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Villers, depuis que l'église St-Martin a été supprimée et abattue.

Villers possédait un prieuré hospitalier, fondé en 1366 par Jeanne Bacon, châtelaine de Lisle, dame du Mollay et de Villers. Elle fonda cet hôpital dans un grand manoir qu'elle avait acquis de Perrin Castel, en sa bonne ville de Villers, paroisse de St-Germain, et le dota de 200 livres de rente. Un second acte, passé trois ans après, en 1369, explique les volontés de la fondatrice.

L'administration de l'établissement fut confiée à deux prêtres séculiers, dont l'un était prieur et administrateur en titre, et l'autre chapelain : le prieur devait rendre compte à l'évêque de son administration une fois chaque année.

Cet établissement utile ne demeura pas long-temps dans un état florissant; il fut dans la suite réduit à l'état de prieuré simple.

M. d'Angennes, évêque de Bayeux, substitua au prieur, du consentement du seigneur de Villers, des religieuses bénédictines que l'on appela de l'abbaye des Vignats, près Falaise. La démission du prieur en faveur de la dame de Belin, prieure, est du 26 juin 1643. Le décret de l'évêque, donné le 12 septembre suivant, porte union du prieuré de l'hôpital de Villers au monastère de religieuses nouvellement établi; il fut confirmé par lettrespatentes du mois d'avril 1647 et du 20 février 1650, enregistrées au parlement de Rouen, le 3 juin 1652.

En 1740, le mauvais état du temporel obligea le supérieur de faire défense à la communauté de recevoir des novices; M. de Luynes, évêque de Bayeux, se détermina à supprimer le couvent. Ce projet trouva une opposition

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très-forte dans M. le marquis de Blangy, seigneur de Villers, et dans les religieuses elles-mêmes. Cependant, par un arrêt du 15 avril 1743, l'évêque fut autorisé à transférer ces religieuses ailleurs, et à faire administrer par un économe le revenu du prieuré, en attendant qu'il en fût ordonné autrement.

L'hôpital de Villers a conservé la plus grande partie de ses revenus et est aujourd'hui administré par une dame religieuse.

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7 Le château de Villers, précédé de belles avenues, est situé au midi du bourg, sur la route allant à Aunay. Le côté gauche, avec sa tour carrée angulaire en encorbellement, ce qu'il reste de bossages et de hautes cheminées, peuvent dater du temps de Louis XIII ou de Louis XIV. Le pavillon formant la partie droite de l'édifice près des douves est moderne et d'une grande pesanteur. Il y avait une chapelle sous l'invocation de St-Jacques et de St-Romphaire. Robert de Roncherolles, seigneur du lieu, déclare en 1609, dans un acte de nomination pour cette chapelle, qu'elle était ruinée depuis environ 16 ans : elle fut rebâtie depuis, mais elle n'existe plus...

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Ce château, qui appartient aujourd'hui à M. le baron de Grandclos, n'occupe pas l'emplacement du château primitif: celui-ci, que j'ai décrit dans le 5o volume de mon Cours d'antiquités monumentales, était à quelque distance à l'est; il se composait, d'après ce que j'ai pu conclure par ce qui resté, d'une motte ronde, entourée de fossés. Cette éminence, maintenant couverte de bois, se trouvait à l'un des angles d'une place à peu près carrée, dont le tracé du Vallum est encore indiqué par une dépression au milieu des terres labourées..

Il y a, tous les mercredis, un marché considérable à Villers-Bocage.

SII. De Villers à Vire.

En sortant de Villers, on reconnaîtra facilement que l'on a passé d'une région physique dans une autre région très-distincte: cette région, c'est le Bocage, dont le sol appartient aux terrains intermédiaires et aux terrains primitifs, et présente des élévations et des enfoncements des vallées profondes à pentes rapides; en un mot, des accidents que n'offrent pas habituellement, au moins, les terrains secondaires...

La route que nous avons à suivre jusqu'aux confins de la Bretagne, va se prolonger constamment sur les roches anciennes.

Α peu Ide distance de Villers, on traverse la Seuline. Le village de Tracy, qui se trouve à 1 kilomètre du côté droit, offre une petite église, dont quelques parties sont construites en arêtes de poisson (côté nord de la nef), mais qui est en grande partie du XIII et du XVe siècle. La tour doit être du XV; elle sert de chapelle. On y voit un autel en pierre, scellé d'un côté dans le mur et porté en avant sur deux colonnes, dont les chapiteaux et les bases annoncent le XVe siècle. Je l'ai figuré dans mon Cours d'antiquités (pl. LXXXXIII, fig. 5).

J'ai remarqué, à l'angle qui termine le mur latéral du sud, une inscription très-fruste, qu'il ne m'a pas été possible de bien déchiffrer. Les lignes sont séparées les unes des autres par des traits gravés dans la pierre ; je les crois au moins du XIIe siècle.

Les actes des martyrs saint Raven et saint Rasiphe font mention d'un miracle opéré dans cette paroisse vers 865, lors de la translation des reliques de ces saints du village de Macé à Saint-Wast. Les chevaux qui portaient ce dépôt précieux, passant par Tracy, ne voulurent pas, si l'on en croit la légende, aller au-delà ; le seigneur du lieu fut obligé de donner de jeunes chevaux, qui n'avaient pas encore été dressés La relation de ce fait prouve au moins l'ancienneté de la paroisse de Tracy.

La terre de Tracy est une ancienne baronnie d'où tirait son nom la famille de Tracy, bien connue sous nos ducs de Normandie, rois d'Angleterre. Le sire de Tracy ac compagna Guillaume-le-Conquérant à la conquête de l'Angleterre, en 1066. Elle a passé ensuite à la famille Pellevey, puis a été vendue successivement à plusieurs [propriétaires. L'un des derniers, avant la Révolution, a été mon bisaïeul maternel, M. Léonard Radulphe, lieutenant-général de police, à Caen.

Maisoncelles-Pellevey se trouve du côté gauche de la route. L'église n'a de remarquable que la porte d'entrée, dans le style du XIIIe siècle.

A Coulvain, on rencontre l'embranchement de la route départementale allant, par la Ferrière et les Besaces, rejoindre la route de Torigny à Vire; puis on aperçoit à droite le village de Saint-Pierre-du-Fresne et l'église de Jurques. On franchit à Jurques une chaîne d'éminences fort élevées, en grès quartzeux, dont la direction est de l'ouest N.-O. à l'est S.-E.

Après avoir franchi les hauteurs de Jurques, on descend au village du Mesnil-Auzouf, résidence d'une brigade de gendarmerie, et qui n'offre, du reste, rien d'intéressant.

On montre, il est vrai, dans les bois, au nord de la paroisse, une pierre de grès argileux, connue sous le nom de pierre diallan, et qui a été signalée par M. Castel; mais cette pierre paraît en place. Si quelques traditions s'y rattachent, on ne peut, avec certitude, en faire un monument druidique...

A peu de distance du Mesnil-Auzouf, on rencontre, à droite de la route, les avenues de Montamy. De ce point fort élevé, on distingue la ville de Vire.

On ne tarde pas à descendre dans les vaux de Soulœuvre, profondément encaissés au milieu de coteaux schisteux; puis on gravit une seconde chaîne de grès quartzeux et de conglomérats (1), suivant à peu près la même direction que celle de Jurques. Ce fut dans la vallée de Soulœuvre à 1 lieue 1/2 de la route, du côté droit, que s'établirent d'abord les religieux du Val-Richer, près de Lisieux.

Le Bény, chef-lieu de canton, est à peine à 2 kilomètres de la route. Du côté opposé, et à la même distance, se trouve le Dézert, ancien prieuré dépendant de l'abbaye de Troarn. En 1118, Henri Ier avait donné aux religieux du Dézert la dîme du revenu du château de Vire. Le prieur était seigneur de la paroisse, et possédait, dans d'autres communes du canton, des revenus provenant de la perception des dîmes.

En 1250, le prieur du Dézert déclara à l'archevêque de Rouen, Odon Rigault, que le personnel de sa maison

(1) V. ma Topographie géognostique du Calvados; un vol. in-8o, avec atlas, et la Carte géologique du même département.

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