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FLORE CRYPTOGAMIQUE DE BELGIQUE,

par C.-H. DELOGNE.

PRÉFACE.

Natura maxime miranda in minimis.

LINNÉ.

La distribution des Phanérogames dans notre pays est aujourd'hui suffisamment connue; mais il n'en est pas de même des Cryptogames. Si l'étude de ces dernières, malgré son utilité incontestable, n'a pas avancé dans la même proportion, cela tient à plusieurs causes, notamment à la difficulté plus grande de leur étude, et surtout à l'absence d'une Flore cryptogamique qui puisse permettre au commençant de déterminer ses récoltes et d'en apprécier le degré de rareté.

Comparée aux contrées voisines qui, depuis longtemps, possèdent des Flores cryptogamiques complètes, la Belgique est, sous ce rapport, dans un état d'infériorité qu'il importe de faire disparaître au plus tôt. C'est le but que nous nous proposons par la publication de

ce travail.

Nous ne méconnaissons aucune des difficultés qu'il nous faudra surmonter pour le mener à bonne fin. Cette considération que des provinces entières sont encore presque inexplorées ne nous a pas arrêté davantage,

parce que nous avons la preuve que les amateurs ne feront pas défaut; ce qui manque, c'est un ouvrage qui puisse guider les premiers pas et aplanir les plus grandes difficultés.

L'administration du Jardin botanique de l'État avait déjà compris les besoins de la Cryptogamie en achetant, pour l'usage des botanistes belges, plusieurs grands herbiers cryptogamiques, parmi lesquels il faut citer particulièrement celui de Me Libert, de Malmédy, qui récolta des Cryptogames toute sa vie, jusqu'à l'âge de 80 ans ; celui du Comte de Limminghe, qui y dépensa toute sa fortune; celui de l'abbé Coemans, enlevé trop jeune à la science, mais suffisamment connu par ses travaux sur les Lichens et les Champignons. Dans sa pensée, ces richesses devaient servir de base à la rédaction de la Flore cryptogamique du pays. Nous y avons largement puisé, tout en complétant nos renseignements à l'aide de nos observations personnelles, qui datent de plus de vingt ans, et des travaux divers, publiés principalement dans les Bulletins de la Société royale de botanique de Belgique, qui vient d'ajouter à son programme, des herborisations annuelles, spécialement consacrées à la Cryptogamie. En outre, nous avons utilisé les indications fournies par nos correspondants, dont nous avons eu soin de citer les noms à la suite de leurs découvertes. Nous espérons qu'ils voudront bien nous continuer leur utile concours et nous nous faisons un devoir de leur en témoigner ici toute notre reconnaissance. Si notre travail a quelque mérite, il leur en revient une grande part.

En ce qui concerne spécialement l'Embranchement des Muscinées qui ouvre notre travail, nous avons été large dans l'admission des espèces et des genres qui

n'ont pas encore été trouvés en Belgique, mais qui pourraient s'y rencontrer. Nous avons agi ainsi parce que l'expérience nous a appris que souvent on laisse échapper certaines espèces faute d'avoir été prévenu. C'est le même motif qui nous a engagé à traiter quelques genres monographiquement.

Nous avons suivi la classification et la nomenclature du Synopsis Muscorum de Schimper, nous en écartant cependant en plusieurs points.

La liste des ouvrages consultés et l'étymologie des noms de genres paraîtront à la fin des Mousses, avec la table. Mais nous croyons utile de citer ici les principaux · travaux qui ont paru sur la Bryologie en Belgique.

J.-J. Kickx. Flore cryptogamique des Flandres. F. Gravet. Flore bryologique de Belgique. Pleurocarpes.

L. Piré. Recherches bryologiques.

A. Cogniaux. Essai d'analyse des Mousses pleuro-

carpes.

Él. Marchal. Les Muscinées des environs de Visé. H. Verheggen. Mousses, Hépatiques et Lichens des environs de Neufchâteau.

C.-H. Delogne. Contributions à la flore cryptogamique de Belgique, etc.

C.-H. Delogne et Th. Durand. Les Mousses de la flore liégeoise.

C. Roemer. Beiträge zur Laubmoos-Flora des oberen Weese- und Göhlgebietes.

Bruxelles, 1 février 1883.

MUSCINÉES.

Les Muscinées doivent être considérées comme for-mant un Embranchement dans le règne végétal. Elles comprennent trois Classes, savoir:

Les Mousses, les Sphaignes et les Hépatiques. Nous plaçons ci-dessous en regard les principaux caractères qui distinguent ces trois classes.

Mousses.

Anthéridies cylindri

ques.

Une vaginule, excepté Archidium et Andreaea.

Pas d'involucre monophylle.

Capsule se développant hors de l'archégone après l'allongement du pédicelle, excepté Andreaea.

Capsule s'ouvrant par un opercule rarement par des déchirures ou des valves adhérentes au sommet.

Presque toujours une columelle.

Une sorte de spores.

Spores non accompagnées d'élatères.

Une sorte de cellules, très rarement deux (Leucobryum).

Pas de cellules poreu

Sphaignes.

Anthéridies globuleu

ses.

Pas de vaginule.

Pas d'involucre monophylle.

Capsule se développant dans l'archégone avant l'allongement du pseudopode (faux pédicelle).

Capsule s'ouvrant par un opercule.

Une columelle.

Deux sortes de spores Spores non accompagnées d'élatères.

Deux sortes de cellules

ayant chacune des fonc-
tions différentes.

Des cellules poreuses

ses (excepté Leuco-munies de fibres spira

bryum, mais ici sans

fibres spiralées).

Prothalle filamenteux.

lées.

Prothalle filamenteux dans l'eau, lobé hors de l'eau.

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INTRODUCTION.

ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE DES MOUSSES.

CHAPITRE PREMIER.

ORGANES DE VÉGÉTATION.

:

Les organes de végétation sont le prothalle appelé aussi proembryon ou protonéma, la racine, la tige et les feuilles.

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Le prothalle des Mousses est composé de filaments plus ou moins ramifiés et formés d'une série de cellules cylindriques séparées entre elles par des parois verticales. Ces cellules sont remplies d'un liquide mucilagineux et de grains de chlorophylle. Il est facile de suivre le premier développement du prothalle en faisant germer des spores au contact de l'eau. On voit bientôt la membrane interne s'allonger en brisant la membrane externe de la spore et prendre la forme cylindrique; puis apparaît une cloison qui partage la cellule en deux. La cellule formée en dernier lieu s'allonge et se cloisonne à son tour. Pendant que les cellules continuent à se cloisonner de la même manière, d'autres apparaissent latéralement au niveau des cloisons et constituent les rameaux qui s'allongent de même en se cloisonnant.

Chaque prothalle produit ordinairement plusieurs plantes qui apparaissent sur différents points sous forme de bourgeons. Ceux-ci s'allongent et développent une tige et des feuilles. La persistance du prothalle pendant toute la durée de la plante jusqu'à la maturité des fruits constitue un caractère très important; mais ce cas est le plus rare et ne se rencontre guère que chez

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