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les conséquences nombreuses qui précèdent. En général, j'ai droit d'attendre que, si l'on veut présenter une autre hypothèse que la mienne sur les pierres d'Imatra, ce soit une solution précise et logique, et non des assertions vagues du genre de celles que le siècle actuel n'a pas encore fait disparaître de la géologie.

M. Virlet répond que lorsqu'il a analysé le Mémoire de M. Parrot, il ne connaissait pas les pierres d'Imatra, mais que depuis il a eu occasion d'en voir un assez grand nombre d'échantillons, dont il possède plusieurs, et que l'inspection de ces pierres noduliformes l'ont confirmé dans l'opinion qu'elles sont bien le résultat d'un transport moléculaire, électrique ou non, postérieur au dépôt de la roche qui les renferme. En effet, à la cassure, surtout si on insuffle dessus, on reconnaît encore très distinctement les différentes zones ou strates du terrain, et leurs différents degrés de compacité, qui déterminent ou les rainures ou les moulures des nodules. Cette agrégation de molécules calcaires ou silicéo-calcaires, qui sont venues s'interposer sur certains points au milieu des strates argilo-sableuses d'Imatra, et y former des nodules quelquefois très rapprochés et adhérents entre eux, est donc tout-à-fait analogue à celle qui a produit les sphérosidérites, les ludus, les clavia (nodules de plitanite), les cherts, les chailles, les silex, les minerais de fer en grains. et géodiques d'alluvions ou ces minerais en plaquettes connus sous les noms de minerais des lacs, des marais, de prairies, de gazons, etc. (1), et même certains grès qui doivent leur ciment siliceux ou calcaire à un phénomène de transport moléculaire analogue. Enfin, les grès calcarifères cristallisés en rhomboèdres de Fontainebleau se sont encore formés de la même manière. Il y a des couches où les nodules sont encore bien plus nombreux qu'à Imatra, à ce point qu'ils se confondent les uns dans les autres, et qu'ils forment parfois des couches continues, où l'on ne distingue plus les formes nodulaires que par les ondulations que présentent les plans de surfaces. Quant à la présence du soufre à l'état de soufre dans les pierres d'Imatra, ajoute M. Virlet, le fait m'a paru assez difficile à expliquer pour que j'aie voulu le faire vérifier. J'ai priè, en

(1) Voir à ce sujet une nouvelle note insérée au Bulletin, 2o série, t. III, p. 150.

conséquence un de nos jeunes chimistes, M. Alphonse Salvétat, de vouloir bien faire l'analyse d'une des pierres d'Imatra, rapportées par M. Édouard de Verneuil, et l'on peut voir par les résultats ci-après de cette analyse, que sa composition diffère essentiellement de celle trouvée par M. Parrot; ce qui peut tenir, au reste, à ce que les mélanges des matières qui composent ces nodules peuvent varier beaucoup, suivant les échantillons et même suivant les parties d'échantillons ou des couches qui les renferment; quant au soufre indiqué, il est très probable qu'il provient des réactifs employés ainsi le carbonate de soude qui est très fréquemment mélangé de sulfate, pourrait, si on ne tenait pas compte de cette circonstance, donner un précipité de sulfate de baryte par le chlorure de barium.

:

Analyse d'une pierre nodulaire d'Imatra, en Finlande; par M. Alphonse Salvétat, chimiste de la manufacture royale de porcelaines de Sèvres.

Cette pierre, attaquée comme à l'ordinaire par le carbonate de soude, a donné 34,06 de son poids de silice qui s'est dissoute complétement dans une dissolution de soude caustique assez étendue, en laissant cependant de légers flocons qui ont été reconnus être de l'acide titanique. Une seconde analyse a donné pour le poids de la silice titanifère 33,90 p. 100.

Soumise à un lavage par l'acide nitrique faible, cette pierre donne un résidu plastique, de la couleur de la pierre elle-même, ayant tous les caractères d'une argile impure, laissant dégager de l'eau par calcination, et prenant, sous l'influence d'une chaleur rouge, une couleur brun-rouge prononcée, par suite de la peroxydation du fer qui s'y trouve. Cette matière argileuse, soumise à des lévigations opérécs avec soin, et répétées souvent, laisse un résidu de sable micacé à grains assez gros et transparents. Le mica est incolore mais à reflets nacrés et verdâtres; on remarque aussi quelques grains noirs, solubles à froid dans de l'acide hydrochlorique. La présence du mica dans ces sables explique l'alcali, qu'une attaque par l'acide hydrofluorique m'a fait reconnaître.

J'ai fait, selon votre désir, de nombreux essais pour arriver à constater la présence du soufre, mais je n'ai pu en reconnaître la plus petite trace, et il est évident que la pierre que vous m'avez remise n'en renferme pas du tout; il paraît aussi résulter de mon analyse, comparée à celles qui ont été publiées, que le sable argileux, mêlé au calcaire, est très variable dans sa composition. Je

ne m'explique pas la forte proportion d'alumine ferrugineuse par rapport à la silice, trouvée dans ces analyses : l'argile la plus alumineuse n'en contient pas autant, et bien certainement là, elle est mélangée à une forte proportion de sable. Voici les résultats de mon analyse:

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M. Durocher fait la communication suivante :

Études sur les phénomènes erratiques de la Scandinavie, par J. Durocher.

Observations successives qui ont eu pour objet les phénomènes erratiques du Nord de l'Europe.

M. de Lasteyrie et M. Al. Brongniart ont décrit, il y a déjà longtemps, les caractères généraux des érosions et des dépôts erratiques de la Suède; plus tard, M. Sefström a déterminé les directions des stries dans le midi de cette contrée. Lors de son voyage dans le Nord, M. E. Robert a aussi observé ce phénomène ; la même année, en 1839, M. Böhtlink et moi avons déterminé les directions des sulcatures dans des pays encore inexplorés, en Finlande et dans quelques parties de la Laponie. Les principaux faits du mémoire que j'ai rédigé sur ces questions, et qui se trouve dans la publication des voyages en Scandinavie (1), ont été mentionnés dans le rapport de M. Élie de Beaumont (2); j'y ai fait connaître les caractères des stries et du dépôt de transport, le gisement, la disposition des blocs erratiques, et leur dispersion en Russie, en Pologne, jusqu'au pied des montagnes de la Silésie, de la Saxe, du

(1) Voyages en Scandinavie, en Laponie, etc.

J. Durocher.

Géologie. Par

(2) Comptes-rendus de l'Académie des sciences, séance du 17 jan

vier 4842.

Hanovre, et dans les plaines des Pays-Bas. J'ai signalé la forme presque circulaire de leur limite extérieure, et leur distribution rayonnante à l'intérieur d'un vaste demi-cercle, dont Stockholm est le point central, et dont la circonférence passe aux environs de Kostroma, de Moscou, de Cracovie, de Leipzig, de Bréda, et dans le comté de Cambridge en Angleterre. Depuis cette époque, MM. Murchison et de Verneuil ont étudié ces phénomènes pendant leurs voyages en Russie et dans le midi de la Scandinavie. Je suis heureux de reconnaître que les observations relatées dans le bel ouvrage qu'ils viennent de publier sur la géologie de la Russie s'accordent pour la généralité des faits avec celles que j'avais publiées depuis plusieurs années; et la limite méridionale du terrain erratique, qu'ils ont tracée sur leur carte géologique, coïncide presque exactement avec celle que je lui avais déjà assignée : mais ils ont déterminé son extension, jusqu'alors inconnue, à l'E. du lac Onéga et de la mer Blanche.

Observations faites en Norvége.

Sur la partie du phénomène erratique relative à la Norvége, il a été publié moins d'observations que sur les contrées citées tout-àl'heure; cependant, M. Keilhau a étudié depuis plusieurs années les directions des stries, et a reconnu, comme l'ont fait plus tard MM. Siljeström et Daubrée, qu'elles ne sont pas constantes, mais que dans le fond et sur les flancs des vallées profondes il y a des stries dirigées dans le seus de leur axe, et descendant des montagnes vers le littoral.

Dans le voyage que je viens de faire en 1845, j'ai cherché quelle est la liaison entre les sulcatures de la Norvége et celles de la Suède; le soin minutieux avec lequel j'ai relevé les directions des stries dans les contrées que j'ai explorées sur de très vastes étendues m'a conduit à des résultats nouveaux. J'ai reconnu que la surface de la Suède et de la Norvége a été érodée par plusieurs systèmes d'agents sulcateurs, qui ont suivi des marches différentes, et qui, dans certaines régions, se sont croisés sous des angles plus ou moins grands, se rapprochant parfois de 90".

Caractères généraux des érosions dans la Scandinavie.

Jetons d'abord un coup d'œil sur les caractères généraux des érosions. A la surface des collines mamelonnées et arrondies, les sulcatures appartenant à un même système suivent une direction généralement constante, et ne subissent de déviation notable qu'à l'approche de massifs rocheux un peu étendus et d'une certaine

élévation. Souvent même sur des plateaux ondulés dont les parties hautes atteignent 1000 à 1200 mètres, et qui présentent des différences de niveau de 3 à 400 mètres, comme ceux de la contrée de Röraas, les stries possèdent une allure propre et indépendante de la disposition des accidents de terrain. Dans les régions montagneuses, où il y a des vallées profondes et encaissées entre des flancs abruptes, on voit des sulcatures dirigées dans le sens des vallées; mais souvent sur les hauteurs qui bordent ces déchirures on voit des stries disposées obliquement ou transversalement, produites par des agents érosifs qui ont dû passer par dessus les vallées. Quelquefois on voit des stries descendre des plateaux environnants dans les vallées, suivant des lignes obliques, et venir couper les sulcatures creusées parallèlement au Thalveg, comme je l'ai remarqué sur le flanc droit de la vallée de la Driva, entre Kongsvold et Drivstuen. D'autres fois, au contraire, les stries sortent de la vallée et se reportent sur le plateau adjacent; c'est ce qui a lieu, par exemple, dans la vallée du Nid Elv (Norvége méridionale): sur la rive gauche du lac Nisser, on voit, comme l'a indiqué M. Keilhau sur une carte de ce pays, des stries quitter la vallée, dirigée ici du N. au S., et s'élever vers l'O.-N.-O., en faisant un angle d'environ 60° avec l'axe de la vallée, et se portant vers le plateau situé à l'E., qui est élevé de plus de 1000 pieds audessus du lac Nisser.

Je signalerai encore une circonstance qui me paraît importante : ce ne sont pas les vallées longues et profondes, se rattachant aux plus hautes cimes, qui ont produit les grands systèmes de sulcatures; ainsi les agents érosifs descendus le long de la vallée du Guldbrandsdal, une des grandes vallées norvégiennes, qui remonte jusqu'au pied du Sneehättan et reçoit un grand nombre d'affluents, ces agents, qui s'avançaient du N.-N.-O. vers le S.-S.-E., ont laissé des traces peu nombreuses sur les collines mamelonnées du lac Miösen. Les sulcatures qui sont le plus marquées entre le lac Miösen et Christiania dérivent du N.-N.-E., de régions où les cimes sont comparativement peu élevées; et les forces érosives, au lieu de suivre le cours d'une grande vallée, ont franchi beaucoup de plateaux et de vallons dans un sens oblique à celui de leur allongement.

Classement des directions des stries.

Pour classer les directions des sulcatures, j'ai divisé les espaces que j'ai explorés en zones, dont chacune présente une certaine homogénéité et la prédominance de stries disposées de la même

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