossiles qu'à Vigny et à Falaise; ils ont aussi la même structure concrétionnée.

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